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[PENDING] L’enseignement scientifique à l’école de base,Approches didactique, anthropo-culturelle et épistémologique des curricula scientifiques de l’enseignement de base en Tunisie

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L’enseignement scientifique à l’école de base,Approches didactique, anthropo-culturelle et épistémologique des

curricula scientifiques de l’enseignement de base en Tunisie

Abdelwahab Chaoued

To cite this version:

Abdelwahab Chaoued. L’enseignement scientifique à l’école de base,Approches didactique, anthropo- culturelle et épistémologique des curricula scientifiques de l’enseignement de base en Tunisie. Educa- tion. Université Rennes 2, 2006. Français. �NNT : �. �tel-00134933v2�

(2)

U

NIVERSITE DE

R

ENNES

II – H

AUTE

B

RETAGNE ÉCOLE DOCTORALE HUMANITES ET SCIENCES DE L’HOMME

§§§

N° attribué par la bibliothèque

Thèse Thèse Thèse Thèse

Pour obtenir le grade de Docteur de l’Université de Rennes 2 en Sciences de l’éducation

L’ ENSEIGNEMENT SCIENTIFIQUE A L ’ ECOLE DE BASE

A

PPROCHES DIDACTIQUE

,

ANTHROPO

-

CULTURELLE ET EPISTEMOLOGIQUE DES CURRICULA SCIENTIFIQUES DE L

ENSEIGNEMENT DE BASE EN

T

UNISIE

TOME 1

(Cadrage théorique et première partie)

Présentée et soutenue publiquement par

Abdelwahab CHAOUED

Sous la direction du Professeur

Louis MARMOZ

Jury Jury Jury Jury

M. le Professeur Patrick BOUMARD (Université de Bretagne Occidentale) M. le Professeur Alain LIEURY (Université de Rennes 2 - Haute Bretagne) Mme la Professeure Sylvette MAURY (Université de Paris 5 - Sorbonne) M. le Professeur Louis MARMOZ (Université de Caen - Basse Normandie)

Rennes le 06 - 07 - 2006

§§§

(3)

D

EDICACE

- À la mémoire d’Ahmed ben Chaoued, l’homme et le père

- À ma mère, avec toutes les expressions d’amour et d’admiration - À mes frères et sœurs

- À ma chère Leïla, avec tous mes vœux d’une vie pleine de bonheur et de réussite

Ce travail est dédicacé aussi à toutes mes enseignantes et à tous mes enseignants d’hier et d’aujourd’hui, de l’école primaire à l’université. Avec ma sincère reconnaissance et un grand merci d’avoir nourri ma connaissance et exalté mon goût pour le savoir.

§§§

(4)

R

EMERCIEMENTS

Je voudrais tout d’abord remercier infiniment mon directeur le Professeur Louis Marmoz qui m’a accompagné avec beaucoup de bienveillance et de patience depuis mes premiers pas dans le monde de la recherche. Son suivi régulier et attentif, ses précieux conseils, ses encouragements et la confiance qu’il m’a toujours accordée, m’ont aidé énormément à mener à bien ce travail. À lui alors toute ma gratitude.

Je tiens aussi à remercier Madame et Messieurs les Professeurs, Sylvette Maury, Patrick Boumard et Alain Lieury pour avoir accepté de faire partie de mon jury.

Mes remerciements vont également à tous ceux qui m’ont aidé directement ou indirectement au cours de mes recherches :

- Monsieur le professeur Jean Manuel de Queiroz qui m’a accueilli pendant trois ans au sein de son équipe de recherche, où j’ai pu profité d’un foisonnement d’idées remarquable.

- Mes collègues doctorants des Universités de Rennes 2 et Rennes 1, avec qui j’ai eu des échanges aussi passionnants que fructueux.

- Les enseignants du primaire et du secondaire qui ont accepté avec beaucoup de gentillesse et de bienveillance de participer à mon enquête de terrain.

Ma pensée et ma reconnaissance vont aussi à mes anciens professeurs de l’université de Caen, en particulier Madame Françoise Chébaux et Monsieur Jacques Arveiller qui m’ont beaucoup appris.

Une pensée toute particulière et beaucoup de reconnaissance vont à mes proches : - Ma mère et mes frères et sœurs qui m’ont toujours soutenu et encouragé.

- Mes beaux parents pour leur hospitalité et leurs encouragements.

- Mohamed et Jamila et leurs enfants, mes chers neveux et nièces, Lassaâd, Sami, Hana, Mariam et Ahmed qui m’ont toujours encouragé et très bien accueilli lors de mes séjours à Tunis.

- Mon cousin et collègue Mohamed El-Khamès pour son esprit chaleureux et collaboratif.

Enfin, un grand merci à ma chère femme Stéphanie qui a supporté avec une patience formidable mes nuits blanches de travail, m’encourageant de temps en temps avec un sourire ou un petit café. Qu’elle trouve ici l’expression de ma reconnaissance affectueuse.

