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Le ”Nouveau cinéma latino-américain” : un projet de développement cinématographique sous-continental

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Academic year: 2021

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(1)Le ”Nouveau cinéma latino-américain” : un projet de développement cinématographique sous-continental Ignacio del Valle Davila. To cite this version: Ignacio del Valle Davila. Le ”Nouveau cinéma latino-américain” : un projet de développement cinématographique sous-continental. Musique, musicologie et arts de la scène. Université Toulouse le Mirail - Toulouse II, 2012. Français. �NNT : 2012TOU20078�. �tel-00782109�. HAL Id: tel-00782109 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00782109 Submitted on 29 Jan 2013. HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés..

(2) 5)µ4& &OWVFEFMPCUFOUJPOEV. %0$503"5%&-6/*7&34*5²%&506-064& %ÏMJWSÏQBS Université Toulouse 2 Le Mirail (UT2 Le Mirail) $PUVUFMMFJOUFSOBUJPOBMFBWFD. 1SÏTFOUÏFFUTPVUFOVFQBS. Ignacio DEL VALLE DAVILA -F jeudi 27 septembre 2012. 5Jtre : Le "Nouveau cinéma latino-américain" : un projet de développement  cinématographique sous-continental  ED ALLPH@ : Cinéma. 6OJUÏEFSFDIFSDIF Laboratoire de recherche en audiovisuel. %JSFDUFVS T EFʾÒTF Monsieur le professeur Guy CHAPOUILLIE 3BQQPSUFVST Mme Nancy BERTHIER, Professeur des universités, Paris IV M. Gérard LEBLANC, Professeur des Universités, Paris III "VUSF T NFNCSF T EVKVSZ Mme Nancy BERTHIER, Professeur des universités, Paris IV M. Paul LACOSTE, Professeur des Universités, Toulouse II M. Gérard LEBLANC, Professeur des Universités, Paris III.

(3) 1.

(4) UNIVERSITÉ TOULOUSE II – LE MIRAIL ÉCOLE DOCTORALE ALLPH@ LARA – ESAV. Thèse de Doctorat Cinéma Ignacio DEL VALLE DÁVILA. Le « Nouveau cinéma latino-américain » : Un projet de développement cinématographique sous-continental. Thèse dirigée par Monsieur le Professeur Guy CHAPOUILLIÉ Soutenue le 27 septembre 2012. Jury : Mme Nancy BERTHIER, Professeur des Universités, Paris IV M. Paul LACOSTE, Professeur des Universités, Toulouse II M. Gérard LEBLANC, Professeur des Universités, Paris III. Laboratoire de Recherche en Audiovisuel (LARA), EA 4154 Université de Toulouse – Le Mirail / Maison de la Recherche / 5 Allées Antonio Machado, 31058 Toulouse CEDEX 9. 2.

(5) RÉSUMÉ Au début des années soixante ont lieu les premiers essais pour créer une alliance des expériences de rénovation cinématographique menées dans divers pays d’Amérique latine. La tentative de révolutionner les formes autonomes du cinéma fut conçue comme une contribution à la révolution sociale et politique revendiquées par les mouvements de libération latino-américains de cette époque. Notre étude est consacrée à l’analyse de ce projet de développement cinématographique, qui sera connu comme Nouveau cinéma latino-américain dès la fin des années soixante. Nous examinerons les films et les réflexions théoriques de quelques-uns des cinéastes qui adhérèrent au projet, dont l’œuvre se caractérise par un positionnement subversif au sein du champ cinématographique, face à la position hégémonique du modèle hollywoodien. À travers l’analyse des apports théoriques de ces réalisateurs et l’étude des rencontres et échanges entre eux, nous chercherons à établir les caractéristiques du concept de Nouveau cinéma latino-américain, ainsi que ses contradictions et limites. MOTS-CLÉS nouveauté,. latino-américanité,. avant-garde,. révolution, libération, décolonisation culturelle. 3. institutionnalisation. cinématographique,.

(6) ABSTRACT The first attempts to create an alliance of the cinematographic renewal experiences that were occurring in several Latin American countries, took place in the early sixties. The attempt to revolutionize the autonomous forms of the cinema was conceived as a contribution to the social and political revolution claimed by the Latin American liberation movements of the time. Our research is dedicated to the analysis of this cinematographic development project that would be known as the New Latin American Cinema since the late sixties. We will examine the films and the theoretical reflections of some of the filmmakers who adhered to the project, whose work is characterized by a subversive approach within the cinematographic field, in relation to the hegemonic position of the Hollywood model. Through the analysis of the theoretical assumptions of these filmmakers and by studying the meetings and exchanges occurred between them, we will seek to establish the characteristics of the concept of New Latin American Cinema, as well as its contradictions and limits. KEYWORDS Novelty, latin americanness, avant-garde,. institutionalization. liberation, cultural decolonization. 4. of. cinema,. revolution,.

(7) REMERCIEMENTS Je tiens tout d’abord à remercier mon directeur de thèse, M. Guy Chapouillié, de m’avoir guidé, encouragé et conseillé durant ces quatre années. Je lui suis également reconnaissant pour sa disponibilité et je lui adresse toute ma gratitude. Je remercie également Nancy Berthier, Paul Lacoste et Gérard Leblanc pour avoir accepté de faire partie de mon jury de thèse. J’aimerais remercier la Comisión Nacional de Ciencia y Tecnología du Chili (CONICYT) de m’avoir accordé la bourse qui m’a permis de mener à bout cette thèse ainsi que l’Institut des Amériques grâce auquel j’ai bénéficié d’une aide à la recherche pour faire un séjour à Cuba. J’exprime ma profonde gratitude à Luciano Castillo pour l’hospitalité dont il a fait preuve envers moi à Cuba, pour la gentillesse qu’il a manifestée à mon égard, et pour tous ses conseils. Mes remerciements vont également au personnel de la Cinémathèque de l’ICAIC, de la Médiathèque de la L’École internationale de cinéma et de télévision de San Antonio de los Baños (EICTV), de la Médiathèque de L’École supérieure d’audiovisuel de Toulouse (ESAV) et de la Cinémathèque nationale du Chili. Je tiens à exprimer ma reconnaissance à Daniel Díaz Torres, Octavio Getino, Lázara Herrera, Miguel Littin, Manuel Pérez et José Román qui m’ont accordé leur temps et fourni de précieuses informations. Je voudrais remercier de nombreux chercheurs pour les discussions et les échanges que j’ai eu la chance d’avoir avec eux et pour leurs suggestions, notamment Jonathan Buchsbaum, Claire Chatelet, Olivier Compagnon, Pablo Corro, Joel del Río, Juan Antonio García Borrero, Magali Kabous, Paul Lacoste, Diana Paladino, Azahara Palomeque Recio, Amanda Rueda et Mariana Martins Villaça. J’adresse mes remerciements à Alessandra Doronzo, Vanessa Gordot-Finestre et Emmanuelle Charrier pour leurs relectures attentives, leurs corrections et leurs traductions. Je remercie aussi Carolina Amaral de Aguiar pour son aide précieuse, son soutien et ses conseils.. 5.

