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Revue Annales du patrimoine, Université de Mostaganem, Algérie, N° 09, 2009

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Université de Mostaganem

             

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Revue académique de l'université de Mostaganem

Algérie < <

 

ISSN 1112 - 5020

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Revue académique consacrée aux domaines du patrimoine Editée par l'université de Mostaganem

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Revue Annales du Patrimoine

Directeur de la revue

Mohammed Abbassa

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Responsable de la rédact ion)

Comité consultatif

Larbi Dj eradi (Algérie) Slimane Achrat i (Algérie) Abdelkader Henni (Algérie) Edgard Weber (France) Zacharias Siaflékis (Grèce)

Mohamed Kada (Algérie) Mohamed Tehrichi (Algérie) Abdelkader Fidouh (Bahreïn) Hadj Dahmane (France) Amal Tahar Nusair (Jordanie)

Correspondance

Pr Mohammed Abbassa

Direct eur de la revue Annales du pat rimoine Facult é des Let t res et des Art s Universit é de Most aganem - Algérie

Email

annales@mail.com

Site web

http://annales.univ-mosta.dz

ISSN 1112 - 5020

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Recommandations aux auteurs

Les aut eurs doivent suivre les recommandat ions suivant es : 1) Tit re de l'art icle.

2) Nom de l'aut eur (prénom et nom).

3) Présent at ion de l'aut eur (son t it re, son aff iliat ion et l'universit é de provenance).

4) Résumé de l'art icle (15 lignes maximum). 5) Art icle (15 pages maximum, format A4).

6) Not es de f in de document (Nom de l'aut eur : Tit re, édit ion, lieu et dat e, t ome, page).

7) Adresse de l'aut eur (l'adresse devra comprendre les coordonnées post ales et l'adresse élect ronique).

8) Le corps du t ext e doit êt re en Times 12, j ust if ié et à simple int erligne et des marges de 2.5 cm, document (doc ou rt f).

9) Les paragraphes doivent début er par un alinéa de 1 cm.

10) Le t ext e ne doit comport er aucun caract ère souligné, en gras ou en it alique à l'except ion des t it res qui peuvent êt re en gras.

Ces condit ions peuvent f aire l'obj et d'amendement s sans préavis de la part de la rédact ion.

Pour acheminer vot re art icle, envoyez un message par email, avec le document en pièce j oint e, au courriel de la revue.

La rédact ion se réserve le droit de supprimer ou de reformuler des expressions ou des phrases qui ne conviennent pas au st yle de publicat ion de la revue. Il est à not er, que les art icles sont classés simplement par ordre alphabét ique des noms d'aut eurs.

La revue paraît au mois de sept embre de chaque année. Les opinions exprimées n’ engagent que leurs aut eurs

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Sommaire

La définit ion du "bayan" dans la rhét orique arabe

Abdessamad Bel haj 7

Pat rimoine et Créat ivit é chez Mohammed Dib

Aicha Cheded 19

Taha Hussein ou l’ exemple d’ une rencont re

Kania Chet t ouh 31

La j ust ice divine selon Al-Ghazali

Dr Al phousseyni Cissé 45

L’ avent ure de la langue française en Algérie

Dr Hadj Dahmane 63

La langue scient ifique arabe : hier et auj ourd’ hui

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© Université de Mostaganem, Algérie 2009

La définition du bayan dans la rhétorique arabe

perspectives mutazilites

Abdessamad Belhaj Universit é cat holique Pázmány Pét er, Hongrie

Résumé :

Je propose de relire les déf init ions du "bayan" la t radit ion rhét orique arabe. L'obj ect if que j e poursuis, ici, consist e à essayer de répondre à la quest ion de savoir si l'argument at ivit é et la poét icit é af f ect ent "bayan" dans sa déf init ion ou pas. Et plus exact ement , y a-t -il des posit ions dif férent es en mat ière de déf init ion du "bayan" à la lumière des dif férent es écoles rhét oriques arabes ? L'hypot hèse que j 'avance sout ient que les rhét oriciens Mût azilit es ont accordé la préf érence aux mot s et au cont ext e dans la product ion du sens. La significat ion a une dimension pragmat ique qui réf ère aux élément s phonét iques et cont ext uels de la langue dans la déf init ion de l'éloquence.

Mots-clés :

rhét orique, arabe, Mut azilit es, éloquence, al Jahiz.

***

Si l’ on rest e rest reint à la rhét orique post classique arabe (al-Qazwini et ses comment at eurs), le t erme "bayan" se déf init dans "ilm al-bayan" ; il s’ agit d’ une part ie de la rhét orique (ilm al-balagha) qui ét udie les procédés de signif icat ion "irad al-mâna al-wahid bi t uruq mukht alif a". Le but est de donner la f orme est hét ique à la proposit ion et varier le st yle af in d'exposer le sens requis(1). Un discours éloquent pourrait êt re désigné par "bayan" s’ il réussit à dévoiler les sent iment s émot ionnels du communicat eur et les exposer aux int erlocut eurs. Cela passe par cert ains procédés st ylist iques (comparaison, mét aphore, mét onymie) qui const it uent une science de l’ illust rat ion, voire une t héorie de l’ imagerie(2), ou une science de clarif icat ion(3).

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remarqué G.- E. von Grunebaum(4). Cert es, il y a un minimum commun présent dans t ous les usages de "bayan", celui de "wudhuh al-dalala" qui implique la clart é de la signif icat ion. Nonobst ant , cet t e not ion a ét é comprise de manières divergent es et dans dif f érent es disciplines.

Je propose de relire les déf init ions du "bayan" la t radit ion rhét orique arabe. L’ obj ect if que j e poursuis, ici, consist e à essayer de répondre à la quest ion de savoir si l’ argument at ivit é et la poét icit é af f ect ent "bayan" dans sa déf init ion ou pas. Et plus exact ement , y a-t -il des posit ions dif f érent es en mat ière de déf init ion du "bayan" à la lumière des dif f érent es écoles rhét oriques arabes ?

De la même manière que les j urist es ont eu un débat sur la not ion du "bayan", résumé par le "kayf a-l-bayan" d’ al-Shaf i'i, les rhét oriciens arabes ont ét é longuement int erpellés par la quest ion : "ma l-bayan".

Al-Dj ahiz déf init "bayan" par la signif icat ion, "al-dalala ala-l-mâna". C’ est un concept , dit -il, qui comport e t out ce qui dévoile le sens, et déchire le voile qui empêche de met t re en évidence la signif icat ion int érieure du caché de sort e que l'audit eur puisse saisir sa vérit é, et at t eindre son but , peut import e ce "bayan" ou le genre de cet t e preuve. Peut -on voir comme le f ait J. St et kevych dans cet t e déf init ion un t on herméneut ique ? En t out cas, il af f irme que les épigones d’ al-Jahiz n’ ont pas eu t ort de comprendre "bayan" comme le masque de la parole f igurat ive quoiqu’ ils l’ aient réduit au sens de "la science des t ropes" ; c’ est -à-dire qu’ ils ont rendu "bayan" une quest ion t echnique la dépouillant , ainsi, de sa dimension herméneut ique act ive(5). Dans un cont ext e dif f érent , W. Smyt h donne raison à l’ int erprét at ion de St et kevych, dans une cit at ion d’ al-Amasi, par la t raduct ion d’ "al-qawaîd al-bayaniyya" par "t he rules of hermeneut ics"(6).

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Clear Exposit ion"(7), selon G. J. H. van Gelder. De sa part , A. Saleh indique que l’ ouvrage cont ient des modèles de let t res et des document s of f iciels(8). D’ après la descript ion qu’ il donne du livre, il apparaît qu’ Ali ben Khalaf l’ a composé pour f ournir aux "kut t ab al-insha" un ouvrage dét aillé, clair, et abondamment pourvu d'exemples, qui leur soit un inst rument indispensable pour rédiger la correspondance du calif e de l'époque(9).

Quant au "bayan", on pourrait y discerner ent re un usage général et un usage part iculier du t erme. Le t it re de l’ ouvrage "al-bayan" indique qu’ il s’ agit des mat ériaux de l’ éloquence, mais en lisant dans la t able des mat ières du livre nous y rencont rons une sect ion t it rée "al-bayan" qui appart ient au chapit re t rois int it ulé "bab t halat h f i aqsam balagha al-f ar'iyya", où il cit e principalement des t ropes (ist i'ara, t ashbih). Plus récemment , A. Gully a ravivé l'int érêt scient if ique dans cet ouvrage qui port e, selon son j ugement , les t races de l’ inf luence de "Greek t heory of communicat ion and rhet oric"(10). Est -ce le cas dans la déf init ion du "bayan" ? Ibn Khalaf af f irme que "bayan" est l'abrégement ment al du sens sous une f orme assimilée dans l’ immédiat . Cet t e condit ion est nécessaire pour dist inguer ent rer "bayan" et "dalala" parce que "dalala" acquiert le sens bien qu’ elle t arde alors que "bayan" est le dévoilement du sens acquis par l’ âme sans pause(11).