(5)

S

OMMAIRE

§§§

D

EDICACE

... 1

R

EMERCIEMENTS

... 2

S

OMMAIRE

... 3

I

NTRODUCTION GENERALE

... 5

1. DE LENSEIGNEMENT SCIENTIFIQUE...6

2. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES...13

3. APPROCHES METHODOLOGIQUES...16

P

REMIERE PARTIE

: L’

ENSEIGNEMENT SCIENTIFIQUE

:

THEORIES ET PRATIQUES

22

1. INTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE...23

2. PARADIGMES EDUCATIONNELS : BASES THEORIQUES ET PROLONGEMENTS PEDAGOGIQUES...25

3. L’ENSEIGNEMENT SCIENTIFIQUE :APPROCHE ANTHROPOLOGIQUE ET CULTURELLE179 4. DEMARCHE CURRICULAIRE ET DEMARCHE DANALYSE...223

5. CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE...252

D

EUXIEME PARTIE

: S

TRUCTURES ET EVOLUTION HISTORIQUE DE L

ECOLE TUNISIENNE

: D

E L

HYPOTHEQUE

«

LANGUE NATIONALE

/

SCIENCES MODERNES

»

A LA REFONTE CURRICULAIRE DE JUILLET

2002 ... 255

1. INTRODUCTION DE LA DEUXIEME PARTIE...256

2. APPROCHE HISTORIQUE DE LENSEIGNEMENT EN TUNISIE...258

3. LA GRANDE REFORME DE 2002 : UNE REPONSE AUX DEFIS SCIENTIFICO-TECHNIQUES DU XXIE SIECLE...366

4. CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE...534

(6)

T

ROISIEME PARTIE

: L

ECTURE ANALYTIQUE DES CURRICULA SCIENTIFIQUES DE

L

ENSEIGNEMENT DE BASE

... 537

1. INTRODUCTION DE LA TROISIEME PARTIE...538

2. MATERIAUX ET STRATEGIES...540

3. CONSTRUCTION DES GRILLES DANALYSE...546

4. ANALYSE DU MATERIEL...557

5. CONCLUSION DE LA TROISIEME PARTIE...630

C

ONCLUSION

G

ENERALE

... 633

T

ABLE DES TABLEAUX

... 648

T

ABLE DES SCHEMAS ET GRAPHIQUES

... 652

B

IBLIOGRAPHIE

... 653

A

NNEXES

... 669

T

ABLE DES MATIERES

... 772

§§§

(7)

I NTRODUCTION GENERALE

1. D

E L

ENSEIGNEMENT SCIENTIFIQUE

2. P

ROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES

3. A

PPROCHES METHODOLOGIQUES

3.1PREMIERE APPROCHE THEORIQUE 3.2DEUXIEME APPROCHE THEORIQUE 3.3APPROCHE ANALYTIQUE ET CRITIQUE

§§§

(8)

1. D E L ’ ENSEIGNEMENT SCIENTIFIQUE

§§§

Aborder la question de l’enseignement scientifique d’une façon problématique, s’interroger et débattre sur l’apprentissage des sciences, se soucier des moyens qui permettent de rendre la culture scientifique plus adaptée à l’école, plus appréhendable et plus assimilable par la population scolaire, sont des préoccupations qui ne cessent depuis quelques décennies de mobiliser l’attention et l’énergie de plusieurs nations et de gagner du terrain à travers les continents. Ainsi, on assiste ces dernières années dans bon nombre de pays (aussi bien du Nord que du Sud) à la naissance d’une nouvelle dynamique qui s’est traduite par la réforme des curricula, la création de structures de recherche spécialisées, le développement de nouvelles stratégies et l’intensification des échanges d’expériences.

Mais pourquoi cette préoccupation de plus en plus accentuée par l’enseignement des sciences ?

Nous pensons que ceci est due à deux facteurs essentiels : Le premier facteur est lié à un constat inhérent aux faits éducatifs, l’autre découle directement d’une certaine vision du monde et d’un désir de changement chez les uns et les autres.

Un constat lié aux faits éducatifs :

Plusieurs rapports nationaux effectués à des moments différents depuis la fin du siècle dernier dans plusieurs régions du monde font état d’un bilan, somme toute, peu satisfaisant quant à la qualité et aux résultats de l’enseignement scientifique1. D’autres études s’accordent

1 Nous citons dans ce cadre les trois exemples suivants :

- Un rapport américain de 1983, soutenant l’idée d’une impérieuse nécessité d’envisager une réforme de l’enseignement des sciences et des mathématiques, établit ce schéma aussi exhortant qu’alarmant : « La nation qui a spectaculairement et hardiment conduit le monde dans l’âge de la technologie échoue aujourd’hui à pourvoir ses propres enfants des outils intellectuels nécessaires pour le XXI siècle (…) Nos enfants pourraient devenir des traînards dans un monde technologique. » (National Commission on Excellence in Education, 1983)- D’après Veleida Anahi Da Silva. Ed. ECONOMICA, 2004, p. 13.

- Au Québec, le Rapport du Groupe de Travail sur la Réforme du Curriculum (2001) avance : « Nous devons signaler l’état déplorable de l’enseignement des sciences au primaire. Dès 1990, le Conseil Supérieur de l’Éducation attirait l’attention du ministre sur cette question. Depuis, rien n’a été fait pour corriger la situation.