(8) Pour leurs encouragements et leur assistance aussi bien matérielle que morale et pour leur soutien dans les moments difficiles je remercie de tout mon cœur ma mère et le reste de la famille, ainsi qu’Alba Paz, David Alonso, Francisca Lucero, Pablo Vergara, Javier Núñez, Mauricio Tunaroza, Rebeca Ortega, Julia San Martín, Claudia Radojkovic, Claire Spooner, Mohsen Haffani, Víctor Fenner, Gonzalo Layseca, César Lara, Marie Chèvre, Maayan Goldsmith, Eva Morsch Kihn et María José Bello. Enfin, ces remerciements ne seraient pas complets sans mentionner l’Association Rencontres Cinémas d’Amérique latine de Toulouse. J’adresse un grand merci aux salariés, stagiaires, bénévoles et membres de l’association qui m’ont transmis leur amour envers les cinémas latino-américains.. 6.

(9) TABLE DE MATIÈRES RÉSUMÉ………………………………………………………………………………………3 MOTS-CLÉS ............................................................................................................................ 3 ABSTRACT .............................................................................................................................. 4 KEYWORDS ............................................................................................................................ 4 REMERCIEMENTS ................................................................................................................ 5 TABLE DE MATIÈRES ......................................................................................................... 7 INTRODUCTION .................................................................................................................. 14 PREMIÈRE PARTIE : LE POSITIONNEMENT DU NOUVEAU CINÉMA LATINOAMÉRICAIN DANS LE CHAMP CINÉMATOGRAPHIQUE…………………………35 PREMIER CHAPITRE : LA NOUVEAUTÉ ET LA LATINO-AMÉRICANITÉ DANS LE PROJET DU NOUVEAU CINÉMA LATINO-AMÉRICAIN……………………….36 A) L’Amérique latine dans les années soixante et soixante-dix : de l’émergence à la crise de l’utopie révolutionnaire………………………………………………………………………39 B) La « nouveauté » dans le Nouveau cinéma latino-américain…………………….……….50 1. Nouveau cinéma, Nouveau monde…………...…………………………………….50 2. Les nouveaux cinémas………………………….….………………………………55 3. Le sentiment de nouveauté dans les cinémas latino-américains………….………59 4. Congrès et festivals de cinéma latino-américain : du concept de « cinéma indépendant » au « nouveau cinéma »…..……………………………………………65 C) L’unité dans le Nouveau cinéma latino-américain………………………………………..76 1. La quête identitaire et la recherche de la spécificité sous-continentale.................... 76 2. L’évolution du concept d’unité latino-américaine au fil des rencontres de réalisateurs ................................................................................................................... .80 3. Le Nouveau cinéma latino-américain avant le projet sous-continental.................... 95. 7.

(10) DEUXIÈME CHAPITRE : LA QUESTION DE L’AVANT-GARDE AU SEIN DU NOUVEAU CINÉMA LATINO-AMÉRICAIN ................................................................. .99 A) Avant-garde et champ cinématographique………………………………………………..99 1. Nommer l’avant-garde au cinéma ........................................................................ 101 2. Les rapports entre l’avant-garde et le Nouveau cinéma latino-américain : Une influence douteuse.................................................................................................... 110 3. Les « résistances » du Nouveau cinéma latino-américain envers le concept d’avant-garde ........................................................................................................... 114 B) Dziga Vertov et le Nouveau cinéma latino-américain…..……………………………….126 1. L’accès à l’œuvre de Vertov en Amérique latine ................................................ 128 2. La quête du nouveau ............................................................................................ 132 3. L’homme nouveau d’une société nouvelle .......................................................... 136 4. La chambre à douze murs .................................................................................... 142 5. L’autoréflexion..................................................................................................... 148 DEUXIÈME PARTIE : FILMER LA NATION, FILMER L’AMÉRIQUE-LATINE : VERS UN PROJET CINÉMATOGRAPHIQUE SOUS-CONTINENTAL ................... 153 CHAPITRE III : LES PREMIERS PAS DU CINÉMA RÉVOLUTIONNAIRE CUBAIN : DE LA CENTRALISATION DU CINÉMA À L’OUVERTURE LATINOAMÉRICAINE ..................................................................................................................... 154 A) L’établissement d’un modèle cinématographique cubain. ............................................. 154. 1. Art et Industrie : l’ICAIC et la centralisation du cinéma à Cuba ......................... 157 1.1) La loi nº 169 ..................................................................................................... 157 1.2) La concurrence avec d’autres agents pour le contrôle de la production .......... 162 2. Construire une voix/voie cubaine : des échanges, des héritages et des négociations avec d’autres traditions cinématographiques ........................................................... 168 3. L’ouverture vers l’Amérique latine...................................................................... 175 B)Santiago Álvarez et le Noticiero ICAIC Latinoamericano : révolution du cinéma et cinéma de la Révolution ..................................................................................................................... 180 8.

(11) 1. Les origines du Noticiero ICAIC Latinoamericano ............................................. 180 2. « Journalisme cinématographique » et critique de l’ « objectivité » ................... 187 3. Le montage comme recherche de formes nouvelles ............................................ 191 4. Le rayonnement latino-américain du Noticiero ICAIC et des documentaires de Santiago Álvarez ..................................................................................................... .207 CHAPITRE IV : LA « CLÉ » DE L’ÉCOLE DOCUMENTAIRE DE SANTA FE : VERS UN CINÉMA NATIONAL, RÉALISTE ET CRITIQUE .................................... 211 A) Le cinéma argentin pendant le « développementalisme » ................................................ 213 B) L’institutionnalisation de l’enseignement du cinéma : l’École documentaire de Santa Fe. ................................................................................................................................................ 220 1. La « clé » néoréaliste et le Centre expérimental de cinématographie de Rome .. 220 2. Les premières œuvres de l’École documentaire de Santa Fe : dépassement du concept d’auteur et prise de conscience du spectateur ............................................. 228 2.1) Le « fotodocumental »...................................................................................... 228 2.2) Tire dié et le concept de « film-école » ............................................................ 230 2.3) Tire dié et le rôle social du cinéma .................................................................. 233 2.4) Les inondés, premier long-métrage de l’École ................................................. 239 3. Problèmes de distribution et censure ................................................................... 243 C) Bilan de l’expérience de Santa Fe………………………………………………………..247 1. Cinéma national, réaliste, critique et populaire : l’élaboration d’une théorie cinématographique ................................................................................................... 247 2. Le départ de Birri et l’évolution de l’École ......................................................... 256 CHAPITRE V : L’ARTICULATION DES DISCOURS NATIONALISTE ET LATINOAMÉRICANISTE DANS L’ŒUVRE DE GLAUBER ROCHA ..................................... 260 A) Cinema novo et nationalisme culturel…………………………………………………...263 1. L’émergence du Cinema novo ............................................................................. 263 2. Rocha et le modèle de développement cinématographique national ................... 273. 9.