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l’ ancrage, "t amakkun" et le choix, "t akhayyur". Dans le premier élément , il f aut se méf ier des périodes qui pourraient amener l’ âme à la t iédeur, "f ut ur al-naf s". Idem pour l’ ancrage qui est l’ ancrage du sens dans l’ âme, "t amakkun al-ma'na f i-l-naf s" et enf in le choix des expressions advient après l’ ancrage du sens dans l’ âme, "t akhayyur al-îbara bâda t amakkun al-mâna f i-l-naf s"(13).

L’ int roduct ion de la variable psychologique dans "bayan" at t est e, cert ainement d’ un changement de paradigme. Il est possible qu’ Ibn Khalaf , scribe Fat imide, adhère au paradigme de "irf an", gnose à la mesure où l’ insist ance sur le rôle de l’ âme mont re qu’ il assigne un plus grand rôle aux processus de décodage du langage. Dans cet t e perspect ive on est assez proche d’ al-Jurj ani. Nonobst ant , il n’ est pas possible de t irer des conclusions sur une possible t héorie "bayan" chez Ibn Khalaf t ant il n’ y a pas suf f isamment d’ élément s dans ce qu’ il a écrit sur "bayan", à part la déf init ion qu’ on a cit ée. L’ essent iel de ce qu’ il a apport é dans les sept pages consacrées au "bayan" est emprunt é à al-Jahiz.

Pour cont rebalancer cet t e t endance psychologique de lire le "bayan", al-Khaf aj i, ut ilise "bayan, f asaha, et zuhur" comme synonymes, comme dans "bi-l-f asaha allat i hiya-l-bayan wa-l-zuhur"(14) quoique "f asaha" semble êt re son t erme de prédilect ion(15). Les exemples, dit -il, clarif ient , dévoilent et soust raient (la parole) de l’ ambigüit é à la clart é(16).

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besoin de ment ionner ses proposit ions dans le but est d’ êt re compris par l’ int erlocut eur, "al-mukhat ab"(17).

Par conséquent , si al-Khaf aj veut êt re consist ant il doit réf ut er l’ idée de "Jawaz t akhir al-bayan ân waqt al-khit ab", l’ accept abilit é du report de la clarif icat ion par rapport au moment de l’ énonciat ion, car le locut eur risque de ne pas êt re compris. En d’ aut res mot s, il se t rouve dans un débat où il doit déf endre sa doct rine lit t éraire en s’ exprimant sur une quest ion j uridico-t héologique. Sachant qu’ il est mût azilit e et que les Mût azilit es accept ent le report de la clarif icat ion par rapport au moment de l’ énonciat ion, il af f irme qu’ il s’ agit en rhét orique de ce qui est mieux et plus proche de l’ éloquence, "ahsan wa ila hayyiz al-f asaha wa-l-balgha aqrab" et non de ce qui est permissible et impossible(18).

Il y a dans la concept ion mût azilit e du "bayan" chez al-Khaf aj i des élément s pragmat iques, déj à présent s dans l’ œuvre d'al-Jahiz et développés ult érieurement par al-Sakkaki. J. Owens, a est imé que l’ œuvre de l’ aut eur de "Mif ah al ûlum" est une cont ribut ion à la t héorie pragmat ique et comme une réact ion cont re la rigidit é des règles imposées par la grammaire arabe classique(19). Pour comprendre la not e brève d'Owens, nous devrons nous baser sur l’ explicat ion de Hat im pour qui al-Sakkaki appart ient aux rhét oriciens arabes qui ont développé une longue t radit ion d’ ét udier le t ext e dans le cont ext e par l'observat ion de la relat ion int ime ent re le degré d’ accept abilit é de l’ évaluat ion. Cet t e relat ion imprègne, à la f ois, le t ext e et l’ ét at du récept eur en t ermes de préparat ion à accept er ou rej et er les proposit ions qu’ il reçoit .

Dans l’ exemple connu t iré du "ilm al-maâni" : - "Abdallah qaîmun".

- "inna Abdallah qaîmun". - "inna Abdallah la-qaîmun".

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la première il s’ agit d’ une phrase inf ormat ive, "ikhbar". Dans la deuxième, d’ une réponse à une quest ion, "Jawab ân suâl saîl" alors que dans la t roisième il s’ agit d’ une réponse à une dénégat ion, "Jawab ân inkar munkir"(20). Dans "Jawab ân suâl saîl" et "Jawab ân inkar munkir" nous pourrions voir les emprunt es des règles du modèle de cont roverse en islam, "munazara". Les adversaires dans une cont roverse se nomment "saîl et muj ib". D’ ailleurs, B. Hat im, corrobore cet t e remarque en disant que les "dénégat eurs" et , à un moindre degré, ceux qui sont quelque peu incert ains, réagissent à des t ext es ayant une accept abilit é d’ évaluat ion, à t ravers diverses f ormes d'argument at ion(21).

Touj ours dans un sens similaire, P. Larcher est ime qu’ il ne s'agit dans réponse à une quest ion, "Jawab ân su'al saîl" et "Jawab ân inkar munkir", d’ un aspect polyphonique, qui, analysé dans le Coran, dévoile le caract ère polémique pragmat ique du discours coranique(22).

Al-Sakkaki est allé au-delà de cet exemple grammat ical pour complét er "ilm al-maâni" et "ilm al-bayan" (composant es de la rhét orique) par la déf init ion et l’ argument at ion, "al-hadd wa-l-ist idlal". Al-Jabiri considère que la part ie de "ilm al-bayan" dans "Mif t ah al-ûlum" pourrait êt re l’ équivalent des Analyt iques d’ Arist ot e parce qu’ elle cont ient des aspect s de "qiyas" ou d’ une f açon générale de l’ "ist idlal"(23).

En t out cas, la rhét orique n’ a f ait que suivre les événement s à la mesure où, après al-Ghazali, les sciences islamiques, qu’ ils soient linguist iques ou religieuses, incluaient des chapit res ou des quest ions logiques ent ières. En revanche, le point où l’ argument at ion d’ al-Jabiri semble êt re f aible vient de sa considérat ion que si Sakkaki a t rait é "ist idlal" après "ilm al-bayan" si parce qu’ il veut insinuer que la connaissance prof onde de "ilm al-bayan" rend la connaissance de la Logique inut ile(24).

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"ilm al-ma'ani". A mon sens, les raisons qui ont poussé al-Sakkaki à consacrer une sect ion à la Logique proviennent de son ut ilit é et de son inévit abilit é. Une chose que les j urist es pourraient appeler "umum al-balwa". C’ est -à-dire qu’ al-Sakkaki voyait que la Logique est devenue une mét hode ut ilisée massivement et ut ilement et qu’ il ne serait possible de l’ ignorer dans un ouvrage dédié à l’ ensemble des sciences linguist iques connues. Néanmoins, en bon mût azilit e, il ét ablit une relat ion de subordinat ion int elligent e ent re "bayan" et la Logique ; celui, dit -il, qui mait rise un cas original, "asl" de "ilm al-bayan" (comme "asl al-t ashbih", ou "kinaya" ou "ist iâra") et a saisi sa logique d’ at t eindre l’ obj ect if , a t out es les chances de comprendre l’ argument at ion(25). En bout d’ analyse, cela veut dire que "bayan" est lui-même "asl" de l’ "ist idlal".

Il semble qu’ al-Sakkaki avait le souci de mont rer que le paradigme de bayan arabe se rencont re avec le paradigme de "burhan" grec dans le principe de "luzum"(26). "Ilm al-bayan", pour al-Sakkaki, consist e à savoir cit er le même sens de manières dif f érent es en aj out ant (ou en omet t ant ) dans la signif icat ion pour empêcher, par ce procédé, l’ erreur dans la correspondance ent re la parole et sa compréhension ent ière(27). La raison réside dans le f ait qu’ il n’ est pas possible de cit er le même sens dans dif f érent es images à moins de le f aire dans des signif icat ions rat ionnelles, "dalalat âqliyya". Celles-ci impliquent un t ransf ert d’ un sens à un aut re en raison d’ une relat ion ent re les deux sens. Donc, la réf érence de "ilm al-bayan" est , en f in de compt e, la considérat ion des cas d’ implicat ions ent re les sens "marj iûhu ît ibar al-mulazamat bayna-l-maâni"(28).

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dif f érent es en aj out ant (ou en omet t ant ) dans la signif icat ion posit ive, "dalalat wad'iyya" n’ est pas possible. Car si quelqu’ un veut comparer la j oue à une rose en rougeur par exemple, "khadd yusbihu al-ward", il serait impossible à ce moment -là d’ exprimer ce sens par les signif icat ions posit ives, car, ét ant ce qu’ elles sont , elles ne permet t ent pas de degrés de clarif icat ions inégales(29).

