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Academic year: 2018

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Université Fernando Pessoa

Faculté de Sciences Humaines et Sociales

Dissertation de Mestrado en Psychopédagogie

Perceptive

La Psychopédagogie Perceptive et l'enfant

Aspects théoriques et pratiques

Directeur: Prof. Dr. Jean-Marc Humpich

Marianne Vincent-Roman

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1

ABSTRACT

L’objet de cette recherche est l’application de la Somato-psychopédagogie auprès des enfants. Pour défricher ce thème neuf, l’enfant n’a pas été interrogé directement, mais l’auteur a enquêté auprès de praticiens experts qui accompagnent des enfants, tout âge confondu. Ont été ainsi analysés, de façon qualitative, les entretiens réalisés auprès de trois participants (dont l’auteur) et un questionnaire adressé à 21 autres praticiens, où était demandé s’ils accompagnaient ou non les enfants, et quelles étaient les facilités et les difficultés rencontrées. Les concepts de la Psychopédagogie perceptive sont étudiés afin de rechercher des critères propres au rapport au Sensible chez l’enfant, tout en discutant avec les référents théoriques issus d’autres approches thérapeutiques de l’enfance. Ce travail amène sur le plan théorique un nouveau concept pour présenter les caractéristiques du « petit être sensible », et sur le plan pratique, à proposer un plan de formation destiné à former les praticiens aux spécificités de l’accompagnement de l’enfant en somato-psychopédagogie.

MOTS CLEFS.

Psychopédagogie perceptive  Somato-psychopédagogie  Enfant  Relation  Praxéologie 

Recherche qualitative  Formation

ABSTRACT

O tema desta investigação é a aplicação da Somato-psicopedagogia às crianças.

Para tratar este tema novo as crianças não foram entrevistadas directamente, a autora questionou praticantes especialistas no acompanhamento em Somato-psicopedagogia que acompanham crianças de todas as faixas etárias. Foram analisadas, de forma qualitativa, entrevistas realizadas junto de 3 participantes (incluindo a autora) e um questionário enviado a 21 outros praticantes onde se perguntava se estes acompanhavam ou não crianças e quais as facilidades e dificuldades encontradas.

Os conceitos da Psicopedagogia perceptiva são estudados com o objectivo de encontrar critérios próprios à relação ao Sensível nas crianças, discutindo-se também os referenciais teóricos vindos de outras abordagens terapêuticas da infância. Este trabalho conduz, do ponto de vista teórico, a um novo conceito para apresentar as características do "pequeno ser sensível" e, do ponto de vista prático, a propôr um plano de formação destinado a formar os "practiciens" às especificidades do acompanhamento das crianças em somato-psicopedagogia.

PALAVRAS CHAVE

Psicopedagogia perceptiva  Somato-psicopedagogia  Criança  Relação  Praxeologia 

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Remerciements

« Garde toujours dans ta main, la main de l’enfant que tu as été. »

A tous les enfants, merci de me donner la foi d’espérer,

A tous les enfants du Cesda, de ma consultation médicale et de mon cabinet, grâce à vous, j’ai tout appris et j’avance toujours…

Et en particulier,

A Kulusé, tu as été le premier, tu auras toujours ta place dans mon cœur, A Faustine, tu m’as appris que la gestion de la douleur peut se faire très tôt, A Julia et Olivier, partis trop tôt, je ne vous oublie pas,

A Jade, pour m’avoir appris ce « toucher » possible quand on le refuse,

A Axel, pour tout l’amour que tu me donnes avec ta « malformation cardiaque »,

A Pierre et Robin, merci de m’avoir permis de vivre en direct le mouvement de la naissance, A Loïc et Sylvain, « les jumeaux » de mon cœur,

Aux amis de mes enfants, Sean, Pablo, Tancrède, Eiichi, Adrian, Julian, Quentin, Xavier, vous me faites comprendre votre monde, l’adolescence,

A mes neveux et nièces chéris, Elsa, Agathe, Romain, Nicolas, Bastien et Baptiste, pour ton si bel exemple d’adaptabilité face à la maladie,

A Heewon, mon troisième enfant,

A Benjamin et Quentin, mes enfants, les élus de mon cœur, votre amour est mon

indispensable.

Et,

A Marc Humpich, merci d’avoir été le « parrain » de mon expérience fondatrice, je suis sensible à la pudeur de tes sentiments, à la profondeur de ta pensée, surtout à ton amitié généreuse et j’ai adoré ta « délicate rigueur » dans ta posture de directeur scientifique malgré toutes les difficultés partagées! Sans ton regard éclairant, je n’y serais jamais arrivée.

A Danis Bois, tes remarques de co-directeur m’ont toujours ouvert un autre regard, un nouveau chemin de réflexions.

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4

A Eve Berger, ton amitié est durable, sincère, loyale, la mienne se conjugue aussi avec « admiration », c’est un honneur de t’avoir présidente à ce jury.

A tous mes Amis, force secrète de ma vie, et particulièrement,

A tous mes collègues et amis du centre du Mouvement, du Cesda et de l’hôpital, de « m’avoir supportée » pendant ce marathon.

A ceux qui ont participé aux entretiens, ou au questionnaire,

Pour ceux du Mestrado, pour cette « folle » aventure partagée, nous avons vérifié, ensemble, ce vieux proverbe africain, « si tu veux aller vite, pars seul ; si tu veux aller longtemps, partez ensemble. » Al Gore

Merci à tous ceux qui ont participé indirectement, par tous les livres prêtés, ou par leurs mémoires et pour toute la richesse de nos échanges, et directement par les relectures ou pour les retranscriptions.

A Dimitri, Suzana, (merci pour la traduction) et vos enfants, pour tous ces moments heureux privilégiés chez vous, à « Lisboa »,

A tous ceux qui m’ont permis d’écrire grâce à leur accueil chaleureux, à Lisbonne, Gardanne, Cordes, Auch, Arcachon, Busan, Annecy, Saint Avertin, Paris et tout particulièrement Meudon…

A Alain, tu es parti sans avoir eu le temps de me lire et surtout de me donner ton avis de « psycho » qui m’était cher,

A « l’équipage du Master », à mon ami Michel, le commandant, à ses coéquipières, Ghislaine

et Marie-Hélène qui le sont devenues, sans vous, je me serai perdue en mer !... sans oublier les escales chez Martine, Jacques et Michèle.

Et surtout à Cécile, avec toute ma reconnaissance car sans toi, la forme n’aurait jamais pu éclore et bravo pour cette course finale...

A ma famille, et spécialement,

A mes parents, vous m’avez rendue « responsable », au sens du Petit Larousse, qui est de « redonner sa liberté à la personne »,

A ma mère, malgré « mon » âge, tu as encore des projets pour moi ! Ton amour m’est éternel. A mon père, c’est bon de sentir toujours ta confiance en moi, ce mémoire, réminiscence de ce moment inoubliable et partagé de ma thèse de médecine…

A Monique, toujours à mes côtés depuis plus de 50 ans et j’ai toujours besoin de toi,

Et surtout, à Christophe, tu es au « cœur» de mon Sensible, c’est un privilège d’avancer à tes

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Table des matières

Remerciements ... 3

Table des matières ... 5

PREMIERE PARTIE : CONTEXTUALISATION ET PROBLEMATIQUE ... 9

CHAPITRE 1 : INTRODUCTION ... 9

CHAPITRE 2 : CONTEXTUALISATION ET PROBLEMATIQUE ...13

2.1. Introduction ...13

2.2. Pertinence personnelle ...14

2.2.1. Une relation privilégiée avec les enfants ... 14

2.2.2. Ma quête à travers la médecine ... 15

2.2.3. Pourquoi m’être formée en somato-psychopédagogie et en fasciathérapie ? ... 16

2.2.4. Mon intérêt pour le Sensible ... 17

2.3. Pertinence professionnelle ...17

2.3.1. Médecin et praticienne ... 17

2.3.2. D’où me vient cette expérience auprès des enfants en thérapie et éveil corporel ? ... 18

2.3.3. Mon vécu de thérapeute auprès des enfants ... 19

2.3.4. La chercheuse au service de la pratique professionnelle ... 20

2.4. Pertinence sociale ...22

2.5. Pertinence scientifique ...23

2.6. Question de recherche ...24

2.7. Objectifs de recherche ...27

DEUXIEME PARTIE : CADRE THEORIQUE ...29

CHAPITRE 3 : CADRE THEORIQUE...29

3.1. Introduction ...29

3.2. Définitions ...30

3.2.1. La Psychopédagogie perceptive ... 30

3.2.2. L’expérience extra-quotidienne ... 33

3.2.2.1. Définition proprement dite ... 33

3.2.2.2. Pourquoi l’utiliser ? Quand et comment se met-elle en place ? ... 33

3.2.3. Expérience de soi, expérience professionnelle, expérience immédiate, praxéologie ou épistémologie de la pratique ... 35