(R.G.T.R.C.Q, 2001, Annexe 4, p.3).

- En Tunisie, la Plan Exécutif de l’Ecole de Demain (2002), déplore des résultats très modestes en sciences et en mathématiques, une insuffisance du temps consacré à l’enseignement des sciences et une faible présence des

(9)

pour dire que beaucoup d’enfants apprennent mal les sciences, que les matières et disciplines scientifiques exercent très peu d’attrait sur eux et que la plupart des méthodes et stratégies d’enseignement ne parviennent pas à aider les apprenants à substituer à leurs conceptions premières, qui sont en général des conceptions erronées, d’autres conceptions scientifiquement fondées. Certains auteurs affirment que ces conceptions premières sont parfois tellement résistantes qu’elles persistent jusqu’à l’âge adulte (Harlen, 1988 ; Astolfi, 1998 ; De Vecchi et Giordan, 2002).

Ce constat négatif ne concerne pas uniquement les pays pauvres ou en développement, mais touche aussi des pays développés qui disposent normalement de moyens matériels et scientifiques considérables pour mettre en place un enseignement scientifique efficace. D’où un sentiment largement partagé de la nécessité de réfléchir sur les moyens supplémentaires à mettre en œuvre, les méthodes à suivre et les objectifs à définir et à atteindre pour remédier à cette situation et rénover l’enseignement des sciences.

Depuis lors, l’état et les résultats de l’enseignement scientifique se sont peut être améliorés dans plusieurs pays, mais l’intérêt accordé au sujet ne cesse de s’accentuer, notamment avec l’explosion exponentielle des nouvelles technologies de l’information et de la communication dans le monde et sa mise, de plus en plus affirmée, au service de l’enseignement et de l’apprentissage.

Une certaine vision du monde et un désir de changement

L’intérêt accordé à l’enseignement des sciences peut être aussi expliqué par la prégnance et le caractère imposant de la modernité. C’est en quelque sorte le signe d’une adhésion générale à une vision du monde incarnée par le modèle scientifico-technique occidental. En réformant l’enseignement des sciences et des techniques, les pays du Sud espèrent former des citoyens suffisamment qualifiés pour assurer leur développement national.

Les pays du Nord, quant à eux, soucieux de maintenir leur rang parmi les nations avancées, aspirent à davantage d’excellence et de progrès dans un monde en perpétuelle mutation et où la compétition entre les nations est de plus en plus rude. Pour les uns comme pour les autres, la mise en place d’un enseignement scientifique efficace et performant est une condition

nouvelles technologies dans les programmes d’enseignement (Nouvelle Réforme de l’Enseignement : Plan Exécutif de l’Ecole de Demain, Juin 2002, pp. 48-50).

(10)

nécessaire (bien que non suffisante) pour réaliser le changement et le progrès souhaités. La liaison entre "système d’enseignement des sciences et de la technologie" et "développement national" est désormais chose bien établie1.

Si le lien entre le développement des sciences en général et de l’enseignement scientifique en particulier est reconnu par tous, il n’en est pas de même pour une autre question cruciale qui s’est longtemps positionnée au cœur du débat sur l’école dans plusieurs pays et notamment les pays de cultures non occidentales (en l’occurrence la Tunisie), et qui continue à animer les débats. On peut la formuler de la manière suivante :

Quel enseignement scientifique pour quelle société ?2

Outre la dimension épistémologique (que nous évoquerons rapidement ci-dessous et sur laquelle nous reviendrons par la suite avec plus de précision), cette question – qui touche directement aux choix d’élaboration curriculaire – est, à notre sens, problématique au moins à deux niveaux, lesquels sont en interaction certaine : d’un côté, le niveau pédagogique et/ou didactique, de l’autre, le niveau culturel et linguistique.

Le niveau pédagogique et didactique

À ce niveau, les questions qui nous semblent préoccupantes sont les suivantes :

Existe-t-il une méthode pédagogique plus efficace que d’autres, si oui, laquelle ? Une méthode pédagogique, est-elle universelle et décontextualisée ou spécifique et contextualisée ? Quelle différence y a-t-il entre théorie éducative et méthode pédagogique ou méthode d’enseignement ? Quelle théorie psychologique faut-il adopter pour comprendre le mode de développement de l’enfant et l’évolution de son système de fonctionnement cognitif ? Sur quels critères faut-il s’appuyer pour juger de la validité d’une théorie développementale ou d’un modèle éducationnel ? Ces théories, dont la plupart sont nées dans un contexte occidental,

1 Cf. à ce sujet « Innovations dans l’enseignement des sciences et de la technologie ». Vol. I et II (ss. dir. de David Layton). Paris UNESCO, 1988.

2 En France, J.-P. Astolfi, A. Giordan, G. Gohau, V. Host, J.-L. Martinand, G. Rumelhard et G. Zadounaïsky ont publié en 1978 un ouvrage collectif sous le titre : Quelle éducation scientifique pour quelle société ? (Paris, PUF).