(12) 2.1) Une politique des auteurs brésilienne............................................................... 273 2.2) Anthropophagie culturelle et réalisme critique ................................................ 278 B) Amérique en transe………………………………………………………………………288 1. Les facteurs historiques du développement de l’intérêt latino-américaniste ....... 288 2. Latino-américanisme et Esthétique de la faim ..................................................... 294 3. Le diptyque inachevé : Terre en transe et América nuestra ................................ 303 3.1) Terre en transe ................................................................................................. 304 3.2) América nuestra ............................................................................................... 312 TROISIÈME PARTIE : L’ÉCRAN RÉVOLUTIONNÉ : L’ÉCLOSION DU NOUVEAU CINÉMA LATINO-AMÉRICAIN ..................................................................................... 316 CHAPITRE VI: LE REGARD ET L’ACTION DE L’ « AUTRE » : LE CINÉMA DE DÉCOLONISATION CULTURELLE DU GROUPE CINE LIBERACIÓN ................. 317 A) Le brasier cinématographique………………………………………………………… ...317 1. Le contexte idéologique et politique .................................................................... 318 1.1) Le péronisme .................................................................................................... 318 1.2) Le néocolonialisme et le rôle des intellectuels dans la « libération » ............. 324 2. L’Heure des brasiers ............................................................................................ 334 2.1) La réalisation du film et la naissance du « cinéma-guérilla » .......................... 334 2.2) Le film-essai ..................................................................................................... 341 2.3) Les versions du film ......................................................................................... 346 2.4) L’œuvre inachevée et le Cinéma-Acte ............................................................. 350 2.5) La diffusion de L’Heure des brasiers en Argentine et les polémiques internationales .......................................................................................................... 354 B) Vers un troisième cinéma : du manifeste au palimpseste …………….………………….361 1. Les versions du manifeste .................................................................................... 363 1.1) L’édition de Tricontinental et la réédition de Cine Club ................................. 363 10.

(13) 1.2) Cinéma de la décolonisation ............................................................................ 366 2. Les trois cinémas : différentes structures et emphases ........................................ 369 3. Le passage du deuxième au troisième cinéma : les différences entre les versions du manifeste .................................................................................................................. 376 4. Vers un troisième cinéma latino-américain ......................................................... 381 CHAPITRE VII : L’AVENTURE D’UN CINÉMA IMPARFAIT ................................. 386 A) Les Aventures de Juan Quin Quin……………………………………….……………....388 1. La rupture néoréaliste.......................................................................................... .388 2. Le héros « majeur » dans le « genre mineur » ..................................................... 390 3. Révolution des formes cinématographiques ........................................................ 393 B) Por un cine imperfecto……………………………………………………………….. .. 402 1. Au-delà de la technique........................................................................................ 402 2. L’imperfection, antichambre de l’avènement d’un peuple-créateur .................... 414 3. Le cinéma du « moi » imparfait ........................................................................... 424 4. L’évolution des propositions de García-Espinosa : de cinéma « imparfait » à cinéma pour le grand public……………………………………………………..431 CHAPITRE VIII : LE CINÉMA CHILIEN PENDANT L’UNITÉ POPULAIRE ....... 434 A) Le Manifeste des cinéastes de l’Unité Populaire ................................................ 437 1. La polémique autour de la représentativité du texte ............................................ 437 2. Le Manifeste des cinéastes de l’Unité populaire : une œuvre de synthèse .......... 440 B) Le développement du cinéma pendant l’Unité populaire ................................... 453 1. Le cadre juridique ................................................................................................ 453 2. À la recherche d’une politique cinématographique ............................................. 455 3. Les échanges avec les cinéastes et les cinématographies d’Amérique latine ...... 466 C. Le qui fait quoi de la révolution .......................................................................... 475 11.

(14) 1. Question posée au Camarade président ............................................................... 475 2. La première année : portrait d’un héros collectif ................................................ 480 3. La jeunesse sous l’Unité populaire : « Insolents et décoiffés » prennent la parole…… ................................................................................................................ 489 CONCLUSION ..................................................................................................................... 500 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................... 511 INDEX : ................................................................................................................................. 533 ANNEXES ............................................................................................................................. 546 ANNEXE I : INTERVIEWS ............................................................................................... 547 Interview de José Román ......................................................................................... 548 Interview de Miguel Littin ....................................................................................... 565 Interview d’Octavio Getino ..................................................................................... 587 Interview de Manuel Pérez ...................................................................................... 602 Interview de Daniel Díaz Torres ............................................................................. 619 Interview de Lázara Herrera .................................................................................... 636 ANNEXE II : PROGRAMMATION DES FESTIVALS DE VIÑA DEL MAR (1967, 1969) ET MÉRIDA (1968) ................................................................................................... 648 Premier Festival de Cinéma Latino-américain de Viña del Mar (1967) ................. 649 Première Muestra de Cinéma documentaire latino-américain de Mérida (1968) ... 654 Deuxième Festival de Cinéma Latino-américain de Viña del Mar (1969).............. 660. 12.

(15) 13.

(16) INTRODUCTION Au début des années soixante, une série de cinéastes latino-américains liés à divers courants de gauche commencèrent à chercher des rapprochements entre eux qui transcenderaient les frontières nationales. Cela se traduisit par un intérêt progressif pour atteindre une alliance entre les différentes expériences de rénovation cinématographique menées, depuis la fin de la décennie précédente, dans plusieurs pays d’Amérique latine. Ils étaient animés par l’idée commune que le développement du cinéma dans leur propre pays devait être associé au développement du cinéma du sous-continent en général. Un projet de développement cinématographique prenait forme, projet qui, sans abandonner la préoccupation pour la dimension nationale, défendait comme un fait nécessaire et fondamental l’union au niveau latino-américain. Les films et les réflexions théoriques des cinéastes engagés dans ce projet sont caractérisés par des pratiques subversives de production, distribution et exploitation recherchant des changements dans les relations de pouvoir à l’intérieur du champ cinématographique, où le modèle hollywoodien détenait une position hégémonique. Ce processus s’est accompagné d’un soutien aux mouvements de libération du Tiers Monde. Ce projet de développement cinématographique commencera à être connu comme Nuevo cine latinoamericano (Nouveau cinéma latino-américain) à la fin des années soixante. Mon intérêt pour ce phénomène s’éveilla au cours des recherches pour mon mémoire de master. Dans cette première recherche – intitulée L’évolution du discours cinématographique de Fernando Solanas : le concept du « troisième cinéma » dans l’œuvre du réalisateur – j’avais essayé d’analyser la théorie du troisième cinéma de Solanas et Getino et ses rapports complexes avec la pratique cinématographique. L’étude était restreinte aux films de Solanas – depuis les années soixante jusqu’en 2007 –, mais j’ai rapidement commencé à m’intéresser aux liens avec d’autres cinématographies d’Amérique du Sud et avec le cinéma cubain, aux effets cinématographiques du discours fortement latino-américaniste et, paradoxalement, très nationaliste du réalisateur argentin. Ce regard globalisant sur l’Amérique latine était plus ou moins partagé par d’autres cinéastes latino-américains des années soixante qui invoquaient souvent l’existence d’un Nouveau cinéma latino-américain.. 14.