3.3. Les cinq concepts du paradigme du Sensible ...38

3.3.1. Le concept de la médiation corporelle ... 38

3.3.1.1. Présentation du concept ... 38

3.3.1.2. Le mouvement interne ... 39

3.3.1.3. Le rapport au corps... 40

3.3.2. Le concept de la transformation de l’adulte sur le mode du Sensible... 44

3.3.3. Le concept du « constructivisme immanent » ... 48

3.3.4. Le modèle de la connaissance immanente ... 49

3.3.5. L’advenir ... 49

3.4. Le paradigme du Sensible : une science des rapports ...49

3.4.1. De quel type de rapport s’agit-il ? ... 50

3.4.2. La réciprocité actuante ... 51

3.4.3. La spécificité de la relation à l’enfant ... 56

3.4.3.1. Les aptitudes de l’enfant ... 56

3.4.3.2. La qualité intrinsèque du thérapeute de l’enfant ... 58

3.4.3.3. Le jeu ... 62

3.4.3.4. L’humour ... 65

3.4.3.5. La fonction métaphorique ... 66

3.4.3.6. Le tissage du lien avec l’enfant ... 66

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6

TROISIEME PARTIE : CHAMP EPISTEMOLOGIQUE ET METHODOLOGIQUE 71

CHAPITRE 4 : POSTURE EPISTEMOLOGIQUE ...71

4.1 La méthodologie qualitative ...71

4.2 La posture de praticien-chercheur ...71

4.3 Une méthodologie d’inspiration phénoménologique ... Erreur ! Signet non défini. 4.4 Le paradigme compréhensif et interprétatif ...73

4.5 La méthode de recherche heuristique ...74

4.6 Une posture herméneutique dans l’analyse qualitative ...75

4.7 Epistémologie du Sensible ...76

CHAPITRE 5 : DEVIS METHODOLOGIQUE ...79

5.1. Introduction ...79

5.2. Choix des sujets participant à la recherche et modalités de recueil des données ...79

5.2.1. Choix des trois participants aux entretiens ... 79

5.2.2. Choix de la modalité de l’entretien ... 81

5.2.3. Les participants au questionnaire ... 83

5.2.4. Réflexions sur la modalité du questionnaire ... 84

5.2.5. Articulation des sources de données ... 86

5.3. Elaboration de mon recueil de données ...87

5.3.1. Elaboration de l’entretien ... 87

5.3.2. Elaboration du questionnaire ... 88

5.4. Choix de la méthode d’analyse des données ...89

5.4.1. Ma démarche dans l’analyse quantitative ... 89

5.4.2. Choix de l’analyse thématique, en tant que figure dominante, parmi les différentes méthodes d’analyse quantitative ... 90

5.4.2.1. L’examen phénoménologique ... 90

5.4.2.2. L’analyse qualitative en mode d’écriture ... 91

5.4.2.3. L’analyse par questionnement analytique ... 91

5.4.2.4. L’analyse par catégories conceptualisantes ... 92

5.4.2.5. L’analyse thématique ... 93

5.5. Organisation de l’analyse des données en actes ...94

5.5.1. Première étape, « sauvage »... 94

5.5.1.1. Etape commune aux entretiens et au questionnaire ... 95

5.5.1.2. Etape spécifique pour Marie et Laura ... 95

5.5.2. Analyse qualitative organisée ... 96

5.5.2.1. Analyse de l’entretien de Marie ... 96

5.5.2.2. Analyse de l’entretien de Laura ... 99

5.5.2.3. Analyse de l’entretien de Marianne ... 101

5.5.3. Analyse du questionnaire ... 103

5.5.4. Vue synoptique de l’intégralité de la phase d’analyse ... 104

QUATRIEME PARTIE : ANALYSE ET INTERPRETATION DES DONNEES... 107

CHAPITRE 6 : PRESENTATION ET ANALYSE DES DONNEES ... 107

6.1. Analyse thématique de Marie... 107

6.1.1. Présentation des 4 tableaux ou ensembles thématiques, et mises en récit... 107

6.1.1.1. 1er tableau de Marie : Parce que c’est un enfant - le point de vue du praticien ... 108

6.1.1.2. 2ème tableau de Marie : Ce qu’il faut savoir en SPP pour accompagner un enfant ... 111

6.1.1.3. 3ème tableau de Marie : Comment l’enfant vit la séance ... 114

6.1.1.4. 4ème tableau de Marie : Place du praticien-expert ou de l’enseignant ... 117

6.1.2. Discussion ... 118

6.2. Analyse thématique de l’entretien de Laura à la lumière de celui de Marie ... 121

6.2.1. Présentation des récits des 3 constats ... 121

6.2.1.1. Récit du 1er constat : Laura confirme les propos de Marie ... 121

6.2.1.2. Récit du 2ème constat : Laura complète les propos de Marie ... 124

6.2.1.3. Récit du 3ème constat : Laura innove à partir des propos de Marie ... 125

6.2.2. Synthèse de l’analyse transversale des entretiens de Marie et Laura ... 127

6.2.3. Conclusion autour des entretiens de Laura et de Marie ... 128

6.3. Analyse thématique de l’entretien de Marianne basée sur les grilles thématiques de Marie et Laura ... 129

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7

6.3.1.1. Les points communs entre les trois praticiennes ... 129

6.3.1.2. Nouveautés de Marianne ... 132

6.3.2. Synthèse des 3 entretiens sous forme d’arbre ... 136

6.4. Analyse du questionnaire ... 139

6.4.1. Données quantitatives des réponses au questionnaire ... 139

6.4.1.1. Analyse des 11 NON ... 139

6.4.1.1.1. Difficultés saisies inhérentes à l’enfant ... 140

6.4.1.1.2. Les causes évoquées, mais indépendantes de l’enfant ... 141

6.4.1.1.3. Perspectives de formation ... 141

6.4.1.2. Analyse des 10 OUI ... 141

6.4.2. Analyse qualitative des réponses au questionnaire... 143

6.4.2.1. Facilités dans le traitement les enfants ... 143

6.4.2.2. Difficultés dans le traitement des enfants ... 144

6.4.2.3. Facilités pour certains et difficultés pour d’autres ... 144

6.5. Conclusion ... 147

CHAPITRE 7 : DISCUSSION FINALE ... 151

7.1 Arguments pour une somato-psychopédagogie adaptée à l’enfant ... 151

7.2 Les indications de la somato-psychopédagogie pour l’enfant ... 153

7.3 La place des parents ... 153

7.4 Les critères du « petit être sensible »... 154

7.5 Vers un contenu de formation ... 158

7.6 A propos de cette expérience ... 161

CHAPITRE 8 : CONCLUSION ... 163

8.1. Retour sur la question de recherche et sur les objectifs ... 163

8.2. Critiques et limites de la recherche... 163

8.3. Perspectives... 164

BIBLIOGRAPHIE ... 167

LISTE DES TABLEAUX ... 183

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PREMIERE PARTIE :

CONTEXTUALISATION ET PROBLEMATIQUE

CHAPITRE 1 : INTRODUCTION

Ce mémoire de recherche, qui a pour thème l’enfant et la Psychopédagogie, est né, comme dans le cas d'un être vivant, de la rencontre du désir et du questionnement.

Le désir tout d’abord de réfléchir, de communiquer, de partager mon expérience de 25 années de pratique auprès d’enfants. Arrivée à une certaine maturité professionnelle, en tant que médecin, fasciathérapeute et somato-psychopédagogue1, mêlant ces trois outils avec toujours autant de plaisir et de passion, il m’a semblé que pour aller plus loin, il fallait que je fasse le point sur ce qui est né de ma pratique, de mes connaissances, des interactions avec les autres, enseignants, collègues, enfants. J'avais besoin de discerner ce qui est efficace, définir ce qui est spécifique à l'accompagnement des enfants. Je tenais à échanger avec mes collègues qui travaillent aussi avec des enfants et à retirer de ce laboratoire pratique quelques concepts et outils clés qui pourraient être discutés, partagés et transmis.