Les auteurs ont consacré la plus grande partie de cet ouvrage (8 chapitres sur 9) à une analyse critique de l’enseignement scientifique français de l’époque. Le dernier chapitre a été consacré à l’étude du type de rapport qui devrait exister entre "culture scientifique" et "société" et le rôle du système d’enseignement scientifique et de l’institution scolaire en général en ce domaine.

(11)

sont elles valables dans les pays du Sud ? Peut-on adapter une théorie exogène au contexte précis d’une société donnée ? Quelle différence y a-t-il entre pédagogie et didactique ? Quels sont les concepts pédagogiques et didactiques les plus valables pour une société donnée et qui permettent de développer des stratégies d’enseignement efficace et favoriser un bon apprentissage des sciences ? Et puis, quelle vision épistémologique faut-il faire valoir à l’école ? Doit-on enseigner les savoirs scientifiques en tant que produit prêt à être

"consommé", c’est-à-dire en tant que valeur immédiate ? Ou bien, doit-on prêter attention aux conditions sociohistoriques et méthodologiques de leur élaboration ?

Ces questions, et sans doute tant d’autres, reflètent un souci largement partagé quant aux liens possibles et nécessaires entre science, développement individuel, pédagogie et société.

Le niveau culturel et linguistique

À ce niveau, des questions pivotant autour d’une même idée centrale sont souvent évoquées lors des débats sur l’enseignement en général et l’enseignement scientifique en particulier. Nous pouvons les formuler selon l’une ou l’autre des interrogations suivantes :

Faut-il enseigner une science abstraite dissociée de tout contexte culturel ou, au contraire, élaborer des curricula scientifiques qui prennent en considération le système de valeurs de la société de référence des apprenants ? Faut-il enseigner ce que l’on appelle « la science moderne » telle qu’elle, en tant que « produit culturel et daté, né dans certains pays de l’hémisphère nord »1, ou faut-il l’adapter aux spécificités culturelles du pays concerné ? Dans ce dernier cas, n’y a-t-il pas une contradiction problématique ? Les savoirs, les croyances et les systèmes de valeurs traditionnels (qui sont caractéristiques des cultures du Sud) ne sont-t- ils pas des obstacles à l’accès aux sciences modernes ? Est-ce qu’une conciliation entre les valeurs traditionnelles et les valeurs incarnées dans les sciences modernes est possibles ? Si oui, comment faire pour y parvenir ? Est-il possible d’adhérer à un système d’enseignement scientifique moderne et préserver son identité culturelle ? N’y a-t-il pas dans un tel système un risque d’hégémonie impérialiste ? Faut-il enseigner les sciences dans la langue nationale ou dans la langue scientifique d’origine ? N’y a-t-il pas un risque d’être en décalage avec

1 LAYTON, D., « Les dilemmes de l’innovation et la réactualisation de l’enseignement scientifique et technologique », in « Innovations dans l’enseignement des sciences et de la technologie ». Ibid., p. 23.

(12)

l’évolution des sciences dans le premier cas, et un risque de la persistance d’une dépendance à l’autre dans le deuxième ?

Toutes ces interrogations sont le symptôme, dans plusieurs pays (dont la Tunisie), d’un déchirement entre un désir insistant de changement et de progrès et une crainte effrayante de perdre sa spécificité et de se dissoudre dans l’autre. Entre la modernité occidentale imposante, triomphante et très prégnante, d’une part, et la tendance humaine naturelle à préserver son identité culturelle, de l’autre, comment procéder pour faire la part des choses et trouver sa voie ?

Par ailleurs, il n’est pas toujours aisé de traiter de ces questions, tant elles appellent à rallier l’étude de l’extrêmement compliqué (sciences et culture, sciences et langue, sciences et modernité, sciences et épistémologie) à celle de l’infiniment complexe (l’apprenant en tant que sujet en devenir développemental et éducationnel).

Et pourtant, il n’y a pas un autre choix pour les sociétés dites "en développement", que d’aller dans cette voie, d’affronter tous ces problèmes avec sérieux et détermination et de se donner les moyens afin d’y apporter des réponses appropriées, faute de quoi elles seraient condamnées à demeurer en marge de la formidable marche scientifico-technique de l’espèce humaine.

C’est dans le sillage de ce cadre général de réflexion et en vertu de cet ordre d’idées que nous avons envisagé cette recherche sur l’enseignement scientifique à l’École de Base tunisienne.

Mais, pourquoi la Tunisie ? Et pourquoi l’École de Base en particulier ?