(17) Le terme me semblait particulièrement singulier, voire stupéfiant, car il prétendait inclure tous les pays et les cinématographies d’un sous-continent – bien que, dans la pratique, il resta restreint à l’Argentine, au Brésil, à Cuba, au Chili et à la Bolivie ainsi que, plus tardivement, à la Colombie, le Venezuela et le Mexique. Par ailleurs, dans le cadre de ce projet, avaient été réalisés quelques-uns des premiers travaux de théorisation cinématographique menés dans des pays en voie de développement. L’une des caractéristiques principales des films et des manifestes de cette période était la négation de la valeur universelle des modèles esthétiques occidentaux, ainsi que la dénonciation et le renversement de la logique colonisateur/colonisé, civilisé/sauvage de l’approche du « Tiers Monde » par les métropoles occidentales. Cependant, ceci ne veut pas dire que leurs auteurs aient adopté une position autarcique. Les réalisateurs qui ont adhéré au projet du Nouveau cinéma latino-américain ont établi un dialogue constant avec la recherche de nouveaux codes narratifs accomplie par les cinématographies européennes à partir du néoréalisme. De surcroit l’œuvre de cinéastes comme Santiago Álvarez, Ruy Guerra, Glauber Rocha, Jorge Sanjinés et Fernando Solanas, parmi d’autres, a éveillé un véritable intérêt de la part de la critique, du public cinéphile et en général des intellectuels de gauche des métropoles occidentales. La curiosité qu’éveilla chez moi, au début, le Nouveau cinéma latino-américain venait surtout des questions suivantes : Pourquoi ce cinéma était-il nouveau ? Pourquoi était-il continental, c’est-à-dire latino-américain ? Est-il pertinent de parler d’un cinéma de dimension continentale ? Ce sont là les questions à l’origine de ce travail de recherche. Aucun concept dans l’histoire du cinéma du sous-continent n’est aussi complexe et riche, aussi ambitieux et contradictoire que le Nouveau cinéma latino-américain. On a beau essayer de dessiner les limites du concept, il s’avère toujours fuyant et insaisissable. C’est aussi là que réside sa force. Aujourd’hui ce concept est très discuté ; certains chercheurs l’accusent d’être réductionniste et volontariste. Pour Tzvi Tal, le Nouveau cinéma latino-américain est avant tout une construction artificielle de la « littérature »1, dont l’étude ne rendrait pas compte de la complexité latino-américaine et serait le reflet de « el eurocentrismo habitual en la historia del. 1. Tzvi Tal. Pantallas y Revolución, una visión comparativa del cine de liberación y el Cinema Novo. Buenos Aires : Lumiere, Université de Tel Aviv, 2005, p. 11.. 15.

(18) cine »2. Le chercheur argentino-israélien reconnaît qu’il exista des tentatives de concertation des cinéastes latino-américains des années soixante, mais il ne leur donne aucune importance : « El Proyecto continental si existió, fue más que nada de palabra, pero su investigación satisface la curiosidad colonial por lo exótico3. » Cette affirmation me paraît problématique : l’auteur qualifie d’eurocentriques les études qui s’intéressent au Nouveau cinéma latinoaméricain, mais il semble ne pas tenir compte du fait que le discours latino-américaniste animait et orientait une part significative des films, des rencontres internationales et des débats théoriques de cette période. L’étude de ces pratiques n’obéit pas à une prétendue nécessité coloniale de satisfaire le goût de l’« exotique », mais plutôt à l’intérêt académique qu’éveille un phénomène culturel qui fut revendiqué à maintes reprises par les cinéastes latino-américains eux-mêmes. L’« eurocentrisme » offre un regard simplifié et hégémonique du monde, certes, mais il n’est pas responsable de la création du terme analysé ; au contraire, le Nouveau cinéma latino-américain est le pari risqué de nombreux cinéastes du souscontinent. Une des principales difficultés de l’étude du concept qui nous occupe vient du fait que, comme nous le verrons plus loin, les premiers à réaliser des travaux théoriques sur le Nouveau cinéma latino-américain ont été les mêmes cinéastes qui faisaient partie de celui-ci. En prenant ces œuvres pour sources, le chercheur qui analyse le Nouveau cinéma latinoaméricain risque de reproduire le discours de son objet d’étude. L’absence d’une certaine distanciation a empêché les cinéastes d’évaluer ce projet sous-continental de manière critique, ce qui les a souvent entraînés à faire une apologie sans réserves du Nouveau cinéma latinoaméricain. En 1985 Fernando Birri déclarait que le Nouveau cinéma latino-américain était « el movimiento que más décadas ha resistido en la Historia del Cine y el primer movimiento continental de dicha Historia »4. Cette longévité viendrait, selon Birri, de sa capacité à. 2. « […] l’eurocentrisme habituel dans l’histoire du cinéma ». Ibidem, p. 72 (nous traduisons). « Le Projet continental, s’il exista, fut surtout en mots, mais sa recherche satisfait la curiosité coloniale pour l’exotique ». Ibid (nous traduisons). 4 « […] le mouvement qui a résisté le plus de décennies dans l’Histoire du Cinéma et le premier mouvement continental de cette Histoire en question ». Fernando Birri. « Manifiesto de los treinta años del Nuevo Cine Latinoamericano ». In Fernando Birri. Fernando Birri, por un nuevo nuevo nuevo cine latinoamericano. Madrid : Ediciones Cátedra, Filmoteca Española, 1996, p. 25 (nous traduisons). Plus tard, le cinéaste a maintenu la pertinence du terme dans divers séminaires tels que « Génesis y destino del Nuevo Cine Latinoamericano » (Genèse et destin du Nouveau cinéma latino-américain, Santa Fe, 2006) et au cours des XXXIVèmes Journées 3. 16.