Pour ce faire, je souhaitais m'inscrire dans l’esprit de recherche qui anime depuis toujours la Psychopédagogie perceptive2, fondée par le Pr. Danis BOIS.

Ce désir pratique combiné à mon cadre professionnel, dans lequel je m’occupe d’enfants ayant de sérieux déficits sensoriels et/ou troubles d’apprentissages, m’avait d’abord orientée vers la question des troubles d’apprentissage (enfants précoces ou ayant une dysphasie3). J'ai donc prospecté les thèmes de l’apprendre, du dessin et de la praxéologie4. J'ai commencé, en même temps, à réaliser une enquête auprès des praticiens, dont moi-même. Sur le plan théorique, je devais définir la Psychopédagogie perceptive et effectuer une recherche sur

1Voir annexe 1, pour la définition détaillée de la fasciathérapie

et l’annexe 2 pour celle de la somato -psychopédagogie.

2Terme qui sera défini dans le cadre théorique. Disons simplement ici : « La discipline de la

somato-psychopédagogie est la somato-psychopédagogie perceptive. […] Le psychopédagogue vise à enrichir les potentialités humaines de l’adulte » (Bois, 2010).

3

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10

d’autres approches thérapeutiques psychocorporelles de l’enfant. Progressivement, j’ai pris conscience que mes objectifs étaient trop vastes : j’ai dû faire le deuil de nombreux thèmes.

Concernant la dynamique du questionnement, le point de départ de cette recherche est un paradoxe : la Psychopédagogie perceptive a été définie et enseignée par le Pr. D. Bois comme s’appliquant principalement à l’adulte. Or, depuis une trentaine d’années qu’existe la fasciathérapie, de nombreux enfants sont suivis par des praticiens de cette approche. De plus, certains enseignants, dont moi-même, animent des cours et des stages spécifiquement destinés aux enfants. Mais, au sein des écrits traitant des pratiques à médiation du Corps Sensible, peu de chapitres ou de mémoires ont été écrits sur le sujet. Je ne ferai que citer ici un chapitre du livre d’Eve Berger, Le mouvement dans tous ses états (1998) et les mémoires de fin de formation professionnelle ou encore de Master écrits par Christophe et Marianne Roman (1993), Annick Borek (2002), Philippe Rosier (2006) ou Tatiana Lebègue (2007). Manifestement, sur le terrain, personne n’a douté qu'il était possible de traiter des enfants par cette méthode. Émergent ainsi de nombreuses questions, notamment : faut-il une pédagogie spécifiquement adaptée à l'enfant ? Existe-t-il des différences d'accompagnement selon les tranches d’âge ? Existe-t-il des modalités favorisant le rapport à l’enfant ?

(12)

11

À l'arrivée, le désir et le questionnement de départ ont fini par converger vers la question de recherche qui sous-tend ce travail : En quoi et comment la somato-psychopédagogie

(13)
(14)

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CHAPITRE 2 : CONTEXTUALISATION ET PROBLEMATIQUE

2.1. Introduction

« Présenter la problématique de recherche dans un projet, un rapport ou un article de

recherche, c’est fondamentalement répondre à la question suivante : « Pourquoi avons-nous

besoin de réaliser cette recherche et de connaître les résultats qu’elle propose? » (Jacques

Chevrier,2002, p. 51).

Pour cela, je suis amenée à dévoiler, à travers la présentation des différentes pertinences, personnelles, professionnelles, sociales et scientifiques, une partie de mon « identité », ainsi que la définit Carmel Camilleri dans son ouvrage, Stratégies identitaires (1990), cité par Etienne Bourgeois : « En bref, celle-ci est vue comme une figuration d’images de soi multiples en tension par laquelle le sujet définit son unité et sa continuité, ainsi que sa similitude et sa différence par rapport à autrui. » (2006, p. 274).

Je ne peux passer sous silence le fait que, dès ma rencontre avec D. Bois, j'ai été interpellée d'emblée par son art perceptif. Pourquoi?

En effet, il m’apprenait et il me faisait découvrir, dès que je posais mes mains sur le corps d'un patient, la perception d’un mouvement interne5. Voilà ce qui m'a étonnée, à la manière de nombreux enfants, émerveillés de sentir que « cela bouge » en eux, dès les premiers instants de la première séance, alors que mes mains ne bougent pas : leurs regards ébahis s’afficheront toujours dans ma mémoire.

Cette perception nouvelle avait un goût de profondeur et des effets sur ma perception : j'étais touchée par « ce » que je touchais ! Comme l'exprime Didier Austry : « Si le toucher technique est tourné vers le corps touché, si le toucher de relation pose son attention sur la posture et l'intention du thérapeute, le toucher du Sensible6 à la fois réunit et dépasse ces deux premiers niveaux pour laisser émerger un lieu de rencontre, d'inter-réciprocité selon les

5Ce terme sera repris dans le cadre théorique, disons, ici, simplement pour la compréhension du lecteur,le mouvement interne anime l'intérieur du corps, il est autonome, perceptible, on objective surtout des effets (chaleur, débit sanguin...) ce mouvement contribue à maintenir le corps en état d'équilibre, de façon sous-jacente aux grandes fonctions. Il est organisé en rythmes, cadences et directions.

6Ce terme sera aussi décrit dans le chapitre cadre théorique :

« Pour D. Bois, la « perception sensible » s’ouvre

à un horizon incarné plus profond, plus intérieur, qu’il définit à travers l’expression « perception du sensible ».

(15)

14

termes de Danis Bois (Bois, 2006 b, 2007) entre thérapeute touchant et touché, et patient touché et touchant. » (Austry, 2006).

2.2. Pertinence personnelle

Qu’est-ce qui m’a poussée à choisir ce thème de recherche sur les enfants ? Pourquoi ai-je cette passion pour ce sujet de recherche ?

2.2.1. Une relation privilégiée avec les enfants

Je suis intéressée par les enfants, par le monde de l’enfance. Je me sens impliquée, comme si je parlais d’une partie de moi. Je me sens spontanée avec eux, la rencontre est aisée, dans le sens de Donald W. Winnicott qui, cité par Claude Geets, parle de « capacité naturelle

d’entrer en contact avec les enfants » (1981, p. 19). J’aime le paradoxe rencontré : au cours d’une même séance, ils peuvent être heureux et malheureux! J’aime l’adaptabilité immédiate (nécessaire) qu’ils m’ont enseignée.

Je ressens du plaisir à être avec eux, c’est même une joie : « Plus encore, si j’en crois un peu les praticiens de ce mouvement interne, une telle pratique ne débouche-t-elle pas sur une joie

subtile d’être au monde, liée à ce temps de silence méditatif que le philosophe contemporain

Nicolas Go nomme pertinemment ‘silenciaire’7 et qui nous fait renaître à l’existence inouïe

dans le royaume de chaque instant ? » (René Barbier, 2009, p. 16)

J’aime leur « compagnie reposante », comme Henri Wallon le décrit : « Si la compagnie des

enfants peut être si reposante, c’est en ramenant l’adulte à des activités déliées entre elles et

insouciantes. » (2002, p. 78).

Enfant, j’ai par ailleurs toujours aimé les jeux et, comme dit Catherine Potel : « Si je suis

psychomotricienne, c’est parce que j’ai tellement aimé jouer quand j’étais enfant. » (2006, p. 32). Maintenant encore, je continue de jouer !

Dans l’ensemble, je me sens facilement en « résonance » avec l’enfant, résonance de la même nature que celles qu’a définies et classées D. Bois (2008 a).

Pour un thérapeute envers son patient, il distingue :

- Une résonance intellectuelle : ce qu’il me dit, ce qu’il me confie m’intéresse, me fait

réfléchir, j’accorde de l’importance à l’enfant et il le ressent.

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15

- Une résonance de sens : l’enfant m’apprend, me pointe « des éléments qui me donnent une nouvelle signification » (Ibid., Bois,).

- Une résonance affective : il «vient toucher quelque chose de ma vie » (Ibid.), car sa sincérité et son authenticité me touchent. Puis-je dire que je suis « attachée » aux enfants car ils me donnent tant ? « L’attachement est lié au don » ou « L’attachement n’existe

qu’avec le détachement. L’intégration de ces deux processus crée l’autonomie. Est

autonome une personne qui dans un acte de vie et dans une expérience relationnelle

parcourt tous ses niveaux d’apprentissage dans une unité psychocorporelle. C’est être soi différent d’autrui et cependant en relation avec lui. » (Suzanne Robert-Ouvray, 1996, pp. 148-149).