D’ où vient cet t e insist ance sur "dalalat âqliyya" ? Les rhét oriciens arabes, cont rairement aux logiciens, est iment que "dalalat al-ilt izam" est "aqliyya" alors que les logiciens la considèrent "wad'iyya". Pour saisir un des aspect s de cet t e dif f érence, il f audrait t enir compt e des propos d'Razi, d’ où al-Sakkaki a t iré cert ains de ces mat ériaux(30). Al-Razi af f irme que dans "dalalat al-ilt izam", l’ implicat ion ext erne n’ est pas valide car l’ essence, "Jawhar" et l’ accident , "aradh" implique l’ un l’ aut re, "mut alaziman" et pourt ant il n’ est pas possible d’ ut iliser le nom de l’ un pour l’ aut re(31).

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- 15 -

l’ int erlocut eur, soit par une convent ion ou aut re, alors il serait possible pour le locut eur d’ aspirer à ce que l’ int erlocut eur comprenne correct ement le t ransf ert du concept original à l’ aut re, moyennant cet t e relat ion ét ablie ent re les deux dans sa croyance(33).

Dans les dif f érent es déf init ions du "bayan", nous avons remarqué que les rhét oriciens Mût azilit es ont accordé la préf érence aux mot s et au cont ext e dans la product ion du sens. La signif icat ion ici a une dimension pragmat ique qui réf ère à la cult ure arabe préislamique. La signif icat ion a une dimension pragmat ique qui réf ère aux élément s phonét iques et cont ext uels de la langue dans la déf init ion de l’ éloquence.

Notes :

1 - Hussein Abd ul-Raof : Arabic Rhet oric, A Pragmat ic Analysis, London, Rout ledge, 2006, p. 197.

2 - W. Heinrichs: "Qazwini", Encyclopedia of Arabic Lit erat ure, Ed. Julie Scot t Meisami, Paul St arkey, London 1998, Vol. II, p. 439.

3 - Philip Hallden: "Rhet oric", Medieval Islamic Civilizat ion: An Encyclopedia, Ed. Josef W. Meri, Jere L. Bacharach, London, Taylor & Francis, 2006, Vol. II, p. 680.

4 - G. E. von Grunebaum : "Bayan", E. I, Leiden, Brill, Vol. I, p. 1114.

5 - Jaroslav St et kevych: "Arabic Hermeneut ical Terminology: Paradox and t he Product ion of Meaning", Journal of Near East ern St udies, Vol. 48, No. 2, 1989, pp. 90 - 91.

6 - William Smyt h: "Cont roversy in a Tradit ion of Comment ary : The Academic Legacy of Al-Sakkaki Mif t ah al-'ulum", Journal of t he American Orient al Societ y, Vol. 112, No. 4, 1992, p. 593.

7 - G. J. H. van Gelder: "Ali ben Khalaf al-Kat ib", Encyclopedia of Islam Three, Ed. G. Krämer, D. Mat ringe, J. Nawas et E. Rowson, Brill, Leiden 2008.

8 - Abdel Hamid Saleh: "Ibn Khalaf ", Encyclopaedia of Islam, Second Edit ion, Leiden, Brill, Volume XII, p. 390.

9 - Abdel Hamid Saleh : "Une source de Qalqasandi, "Mawadd al-bayan", et son aut eur, Ali ben Khalaf ", Arabica, Vol. 20, No. 2, 1973, p. 195.

10 - Adrian Gully: The Cult ure of Let t er-Writ ing, in Pre-Modern Islamic Societ y, Edinburgh, Edinburgh Universit y Press, 2008, p. 154.

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- 16 -

12 - Adrian Gully: op. cit ., p. 154. 13 - Ibn Khalaf al-Kat ib: op. cit ., p. 149.

14 - Ibn Sinan al-Khaf aj i: "Sirr al-Fasaha", Beyrout h, Dar al-Kut ub al-Ilmiyya, 1982, p. 71.

15 - Dans l’ ent rée "f asih" de l’ Encyclopedia of Arabic Language and Linguist ics, G. Ayoub af firme dans la quat rième sect ion "f asaha and t he epist emological f oundat ions of Arab Thought " que "in Arabic, t hese words are not only lit erary t ext s but also a sacred t ext . Hence, t he dimension of t he correct ness of t he language is not only aest het ic but also et hical and ont ological... rhet oric and linguist ics meet t heology", Encyclopedia of Arabic Language and Linguist ics, Ed. Kees Verst eegh, Leiden, Brill, 2006, Vol. II, p. 88. Cont re t out e at t ent e, al-Khaf aj i, le meilleur exemple qui incarne cet t e rencont re n’ a pas f ait part ie de son champ d’ ét udes. Cependant , la t âche f ut accomplie par Y. Suleiman qui a classé les paramèt res de "f asaha" chez al-Khaf aj i en deux cat égories : la première est phonologique et couvre l’ aisance de l’ art iculat ion, l’ impact sur l’ audit oire et l’ usage des mot s d’ une longueur modéré. La deuxième cat égorie est lexico-grammat icale et couvre l’ accessibilit é lexique et le raf finement , la conformit é aux normes lexiques et grammat icales, évit er les mot s avec des sens négat if s et l’ usage approprié des diminut if s. Y. Suleiman: "The Concept of "Fasaha", in Ibn Sinan al-Khaf aj i", New Arabian St udies, No. 3, 1996, p. 231. 16 - Ibn Sinan al-Khaf aj i: op. cit ., p. 14.

17 - Ibid., p. 222. 18 - Ibid., p. 223.

19 - Jonat han Owens: "Models f or Int erpret ing t he Development of Medieval Arabic Grammat ical Theory", Journal of t he American Orient al Societ y, Vol. 111, No. 2, 1991, p. 234.

20 - Abu Ya'qub al-Sakkaki: "Mif t ah al-ûlum", p. 171.

21 - Basil Hat im: "A Model of Argument at ion f rom Arabic Rhet oric", Bullet in (Brit ish Societ y…), Vol. 17, No. 1, 1990, p. 48.

22 - Pierre Larcher : "Coran et t héorie linguist ique de l’ énonciat ion", Arabica, Vol. 47, No. 3, 2000, pp. 453 - 454.

23 - M. A. al-Jabiri: "Binyat al-âql al-ârabi", Beyrout h, Markaz Dirasat al-Wahda al-Arabiyya, 2004, p. 97.

24 - Ibid., p. 99.

25 - Al-Sakkaki: op. cit ., p. 435. 26 - Al-Jabiri: op. cit ., p. 101. 27 - Al-Sakkaki: op. cit ., p. 162.

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Mif t ah al-ûlum", Der Islam, Vol. 72, No. 1, 1995, p. 17. 29 - Al-Sakkaki: op. cit ., p. 329.

30 - William Smyt h: "Crit icism in t he Post -Classical Period: a Survey", in Arabic Lit erat ure in t he Post -classical Period, Ed. Roger Allen, D. S. Richards, Cambridge, Cambridge Universit y Press, 2006, p. 403.

31 - Fakhr al-Din al-Razi: "Al-Mahsul f i îlm al-usul", Ed. Taha Jabir al-Alwani, Riyad, Universit é Muhammad ben Saoud, 1979, Vol. I, p. 300.

32 - Kees Verst eegh: Greek Element s in Arabic Linguist ic Thinking, Leiden, Brill, 1977, pp. 157 - 158.

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© Université de Mostaganem, Algérie 2009

Patrimoine et créativité chez Mohammed Dib

Aicha Cheded Universit é d’ Oran, Algérie Résumé :

Cet art icle revient sur quelques t rait s du processus de la créat ivit é chez not re illust re aut eur algérien d'expression f rançaise, Mohammed Dib, à t ravers l'ét ude de quelques t ext es t irés de son livre "Simorgh" appart enant à des genres dif f érent s, cont e philosophique, séance ou "maqama", t ragédie, essai et poésie. Nous parlerons aussi de ses posit ions / déposit ions concernant la quest ion du pat rimoine aut ant mat ériel qu'immat ériel et la nécessit é de sa réhabilit at ion.

Mots-clés :

pat rimoine, cont e, Mohammed Dib, roman, maqama.

***

Si la créat ivit é est une qualit é personnelle, "un processus complexe d’ assimilat ion c'est -à-dire à la f ois d’ int égrat ion et de t ransf ormat ion"(1), le pat rimoine est ce legs parvenu à l’ homme depuis la nuit des t emps. Le pat rimoine est un bien collect if .

Pat rimoine et créat ivit é, deux vocables qui se complèt ent . Le premier évoquant le part age et l’ échange, le deuxième rappelant la singularit é et la f inesse. Mais les deux versent dans l’ originalit é et l’ aut hent icit é d’ un peuple, d’ un individu.

Pour parler de la créat ivit é chez Dib, nous nous baserons sur son dernier livre édit é de son vivant à savoir "Simorgh" pour avancer quelques pist es éclairant son moi créat eur. Sur la quest ion du pat rimoine, nous nous réf érons à cert ains f lashs de sa vie et à ses posit ions / déposit ions const ant es.

L’ ingéniosit é de Dib f ut d’ voir mobilisé dans l’ espace rest reint de son livre int it ulé "Simorgh", un cert ain nombre de genres qu’ il a manipulé.