(19) intégrer de nouvelles thématiques et expériences cinématographiques : « [El nuevo cine latinoamericano] incorpora los temas contemporáneos de la nueva calidad de la vida, los nuevos pétalos de la mujer, nuestras compañeras cineastas, de las minorías oprimidas social y sexualmente, del video democrático, y también la defensa de las hojas de pacífico verde que se movilizan para detener el huracán atómico5. » Cependant, nous constatons que le caractère « continental » et cette « longue vie » du « mouvement » dont parle Birri sont les conséquences d’une définition assez vague et d’une élasticité conceptuelle6 dangereuse. Les appréhensions de Narboni envers le concept de « nouveau cinéma » sont valables ici : « […] l’on sait pourtant avec quelles précautions il faut user d’un terme ambigu, incertain, peu spécifique, qui, faute de pouvoir expliquer ce qu’il désigne, ne sert le plus souvent qu’à ménager une nébuleuse incertitude7. » Paulo Antonio Paranaguá a pris des distances par rapport au Nouveau cinéma latinoaméricain, en affirmant, déjà dans les années quatre-vingt, que l’Amérique latine ne constituait un marché unitaire que pour les cinématographies dominantes – c'est-à-dire Hollywood et, dans une moindre mesure, les cinémas d’Europe occidentale. Dans ces. internationales de cinéma de Bahia (Salvador de Bahia, 2006). L’idée reste aussi présente dans le dernier livre publié de l’auteur : Fernando Birri. Soñar con los ojos abiertos. Buenos Aires : Aguilar, Altea, Taurus, Alfaguara, 2007, p. 400. (Réalisé à partir du séminaire donné au centre d’études latino-américaines de l’université de Stanford, 2001-2002.) 5 « [Le Nouveau cinéma latino-américain] intègre les thèmes contemporains de la nouvelle qualité de la vie, les nouvelles pétales des femmes, nos compagnes cinéastes, des minorités opprimées socialement et sexuellement, de la vidéo démocratique et aussi la défense des feuilles de pacifique vert qui se mobilisent pour arrêter l’ouragan atomique. » Fernado Birri. « Manifiesto de los treinta años del Nuevo Cine Latinoamericano ». op. cit., p. 25 (nous traduisons). En 2007 le chercheur cubain Rufo Caballero développait une idée semblable à celle de Birri : le Nouveau cinéma latino-américain existait toujours car il avait su se rénover tout en gardant une « attitude » envers le cinéma et les sociétés latino-américaines : « Los defensores del NCL [Nuevo Cine Latinoamericano] (institucionales o no) han tenido claro, durante todos estos años, que cuanto había que salvar era un espíritu, una vocación, una actitud frente al mundo. Por suerte, no se afanaron en prorrogar signos artísticos de este o aquel color – la epopeya o el intimismo, el coro o el protagonismo demarcado, el paisaje o el interior, el discurso o el silencio –, sino en mantener en vilo una actitud de inconformidad y un espíritu: encaremos el mundo, y desafiemos el mundo. » « Les défenseurs du NCL [Nouveau cinéma latino-américain] (institutionnels ou non) ont clairement su, pendant toutes ces années, que ce qu’il fallait conserver était un esprit, une vocation, une attitude envers le monde. Heureusement, ils ne s’efforcèrent pas de proroger des signes artistiques de telle ou telle couleur – l’épopée ou l’intimisme, le chœur ou le protagonisme déterminé, le paysage ou l’intérieur, le discours ou le silence –, mais de maintenir en éveil une attitude de non-conformisme et un esprit : affrontons le monde et défions le monde ». Rufo Caballero. « El cielo del custodio Nuevo Cine Latinoamericano, en forma de preludio. » (nous traduisons). Disponible sur : http://www.cubacine.cult.cu/revistacinecubano/digital08/centrocap13.htm (consulté le 20 mai 2012). 6 Le concept appartient à G. Sartori: « La trop grande souplesse d’une définition rend la classification impossible ». G. Sartori, cité par Cécile Vigour. La comparaison dans les sciences sociales. Paris : Éditions La Découverte, 2005, p. 144. 7 Jean Narboni. « Les trois âges ». In Antoine De Baecque (comp.), Gabrielle Lucantonio (collab.). Années 60 : Nouveaux Cinémas Nouvelle Critique. Paris : Cahiers du Cinéma, 2001, p. 147. 17.

(20) circonstances, selon l’auteur, croire à l’existence d’un cinéma latino-américain « relève de l’utopie »8. Paranaguá soutient, à ce sujet, que le Nouveau cinéma latino-américain n’existe que comme « tautologie cartésienne »9, c'est-à-dire uniquement car son existence est autoproclamée : [Le cinéaste, au Festival de La Havane] commence à y croire et en adopte l’idéologie, à défaut d’avoir pleine conscience de tous les tenants et les aboutissants. Malgré un élan de rénovation brisé et une hétérogénéité croissante, le cinéma latino-américain affirme de manière cartésienne son existence, au moins une fois par an, dans la mesure où ainsi pensent ses acteurs, ses protagonistes […] »10. L’analyse de Paranaguá est pertinente car elle annonce les limitations intrinsèques à des déclarations comme celles de Birri, que nous avons évoquées auparavant. Il faut néanmoins signaler que le Nouveau cinéma latino-américain ne se constitua pas uniquement à partir d’autoproclamations : il y eut également une série d’initiatives pratiques de la part des cinéastes qui avaient pour objectif de favoriser les échanges entre eux. Nous aborderons celles-ci en détail au cours de ce travail de recherche, mais il convient peut-être néanmoins de les mentionner brièvement ici : accords entre institutions cinématographiques, échanges de films, équipes et matériel, partage de laboratoires, coproductions et accueil par leurs pairs de cinéastes exilés. Néanmoins, la question qui guide mon travail n’est pas de déterminer s’il exista un Nouveau cinéma latino-américain. À la différence de Paranaguá et de Tal, il me semble plus approprié de se demander quelles furent les motivations, les circonstances et les enjeux qui portèrent une série de cinéastes de divers coins d’un ensemble de pays vaste et extrêmement hétérogène à proclamer l’existence d’un Nouveau cinéma latino-américain, au-delà du fait que ce projet ait atteint ou non son développement complet. Rompre avec le concept, comme le fait Paranaguá, peut avoir été nécessaire au milieu des années quatre-vingt, quand la recherche sur les cinémas d’Amérique latine était en large mesure dominée, depuis des années, par les postulats théoriques du Nouveau cinéma latino-américain. Aujourd'hui la situation est différente, vu que peu de chercheurs partagent encore ces idées. C’est pour cette raison qu’il me semble que le plus pertinent dans les circonstances actuelles n’est pas de se demander s’il 8. Paulo Antonio Paranaguá. Le cinéma en Amérique latine : le miroir éclaté, historiographie et comparatisme. Paris : L’Harmattan, 2000, p. 185. 9 Ibidem, p. 186. 10 Paulo Antonio Paranaguá. Cinema na América Latina : Longe de Deus e perto de Hollywood. Porto Alegre : L&PM, 1985, p. 91-92. Cité par Paulo Antonio Paranaguá. Ibid., p. 185.. 18.