- Une résonance intérieure : l’enfant touche mon humanité. Comme le formule Serge Tribolet, « L’humanité est en l’homme ce qui est plus que l’homme, elle n’est ni dans le corps ni dans la psychologie. […] Elle est un inaccessible, irréductible, elle est comme

Dieu en nous. L’humanité est en nous-mêmes notre dépassement. » (2006, p. 80). Surtout, l’enfant touche «mon sensible et m’anime » (Ibid., Bois ).

2.2.2. Ma quête à travers la médecine

Lorsque j’ai réussi mon concours d’entrée en médecine, je me suis considérée très chanceuse, je pouvais faire le plus beau métier, « soigner » ! Mais j’avais à ce moment là la vision utopique de sauver l’humanité !

Très vite, j’ai été déçue dans mes études du peu de place réservée à l’humain et du manque de connaissances en psychologie. J’ai pourtant choisi de les poursuivre par une spécialité en oto -rhino-laryngologie ou ORL, alors que je cherchais le fonctionnement global du corps ! Inévitablement, je n’ai pas trouvé de réponse !

J’étais attirée par la pédiatrie,évidemment par mon intérêt pour les enfants. Je n’ai pu faire ce choix car j’étais trop affectée par la gravité des maladies et surtout par le décès de certains de ces jeunes patients. Pourtant, c’est bien eux, lors d’un stage, qui m’ont appris les premiers cette capacité à vivre le présent : trente minutes après un soin douloureux ou l’annonce d’une mauvaise nouvelle, ils étaient capables de jouer et même de rire, et moi avec. Oui, c’est aussi la souffrance, quelle que soit sa nature, qui me mobilise dans ma démarche de thérapeute, et ceci tout particulièrement chez les enfants. Comme le formulait le Professeur Catherine Jousselme dans une conférence (2008) : « Je me sens investie par le regard de l’enfant

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16

Le choix de la spécialité ORL s’est fait « presque » par hasard, bien que mon père ait été chirurgien ORL et qu’il m’ait sûrement « inconsciemment » influencée par son approche profondément humaine. Mon entrée dans ce domaine s’est faite grâce à une rencontre, celle d’un patron passionné! J’ai adoré mes débuts d’apprentissage dans son service, j’ai découvert et me suis finalement spécialisée dans le monde de l’otologie. J’ai participé pendant de nombreuses années à la recherche et à quelques publications dans son service hospitalier. Mais je n’avais pas encore trouvé de réponses au fonctionnement global du corps, j’avais toujours une vision parcellaire. J’ai écrit ma thèse de médecine sur « Les manifestations douloureuses de la sphère ORL guéries par manipulations cervicales » (Marie-Anne Vincent, 1984) et même avec l’ostéopathie, je n’ai pas trouvé ce que je cherchais.

Finalement, j’ai rencontré la fasciathérapie grâce à un ami, lors d’un stage de méditation. Ce fut une révélation, un choc : j’ai senti autant en posant mes mains qu’en étant touchée, mais c’était trop invraisemblable! Un os qui s’étirait, mon cœur touché par une main… Je n’y « croyais pas », mais cette perception m’avait ébranlée et j’ai voulu en savoir plus. A la fin de ce séminaire, je me suis inscrite à la formation de fasciathérapie !

Par ailleurs, j’étais restée en contact avec le monde des enfants puisque j’étais devenue phoniatre et que je travaillais dans un centre spécialisé pour enfants déficients auditifs avec des troubles ou handicaps associés et enfants souffrant de troubles sévères d’apprentissage.

2.2.3. Pourquoi m’être formée en somato-psychopédagogie et en fasciathérapie ?

Au premier stage de fasciathérapie, dès le premier cours, j’ai compris que j’étais au bon endroit pour avancer dans ma quête ! En effet, le professeur D. Bois nous a fait un cours sur l’organisation des fascias dans le corps et sur le mode d’installation de la pathologie. J’avais enfin des réponses à mes questions sur le concept de globalité et de « comment cela marche ». Par ailleurs, comme j’avais également été « remuée » dans mon intimité, mon intention de départ était de m’occuper de moi, m’engageant dans cette formation comme dans une thérapie personnelle. Mais en même temps, je suis devenue « thérapeute ». Dès le retour de ce stage, je commençais à « m’entraîner » grâce à mon entourage et, très rapidement, avec des patients.

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Au cours de la première année de formation de fasciathérapie, plus précisément lors d’un stage sur le « pied », où je m’ennuyais (!), D. Bois est venu me parler et m’a dit cette phrase, que je n’ai comprise et surtout vérifiée que bien plus tard : « Tu sais, tu ne traiteras pas des pieds mais des pathologies crâniennes en rapport avec ton métier de médecin, des pathologies de système et des enfants. »

Parallèlement, les formations en fasciathérapie, puis en somato-psychopédagogie8, m’ont apporté une solidité psychologique qui m’a permis progressivement de m'occuper et d'accompagner plus sereinement des enfants avec des troubles sévères ou des pathologies graves.

2.2.4. Mon intérêt pour le Sensible

Lorsque j’attendais mon premier enfant, j’ai eu la chance d’être accompagnée par D. Bois. Je me rappelle tout particulièrement une séance où j’ai ressenti une libération capitale dans mon corps, autant pour moi que pour mon fils. Depuis, ma confiance dans le Sensible est immuable.

Cette confiance est aussi venue prendre soin d’une peur fondamentale née pendant mon adolescence, « la solitude ».

Le Sensible est comme une lumière qui a éclairé ma vie, qui m’a ouvert un nouveau regard, une nouvelle compréhension, une nouvelle écoute, un nouveau goût, et qui a installé une exigence dans ma démarche de vie suscitant parfois l’incompréhension des autres. J’y ai aussi découvert une certaine gravité, en lien avec cette profonde relation à moi-même, acceptée et essentielle. Cette rencontre avec le Sensible a en outre ouvert mon cœur et m’a appris l’art de la relation, ce qui a transformé ma relation avec tous ceux que j’aime.

Enfin, avec la notion de réversibilité, c’est mon âme de thérapeute même qui a été touchée. Ma devise devant un patient est devenue : « Tout est possible ».

2.3. Pertinence professionnelle

2.3.1. Médecin et praticienne

J’ai eu la chance de démarrer mon métier de médecin en même temps que ma pratique de fasciathérapeute. Au fil des années, j’ai pris conscience que je mêlais mes deux pratiques, l’une enrichissant l’autre.

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Je suis, surtout, devenue une « praticienne ». Dans le sens de la pratique en médecine tout d'abord : « le savoir pratique a une importance capitale en médecine. N’appelle-t-on pas les

médecins des ‘praticiens’ ? » (Alain Bernadou, 1996, p. 29) ; dans le sens de la fasciathérapie et de la SPP ensuite.

Ce qui me manquait tant dans ma formation médicale, le rapport au corps et la relation médecin-malade, je l’ai trouvé dans la formation de fasciathérapeute et de SPP.

Je suis en effet sensible à cette phrase de François Roustang9, que cite Jean-Philippe Gauthier : « Il n’y a pas d’âme sans corps et pas de corps sans rapport à l’espace et à l’environnement. ‘Le corps humain est la meilleure image de l’âme humaine.’ C’est Wittgenstein qui dit cela. C’est du corps qu’il faut s’occuper, pas du corps vu par la médecine scientifique, mais du corps qui parle, qui se meut, qui s’émeut. » (2009, p. 289).

2.3.2. D’où me vient cette expérience auprès des enfants en thérapie et éveil corporel ?

J’ai commencé à accompagner des enfants en séances individuelles à mon cabinet dès les débuts de ma formation en fasciathérapie en 1987.

Plus tard, de 1993 à 2001, j’ai animé des cours collectifs et des stages pour des enfants âgés de 3 à 5 ans et de 6 à 9 ans. Cette expérience, très riche, a été la source de création de nombreux exercices issus de la spontanéité du moment et utilisés plus tard en thérapie individuelle. Pour moi, c’était facile, je n’avais pas la contrainte du cabinet (avec l’exigence du résultat) ; je me sentais « libre » dans mes propositions.