1 - Le conte philosophique "Simorgh" :

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dernier, désormais oiseau, répond à un appel lancé. Le voyage ef f ect ué n’ éclaire en rien sur les idées et les sociét és (mœurs, croyances, civilisat ions diverses) sollicit ant t out ef ois l’ imaginat ion du lect eur. Ce voyage n’ est pas ponct ué d’ ét apes et d’ épreuves signif icat ives mais il est f ait ment ion de sa duret é "après le crénom de voyage qu’ on s’ est t apé... ce crénom de voyage..." (Simorgh, p. 14). Ce voyage est couronné par un succès celui d’ arriver à dest inat ion. Le héros ne se voit pas dans la nécessit é de consult er un int erprèt e (ange, génie, derviche, vieillard...). Le suspense demeure puisque après une longue at t ent e, il ent re au palais et découvre après plusieurs ét apes et à t ravers plusieurs voiles que c’ est lui l’ émet t eur et le dest inat aire de cet appel. Il f aut remarquer que les ef f et s du réel ne sont ut ilisés qu’ en prélude. Aussi, le divert issement et l’ humour sont bannis. Les idées sont ici souveraines.

Le récit de "Simorgh" est d’ un bout à l’ aut re une quêt e de la vérit é, de la paix, de l’ immort alit é. Mais le seul voyage valable est celui qu’ ef f ect ue l’ homme, t out homme, à l’ int érieur de lui-même. Dib emploie un cert ain nombre de symboles reconnus par t out es les cult ures et religions. Il f ait figurer "Simorgh", t it re éponyme et du cont e philosophique et du livre, relevant de la lit t érat ure persane et orient ale. C’ est ainsi que Farid ud-Dine At t ar, dans son colloque "Mant iq-at -ayr" parle de cet oiseau f abuleux comme d’ un symbole de la recherche de soi. De son côt é, le nom du Phénix inséré dans le cont e est d’ un symbolisme t rès riche dans la lit t érat ure gréco-lat ine en général. Par ailleurs, il a employé un cert ain nombre de symboles t els que le ciel, l’ oiseau, le nombre douze, le t emps, midi, l’ ombre, le voile, le miroir.

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et ne t rouve au bout qu’ un récit , qui est ce sens et ce obj et mêmes. Un sens évent uel et même arbit raire obt enu par la reconst it ut ion longuement murie de ces symboles serait que l’ élu promis à la béat it ude ét ernelle est une âme angoissée engagée dans la quêt e sacrée de l’ Illuminat ion qui n’ est aut re que la recherche de soi et de la paix int érieure (la sakinah). Ainsi serait la condit ion de t out mort el aspirant à l’ immort alit é, à la saint et é, au cont ent ement de l’ âme (rida). Ainsi serait le "Simorgh" qui sommeille en chacun de nous.

2 - La séance ou la "maqama" intitulée "le Guide" :

"Maqamat " nom pluriel de "maqam" est un genre lit t éraire qui a vu le j our à l’ époque abbasside(3). Un bref discours composé dans un st yle romanesque et bien t ruf f é de t ours poét iques de la langue arabe en vue d’ un enseignement . C’ est une prose rimée conçue pour l’ exposit ion ext érieure.

Le souci maj eur de l’ aut eur d’ une "maqama"(4) est de mont rer ses connaissances rhét orico - lexicales et même l’ ét endue de son savoir dans t ous les domaines de la science. Ceci laisse la primaut é exclusive à la f orme du t ext e et non le f ond.

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bien disposer" (S., p. 129), "serait -il inconvenant de vous t racer le port rait du beau parleur ?" (S., p. 129), "j e suis de nat ure un guide. Un vrai." (S., p. 130).

3 - Le guide, une dénonciation :

La séance dibienne comport e quat re pet it es hist oires int roduit es par un bref dialogue.ces hist oires t rait ent les t hèmes suivant s :

- Ignorance des simples gens ou mieux dit encore la mosquée, lieu de propagande.

- Abus de pouvoir de quelques aut orit és après l’ indépendance. - Opport unisme de cert ains responsables à la même période. - Passivit é et paresse des gens après l’ indépendance.

Dans cet t e "maqama" int it ulée "le guide", Dib n’ a pas f ait appel à la prose rimée, aux mot s rares et aux idées séduisant es. Il a pris comme cadre sociohist orique la sociét é algérienne post -indépendant e. Il a f ait appel à une conj onct ure sans t out ef ois mont rer son aisance poét ique habit uelle et qui est de rigueur dans ce genre. Mais en t rait ant le t hème de la dénonciat ion, la séance de Dib a acquis la prof ondeur qui lui manquait .

4 - L’ élévation d’ Œdipe, une tragédie :

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oublier Thésée le déf enseur des pauvres et vieilles gens mais surt out Créon et Polynice source de conf lit et de ressent iment . L’ heure n’ est plus au règlement de conf lit mais d’ un départ déf init if ou plut ôt d’ une élévat ion. Dib nous propose ainsi, une vérit able t ragédie en quelques scènes seulement .

Il est une coïncidence t roublant e, Sophocle a rédigé "Œdipe à Colone" à la f in de sa vie de nonagénaire. Il en est de même pour Mohammed Dib dans "Simorgh" édit é en 2003 j ust e avant sa mort survenu le 02 mai de la même année. Animé, semble-t -il, par le même désir, les deux aut eurs ont choisi de f aire parler un Œdipe non pas ce roi plein de sollicit ude au début du cycle t hébain ni celui présompt ueux, arrogant , soupçonneux, violent et inquiet mai un Œdipe désespéré, humilié, déchiré, t endre et humble. Il n’ est nul besoin de rappeler ici le génie créat eur de l’ un ou de l’ aut re aut eur car les deux t riomphent dans la st rict e économie, maniant la grâce à la puissance du verbe et la grandeur chez eux est inséparable de la simplicit é. De l’ un et de l’ aut re, un message t ranscendant al nous est parvenu depuis Sophocle j usqu’ à Mohammed Dib. "Rest e à se demander si cela présent e un int érêt pour qui que ce soit " (Simorgh, p. 238) et surt out rest e à le déchif f rer.

5 - L’ engouement de l’ essai :

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crit ère normat if(8). Les essais dibiens présent ent , eux aussi, une pensée en t rain d’ about ir, lest ée d’ inachèvement . Leur mérit e est qu’ ils f usionnent la médit at ion (caract érist ique mont aignienne, de la t radit ion f rançaise de l’ essai) avec la cognit ion (caract érist ique baconienne, de la t radit ion anglaise de l’ essai). Remarquable encore est la f usion de la lit t érat ure non-f ict ionnelle ; de la dict ion avec la lit t érat ure non-f ict ionnelle. Ceci se t rouve clairement dans l’ essai n° 2 Ghost t owns blues et l’ essai n° 5 La couleur pire, le plus t ypique où des const ruct ions mixt es de séquences sont repérables.

Les essais dibiens sont t ous en couplage puisqu’ ils se réf èrent à des domaines de cognit ion t rès variés t els que la philosophie, la sociologie, l’ hist oire, la géographie. Sous l’ ef f et de ces croisement s, ils ne peuvent avoir qu’ une dénot at ion plus f erme et une plus grande f orce de désignat ion lit t éraire. Aut re point , est que le rapport à l’ act ualit é, avec t out ce qu’ elle présent e comme inept ies et horreur, mot ive la rédact ion des essais. Mont aigne dit ceci à ce propos "le monde n’ est qu’ une branloire pérenne. Tout es choses y branlent sans cesse"(9). Mont aigne se borne à l’ ét ude et à la descript ion d’ un seul spécimen d’ humanit é, lui-même car dans l’ ét ude de sa propre vie commune considérée dans son ensemble, il cherche à connaît re l’ humaine condit ion en général. Mais cet t e ambit ion de dégager une essence en isolant l’ individu de sa vie cont ingent e, met t rait en pert e cet t e essence sit ôt dét achée des cont ingences, risque que Dib a su dét ourner en puisant dans le macrocosme.

6 - Poésie et/ ou "fibres" poétiques :

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Dib est poèt e avant d’ êt re écrivain. Cet t e st ance de huit vers mont re bien son élan poét ique :

Pigeonnes au t eint blanc De j eunes f illes, plaise

Impudent es qui vous pavanez Dans la cour des mosquées ; Ânes des rues t rot t inant Avec vos coupures à vif si Savoureuses à lécher, plaise

Qu’ est -il de moi advenu ? (Simorgh, p. 63).

Dans ce huit ain, les j eunes f illes sont comparées à des pigeonnes dans leur impudence à se t rouver même dans les lieux les plus sacrés ici la cour des mosquées réservés à la prière et le recueillement . Image de pigeons qui j ust ement f ont des mosquées un lieu de prospect ion et d’ explorat ion. Une deuxième mét aphore non moins animalisant e suivi d’ un complément du nom "des rues" f aisant de ces dit s f illes des "ânes des rues". Le sixième et le sept ième vers f ont ét at d’ un enj ambement avant la chut e. Cet t e dernière est marquée dans le huit ième vers comme s’ il s’ agissait d’ une chut e du sept ième ciel, un ef f ondrement de t out un monde semble se désigner par cet t e phrase int errogat ive, une quest ion exist ent ielle au t on raf f iné, au romant isme originel nous laissant en proie à une médit at ion f at alement mélancolique.