(21) exista un Nouveau cinéma latino-américain, mais plutôt d’analyser les objectifs, stratégies, positionnements et postulats esthétiques des cinéastes qui en formèrent part. Je crois que ce n’est qu’ainsi qu’il est possible de rendre compte de l’immense complexité que renferme ce phénomène. L’idée, manifestée par certains cinéastes des années soixante, de recueillir sous le même terme des expériences cinématographiques de tout le sous-continent est tellement volontariste qu’il me semble nécessaire de l’interroger. La question que je me pose est donc la suivante : qu’il y a-t-il derrière le concept de Nouveau cinéma latino-américain ? ou, plus simplement, que désigne le Nouveau cinéma latino-américain ? Je voudrais comprendre ce qu’il englobe et ce qu’il exclut, c’est-à-dire qu’il s’agit d’essayer d’en dessiner les contours. Contours toujours problématiques. Contours qui ne seront pas nécessairement fermés, mais plutôt un sfumato. Il me semble nécessaire de rester très prudent face au réductionnisme que peut renfermer l’idée d’un cinéma commun à toute la région. En effet, l’idéal d’unité latino-américaine simplifie très souvent la diversité culturelle, politique et sociale des pays d’Amérique latine la réduisant à un seul terme. Le Nouveau cinéma latino-américain ne doit donc surtout pas servir d’alibi pour ne pas analyser les particularités nationales, les divers contextes, les différentes sensibilités esthétiques, les influences contradictoires, l’isolement relatif de beaucoup de réalisateurs de la région et leur méconnaissance des travaux de leurs pairs d’autres pays. Ce sont précisément les fissures et les fractures, les interstices, en somme, du projet que je considère être les aspects les plus intéressants pour essayer de comprendre les enjeux du Nouveau cinéma latino-américain. Pour tenter de répondre aux questions évoquées plus haut, je vais analyser quelques films réalisés par des cinéastes latino-américains entre 1958 et 1973. Mon objectif n’est pas d’écrire un dictionnaire des principaux films de l’époque – entreprise qui n’aurait aucune sens – ; je voudrais, par contre, approcher un certain nombre d’expériences cinématographiques, parfois très éloignées les unes des autres, mais qui me semblent révélatrices des nouvelles façons de concevoir le cinéma qui cohabitent et dialoguent à l’intérieur du projet sous-continental. De même, je voudrais montrer leur évolution au long des années. Je me propose d’analyser les films en tant que tels, mais aussi de les comparer entre eux, avec pour objectif de trouver d’où vient leur nouveauté – si elle existe –, d’où vient leur spécificité et quels sont les enjeux de 19.

(22) chacun. Le choix d’analyser une série précise de films est fondé sur leur exemplarité et sur leur influence dans le cadre des différentes recherches audiovisuelles menées par les réalisateurs latino-américains ; de plus, comme nous allons le voir, une bonne part d’entre eux servirent de base à des œuvres théoriques. J’ai restreint cette étude à la période allant de 1956 à 1974, c’est-à-dire aux dix-huit années écoulées entre les premières expériences de Fernando Birri à Santa Fe (Argentine) et la création du Comité de cinéastes d’Amérique latine à Caracas. Le travail théorique et pratique des cinéastes latino-américains continue après cette date, mais nombreux sont ceux qui s’exilent à cause des coups d’État qui frappent l’Amérique latine. Le Nouveau cinéma latinoaméricain perd son élan original et finit par être institutionnalisé par les autorités cubaines de l’ICAIC dans le cadre du Festival du Nouveau cinéma latino-américain (1979). Cette étude est aussi limitée en termes géographiques. Je me propose de la centrer dans un espace déterminé du sous-continent, constitué par trois pays du Cône Sud, le Brésil, l’Argentine et le Chili ainsi que par Cuba qui, malgré son éloignement par rapport aux autres pays, exerçait à ce moment-là une énorme influence politique et culturelle sur les intellectuels et la gauche de l’Amérique Latine. La tradition cinématographique de chaque pays est très différente. Le Brésil et l’Argentine sont – avec le Mexique – les plus grands producteurs de cinéma de la région, les seuls pays ayant réussi à développer des studios (précaires, certes) et exportant régulièrement leurs films au-delà de leurs frontières. Il s’agit également des pays ayant une importante production de films indépendants des studios, qui seront responsables du renouvellement des années soixante. De l’Argentine, nous analyserons les films Tire dié (Jetez dix centimes, 1960), Les inondés (1962) de Fernando Birri et L’Heure des brasiers (groupe Cine Liberación, 1968) ; du Brésil, Terre en transe (Glauber Rocha, 1967) ainsi qu’un projet inachevé sur lequel le même réalisateur travailla pendant des années et dans lequel il voulait aborder la thématique d’une révolution latino-américaine : América nuestra (Notre Amérique). Le Chili était, jusqu’à la fin des années soixante, un pays où la production cinématographique restait marginale et intermittente. Il n’y eut pas de politiques nationales conduisant à la création d’institutions d’État responsables du développement du cinéma ; pourtant la production cinématographique augmenta timidement au cours de cette période, et elle fut surtout associée à des centres de production cinématographique dépendants des universités. 20.

(23) Pendant le gouvernement de l’Unité populaire (1970-1973) il y eut des tentatives pour favoriser une production cinématographique – aux idées proches du projet révolutionnaire mis en place –, à travers la maison de production publique Chile Films. Nous étudierons trois des films produits au Chili au cours de cette période, dans lesquels la question de la « Voie chilienne vers le socialisme » est abordée selon différents points de vue : Compañero Presidente (Camarade président, Miguel Littin, 1971), La première année (Patricio Guzmán, 1972) et Descomedidos y chascones (Insolents et décoiffés, Carlos Flores del Pino, 1973). À Cuba la révolution de 1959 signifie un changement très profond pour la production cinématographique, avec la création de l’Instituto Cubano del Arte y la Industria Cinematográficos (Institut cubain de l’art et de l’industrie cinématographiques, ICAIC). Le cinéma cubain devient une référence indéniable pour tout le sous-continent tant au niveau de la pratique cinématographique que de la discussion théorique. Même si la production reste moindre qu’au Mexique, au Brésil et à l’Argentine, dès la moitié des années soixante la cinématographie cubaine exerce une influence sur le reste du continent similaire – et, parfois, plus grande – à celle des trois premiers pays. De Cuba, nous analyserons le film Les Aventures de Juan Quin Quin (Julio García-Espinosa, 1967) ainsi que les court-métrages de Santiago Àlvarez : Ciclón (Cyclone, 1963), Now ! (1965), LBJ (1968) et 79 printemps (1969). Je réaliserai, tout au long de ce travail, une analyse plus approfondie de ces cinématographies. Pour l’instant, je me suis limité à donner quelques-unes des caractéristiques de chacune d’entre elles pour montrer comment les circonstances dans lesquelles se développe le cinéma sont très différentes selon les pays, ce qui a évidemment une grande importance pour les films qui constituent le corpus de cette investigation. La période est aussi très riche en tentatives de théorisation cinématographique autochtones visant à dessiner les contours de ce que devrait être, selon leurs auteurs, le cinéma latinoaméricain. Il s’agit d’un processus jusqu’alors inédit dans les cinématographies du souscontinent, où le cinéma et son milieu avaient toujours été dépendants de la conception de celui-ci émanant d’Europe et des États-Unis. Comme nous le verrons tout au long de cette étude, certains de ces manifestes, notamment Esthétique de la faim (1965) de Glauber Rocha et Vers un troisième cinéma (1969) de Fernando Solanas et Octavio Getino, connaissent une répercussion qui dépasse les frontières latino-américaines. Ils seront, peut-être, les premiers. 21.