Je n’étais pas non plus face à la difficulté d’accompagner des enfants avec des troubles importants comme c’était le cas dans le centre spécialisé ou à mon cabinet. Les enfants venaient par plaisir, c’étaient « leur activité » comme ils seraient allés faire du théâtre ou de la danse. Chacun d’ailleurs appelait l’atelier «d’éveil en mouvement » à sa façon : cours de gym, yoga, musique, relaxation…

Je travaille également depuis 20 ans en tant que médecin ORL et phoniatre dans un centre spécialisé auprès d’enfants sourds, dont certains n’ont pas de communication orale mais uniquement gestuelle, et aussi auprès d’enfants avec des troubles sévères d’apprentissage. Cette longue expérience auprès de ces enfants m’a enrichie en m’apportant une nouvelle perception du ressenti des patients grâce à la sensorialité. Je regarde toujours la « potentialité» de l’enfant à laquelle je crois, et non ses difficultés, ce qui est aussi enseigné en SPP. Comme

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Jacques Ladsous l’affirme : « On ne peut accompagner valablement quelqu’un sans avoir la

certitude intérieure qu’il est capable de faire la route, même si celle-ci peut paraître incohérente, entrecoupée de pauses et de marches arrière, liées aux obstacles sur lesquels il vient parfois (ou souvent) buter. » (2007, p. 75). C’est au centre que j’ai appris à communiquer avec des enfants sans le support du code du langage oral. J’ai pu y accompagner certains enfants en thérapie individuelle, et animer de multiples cours collectifs, seule ou en binôme avec la psychomotricienne ou l’enseignant spécialisé.

Par ailleurs, j’ai été amenée à transmettre les outils de la SPP aux étudiants en formation en devenant formatrice de la méthode en 1990. En tant qu’enseignante en SPP ou en fasciathérapie, ma préoccupation a toujours été de tenter de répondre à la demande des étudiants comme à celle des patients en thérapie. Je me suis toujours remise en question et c’est la raison pour laquelle je n’ai jamais fait deux fois le même cours, éprouvant toujours le besoin de l’améliorer. Probablement que cette expérience d’enseignement a son importance aussi dans mon désir actuel d’analyser ma pratique professionnelle.

2.3.3. Mon vécu de thérapeute auprès des enfants

J’apprécie l’authenticité des enfants : ils disent ou plus précisément ils osent dire « les choses » du moment où ils sont conscients de leur pensée, sans cacher leurs réactions. Comment ne me suis-je jamais sentie blessée dans le « comment » ils le disent ? Comment font-ils pour le dire toujours en direct, sans temps de latence ?

Sont-ils plus facilement dans l’immédiateté ? « L’immédiateté est une force, c’est un mouvement. » (Bois in Christophe Roman, 2007, p. 108). Ne seraient-ils pas moins « conditionnés » que nous ?

La rencontre est facile d’emblée. Pourquoi ? Sont-ils moins méfiants ? Ont-ils moins de représentations ? Suis-je particulièrement ouverte au rapport avec eux ? Qu’est-ce qui fait que nous jouons ensemble ? Le plaisir du jeu fait partie de l’enfant. Mais le jeu est-il indispensable dans la thérapie de l’enfant ? Comment peut-on utiliser cet outil ? « Ne sait pas jouer qui veut ni quand il veut. Il y faut des dispositions et parfois un apprentissage ou un réapprentissage. » (Ibid., p. 78)

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manière d’entrer en relation avec les enfants quand il mentionne l'importance « d’entrer en relation avec l’enfant et d’instaurer une sorte d’intimité entre lui et le médecin, cette

complicité sans laquelle aucun travail thérapeutique n’est possible. » (Geets, 1981, p. 30). Je ressens leur insouciance comme une qualité, spontanément le mode d’apprentissage de l’enfant est l’expérience : le fait de sentir suffit-il ? En perçoivent-ils les effets ? Mon humour est-il un outil à acquérir ? Une autre vertu est leur intérêt pour la nouveauté avec une belle mobilisation attentionnelle : « Par exemple la nouveauté de l’impression que fait éprouver un

geste pour la première fois peut être suffisante pour mobiliser quelque temps, en vue de sa

répétition, une somme d’énergie qui ne pourra plus se retrouver quand cet attrait sera devenu

moindre. Elle disparaîtra donc provisoirement. » (Wallon, 2002, p. 48)

Enfin, ils ont un don pour la poésie qui naît de leurs paroles spontanées et de leurs attentions délicates, comme le prouve Rémy, âgé de 6 ans. Pendant une relation d’aide manuelle, alors que je rencontrais une résistance, il s’exclame : « Arrête !». Je pensais que mon point d’appui était trop intense et déclenchait une douleur et lui demandai : « Je te fais mal ? ». « Non, mais il y a tellement de mouvement et moi qui ne fais rien, tu dois être si fatiguée ! »

De leur côté, quel sens donnent-ils à ce vécu, à ce perçu, à ses effets, à cette première rencontre? Que peuvent-ils dire sur eux-mêmes ? Que peut leur apporter le fait d'apprendre de l'expérience corporelle facilement ?

J’ai donc toujours travaillé auprès d’enfants, que ce soit en tant que médecin ou que praticienne en SPP ou en fasciathérapie. Cela fait de nombreuses années que j’éprouve le besoin de partager cette passion pour clarifier et mettre en forme mon expérience. Le fait de pouvoir parler de mon expérience auprès des enfants dans ce mémoire correspond également au besoin de me libérer spontanément et facilement, comme un enfant qui aurait gardé pendant longtemps un secret ; je sens ce secret responsable d’une sorte de souffrance, souffrance de ne pas avoir pu en parler, de ne pas avoir été entendue.

2.3.4. La chercheuse au service de la pratique professionnelle

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je fais, comment je sais ce qu’il faut faire lors de l’accompagnement des enfants en SPP, qu’est-ce qui est amélioré. Et comment je l’évalue. Mais aussi, pour prendre conscience de ce que je ne fais pas et que je pourrais faire. « On n’interroge pas ce que l’on fait quand on est convaincu de son bien fondé. » (Berger, 2007 a). Ce que je propose, est-ce utile ? Mon expérience clinique répond oui, mais sur quels critères ? Et si je m’interrogeais sur mes échecs ou mes erreurs ? Pour aller plus loin, j’ai besoin d’apprendre de nouvelles pistes de travail et de me renouveler. Analyser l’expérience professionnelle de mes collègues doit me faire apprendre, c’est un objectif de ma recherche. « On ne change pas quand tout va bien. » (Bois)10

Je suis prête aussi à me remettre en question, donc à élargir mon point de vue, en découvrant d’autres praticiens, ou même à changer mon point de vue par la prise de conscience d’éventuels angles morts. Je ne cherche pas à vérifier l’efficacité de mes traitements mais je m’interroge sur les outils utiles pour des professionnels et donc pour les enfants eux-mêmes. Je ne tente pas de combler des lacunes, mais j’explore cette pratique auprès des enfants pour mieux la comprendre et pour éventuellement en tirer des concepts ou une modélisation pratique, si se dégagent des invariants dans un objectif de transmission.

Mon hypothèse est que cette recherche pourrait à la fois apporter des éléments pertinents pour tous les professionnels, dont les thérapeutes, qui pourraient aider les enfants. Elle pourrait d’abord intéresser mes collègues praticiens - il est toujours motivant de partager sa passion avec ses pairs, et les réponses à mon enquête montrent leur intérêt pour le sujet. Je suis, de plus, sollicitée depuis de nombreuses années par ces mêmes collègues qui m’interrogent : « Comment fais-tu avec les enfants ? ». Il est donc utile de leur répondre, c’est le moment ! Je pense aussi à mes collègues médecins, qui pourraient bénéficier du fruit de ma recherche, à mes collègues du centre spécialisé, pour leur faire découvrir ma façon de travailler en fasciathérapie et en SPP, voire au monde plus global de l’éducation des enfants.

À l'arrivée, la pertinence professionnelle de mon projet de recherche repose sur la tentative d'obtenir des éléments de réponse face à des questions nombreuses et qui concerne le praticien de terrain : le travail d’éveil sensoriel en SPP peut-il s’appliquer à l’enfant ? Sous quelle forme ? Faut-il une pédagogie particulière ? Un cadre singulier ? Existe-t-il un ou des

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protocoles de travail particuliers à proposer ? Y a-t-il des compétences spécifiques à acquérir lorsqu’on applique les principes de la SPP au travail avec des enfants ? Faut-il un don pour travailler auprès d’eux? Quelles sont les modalités de relation avec l’enfant ? Y a-t-il des précautions à prendre ? Faut-il être touché par l’enfant pour pouvoir l’accompagner ? D’autre part, à quelle population d’enfants peut s’appliquer ce travail ? A quel âge ? Quelles en sont les indications ? Quel type de prise en charge ou d’accompagnement peut-on proposer ?