Un aut re ext rait poét ique exprime t out e l’ ampleur d’ une exist ence en quat re vers résumant ainsi le cycle en quat re saisons opérant un parallèle avec les quat re t ranches de vie :

Print emps avec t oi j e f leuris Mais ét é avec t oi j e mûris

Aut omne avec t oi j e me prépare

Hiver, hiver avec t oi j e pars. (Simorgh, p. 63).

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orale que nos mères et grands-mères d’ ant an employaient à savoir l’ expression "zum... zum" pour annoncer un événement imminent à l’ approche de "l’ hiver" celui d’ un ét range départ évoqué précédemment . Pour int ensif ier plus ce moment , le dernier vers est coupé en deux. Ce quat rain nous laisse convaincu quant à l’ int erprét at ion à donner :

Aut omne avec t oi j e me prépare Zum... zum... zum... zum... zum Hiver, hiver... zum... zum... zum

Avec t oi... zum... zum... zum (Simorgh, p. 64).

Ment ion f ait e aussi de quelques vers d’ une st rophe incomplèt e avec un j eu de paronomase (ormeau/ hameau) et soulignement part iculier de rimes f éminines (l’ en-f an-ce ri-eu-se/ la vieillesse heu-reu-se) en écrit ure syllabique qui viennent ryt hmer l’ oxymore (enf ance/ vieillesse). Dib semble nous imposer la dict ion. Ces t rois vers à eux seuls dégagent un climat de convivialit é et de vie paisible des t out j eunes et des si vieux à la f ois dans un lieu-dit . Il n’ est pas inint éressant de les t ranscrire ici :

Sous l’ ormeau du hameau, L’ en-f an-ce ri-eu-se

Et c., et c., et c.

La vieillesse heu-reu-se

Et c. et c. et c. (Simorgh, p. 122).

Le discours poét ique dibien est marqué par un ret our répét é du même. Il s’ agit ici du t emps, de la vieillesse, du dest in.

L’ imbricat ion de ces bribes de poésie émane de sa longue expérience de la vie, de l’ écrit ure et des t echniques st ylist iques.

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bercé par les chant s poét iques en l’ absence de t out es aut res f ormes de cult ure. Cet t e cult ure arabo-musulmane lui f ut inculquée dans sa globalit é par des f emmes à leur t êt e sa mère ét ant donné la pert e précoce de son père.

De plus, Dib f ut mis t rès t ôt en cont act avec la sociét é t lemcenienne grâce aux dif f érent s mét iers prat iqués, ent re aut res, concept eur de maquet t es art isanales. Il a ainsi, côt oyé la classe des t isserands. Sa cult ure s’ est élargie et s’ est f ort ement ancrée en lui. Il en a f ait une source inépuisable not amment dans ses premiers romans et nouvelle dit s de la période réalist e et même bien après, où les t ouches du poèt e, du cont eur apparaissent avant celles du romancier et du dramat urge.

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S.N.E.D., c’ est d’ abord parce que dans son esprit elle renverse cet ordre"(11).

Dib s’ est aussi prononcé en ce qui concerne le pat rimoine mat ériel. Il a précocement compris que le devenir d’ un peuple ne peut se f aire sans la conservat ion de son ident it é, sa cult ure, son passé loint ain et proche en explorant ses vest iges, ses monument s hist oriques. Dans "Simorgh", Dib rappelle par un essai consacré à ce t hème (l’ essai n° 2 Ghost t owns blues ou Trist es villes f ant ômes)(12), l’ import ance et la qualit é des civilisat ions qu’ a connues not re pays qui n’ ont rien à voir avec les villes américaines abandonnées parce qu’ elles ne f ont plus l’ af f aire de leurs habit ant s. Cet essai se t ermine par une conclusion qui en dit long : "les cit és t raj anes, elles, ne saurait devenir les poubelles de l’ Hist oire"(13).

Dans son livre post hume, Laezza, il réit ère son appel à la sauvegarde de ce pat rimoine et f ut en cela t rès lucide : "l’ Algérie, parlons-en une f ois de plus, si elle voulait sauver son âme, et commencer par se sort ir de son marasme int ellect uel comme de sa misère morale. Il serait t emps en ef f et qu’ elle s’ en soucie et f asse en t out premier lieu la pleine lumière sur son hist oire : en d’ aut res t ermes sur son hérit age cult urel, t out l’ hérit age, depuis les "origines", et qu’ elle soit non seulement prêt e à l’ ident if ier mais pour une part égale à s’ y reconnaît re... not re sol est j onché de t émoignages, vest iges, plus glorieux et plus riches les uns que les aut res"(14). Il cont inue dans la page suivant e : "il nous rest e beaucoup à récupérer de not re passé et , ce f aisant , de nous-mêmes. Cela ne semble pas aller de soi pour l’ inst ant , parce que, s’ at t eler à pareille t âche, exige de se délest er d’ une épaisse couche de paresse et de préj ugés"(15). Ces quelques lignes ret racent t out un programme cult urel.

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arrêt sur image. Il nous a donné l’ image de sa ville nat ale Tlemcen et de son j ardin luxuriant not amment à t ravers son livre Tlemcen ou les lieux de l’ écrit ure. C’ est cet t e image qui reproduit f idèlement le pat rimoine t lemcenien et part ant algérien. Par la suit e et / ou en parallèle, il est part i à la découvert e d’ aut res espaces. Sa langue est désormais son t opos, non pas ce code mais sa langue d’ écrit ure, ce subt il mélange de pensées algérienne, arabo-musulmane et proprement dibienne. Et de-là, il s’ est envolé vers la post modernit é et a pris de l’ avance sur ses pairs. Ce qui est t out à son honneur et à not re avant age.

Notes :

1 - Michel-Louis Rouquet t e : La Créat ivit é, P.U.F., Paris 1981, p. 6.

2 - Analyse et réf lexions sur le Cont e philosophique volt airien, Ellipses, 1995. 3 - Précis de lit t érat ure arabe et son hist oire, 3 la lit t érat ure abbasside, Edit ions Dar al Maarif , 1967.

4 - Omar ben Quina : L’ art de la Maqama dans la Lit t érat ure Arabe Algérienne, Dar al Maarif , 2007.

5 - Christ ine Dubarry-Sodini : Et ude sur Sophocle, Œdipe roi, Ellipses, 1994. 6 - Il y a 9 personnages dans "Oedipe à Colone" de Sophocle.

7 - Les essais de Mont aigne sont rédigés de 1571 à sa mort en 1592.

8 - Aline Geyssant et Nicole Gut eville : L’ essai, le dialogue et l’ apologue, Ellipses, 2001.

9 - Eric Auerbac : Mimesis (chap. XII, l’ humaine condit ion), Gallimard, 1968, p. 287.

10 - Most efa Lacheraf : L’ Algérie, Nat ion et Sociét é, Ed. S.N.E.D., 1976, p. 328.

11 - Malek Bennabi : Conj onct ure Cult urelle, in Révolut ion Af ricaine du 9 avril 1967 ; Réédit ions, Malek Bennabi : Pour Changer l’ Algérie, Sociét é d’ Edit ion et de Communicat ion, p. 79.

12 - Mohammed Dib : Simorgh, Albin Michel, Paris 2003, p. 26 - 34. 13 - Ibid., p. 238.

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© Université de Mostaganem, Algérie 2009

Taha Hussein ou l’ exemple d’ une rencontre

culturelle entre l’ Egypte et la France

Kania Chet t ouh Universit é d'Alger, Algérie

Résumé :

Le parcours int ellect uel de Taha Hussein mont re à quel point peut êt re harmonieuse la rencont re ent re les civilisat ions arabe et f rançaise. Convaincu de leur f rat ernit é, il mit sa plume au service de leur dialogue. Ainsi, il présent a à son lect orat arabophone des ét udes comparat ist es met t ant en évidence leurs aff init és profondes, t raduisit en arabe plusieurs j oyaux de lit t érat ure et de pensée f rançaises, écrivit sur l'hist oire de ces dernières, convoqua cert aines de leurs idées ou mét hodes novat rices pour redynamiser ou réf ormer la lit t érat ure et la pensée arabes de son époque.

Mots-clés :

alt érit é, Taha Hussein, t raduct ion, lit t érat ure, dialogue.

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La f ascinat ion que l’ Egypt e avait exercée sur les int ellect uels f rançais a inspiré plusieurs t ravaux de recherche dont chacun s’ est int éressé à un aspect ou un siècle part iculier(1). Mais rares sont les ét udes consacrées à l’ at t rait de la France et son impact sur l’ int elligent sia égypt ienne(2). Pourt ant , la f rancophilie a bel et bien une t radit ion t rès ancrée dans sa cult ure, révélant une ouvert ure d’ esprit t elle qu’ il semble opport un d’ en donner ne serait -ce qu’ un aperçu suggest if à t ravers l’ exemple révélat eur de Taha Hussein (1889-1973).