• Outre le fait que nous sommes Tunisien et que, à ce titre, notre posture de pédagogue nous pousse – presque instinctivement – à nous soucier des problèmes éducationnels de notre pays d’origine, le choix de la Tunisie comme aire géo-éducative de notre recherche est lié essentiellement aux conditions politico-historiques d’introduction des sciences modernes en ce pays. En effet, contrairement à beaucoup d’autres pays du Sud, le contact de l’école tunisienne avec la science occidentale a été antérieur au phénomène colonial. « Dès 1840, Ahmed Bey, roi éclairé, décide la création de l’école polytechnique du Bardo (jumelle à l’école créée par Napoléon au début du 19ème siècle) »1. Ainsi, une première expérience

1 CHABCHOUB, Ahmed (2000), École et modernité en Tunisie et dans les pays arabes, L’Harmattan, p. 18.

(13)

d’un enseignement scientifique tunisien en français y était amorcée. L’école de Bardo périclitera en 1864, mais après avoir formé une première élite moderniste tunisienne. Onze ans plus tard, en 1875, le Ministre réformateur Khéréddine, après s’être informé du système scolaire français de l’époque, fonde le premier établissement scolaire moderne de la Tunisie, le Collège Sadiki. On y enseigne les langues étrangères et les sciences exactes et naturelles, qui étaient dispensées surtout en langue française par des professeurs en majorité Français.

Ce qui est important ici du point de vue de la recherche est le caractère initialement "choisi"

–et non "imposé"– de l’introduction des sciences modernes à l’institution scolaire tunisienne. Car cela permet d’étudier ce fait autant que tel, c’est-à-dire comme phénomène s’inscrivant dans un certain contexte sociohistorique, et déterminé par la logique interne de ce contexte, et non en tant que résultat d’une violence culturelle imposant au système un modèle venant de l’extérieur.

• Quant au choix de travailler sur l’Ecole de Base, il a été motivé par deux facteurs essentiels :

- Tout d’abord, un facteur lié à notre pratique professionnelle antérieure. Nous avions, en effet, exercé en Tunisie en tant qu’instituteur pendant douze ans, dont dix ans (de 1986 à 1996) avec des élèves de sixième année, c’est-à-dire l’année charnière entre le cycle primaire et le cycle secondaire dans le système éducatif tunisien d’alors. Nous avions pendant toutes ces années enseigné en langue arabe et nous avions donc en charge l’enseignement de plusieurs matières dont les mathématiques et les activités d’éveil scientifique. À l’époque, les élèves de 6ème année devaient passer un concours national pour accéder à l’enseignement secondaire. Et comme le système d’évaluation de ce fameux concours accordait aux "matières nobles" (mathématiques et sciences) des coefficient, de loin, plus élevés que ceux des matières dites "subalternes" (langues, arts et humanités), tout le monde était appelé à travailler hardiment les premières pour mettre plus de chance de son côté et passer avec succès "le cap du 6ème". En dehors (et compte tenu) des effets de cette variable sur l’attitude psychologique des élèves vis-à-vis des disciplines scientifiques, nous avions pu constater les énormes difficultés et les blocages qu’éprouvaient beaucoup de ces élèves face aux leçons de sciences et de mathématiques.

Ce problème nous a toujours préoccupé et nous nous sommes souvent posés la question

(14)

sur les causes de ces blocages. Nous savons maintenant qu’on ne peut guère imputer ces difficultés à une cause unique et exclusive, tant la situation d’enseignement–

apprentissage est complexe et à variables multiples, mais nous voulons à cet égard tenter d’apporter un certain éclairage sur les conditions et les possibilités de l’enseignement scientifique destiné à des jeunes du primaire et du premier cycle secondaire.

- L’autre facteur a trait au caractère relativement récent de l’École de Base comme concept et comme institution éducative en Tunisie. Cette école qui a été instituée en vertu de la deuxième grande réforme de 1991 ne fut guère un projet facile à réaliser dans un pays comme la Tunisie où le système scolaire a longtemps fonctionné, aussi bien structurellement que méthodologiquement, selon un modèle hérité de l’époque coloniale.

Autant ce projet suscitait l’enthousiasme et la détermination de ceux qui aspiraient à une école plus juste et plus adaptée aux besoins réels des enfants tunisiens et à leurs caractéristiques tant psycho- et sociocognitives, que psycho- et socioaffectives, autant il générait craintes et scepticisme chez ceux qui pensaient qu’une telle entreprise pourrait compromettre l’avenir de l’école et mettre en péril le projet de modernisation de l’institution scolaire, adopté dès l’indépendance du pays et mis en œuvre depuis la première réforme de 1958. Au cœur des préoccupations des détracteurs du projet de l’École de Base, figure la question de l’arabisation des enseignements scientifiques, qu’ils considèrent comme une aventure dont les risques sont non négligeables étant donné, disent-ils, l’origine occidentale des sciences modernes et vu aussi l’absence, depuis plusieurs siècles, d’une tradition de recherche en langue arabe.

Aussi bien les préoccupations des premiers (une école plus juste et plus adaptée à la réalité des enfants) que les craintes des deuxièmes (risques et enjeux de l’arabisation de l’enseignement scientifique) nous intriguent dans le cadre de cette recherche et nous poussent à tenter de jeter un peu de lumière sur les possibilités et les limites de l’enseignement scientifique à l’École de Base après, maintenant, quinze ans de son existence.