2.4. Pertinence sociale

Dans cette section, je dois relever, d’après J. Chevrier, « une situation concrète (sociale) - pour moi, il s’agit d’une pratique professionnelle en SPP - comportant un phénomène particulier » - en ce qui me concerne, l’application à l’enfant (2002,p. 77).

Depuis de nombreuses années, des praticiens en SPP m’ont souvent sollicitée sur ma pratique auprès des enfants, rencontrant eux-mêmes des difficultés. Je suis ainsi intervenue soit individuellement soit dans certains stages de formation professionnelle en SPP.

J’ai été également invitée par des instituteurs11 confrontés aux problèmes d’attention ou de motivation de l’enfant, pour animer des séances pratiques en classe. Sur le thème du corps et de la relaxation, une association de formation d’orthophonistes libéraux me demande régulièrement d’animer des formations sous forme de stages, afin de leur apporter des outils pratiques face à leurs préoccupations au sujet de tel ou tel enfant. Mais je n’ai jamais rien écrit ou publié.

Enfin, je suis appelée depuis plusieurs années à participer à l’enseignement en travaux dirigés à la faculté pour les étudiants en orthophonie. Je mêle là mes deux compétences de médecin ORL-phoniatre et de praticienne en SPP.

Je reçois de nombreux témoignages de ces différents publics me confiant combien ces interventions sont utiles pour leur métier actuel ou futur. L’objectif de ce travail de recherche est également de leur apporter des informations pertinentes par un support écrit.

Enfin, on peut se poser la question du type de rapport qu’a aujourd’hui l’enfant avec son corps. Quel rapport peut-il avoir dans cette ambiance de compétition sportive ou de stimulation intensive par les jeux vidéo ?12 On ne peut non plus passer sous silence le contexte

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De la même façon, j’ai animé des ateliers dans le centre spécialisé où je travaille.

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de violencedans les écoles, ou les problèmes de drogue ou d’alcool dès le collège. Il y a donc aussi un besoin sur le terrain pour accompagner les adolescents en crise, pour leur apprendre à ressentir, et pourquoi pas, leur offrir un espace d’expression inédit dans lequel découvrir leur intériorité !

Cette recherche pourrait donc illustrer l’intérêt d’utiliser ce nouvel outil qu’est le mouvement sensoriel par la SPP, clarifiant ainsi l'action de praticiens du champ social auprès d'une population tout à fait particulière : celle des enfants. En ce sens, ce travail de recherche viendrait témoigner de la SPP en tant qu'approche apportant des réponses dans des domaines d'intervention très variés. La SPP est en effet déjà pratiquée par des artistes (Maria Leão, 2003 ; Luca Aprea, 2007), des psychologues (Annick Borek, 2002), des orthophonistes (Sophie Pastor et Nadine Chastragnat, 2002), des psychomotriciens et des enseignants.

2.5. Pertinence scientifique

Quand je tente de répondre à la question : « Comment s'est développée la stratégie de travail que j'utilise auprès des enfants ? », je m'aperçois que mon trajet a épousé les grandes étapes du développement des pratiques à médiation du Corps Sensible. En d'autres termes, mon questionnement d'aujourd'hui rejoint les interrogations qui animent la dynamique de recherche au sein du CERAP (Centre d'Études et de Recherche Appliquée en Psychopédagogie perceptive : www.cerap.org).

Mes stratégies de travail se sont donc construites progressivement, en suivant à la fois mon évolution personnelle de thérapeute et celle de la méthode, en quatre étapes :

- La première correspond à ma découverte du « mouvement interne », d’abord sur moi

puis auprès des patients, dont les enfants. Je suis, à ce jour encore, impressionnée par leur facilité et leur rapidité pour « sentir » dès que l'on pose les mains sur leur corps. Ce qui est très rassurant pour un thérapeute débutant ! Au niveau de la méthode, c’était le moment de la thérapie manuelle de la profondeur (Bois et Berger, 1990).

- La deuxième étape, celle de la pratique du « Mouvement Fondamental » m’a beaucoup

appris ; cela a été un très bon entraînement pour capter l’imprévisible, l'immédiateté et la nouveauté. Elle m’a initiée au niveau artistique, en particulier au théâtre et aux arts plastiques, qui m’ont donné l’occasion de créer des outils adaptés à l’enfant. C’était l’époque du

Fondamental en mouvement (Bois et Berger, 1995).

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comprendre la notion de « chaînon manquant » : quelle information manque au patient pour qu’il puisse accéder à une transformation ? Le livre de référence de cette étape est le Mouvement dans tous ses états (Berger, 1999).

- La quatrième étape est celle de la « Psychopédagogie perceptive ». Elle a permis d’intégrer les fonctions cognitives comme l'attention, la mémoire, l'apprentissage, l'intention, la perception, l'empathie et la pensée (thèmes intéressants pour la population d’enfants que je suis, tant au niveau médical que dans mon cabinet de praticienne). Puis la pédagogie, avec cette notion capitale : comment « apprendre de son corps ». Et enfin les entretiens verbaux, rendant possible une prise en charge plus globale de l’enfant.

La Psychopédagogie perceptive13, telle qu’elle est définie par D.Bois, s’adresse prioritairement à l’adulte. Je me suis demandée avec quels ajustements, à partir de quelles connaissances nouvelles, il devenait possible de pratiquer cette méthode auprès des enfants. Se posait également la question de la façon dont les enfants peuvent prendre conscience de l’expérience proposée en SPP.

Je l'ai dit en début d'introduction, il y a donc peu d’écrits sur l’enfant et l'accompagnement en SPP, d’où l’intérêt de faire ma recherche sur ce thème.

Ce qui apparaît dans les écrits spécifiques sur la SPP et les enfants est plutôt l’absence de problème quand il s'agit d'appliquer l’outil de la SPP auprès de cette population (voir les travaux de P. Rosier, T. Lebègue et A. Borek, ainsi que l’ouvrage d’E. Berger sur la SPP édité en 2006 : La somato-psychopédagogie, ou comment se former à l’intelligence du corps). A l’opposé, de nombreux praticiens ont pu nous verbaliser combien ils pouvaient se retrouver, parfois, en difficulté avec l’enfant. Il y a donc une contradiction entre ces points de vue. Notre recherche tentera de la résoudre. Rappelons ici que : « le rôle du chercheur est aussi de mettre

en doute ce qu’on tient pour vrai » (Jean Crête, 2002, p. 220)… et ainsi d'étendre le domaine du connu. Soulignons que, pour J. Chevrier : « Une recherche sera jugée pertinente dans la

mesure où l’on réussira à ‘établir un rapport solide entre le déjà connu et ce qui était jusqu’alors inconnu’14, que ce soit pour le prolonger ou pour s’opposer. » (2002, p. 54).

2.6. Question de recherche

13Nous avons déjà proposé une définition dans l’annexe 2 14H. Selye,

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L’objet de ma recherche est d’étudier une adaptation pratique de la SPP auprès des enfants.

Deux problèmes apparaissent dans ma recherche :

- Je viens de décrire une contradiction : certains praticiens dont moi-même appliquent facilement cette méthode auprès des enfants. Par contre, d’autres praticiens m’ont confié leurs difficultés. Je souhaite donc, dans la posture de praticien-chercheur, analyser avec du reculma pratique et celle d’autres collègues de la SPP qui travaillent aussi avec des enfants.

- Cette méthode est enseignée et définie pour accompagner des adultes et je me demande si les principes et les concepts conçus par D. Bois sont valables dès lors qu’il s’agit d’enfants.

Ce qui nous amène à formuler notre question de recherche :

En quoi et comment la somato-psychopédagogie est-elle adaptée à l’enfant ?

Tout thérapeute recevant des enfants est confronté à des difficultés inhérentes à l’enfant.

La problématique de cette recherche est de découvrir et de comprendre ce que vivent et disent les praticiens sur leur expérience en SPP auprès des enfants.

Des sous-questions émergent :

- Faut-il définir d’autres concepts en SPP spécifiques pour l’enfant ? Pour cela, il me faut étudier et décrire les fondements théoriques de la Psychopédagogie perceptive définie par D. Bois.