(24) travaux théoriques dans l’histoire du cinéma à inverser le flux nord-sud dominant dans la transmission de la pensée. Il faut souligner que ces travaux ne viennent pas du monde académique ou de la critique spécialisée : ils sont l’œuvre des réalisateurs eux-mêmes et adoptent souvent la forme de manifestes. Cette démarche de théorisation accomplie par les réalisateurs a servi de soutien écrit à leurs films. Cependant, les manifestes sont, avant tout, une manière de réfléchir à la place du cinéma dans la société de l’époque : ils mettent en question le rapport entre œuvre et public ainsi que le rôle du réalisateur, ils soulignent les liens entre politique et cinéma, ils renouvellent les appels à l’unité des réalisateurs latino-américains, ils condamnent le cinéma conçu comme simple loisir ou comme expression intime des préoccupations d’un auteur. Puisqu’il faut bouleverser le monde, le bouleversement du cinéma s’impose. Au cours de l’histoire du cinéma, il n’a pas été rare que les cinéastes développent leurs propres théories ; cependant, comme l’a mis en relief Jacques Aumont, il s’agit d’un phénomène devenu de moins en moins commun : […] il est devenu aujourd’hui étrange, voire suspect, de proposer une pensée générale et abstraite, alors même que les cinéastes, et les artistes en général, n’ont jamais autant été poussés à s’exprimer – mais plutôt pour contribuer à la médiatisation de leur travail qu’a sa compréhension. […] Après la postmodernité et avec la mondialisation, le cinéma est devenu un domaine (faussement) consensuel, où toute théorie est aussi bonne qu’une autre. Si c’est le cas, je crois d’autant plus important, voire d’autant plus urgent, de continuer à se préoccuper de ces théories élaborées par des partisans, par des cinéastes qui ne pensaient pas que toute conception du cinéma est bonne à prendre, mais défendaient la leur, et tâchaient de dire, en détail, au nom de quoi11. L’Amérique latine d’aujourd'hui ne fait pas exception par rapport aux considérations d’Aumont12. C’est pour cette raison même qu’il est intéressant d’aborder ces textes qui, par leurs prises de position radicales vont en direction opposée à la démarche actuelle et qui. 11. Jacques Aumont. Les théories des cinéastes. Paris : Armand Collins, 2011, p. 10. La dernière théorisation cinématographique réalisée par un cinéaste latino-américain à laquelle j’ai eu accès est le texte Cine Independiente dependiente (Cinéma indépendant dépendant) que le réalisateur cubain Miguel Coyula fit circuler à travers les réseaux sociaux en 2011. Le fait que Coyula soit l’un des réalisateurs latinoaméricains à s’être le plus intéressé à l’établissement d’un dialogue avec les œuvres des cinéastes cubains du Nouveau cinéma latino-américain ne semble pas une coïncidence. Son dernier film, Mémoires du développement (2010) – une adaptation du roman homonyme d’Edmundo Desnoes – reprend le personnage principal et peut être considéré comme la suite de l’histoire racontée par Tomás Gutierrez Alea dans Mémoires du sousdéveloppement (1968), également basée sur un roman au titre identique de Desnoes. 12. 22.

(25) essaient de favoriser, à un niveau théorique, une manière donnée de penser le cinéma. Il me semble que s’interroger sur l’émergence et la signification de ces manifestes s’avère utile pour cette recherche. Ces textes sont une bonne source pour comprendre les enjeux des cinéastes qui préconisèrent le Nouveau cinéma latino-américain. Mon objectif est d’établir une sorte de dialectique des manifestes entre eux, mais aussi entre manifestes et films. À mon sens, cette analyse peut éclaircir quelques caractéristiques des films que j’ai choisis pour mener cette recherche. Il faut cependant souligner que les films ne sont absolument pas une illustration des manifestes ; ce sont plutôt des manifestes à leur manière, et des œuvres complexes et ouvertes à différentes analyses et interprétations. Ils approfondissent des aspects de la théorie, mais souvent ils dépassent aussi certaines des propositions établies dans les textes, c’est-à-dire qu’ils s’émancipent de ces derniers. Je propose d’analyser ce qui unit textes et films ainsi que ce qui les éloigne. Autrement dit, je voudrais analyser les influences réciproques, mais aussi les contradictions qui peuvent exister entre eux. Les textes avec lesquels je vais travailler ont été écrits par des réalisateurs dont certains films font partie de mon corpus. Ce n’est évidement pas une coïncidence : il m’a paru intéressant de confronter les théories de ces cinéastes à leurs films. Les principaux textes que je vais analyser sont : Manifiesto de Tire dié: por un cine nacional, realista y crítico (Manifeste de Tire dié : pour un cinéma national, réaliste et critique, 1958), La Escuela documental de Santa Fe (L’École documentaire de Santa Fe, 1963) de l’Argentin Fernando Birri ; Esthétique de la faim (1965) du Brésilien Glauber Rocha ; Vers un troisième cinéma (1969) des Argentins Fernando Solanas et Octavio Getino ; Por un cine imperfecto (Pour un cinéma imparfait, 1969) du Cubain Julio García-Espinosa et le Manifeste des cinéastes de l’Unité populaire (1970), signé par un vaste groupe de cinéastes chiliens et rédigé par Miguel Littin. J’analyserai également divers textes d’Alfredo Guevara, fondateur et premier directeur de l’ICAIC. Il s’agit d’un des principaux responsables du cinéma cubain à partir de 1959 et aussi d’un des plus grands promoteurs et références du Nouveau cinéma latino-américain. Les auteurs des films et des textes théoriques que j’ai mentionnés n’appartiennent pas forcément à la même génération : le plus âgé naquit à la fin des années dix (Santiago Álvarez, 1919-1998), d’autres pendant les années vingt (Fernando Birri, 1925 ; Alfredo Guevara, 1926 ; Julio García-Espinosa, 1926) et la plupart au cours des deux décennies suivantes 23.