§§§

(15)

2. P ROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES

§§§

Problématique de la recherche

Compte tenu des idées et des interrogations avancées ci-dessus, nous articulons notre travail autour d’une problématique générale que nous formulons de la manière suivante :

Quelles sont les conditions de possibilité, tant au niveaux pédagogique et didactique, que culturel et épistémologique de la mise en place d’un enseignement scientifique alliant "modernité éducative" et "prise en compte des conditions psychocognitives et socioaffectives de l’apprenant dans le cadre curriculaire de l’École de Base tunisienne ?".

De cette problématique, découlent quatre questions principales auxquelles nous essayerons à travers cette recherche d’apporter une certaine réponse :

Premièrement : Comment se positionnent les recherches psycho-développementales, pédagogiques et didactiques actuelles eu égard de l’enseignement des sciences à l’école primaire et moyenne ?

Deuxièmement : Qu’en est-il de la modernité ? Que désigne-t-on par cette notion ? Et quel sens peut-on lui accorder dans le cadre de l’école tunisienne ?

Troisièmement : Est-ce possible, dans le cadre curriculaire de l’enseignement scientifique à l’École de Base tunisienne, de concilier "modernité", en tant que concept élaboré et développé en Occident, et "spécificités culturelles" du sujet apprenant ?

• Enfin, quatrièmement : Comment donner du sens aux enseignements scientifiques à l’École de Base tunisienne dans le cadre, d’une part d’une réflexion épistémologique et, d’autre part d’une réflexion anthropologique et culturelle ?

Face à cette problématique générale et à ces questions, nous avançons la thèse suivante :

(16)

Dans le cadre curriculaire de l’École de Base tunisienne, il serait possible de créer des conditions plus favorables à l’implantation et au développement d’un enseignement scientifique

"moderne" et efficace, à condition de mieux prendre en compte l’apprenant en tant que Sujet socialement et culturellement construit, et d’adopter, sur le plan méthodologique, une approche éducationnelle plus axée sur la didactique des sciences et une démarche épistémologique plus ancrée dans la conception socioconstructiviste des savoirs scolaires.

Hypothèses de la recherche

Pour répondre aux questions évoquées par la problématique générale ci-dessus formulée et développer notre thèse, nous avançons les trois hypothèses suivantes :

• La science moderne qui a pris forme et s’est développée dans le contexte historico-culturel de la civilisation occidentale, trouve sa raison d’être dans les deux dimensions principales de la modernité : le Sujet et la Raison. Si l’esprit rationnel peut être envisagé en tant que dimension universelle et commune à toute l’humanité, le Sujet lui, doit être considéré dans sa singularité en tant qu’être psychologiquement différencié, et au regard de son cadre culturel d’appartenance. À ce titre, c’est par rapport à la Raison humaine et au Sujet à la fois psychologique et socioculturel qu’il faut envisager l’enseignement scientifique à l’école tunisienne.

• Tout au long de son histoire (époque précoloniale, époque coloniale, époque républicaine), l’école tunisienne aurait entretenu un rapport coloré de confusion et d’ambivalence, aussi bien vis-à-vis des composantes principales de la culture nationale (langue, tradition, religion) que vis-à-vis de la modernité.

En ce qui concerne la culture nationale, il y aurait un décalage (en particulier avant la réforme de 1991) entre le discours officiel ayant souvent tendance à valoriser cette culture et la pratique curriculaire effective qui, au contraire, aurait tendance à la maintenir dans une situation dévalorisante. Nous pensons à cet égard notamment au statut attribué à la langue arabe et au degré de prise en compte des spécificités culturelles de la société de référence de l’apprenant dans les curricula scolaires.

(17)

Pour ce qui est de la modernité, il y aurait, d’une part une tendance à adhérer à la culture scientifico-technique occidentale et, d’autre part, une absence de vision claire délimitant sans ambiguïté le sens et le rôle assignés à cette modernité dans le contexte de l’école tunisienne. Tout se passe comme si l’institution scolaire cherchait à instituer un compromis entre les valeurs authentiques et les valeurs modernes, mais sans aller jusqu’à l’élaboration d’un projet complet avec des choix clairs et bien établis.

• Enfin, depuis la réforme de 1991, et surtout grâce à la dernière réforme de 2002, les curricula scientifiques de l’École de Base tunisienne ont été sensiblement améliorés, surtout au niveau de la méthode didactique adoptée et eu égard de la reconnaissance de l’élève en tant que Sujet. Toutefois, ces curricula (en particulier les manuels scolaires) seraient encore parsemés de conceptions empiristes et accuseraient un certain décalage par rapport à la didactique moderne des sciences, et un écart épistémologique important par rapport à la vision socioconstructiviste de l’enseignement scientifique, laquelle serait plus adaptée à l’école et plus proche de la dynamique réelle du mouvement scientifico-technique de notre époque.

§§§

(18)

3. A PPROCHES METHODOLOGIQUES

§§§

Cette recherche s’appuie sur trois types d’investigation articulés en trois parties : o Une investigation théorique développementale, pédago-didactique, anthropo-culturelle

et technico-analytique, qui correspond à la première partie du travail : « Première approche théorique »

o Une investigation théorique historico-éducative et curriculaire, qui correspond à la deuxième partie de la recherche : « Deuxième approche théorique »

o Une investigation pratico-analytique et critique, qui correspond à la troisième et dernière partie : « Approche analytique et critique ».