- Y a-t-il un savoir-être spécifique pour l'accompagnement de l’enfant ? Comment se situent les praticiens dans le lien à l’enfant ? Quelles sont les conditions qui favorisent la relation avec les enfants ? Y a-t-il une qualité spécifique à avoir dès lors qu’on les accompagne ? Je définirai le mode de rapport propre à la SPP, qui sera comparé avec d’autres théories.

- Comment cette pratique s’articule-t-elle avec d’autres approches centrées sur l’enfant ?

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les niveaux de développement et de communication sont très différents du bébé à l’adolescent, le champ de pratique est toujours le même : la relation au corps. Elle sera envisagée dans le chapitre « Cadre Théorique » et confrontée à d’autres auteurs comme Julian Ajuriaguerra, Henri Wallon, Bernard Aucouturier, Suzanne Robert-Ouvray ou André Bullinger.

Ma pratique a spontanément inclus des propositions de type ludique. Pour cela, je dois préciser la notion du « jeu », et j’ai choisi d’étudier les propositions qu’avancent d’autres thérapeutes, et en particulier D. W. Winnicott : « Ce qui m’importe avant tout, c’est de

montrer que jouer c’est une expérience : toujours une expérience créative, une expérience qui se situe dans le continuum espace-temps, une forme fondamentale de la vie. ». (1975, p. 71)

À l'arrivée, ces questionnements structurent une réflexion théorique en cinq axes :

- La Psychopédagogie perceptive

- La notion d’expérience issue de la pratique, c’est à dire la praxéologie

- La place du corps

- L’utilisation d’outils spécifiques, le jeu par exemple

- Le rapport à l’enfant

Sur le plan méthodologique, comment recueillir le savoir-faire des praticiens ? Je choisirai de m'appuyer ici sur la praxéologie ou l’épistémologie de la pratique, comme l’explique D. A. Schön : « L’efficacité de l’instructeur comme entraîneur dépend de sa capacité à

interroger sa propre pratique, de sa capacité à se demander ce qu’il est exactement en train

de faire et qui rend compte de sa capacité à faire ou bien encore, comment il peut décrire ou démontrer de la meilleure façon qui soit ce qu’il fait, de telle manière qu’il puisse adhérer le

mieux possible au mode de compréhension ou d’apprentissage par l’action de l’étudiant. » (1996, p. 220)

Notre méthodologie de recueil de données comprendra :

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- un questionnaire envoyé à des praticiens en SPP, dont nous ne savons pas a priori s'ils accompagnent des enfants.

2.7. Objectifs de recherche

Le fait d’interroger des professionnels en SPP, et particulièrement des experts ayant l’expérience d’enfants, devrait faire cheminer les connaissances sur la SPP et l’enfant. L’objectif de ma recherche est donc de faire avancer ma pratique professionnelle en l’évaluant (d’où l’idée de me faire interroger), et de l’enrichir par ce que je vais apprendre de mes collègues.

Mes objectifs de recherche peuvent se formuler ainsi :

- Répertorier les points spécifiques de la SPP appliquée à l’enfant ;

- Dégager des principes théoriques et pratiques qui pourraient permettre à des non-experts de travailler auprès d’enfants ;

- Rechercher s’il existe des critères du Sensible propres à l’enfant et une éventuelle influence de l'âge ;

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DEUXIEME PARTIE : CADRE THEORIQUE

CHAPITRE 3 : CADRE THEORIQUE

3.1. Introduction

Dans le chapitre précédent, nous avons présenté notre thème de recherche, sur l’application de la SPP à l’enfant. Ici, nous devons développer la discipline fondamentale à laquelle elle se rattache, la Psychopédagogie perceptive, éclaircir ce qu’elle est et en expliquer les concepts. Comme le précise F. P. Gingras, « Pour éviter les malentendus, toute théorie doit donc définir avec précision ses concepts. » (Gingras, 2002, p. 106).

Puis, il nous faudra définir le sens précis de termes utilisés comme celui de « l’expérience extra-quotidienne », le mouvement interne et le Sensible. En effet, toute méthode possède son « jargon » propre avec des significations bien spécifiques.

Nous avons choisi, comme « posture de départ », comme l’appelle Pierre Paillé (2008, p. 78), les« référents ». « Ce sont des savoirs auxquels le chercheur se réfère », pour nous, qui sont connus par la Psychopédagogie perceptive chez l’adulte, et que nous avons issus de l’analyse de nos données. Ils sont de même des « repères (ils le guident en tant que repères), des leviers

(il s’en sert pour hisser une observation du terrain à un niveau théorique) et des ressources

diverses (il va en recherche-terrain avec des ressources). » (Ibid., p. 79).

Notre objectif de recherche est, en effet, de dégager des points spécifiques de la Psychopédagogie perceptive applicables à l’enfant ou, si besoin, de créer des concepts nouveaux issus de notre recherche, « La théorie crée la capacité d’imaginer des explications. » (Ibid., p. 104)

Pour notre autre objectif, décrire la pratique, c'est-à-dire comment font les praticiens en SPP auprès des enfants, il nous faudra aborder les concepts de la praxéologie (ou épistémologie de la pratique).

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Pendant tout le déroulement de cette présentation propre à la Psychopédagogie perceptive, nous l’enrichirons d’autres points de vue. «Le chercheur peut également compter sur la

recherche de nouveaux référents en cours d’enquête, voire après que l’analyse des données empiriques a eu lieu, optant ainsi pour une stratégie de mise en perspective théorique.» (Paillé et Mucchielli, 2008, pp. 79-80).

3.2. Définitions

3.2.1. La Psychopédagogie perceptive

Comment D. Bois définit-il aujourd’hui la Psychopédagogie perceptive ?15

Il la présente comme une « discipline fondamentale en prolongement de la Somato-Psychopédagogie qui représente une discipline appliquée » (2009 c, p. 14).. Il précise, dans sa thèse : « Son originalité repose sur une théorie qui s’est construite à partir de l’expérience des pratiques corporelles et des techniques du corps qui font intervenir la dimension du Sensible. » (2007 a, p. 25).

Avant tout, il faut préciser que la genèse de la PPP provient de tous les travaux de D. Bois depuis les débuts de la fasciathérapie et a été inspirée de certains concepts de la Psychopédagogie curative, enseignée à l’Université Moderne de Lisbonne. « En guise de première ébauche, avançons que la Psychopédagogie perceptive propose des modalités

d’accompagnement des personnes ou des groupes qui recrutent des cadres d’expérience centrés sur le rapport au corps et au mouvement, avec le projet de favoriser l’enrichissement

de la dimension perceptive, mais aussi cognitive et comportementale des interactions que la personne déploie avec elle-même, avec les autres et avec le monde qui l’entoure. » (Bois, 2006 c).

Tout d’abord, précisons avec Philippe Rosier ce terme de « pédagogie » : « Nous nous situons

donc dans le domaine de la pédagogie, parce que notre objectif premier est celui d’apprendre

au sujet à apprendre de ses expériences de vie. L’apprentissage est donc une donnée centrale

dans notre psychopédagogie. » (2006, p. 77). Nous dirons ici, qu’un somato -psychopédagogue est un enseignant qui répond aux critères d’André Giordan : « Il s’affirme éveilleur » (1998, p. 214), il éveille le sujet à une perception nouvelle de son corps, « au Sensible », il l’accompagne par différents outils, manuel, gestuel…« L’enseignant est d’abord

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31

là pour échanger » (Ibid. Giordan, p. 215), mais dans un type de rapport précis (voir plus loin, le chapitre sur la réciprocité actuante). Il est un « transmetteur de désir » : « L’enseignant se

doit toujours d’avoir un ‘plus’ à apporter à l’élève : une expérience, (on discutera sur ce qu’est une expérience), une situation de dépassement, de simples renseignements pratiques,

sinon une culture. Ce qu’il doit surtout ne pas se priver de transmettre, c’est un désir. » (Ibid., p. 217). Enfin, « Pour accrocher les élèves, par exemple, il s’agit d’évoquer leurs problèmes », (Ibid., p. 218), le pédagogue en PPP n’apporte pas la solution au problème mais amène une information à laquelle l'élève n’a pas accès sans notre intervention c’est ce qu’on appelle « l’information manquante, information qui permet à l’homme d’amorcer un processus de transformation. » (Rosier, 2006, p. 75)

Il s’agit d’une pédagogie différenciée qui part du principe de l’adaptation cas par cas. D. Bois entrevoit lors d’un cours sur la PPP, en 2003, cette pédagogie différenciée plutôt dans un rapport individuel : « c’est admettre l’idée que chaque élève mais également que chaque groupe est un cas particulier et donc la stratégie d’enseignement ne va pas être la même d’un

groupe à un autre groupe » (Bois, 2003).