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réf ormat eurs lui avaient causés, il avait pu publier près de soixant e-dix livres dans divers domaines int ellect uels t els que le roman, la crit ique lit t éraire, l’ hist oire, l’ aut obiographie, l’ essai..., leur list e ayant ét é ét ablie par ses amis et disciples en 1967, c’ est -à-dire six ans avant sa mort(5). Sa première découvert e de la cult ure f rançaise a commencé relat ivement t ard, à l’ âge de dix-neuf ans, quand il choisit le f rançais comme langue ét rangère et ent reprit de suivre avec assiduit é les cours que Louis Massignon dispensait à l’ Universit é du Caire. Mais c’ est surt out son séj our d’ ét udes en France qui inaugura sa f idélit é indéf ect ible à ce pays, à sa civilisat ion et sa cult ure. Boursier du gouvernement égypt ien, il f ut envoyé en novembre 1914 à Mont pellier car cet t e ville ét ait alors épargnée par les af f ront ement s de la première guerre mondiale. Il n’ y rest a que onze mois puis f ut rapat rié avec ses camarades égypt iens à cause de la crise f inancière que t raversait en 1915 l’ Universit é du Caire. Cependant , cela ne l’ empêcha pas d’ en revenir f ort admirat if de la pédagogie de ses prof esseurs f rançais. Il en parla dans des t ermes laudat if s auxquels il mêlait une crit ique acerbe de l’ enseignement universit aire égypt ien dont il souhait ait la réf orme rapide. Son ex-prof esseur en ayant pris ombrage, l’ af f aire eut des suit es disproport ionnées qui f aillirent le priver de la reprise de sa f ormat ion en France, mais des hommes de bonne volont é, comme Aloui Pacha, surent int ercéder en sa f aveur, aussi put -il bénéf icier à nouveau d’ une bourse égypt ienne lui permet t ant d’ ét udier cet t e f ois-ci à Paris où il prépara un doct orat sous la direct ion d’ Emile Durkheim(6) et où son dest in prit un t ournant décisif .

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rat t achait la civilisat ion égypt ienne. C’ est aussi dans cet t e ville qu’ il connut son épouse, Suzanne, qui ét ait la camarade puis l’ amie dévouée dont la sollicit ude lui f ut d’ un immense secours depuis leur première rencont re à l’ Universit é j usqu’ à la f in de sa vie. Cet t e Française au grand cœur lui inspira des pages immort elles où l’ expression de sa t endresse n’ a d’ égal que celle de sa reconnaissance et de son respect . En out re, elle le gagna déf init ivement à la France, où il passait t ouj ours ses vacances d’ ét é et où il avait de solides relat ions amicales avec de célèbres écrivains et penseurs comme Paul Valéry, André Gide, Louis Massignon, Jean Coct eau, Jean-Paul Sart re... et des art ist es comme la peint re Marguerit e Bordet , par exemple.

C’ est donc t out à f ait normal que sa disposit ion si f avorable à la France mot ive l’ accueil ent housiast e qu’ il réservait à ses int ellect uels visit ant l’ Egypt e et marque du sceau de f rancophilie l’ ensemble de son œuvre dont il consacra une part ie import ant e à la dif f usion de la cult ure f rançaise. Ainsi, il ent reprit de résumer, comment er, et parf ois crit iquer d’ une manière const ruct ive les œuvres f rançaises, not amment lit t éraires, dès leur parut ion, af in que ses lect eurs arabophones soient inf ormés de l’ évolut ion cult urelle en France, pays selon lui indispensable à l’ humanit é t out ent ière(7), qu’ il soit vainqueur ou vaincu. D’ aut re part , il s’ at t ela, de 1920 à 1959, à la t raduct ion vers l’ arabe d’ œuvres lit t éraires f rançaises dont il f ut part iculièrement impressionné(8) et qu’ il présent a à ses lect eurs arabophones comme modèles à suivre, après avoir relevé leurs qualit és sur le plan du f ond et celui de la f orme.

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t raduisant les œuvres de Paul Hervieu, par exemple.

De plus, grâce à son ouvert ure sur les lit t érat ures médit erranéennes, not amment gréco-lat ine et f rançaise, il avait découvert la nécessit é de combler les lacunes de la lit t érat ure arabe en mat ière de product ion t héât rale et parf ois même romanesque. En out re, son désir permanent de réf ormer la sociét é égypt ienne, et arabe en général, l’ incit ait à int égrer dans le choix des œuvres à t raduire les crit ères d’ émancipat ion sociale et / ou polit ique qu’ on pourrait en escompt er comme, par exemple, celui de l’ égalit é ent re l’ homme et la f emme, qu’ il avait pris en considérat ion en t raduisant "La Loi de l’ homme" de Paul Hervieu, celui de la j ust ice sociale, et c.

On peut même dire que ses t raduct ions ont une t riple f inalit é :

- L’ enrichissement de la lit t érat ure arabe sur le plan t echnique et est hét ique.

- L’ engagement pour le progrès social et polit ique. - Et enf in l’ apport idéel, philosophique ou idéologique.

Ces but s sont parf ois explicit ement f ormulés dans les comment aires ou les not es accompagnant les t ext es qu’ il t raduit en arabe comme c’ est le cas, par exemple, des "Pièces de t héât re écrit es par des dramat urges f rançais" qu’ il avait t raduit es en arabe et dont il avait comment é et j ust if ié la t raduct ion. Mais parf ois, ces obj ect if s sont t ellement manif est es que le lect eur les comprend spont anément ou les déduit par analogie, s’ il avait lu auparavant d’ aut res t raduct ions comment ées de Taha Hussein.

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lat ines... car en f ait c’ est surt out à la lit t érat ure et la civilisat ion f rançaises qu’ il avait consacré le plus gros de ses ef f ort s de t raduct ion.

Cet t e f idélit é à la cult ure f rançaise, qu’ il t enait const amment à f aire connaît re dans le Monde arabe et la représent at ion t rès élogieuse qu’ il donnait de la France, eurent de f avorables échos chez cert ains de ses ressort issant s célèbres, ainsi André Gide et Georges Duhamel écrivirent sur lui, les universit és de Lyon et de Mont pellier lui décernèrent chacune le t it re de doct eur honoris causa(9) et le Gouvernement f rançais la Grand Croix de la Légion d’ Honneur.

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Renaissance arabe (Nahdha). Avec le recul, cert ains int ellect uels ont t rouvé que le déf i caract érisant ses réf ormes ét ait un peu t rop prononcé. André Miquel exprima cet t e idée sans en relever les ret ombées négat ives(10); Rabia Mimoune déplora l’ échec qui en avait résult é dans la récept ion du "Discours de la mét hode" dans le Monde arabe, ce dernier n’ ayant réellement apprécié cet t e œuvre de Descart es que grâce à la t raduct ion de Mahmoud al-Khodeiri(11). Quant aux Lumières, Abdelwahab Meddeb dit(12) que les Arabo-musulmans n’ avaient pas su en t irer prof it ; comme il avait cit é le t ravail de médiat ion accompli par Taha Hussein sans en évoquer les f ruit s, on peut en déduire qu’ il ne t rouve pas signif icat if s les résult at s de l’ ef f ort consent i par ce dernier pour les présent er au lect orat arabophone.

Mais puisque ces crit iques ont ét é f ait es plusieurs années après la mort de Taha Hussein, et qu’ elles int ègrent par conséquent les f act eurs t emps, évolut ion et résult at s qui lui échappaient t ot alement au moment où il rédigeait et publiait ses écrit s rénovat eurs, il ne serait pas exagéré de dire que dans les conj onct ures part iculières de l’ époque, il avait su t irer part i de la pensée f rançaise en en sélect ionnant les t héories et mét hodes qu’ il j ugeait apt es à servir d’ une part sa volont é de libérer la lit t érat ure arabe de l’ emprise de la religion et celle de la polit ique et d’ aut re part son désir d’ encourager ses lect eurs à l’ ouvert ure sur les civilisat ions ét rangères, parmi lesquelles il préf érait la f rançaise.

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1 - Son livre "De loin" (Min Baîd) où il mult iplie les argument s de t ous ordres pour prouver que l’ Hexagone (ou Paris) représent e la quint essence des mérit es civilisat ionnels réalisés par l’ humanit é t out au long de son hist oire.

2 - Son "Voyage du print emps" (Rihlat Arrabîe) où il plaide en f aveur du pouvoir qu’ à la France d’ épanouir ses visit eurs sur t ous les plans.

3 - Ses "Chapit res de lit t érat ure et de crit ique" (Foussoul Fil Adabi Wannaqd) où il f ait l’ apologie des droit s civiques obt enus par les Français et leur ambit ion permanent e de les améliorer, parallèlement aux éloges qu’ il f ait de cert aines œuvres f rançaises comme celles de Jean Giraudoux, Jules Romain, Marcel Thibault , Robert Cami, et c.