3.1 P

REMIERE APPROCHE THEORIQUE

Compte tenu des éléments que nous avons développés aux deux chapitres précédents, nous tenterons, dans la première partie, d’approcher l’enseignement scolaire, en particulier l’enseignement scientifique, sous l’angle de cinq logiques théoriques :

- Une logique développementale : cette logique repose sur un postulat très simple qui consiste à dire que, à partir du moment où nous décidons de faire du domaine de l’enseignement et de l’apprentissage scolaire un objet d’étude et d’intérêt, que ce soit dans son aspect global ou par rapport à l’une de ses multiples facettes, il devient fort souhaitable, voire nécessaire, d’avoir une certaine connaissance de l’enfance et de son développement psychologique et mental. L’idée soutenue ici (laquelle est le corollaire de ce postulat) est que tout "paradigme éducationnel" sous-tend – plus ou moins directement – au moins un modèle théorique psycho-cognitif et développemental, auquel il se réfère et qui constitue pour lui une source d’inspiration et même parfois de légitimation.

(19)

- Une logique pédagogique et didactique : Il est question dans le cadre de cette logique de tenter d’établir le lien entre, d’une part, la sphère pédagogique, bien ancrée dans la tradition de recherche sur l’enseignement/apprentissage et, d’autre part, la sphère didactique, beaucoup plus récente (du moins du point de vue des directions actuelles de la recherche) mais qui ne cesse depuis trois décennies de gagner du terrain. Il s’agit tout particulièrement d’explorer le domaine de la didactique des sciences, sa genèse, ses préoccupations et ses grands concepts.

- Une logique épistémologique : si une certaine compréhension de la genèse et du mode de développement de la pensée enfantine est nécessaire pour mieux cerner les mécanismes qui régissent le fonctionnement psycho-cognitif de l’enfant, une réflexion épistémologique sur l’origine des savoirs (en l’occurrence les savoirs scientifiques) ainsi que leur mode d’élaboration est, pour le pédagogue, un passage quasi-obligatoire. D’ailleurs, nous verrons que la problématique épistémologique est une préoccupation majeure aussi bien chez les didacticiens des sciences, soucieux d’explorer l’archéologie du savoir pour mieux comprendre les éléments internes qui favorisent (ou qui entravent) son appropriation par l’apprenant (Astolfi et al, 1997 ; Giordan et De Veechi, 1994 et 2002 ; Astolfi et Develay, 2002, etc.), que chez d’autres spécialistes de l’éducation et de la formation scolaire, qui se préoccupent davantage de la dimension épistémologique de "la démarche scientifique" et de son implication sur, d’une part, le processus d’élaboration curriculaire (notamment la conception des manuels scolaires) et, d’autre part, le processus d’enseignement et d’apprentissage (Fourez, 1990 et1998 ; Mathy, 1997 ; Knain, 2001, etc.)

- Une logique anthropo-culturelle et linguistique : Dans le cadre de cette logique, notre souci est d’examiner, d’un côté, le lien entre "enseignement scientifique" et "culture de l’apprenant" (en l’occurrence l’apprenant tunisien) et, de l’autre, le problème du langage dans ses liens avec les processus de pensée et les modalités d’acquisition des connaissances scientifiques.

- Enfin, une logique curriculaire et analytique : Notre propos à cet égard est de mettre en exergue certains aspects de la démarche curriculaire qui nous paraissent les plus importants.

Nous essayerons dans ce cadre d’apporter un éclairage sur les processus d’élaboration et

(20)

d’analyse des curricula. Nous présenterons plus particulièrement certaines démarches et techniques concrètes élaborées par certains auteurs et permettant d’envisager une analyse critique des manuels scolaires.

La première partie sera donc organisée ainsi : tout d’abord, nous nous arrêterons sur les principales théories-sources (théories de référence) qui ont alimenté et inspiré les théories et méthodes éducationnelles, à savoir, les théories comportementales et les théories cognitives.

Ensuite, nous examinerons les grands paradigmes éducationnels, ainsi que certaines méthodes éducatives qui ont marqué par leur originalité et/ou leur influence le domaine de l’éducation scolaires et de l’enseignement. En troisième lieu, nous aborderons la didactique des sciences, axe de recherche issu des paradigmes cognitivistes et constructivistes qui s’est remarquablement développé ces dernières années. Nous en présenterons les principaux concepts, postulats et stratégies dont notamment le concept central de conception- représentation et la stratégie d’analyse épistémologique des savoirs scolaires. Puis nous tenterons d’identifier les points forts et les limites de cette approche. Nous enchaînerons ensuite avec une approche de l’enseignement/apprentissage (en particulier l’enseignement scientifique) du point de vue de ses liens avec la problématique anthropologique et culturelle.