D. Bois utilise aussi la notion de potentiel : potentiel qui sommeille, qui n’est pas utilisé par l’élève car celui-ci n’est pas sollicité par une médiation corporelle.16 D. Bois cherche à respecter le rythme d’apprentissage qui est propre à chacun : «Le but de la pédagogie est

d’accompagner une personne en respectant le processus naturel de celle-ci, et en potentialisant toutes les qualités déjà en place. » (Bois, 2007 a, p. 88).

Il repère une stratégie, qui est très connue en Sciences de l’Education, (la théorie de Vitgovsky): « stratégie d’acquisition performante, la personne va rester dans la production,

dans la forme qui lui procure la production la plus grande en plaisir […]. Il y a toujours un moyen d’aller, de partir de ce point-là pour aller vers un autre point. […]Toujours partir du

point fort pour aller vers des points plus faibles. » (Ibid., p. 88)

Comme nous l’avons dit dans le chapitre 2, nous avons de suite appliqué « spontanément » la PPP auprès des enfants avec comme référence théorique notre formation auprès de D. Bois et aussi, nos références médicales. Ainsi, le fait de suivre son enseignement du « Sensible »

16La notion de potentialité sera reprise et détaillée dans le concept de la transformation

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depuis de nombreuses années nous a évidemment influencé, il nous a appris à analyser notre pratique, à la remettre en question, à nous aider à exprimer notre potentialité et à découvrir le lieu de notre créativité. Son enseignement avait toujours la particularité d’amener dans ses cours, autant pratiques que théoriques, une composante de nouveauté, voire d’imprévu.

« C’est à pouvoir rencontrer l’imprévu qu’il faut être préparé, et non à tout prévoir. » dit Georges Favez17.En effet, un des axiomes de la méthode est : « c’est à travers la nouveauté

que l’on apprend le plus » (Bois, 2006 c)

L’objectif de ce mémoire répond à ce besoin de décrire ce savoir-faire et à cette envie de modéliser cette pratique auprès des enfants.

Enfin, une dernière donnée essentielle, en Psychopédagogie, est la posture de pédagogue et de thérapeute : « Notre champ disciplinaire est celui des Sciences pédagogiques de la santé. Nous sommes à la fois pédagogues et thérapeutes, c'est-à-dire que nous réalisons des soins18 et en ce sens nous sommes des praticiens de la santé, nous avons une action directe sur la douleur, à travers des gestes techniques et un savoir-faire thérapeutique. Et puis nous sommes des pédagogues car nous invitons la personne à prendre soin d’elle. » (Bois, 2006 c). Ainsi, « l’aspect curatif n’est pas la psychologie mais la pédagogie » (Bois, 2003). Nous verrons comment cette notion est abordée en pratique, dans l’analyse de nos données et tout particulièrement avec la participante Laura.

Il s’agit d’une pédagogie qui demande un travail personnel, sur soi, sur sa façon d’être. En Psychopédagogie perceptive, la pédagogie est inédite car portant sur le rapport au Sensible : « La pédagogie du Sensible est donc centrée non seulement sur la personne, mais aussi sur le rapport que la personne instaure avec elle-même. Il ne s’agit pas de développer uniquement des degrés de conscience sur ou à propos de quelque chose, mais de développer une présence

à soi au sein d’une action. » (Bois, 2009 a, p. 26). Nous verrons que la notion de rapport fait également partie du paradigme du Sensible.

C’est l’objet de notre travail de recherche, de définir quelle pédagogie est utilisée auprès des enfants.

17Favez G.,

De la contestation, 1958, cité par Golse (2001). Du corps à la pensée. Le fil rouge. Vendôme, PUF.

Dans page d’avant garde

(34)

33

3.2.2. L’expérience extra-quotidienne

3.2.2.1. Définition proprement dite

Tout d’abord, dans le champ du Sensible, il s’agit d’une expérience, nous l’avons déjà située, corporelle. L’interlocuteur est le corps, et le sujet va être sollicité dans une tâche de perception de soi et aussi de son être en devenir.

De nombreux écrits ont déjà précisé le terme « extra-quotidien » (Bois, 2001, p. 35 ; Berger, 2006, p. 37, pp. 140-141, p. 176 ; Bois, 2007 a, p. 55, pp. 75-76, p. 336 ; Bois et Berger, 2007 c, p. 28, p. 29 ; Laemmlin-Cencig, 2007 ; Bois, 2009 d, p. 17).

Expliquons brièvement cette appellation : comme cette expérience se déroule en dehors des conditions quotidiennes, habituelles, on la désigne par extra -quotidienne, elle se situe dans la temporalité de l’immédiateté.

3.2.2.2. Pourquoi l’utiliser ? Quand et comment se met-elle en place ?

- A la question pourquoi l’utiliser, la réponse est, pour parvenir à apprendre en temps direct : « Nous considérons qu’une personne mise dans une situation extra -quotidienne peut saisir de la connaissance en temps réel et aucune technique de

rappel ne pourra reproduire la richesse des informations produites dans l’expérience immédiate. Il y a toujours une déperdition de l’information avec le temps. En revanche, revisiter l’expérience immédiate, concrète, en conservant la richesse des

informations captées dans l’instant permet de tirer davantage de sens de son expérience, par le recul pris par rapport l’expérience. » (Bois, 2006 c).

Quel est l’intérêt pour l’enfant ? P. Rosier explique : «Il ne s’agit pas de désapprendre des

stratégies ou des fonctionnements perdants, mais de mettre d’emblée l’enfant dans une

situation extra-quotidienne, nouvelle pour lui où il ne peut pas utiliser ses anciennes stratégies perdantes. » (2006, p. 70).

(35)

34

André Giordan, « L’on n’apprend que ce qui nous touche ou nous accroche » (1998, p. 186), ce qui nous semble d’autant plus pertinent quand il s’agit d’un enfant. Autrement dit, il s’agit d’interpeller la motivation de l’enfant que Giordan compare «à une force, à une pulsion, à

une tension et permet le déclenchement d’une action » (Ibid., p. 100).

En définitive, c’est pour avoir accès à un ressenti qui apprend, qui porte un sens, et qui permet de découvrir plus que les « potentialités de l’être humain » mais « les conditions

d’accomplissement de l’être humain » (Bois, 2009 a, p. 26).

- A la question quand la mettre en place ? Dans quatre grands types de situation, le toucher manuel, le mouvement gestuel, l’introspection sensorielle et l’entretien verbal dit à médiation corporelle.

- A la question comment la mettre en place ? Avec une présence à soi singulière, « Les travaux de D. Bois et de ses collaborateurs nous enseignent avec virtuosité une posture de l'attention dans une présence à soi, à l'autre et au monde, une forme d'attention perceptive qui permet d'éduquer et d'enrichir le rapport au monde et à la réalité. » (Marie Beauchesne, 2008, p. 4-5). Cette présence à soi est une sorte de disponibilité, qui s’installe grâce à une intention et une attention bien particulière. C’est une tâche difficile, car cette dernière peut paraître se révéler spontanément, « ce

n’est plus seulement l’attention qui se pose sur un objet à percevoir mais c’est toute une émergence de phénomènes qui attire l’attention du sujet qui pénètre l’expérience. Cette forme d’attention, nous l’appelons l’attentionnalité: un ‘ laisser venir ‘ à la

conscience des contenus de vécu et de leur signification. C’est à partir de cette attentionnalité que s’instaure une relation signifiante entre la sensation et sa signification pour la personne qui la vit. » (Bois, 2009 a, p. 298). Faut-il le même type de présence ou faut-il en changer quand il s’agit d’un enfant ? Quelles stratégies faut-il utiliser pour toucher, intéresser l’enfant, afin qu’il puisse lui aussi poser son attention sur la perception de son corps ?

Comment cela fonctionne-t-il ? Eve Berger explique dans sa thèse : « Les conditions

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Tableau 1  : Comparaison de l’épistémologie compréhensive et l’épistémologie du Sensible
Tableau 2 : Comparaison de la posture dans la recherche compréhensive et dans le paradigme  du Sensible
Tableau 3 : Premier ensemble thématique saillant de Marie, simplifié
Tableau 4 : Arbre thématique simplifié de Marie
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Referências

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