(26) (Octavio Getino, 1935 ; Fernando Solanas, 1936 ; Glauber Rocha, 1939-1981; Patricio Guzmán, 1941 ; Miguel Littin, 1942 ; Carlos Flores del Pino, 1944). Malgré cela, ils ont tous un point commun : la revendication du projet révolutionnaire d’intégration cinématographique latino-américaine coïncide approximativement avec le début de leur carrière. Cette revendication ne se produit néanmoins pas de manière parallèle : certains, comme Birri, Guevara et Rocha la formulent en premiers – au début sans grande précision –, d’autres y adhèrent alors que le projet avait déjà été évoqué à maintes reprises. Dans la première partie de ce travail, j’essaierai d’établir quelles sont les principales caractéristiques du projet sous-continental. Pour cela, je tenterai de déterminer quelle est sa position dans le champ cinématographique – ainsi que l’évolution de cette position – et j’analyserai le concept de Nouveau cinéma latino-américain à partir des termes qui le composent, desquels dérivent deux principes fondamentaux pour ce projet : l’idée de « nouveauté » et d’« unité latino-américaine ». Pour cela, j’étudierai principalement les rencontres de cinéastes ayant eu lieu à Viña del Mar en 1967 et 1969. Ces initiatives jouèrent un rôle fondamental dans l’évolution des théories latino-américaines, car elles servirent de un point de confluence pour les réalisateurs de la région dans le sous-continent, à la différence de la plupart des rencontres réalisées auparavant. La position de rupture à l’intérieur du champ cinématographique assumée par le projet du Nouveau cinéma latino-américain et sa revendication explicite d’une révolution, tant au sein de ce champ que dans les sociétés auxquelles il appartient, rapprochent le phénomène que j’étudie du concept d’« avant-garde ». Il me semble pertinent d’étudier le concept d’« avantgarde » et les points communs que le Nouveau cinéma latino-américain peut avoir avec lui, ainsi que ses résistances envers lui. En ce sens, pour mettre en perspective les œuvres des réalisateurs latino-américains, il me semble intéressant d’aborder les liens qui peuvent exister entre certains d’entre eux – principalement Santiago Álvarez et le groupe Cine Liberación – et le Soviétique Dziga Vertov. Bien que les conditions historiques, politiques et sociales de l’Union Soviétique et de l’Amérique latine ne soient pas les mêmes, à mon sens l’étude des travaux théoriques et des films de ce cinéaste peut être utile pour mieux comprendre le travail des réalisateurs latino-américains. Une fois établis les contours généraux du projet du Nouveau cinéma latino-américain, j’analyserai, dans les deuxième et troisième parties, les principaux apports des cinéastes qui 24.

(27) forment le corpus de ma recherche, en les situant dans leur contexte national et en essayant de présenter aussitôt les relations avec le projet sous-continental. Les dimensions nationale et latino-américaine entrent ainsi en dialogue, créant parfois des synergies et parfois des contradictions. Tant dans la deuxième que dans la troisième partie, j’approfondirai certaines questions qui auront quelquefois été abordées succinctement dans la première partie, mais dont la complexité rendait nécessaire une étude plus poussée. En ce sens, la première partie a été conçue pour établir le cadre du Nouveau cinéma latino-américain, alors que les deuxième et troisième ont pour but un approfondissement à l’intérieur de ce cadre. J’ai décidé de ranger les chapitres de manière plus ou moins chronologique : ils vont des premiers apports du début des années soixante à ceux des années soixante-dix. Cette chronologie – qui, je le répète, est loin d’être stricte – me semble la meilleure manière de montrer comment le travail théorique et les films des réalisateurs de cette période opèrent, en général, en intégrant à leurs discours ou en discutant le travail réalisé par d’autres cinéastes. Ce travail d’intégration ou de discussion est beaucoup plus évident dans les manifestes écrits vers la fin de notre période d’étude (par exemple, Le manifeste des cinéastes de l’Unité populaire, 1970) que dans les premiers manifestes (par exemple ceux de Birri) écrits à la fin des années cinquante. J’ai décidé de séparer en deux parties cette phase de l’analyse afin de regrouper dans un premier temps les apports réalisés avant le début de l’utilisation massive du terme Nouveau cinéma latino-américain (dans le festival de Viña del Mar de 1967) et, ensuite, ceux réalisés lorsque le concept et le projet sous-continental avaient déjà été plus clairement définis. Pour cela, il serait possible de dire que dans un premier temps je regroupe les cinéastes qui commencèrent à manifester un intérêt pour partager et faire converger les expériences de rénovation cinématographique latino-américaine alors que, dans un second temps, j’étudie les apports réalisés alors que ce projet avait déjà été amplement évoqué. Il ne s’agit néanmoins que d’une manière d’organier l’analyse et non d’une périodisation au sens strict. Dans cette étude, je voudrais m’éloigner de toute comparaison qui ait pour but de trouver à tout prix des similitudes entre les différents cas analysés. Comme l’a dit Marc Bloch : « Peutêtre la perception des différences est-elle, en fin de compte, l’objet le plus important »13. À ce sujet, il me semble indispensable de porter une attention particulière sur la contextualisation,. 13. Marc Bloch. « Comparaison ». Bulletin du Centre International de Synthèse, tome XLIV, juin 1930, p. 31-39.. 25.

(28) ce qui permettra de mieux connaître les processus dans lesquels s’insèrent les films et limitera la portée de la comparaison. L’objectif est, alors, d’établir un corpus qui permette de faire des analyses précises et paradigmatiques à la fois. Outre les films et les manifestes que j’ai mentionnés, je privilégierai l’utilisation d’autres sources primaires comme des rapports et des déclarations élaborés dans des rencontres internationales, accords entres différentes organisations cinématographiques, et articles et interviews apparus dans les revues de cinéma de l’époque, principalement Cine cubano et celle cubaine Primer plano. Par ailleurs, dans le cas spécifique de Vers un troisième cinéma, j’analyserai les diverses versions du manifeste ainsi qu’un document inédit du groupe Cine Liberación, intitulé Cine de la descolonización (Cinéma de la décolonisation) qui me semble apporter de nouveaux antécédents éclairant certains aspects de cette théorie. Je donnerai également une importance particulière à la relation épistolaire entre les cinéastes de cette époque. Il me semble que ce dernier aspect doit être souligné, non seulement car il a été peu étudié, mais aussi car il permet de mieux comprendre comment fut conçu et évolua dans la pratique le projet du Nouveau cinéma latino-américain. L’analyse de cette correspondance permet de se rapprocher du travail quotidien des cinéastes, éloigné de la grandiloquence souvent présente dans les écrits théoriques. Elle permet aussi d’établir les difficultés et les conflits internes auxquels ils étaient confrontés et d’approcher une série de projets qui ne purent pas être réalisés. Comme on peut le voir, mon intention est de privilégier les documents de l’époque plutôt que les analyses et les réinterprétations réalisées par la suite par les protagonistes du phénomène que j’étudie. J’essaie ainsi, autant que possible, d’éviter de me laisser mener par des discours qui parfois déforment voire mythifient le processus vécu. Néanmoins, il est parfois impossible de répondre à travers des sources de l’époque à des questions émergeant de l’étude du Nouveau cinéma latino-américain. C’est pour cette raison que j’ai aussi interviewé une série de personnes qui prirent part au projet du Nouveau cinéma latino-américain. Ce type de témoignage doit être utilisé prudemment, la mémoire ayant une forte composante subjective et le passage du temps rendant certains souvenirs imprécis. Néanmoins, l’échange avec ces acteurs est aussi enrichissant du fait des multiples pistes de recherche qu’il ouvre. J’ai interviewé : le réalisateur et chercheur argentin Octavio Getino, les Chiliens Miguel Littin et José Román, ainsi que les Cubains Manuel Pérez et Daniel Díaz Torres. J’ai également pu 26.

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