En out re, plusieurs aut res écrit s de Taha Hussein mont rent , d’ aut re part , sa cont ribut ion act ive à l’ échange const ruct if et f ruct ueux ent re les deux cult ures : arabe et f rançaise. A cet égard, il serait t rès int éressant et t rès inst ruct if d’ ét udier, par exemple, sa correspondance avec André Gide à qui il avait exprimé au départ son int ent ion de t raduire en arabe "La port e ét roit e". L’ ét onnement de Gide au suj et d’ un possible int érêt que son œuvre pourrait suscit er chez le lect orat arabe et les poncif s dévoilant son incompréhension de l’ Islam appelèrent une réponse magist rale où Taha Hussein avait dét ruit les st éréot ypes et désigné les af f init és prof ondes ent re les Arabo-musulmans et les Français(13). La f ranchise et la sincérit é de ses paroles avaient le mérit e de consolider les sent iment s amicaux qu’ il inspirait à son int erlocut eur f rançais qui dit , par exemple, de son voyage en Egypt e que sa "rencont re avec Taha Hussein rest e le souvenir de beaucoup le plus import ant , le plus beau", aj out ant , ent re aut res : "quel charme et quelle sagesse dans ses propos !".

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par ses œuvres t raduit es en f rançais comme, par exemple, "Le livre des Jours" (préf acé par André Gide) et "La Traversée Int érieure" (préf acée par René Et iemble), sont d’ une import ance t elle qu’ ils devraient êt re décrit s dans une ét ude exhaust ive ou du moins des art icles dét aillés dépassant largement le cadre de la présent e esquisse. Ils expliqueraient , ne serait -ce qu’ en part ie, la t endance des Français f rappés par la not oriét é de ses réf ormes, à l’ appeler "le Volt aire arabe" ou "le Mart in Lut her de l’ Islam". D’ aut re part , le bénéf ice qu’ il obt int de la pensée f rançaise est aussi considérable, ce qui explique son engagement , t out au long de sa vie, à en mont rer les af f init és avec la pensée arabe puis, en cas de besoin, la nécessit é d’ en t irer avant age pour redynamiser cet t e dernière.

Taha Hussein ét ait convaincu que la f idélit é à la t radit ion musulmane signif ie que l’ on regarde vers les aut res, qu’ on les comprenne. Il n’ épargnait donc aucun ef f ort pour promouvoir le dialogue des cult ures et illust rait savamment et avec lucidit é la parent é cult urelle arabo-f rançaise à laquelle il croyait f ermement et dont il cherchait à convaincre ses pairs dans le Monde arabe et en France.

Ainsi, il consacra plusieurs art icles à relever la f rat ernit é d’ esprit due aux ressemblances, et parf ois même aux similit udes part iculièrement f rappant es, qu’ il avait const at ées ent re des aut eurs arabes et des aut eurs f rançais comme Omar Ben Abi Rabiâ et Pierre Lot i(14), Ibn Hazm el Andaloussi et St endhal(15), Ibn Khaldoun et Mont esquieu(16), Mansour Fahmi et Ernest Renan...(17). Maît risant les let t res arabes, f rançaises et grecques, il dévoilait souvent avec brio la concordance ou les ressemblances ent re cert ains de leurs t ext es comme il le f it , par exemple, en ét udiant la lit t érat ure engagée en France, dans le Monde arabe et dans la Grèce ant ique(18).

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bibliographies des penseurs et écrivains f rançais qu’ il préf érait , comme, par exemple, August e Comt e(19), Charles Baudelaire(20), Madame Du Def f and(21), André Gide(22), Paul Valéry...(23), ces deux derniers lui ayant inspiré de t rès admirables pages dict ées par l’ amit ié indéf ect ible qui le liait à eux, par les relat ions t rès riches qu’ ils avaient su ét ablir grâce à leurs af f init és réelles et aux sent iment s d’ admirat ion et de respect mut uels qui les unissaient les uns aux aut res. Aussi n’ est -il pas ét onnant de voir son dévouement à la France rej aillir sur l’ hommage qu’ il rend à ses gens célèbres dans t out es les circonst ances. Il arrive même que la disparit ion de cert ains d’ ent re eux suscit e en lui une vive douleur, qu’ il la considère comme une pert e pour t out e l’ humanit é, comme il le f it , par exemple avec Sarah Bernard et Paul Valéry(24), la t ombe de ce dernier ayant f ait l’ obj et de sa visit e et de son recueillement , ce qui prouve son af f ect ion et sa f idélit é, même par-delà la mort .

En réalit é, Taha Hussein espérait incit er ses compat riot es à lire les célébrit és qu’ il leur présent ait ou même à les ét udier pour s’ enrichir de leurs idées, s’ inst ruire de leurs expériences ou médit er sur leur parcours. Tout ef ois, les convict ions qu’ il avait du cousinage spirit uel et int ellect uel ent re les aut eurs arabes et f rançais l’ aut orisait à les t rait er sur le même pied d’ égalit é, aussi ne t rouvait -il aucune gêne, en cas de nécessit é, à crit iquer ces derniers ou à émet t re des réserves sur cert aines caract érist iques de leur pensée ou de leurs œuvres dont il parlait à son lect orat arabophone, comme il le f it , par exemple, avec Albert Camus en crit iquant , d’ une part , "La pest e" pour son aspect lit t éraire, et d’ aut re part , "Le myt he de Sisyphe" pour son aspect philosophique(25).

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quand elle exist e, s’ apparent e plut ôt aux réminiscences d’ idées ou de mét hodes novat rices et const ruct ives qu’ il avait bien digérées, assimilées et acclimat ées pour les met t re au service de la cult ure arabe. Aussi est -il part iculièrement laborieux de déceler les échos d’ une quelconque source f rançaise dans sa créat ion lit t éraire, sa crit ique, ses plaidoyers ou ses comment aires. Ses déclarat ions au suj et des œuvres f rançaises qu’ il avait lues const it uent parf ois le point de départ à part ir duquel peut démarrer la recherche de ressemblances plus ou moins import ant es ent re son écrit et celui de t el aut eur f rançais ou t el aut re comme c’ est le cas, par exemple, ent re ses "Causeries du mercredi" et les "Causeries du lundi" de Saint e-Beuve ou ent re sa croyance(26) et celle de Taine(27) au dét erminisme hist orique ou ent re ses idées philosophiques(28) et celles de Volt aire(29) et d’ August e Comt e ou enf in ent re ses créat ions lit t éraires d’ inspirat ion religieuse(30) et celles de François-René de Chat eaubriand(31).

Des ét udes dét aillées de lit t érat ure comparée peuvent êt re consacrées aux sources f rançaises de la cult ure de Taha Hussein qui, loin d’ êt re un récept eur passif , a f ondu dans le creuset de sa pensée ses sélect ions int ellect uelles arabes et f rançaises, les a enrichies de ses idées personnelles et en a obt enu une synt hèse originale prouvant à quel point le mét issage int ellect uel f ranco-arabe peut êt re int éressant et const ruct if pour les deux part ies.

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cult ure en Egypt e" où il encouragea ses compat riot es à l’ ouvert ure sur les pays de la rive occident ale de la Médit erranée, leur rappelant le rat t achement de la civilisat ion de l’ Egypt e à cet t e aire géographique t out au long de l’ hist oire et en concluant que l’ avenir de sa cult ure serait bien prospère si elle se t ournait vers l’ Europe médit erranéenne, non vers l’ Orient (ou du moins beaucoup plus que vers celui-ci), dans ses choix de coopérat ion cult urelle. Cet t e t hèse - d’ où découle "le pharaonisme" reproché aux art icles qu’ il publiait dans sa revue "L’ Ecrivain égypt ien" - provoqua une levée de boucliers parmi les t enant s de l’ arabisme comme Sat ee al Houssary(32), les nat ionalist es comme Ahmed Lot f i Essayyed(33) et les int ellect uels appart enant à d’ aut res courant s exist ant alors en Egypt e comme Zaki Moubarak, Ahmed Amin, et c.

Le "médit erranisme" de Taha Hussein est en f ait l’ about issement d’ un long parcours durant lequel il concilia avec bonheur les qualit és des deux civilisat ions, arabe et f rançaise, et reçut une solide f ormat ion en langues et cult ures lat ine et hellénique. S’ adressant le plus souvent à un public arabophone, avec le souci de servir en priorit é ses compat riot es, il sut s’ inspirer de la cult ure et la civilisat ion f rançaises dans la démarche de réf orme int ellect uelle qu’ il ent reprit de réaliser dans son pays et f ut ainsi un modèle de réussit e dans la rencont re ent re l’ Orient et l’ Occident .

Notes :

1 - Cit ons, par exemple, classés par ordre alphabét ique : Aubaude, Camille : Le voyage en Egypt e de Gérard de Nerval ; Carré, Jean-Marie : Voyageurs et écrivains français en Egypt e ; Prisse d’ Avennes, Emile : Pet it s mémoires secret s sur la cour d’ Egypt e suivis d’ une Et ude sur les almées ; Siméon,

Jean-Claude : Le voyage en Egypt e : les grands voyageurs du XIXe siècle.

2 - On ne cit e en général que celle de Louca, Anouar : Voyageurs et écrivains égypt iens, Didier, Paris 1970.

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consacrée à Ibn Khaldoun en 1918, à la Sorbonne. Il avait int it ulé la première : "Le ressouvenir d’ Abil Ala" (Taj did Dhikra Abil Ala) et la seconde : "Et ude analyt ique et crit ique de la philosophie sociale d’ Ibn Khaldoun".

4 - Dès son ret our de France, il ét ait j ournalist e de presse polit ico-lit t éraire, prof esseur d’ hist oire gréco-romaine puis de lit t érat ure arabe à la f acult é de let t res du Caire dont il devint doyen. Il ét ait le premier président de l’ universit é d’ Alexandrie (qu’ il avait créée en 1942), cont rôleur général de la cult ure, représent ant de l’ Egypt e à l’ UNESCO, conseiller t echnique et sous-secrét aire d’ Et at au Minist ère de l’ Inst ruct ion Publique, Minist re de l’ Educat ion (nommé en 1950) et le premier à avoir aboli les frais d’ inscript ion et inst auré la grat uit é de l’ enseignement dans son pays.

5 - "A Taha Hussein à l’ occasion de son soixant e-dixième anniversaire", sous la direct ion d’ Abderrahmane Badawi, Le Caire, Dar al Maârif , 1968.

6 - Mort de chagrin en 1917, quand son f ils f ut t ué à la guerre. Taha Hussein acheva donc sa t hèse sous la direct ion d’ un aut re prof esseur, f ormé, lui aussi par Durkheim.

7 - Taha Hussein : "Chapit res de lit t érat ure et de crit ique", (Foussoul Fil Adab wan Naqd). Ed. Dar al Ma'arif , Le Caire, p. 305.

8 - Les plus import ant es parmi ces t raduct ions sont énumérées dans les int éressant es ét udes int it ulées : "A Taha Hussein à l’ occasion de son soixant e-dixième anniversaire". Nous pouvons en cit er, à t it re d’ exemple, pour le t héât re : Andromaque de Racine (1935), Zaïre de Volt aire (1947), Pièces de t héât re écrit es par un groupe de célèbres dramat urges f rançais (1924) ; et en poésie : des poèmes de Baudelaire et de Sully Prudhomme. Not ons, t out ef ois, qu’ il s’ ét ait abst enu de t raduire "Le cimet ière marin" de Paul Valéry et avait j ust if ié son ref us par le f ait que d’ une part , il n’ avait pas t rès bien compris ce poème (comme ce f ut d’ ailleurs le cas des crit iques f rançais) et que d’ aut re part , Paul Valéry lui-même désapprouvait la t raduct ion de la poésie en général, de craint e qu’ elle ne soit ainsi enlaidie. (Chapit res de lit t érat ure et de crit ique, p. 199).

9 - Comme le f irent , par ailleurs, les universit és de Madrid, de Rome, d’ Oxford et d’ aut res encore... Le charisme qu’ il acquit et la not oriét é mondiale dont il bénéf icia de son vivant et même après sa mort ne se sont j amais dément is, ce qui incit a l’ UNESCO et d’ aut res organisat ions cult urelles int ernat ionales à célébrer son cent enaire.

10 - André Miquel : Taha Hussein rénovat eur de la lit t érat ure arabe, Canal Académie, émission proposée par Hélène Renard, réf érence PAG 214, mise en ligne le 16/ 11/ 2006.

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Essais". Text es réunis par Henry Mechoulan, p. 179.

12 - Abdelwahab Meddeb : Islam et Lumières : le rendez-vous manqué, Le Nouvel Observat eur, 2/ 3/ 06 (Les débat s de l’ Obs.).

13 - Les let t res sont édit ées par le bullet in des amis d’ André Gide, vol 114/ 115, avril-j uillet 1997. On les t rouve en arabe dans "Al Bab Edhayyaq" (La port e ét roit e), Edit ions Al Hilal, N° 229, j anvier 1968, pp. 7 - 8 sqq., sous le t it re : "La let t re et la réponse".

14 - Taha Hussein : Causeries du mercredi, (Hadit h al Arbi'a). Edit ions Dar al Maaârif , Le Caire, pp. 311 - 313.

15 - Voir, Taha Hussein : Mélanges (Alwan), Ed. Dar al Maârif , Le Caire 1958, p. 102.

16 - Taha Hussein : Et ude analyt ique et crit ique de la philosophie sociale d’ Ibn Khaldoun, Facult é des let t res, Paris, Ed. A. Pedone, 1918. (Thèse de doct orat sout enue à la Sorbonne en 1918), pp. 35 - 44.

17 - Taha Hussein : De loin (Min Baîd), Ed. Al Mat baâ Arrahmania, 1935, p. 275. 18 - Taha Hussein : Mélanges, p. 189.

19 - Ibid., pp. 149 - 153.

20 - Taha Hussein : Haf ez et Chaouqi, (Haf ez Wa Chawqi), Mat baât al It imad, Le Caire 1933, pp. 50 - 62.

21 - Taha Hussein : Mélanges, pp. 144 - 157.

22 - Taha Hussein : Chapit res de lit t érat ure et de crit ique, pp. 140 - 150. 23 - Ibid., p. 197 - 198. Mélanges, pp. 51 - 75.

24 - Taha Hussein : Mélanges, p. 51. 25 - Ibid., p. 365.

26 - Taha Hussein : Le ressouvenir d’ Abil Ala, (Taj did Dhikra Abil Ala), Ed. Dar al Maârif , Le Caire 1937. (Thèse de doct orat sout enue à l’ Universit é égypt ienne en 1914), p. 282 - 283.

27 - Taine : Les origines de la France cont emporaine. - De l’ int elligence. 28 - Taha Hussein : Mélanges, pp. 148 et 365 ; De loin, pp. 17 et 232. 29 - Let t res philosophiques.

30 - En marge de la prophét ie (Ala Hamech as Sira). La promesse t enue (Al Wâd al Haq).

31 - Le génie du Christ ianisme.

32 - Mohamed Af if i et Edouard al Kharrat : La Médit erranée égypt ienne, Ed. Maisonneuve et Larose, Collect ion : représent at ions médit erranée, 24 mai 2000, p. 39.

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© Université de Mostaganem, Algérie 2009

La j ustice divine selon Al-Ghazali

Dr Alphousseyni Cissé Universit é Cheikh Ant a Diop Dakar, Sénégal

Résumé :

La j ust ice divine se t raduit chez Al Ghazali par l'unicit é de Dieu à t ravers Sa t out e puissance et Sa sagesse qui se manif est ent par l'ordre parf ait de l'univers ensuit e par la souverainet é de Dieu le Très-Haut qui a dét erminé t out e chose dans l'ét ernit é à savoir les causes et les causés en va-t -il de même concernant le dest in de l'homme, il est également dét erminé sans induire pour aut ant celui-ci à la paresse et à la f ainéant ise, bien mieux il est appelé à choisir la voie qu'il veut pour at t eindre la félicit é ici-bas et dans l'au-delà en s'appuyant sur la raison et la Loi divine.

Mots-clés :

j ust ice divine, al Ghazali, unicit é, Islam, loi.

***

Al-Ghazali dit : "On peut penser que l’ inj ust ice c’ est faire mal (à quelqu’ un) t andis que la j ust ice c’ est procurer un bienfait aux gens. Or il n’ en est pas ainsi. Au cont raire si un roi ouvre (les port es) des armureries, des bibliot hèques et des t résors et qu’ il dist ribue ces derniers aux riches, donne les armes aux savant s et met à leur disposit ion les cit adelles donne les livres aux soldat s et met à leur disposit ion les mosquées et les écoles, sans dout e il a fait preuve de bont é t out ef ois il a mal fait et a dévié de (la voie) de l’ équit é dans la mesure où il a mis chaque chose à la place qui ne lui convenait pas. Tandis que s’ il fait mal aux malades en leur donnant à boire des médicament s (amers) en leur appliquant des vent ouses ainsi par force et qu’ il punit les criminels par la peine capit ale ou leur coupe la main ou bien les frappe du coup il s’ est mont ré j ust e car il a mis les choses à la place qui leur convenait "(1).

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connaît re Dieu en t ant qu’ Et re j ust e qu’ il observe le royaume des cieux et de la t erre dans leur ordre parfait ou plut ôt qu’ il considère son propre corps t out au moins pour se rendre compt e de ses merveilles (aj aib badanih) qui sont dérisoires par rapport à celles des cieux et de la t erre dit l’ aut eur(2). En effet l’ équit é divine se t raduit ainsi par le fait que Dieu a rangé chaque chose dans le macrocosme comme dans le microcosme t el que le corps humain dans l’ ordre qui lui convenait dit Al-Ghazali sans quoi il y aurait imperfect ion et une exposit ion aux défaut s.

Ainsi a-t -Il rangé la t erre, dans le macrocosme au plus bas (asfala s-safilin) l’ eau par-dessus l’ air au-dessus de l’ eau ensuit e les cieux au-dessus de l’ air à défaut de quoi leur ordonnancement serait vain selon lui.

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