Enfin, nous achèverons cette partie par une étude de la démarche curriculaire dans ses liens avec la démarche d’analyse. Nous examinerons notamment deux techniques différentes d’analyse des manuels scolaires, l’une relevant de l’ingénierie générale des manuels scolaires, l’autre s’inscrivant dans le domaine de l’analyse épistémologique des contenus scientifiques d’enseignement.

3.2 D

EUXIEME APPROCHE THEORIQUE

En Tunisie, l’instauration de l’Ecole de Base a été l’aboutissement d’une marche aussi longue que houleuse, au cours de laquelle plusieurs réformes et remaniements ont été introduits selon les conditions et les circonstances de l’histoire du pays et de l’institution scolaire.

(21)

Elle découle d’un état d’esprit qui prône l’acquisition, par les enfants, des contenus d’enseignement, y compris – et surtout – les contenus scientifiques, dans la seule langue nationale, à savoir l’arabe classique.

Il est vrai que l’Ecole de Base tunisienne était tout « un projet de société »1 où la question de la langue n’était qu’un aspect parmi d’autres dont notamment les contenus mêmes de l’enseignement et les outils mettant en œuvre ces contenus. Néanmoins, il semble bien que la problématique linguistique dans le contexte scolaire tunisien est, pour des raisons historiques et civilisationnelles, d’une importance majeure.

En effet, la question de la langue d’enseignement a toujours été en Tunisie l’objet de controverses parfois aiguës entre les différents acteurs de la vie politique, éducative et culturelle de façon générale, notamment quand il s’agit de la langue d’enseignement des matières scientifiques. Entre les partisans de la francisation utilitariste et les adeptes de l’arabisation "chauviniste", la polémique a souvent été très intense.

Mis à part la dimension heuristique qui, par ailleurs, mérite d’être examinée, la question de l’arabisation de l’enseignement scientifique soulève d’emblée le problème de la terminologie scientifique moderne. Or, à ce niveau, la langue arabe fait cruellement défaut.

Est-ce pour autant une raison pour obliger le petit Tunisien à apprendre les sciences dans une langue aussi étrangère que contraignante pour son système de référence culturel et cognitif ? C’était là un problème majeur qui a pendant longtemps animé le débat sur l’école, aussi bien pendant la période coloniale qu’au lendemain de l’indépendance et jusqu’à une époque non lointaine de la notre.

Aujourd’hui, l’institutionnalisation de l’Ecole de Base, avec la restauration de l’arabe, à ce niveau, en tant que langue officielle d’enseignement de toutes les matières, rend caduque une telle controverse (bien qu’aujourd’hui encore l’arabisation scientifique n’est pas du goût de tout le monde). Il ne s’agit plus donc de polémiquer sur la scientificité ou la non scientificité de la langue arabe, mais de réfléchir davantage, et sur les contenus d’enseignement – en l’occurrence l’enseignement scientifique –, et sur les procédures pédagogiques le mettant en œuvre dans le nouveau contexte arabisé de l’Ecole de Base.

1 Cf. ISMAÏL, Ameur, L’Ecole de Base – Projet de société, édition PAPYRUS, Dar Chaâbane, Nabeul, 1990.

(22)

Ainsi se posent des questions du genre : de quels contenus s’agit-il ? Ou encore, selon quels critères choisit-on les contenus de l’enseignement scientifique?

Ce sont, certes, des contenus modernes, mais comment concevoir des curricula qui seraient adaptés au contexte sociocognitif de l’Ecole de Base tunisienne et qui répondraient en même temps aux exigences de la modernité scientifico-technique ? C’était là, sans doute, l’un des défis majeurs de la réforme de 2002 : Edifier une école nouvelle qui, tout en tenant compte des références et des acquis civilisationnels de la nation, serait génératrice de modernisme et de progrès.

La deuxième partie abordera donc la question de l’enseignement scientifique à l’école tunisienne dans une perspective historico-linguistique et curriculaire. Ainsi, Nous commencerons par évoquer les racines historiques de l’école tunisienne et les conditions dans lesquelles sont intervenus ses premiers contacts avec la modernité occidentale. Nous discuterons notamment du contexte historico-politique dans lequel le bilinguisme éducatif a été instauré dans ce pays, ainsi que de ses aspects positifs et négatifs.

Ensuite, nous examinerons les aspects structurels et fonctionnels de l’école tunisienne depuis environ la deuxième moitié du XIXème siècle et jusqu’à l’indépendance du pays en 1956. Nous verrons de la sorte les structures et les modes de fonctionnement de l’école traditionnelle, les tentatives d’innovation et de modernisation de l’enseignement au cours de cette époque et les modifications introduites par le système colonial depuis l’établissement du Protectorat en 1881.

En troisième lieu, nous verrons les conditions d’installation, les objectifs et la nature de l’enseignement bilingue et biculturel en Tunisie indépendante, ainsi que les polémiques suscitées par le choix – de la part de la classe dirigeante tunisienne – d’un système éducatif

"bicéphale" où la langue française va jouer un rôle prépondérant en tant que langue de la science moderne et du changement social souhaité. Nous verrons que ces polémiques seront traversées par des voix de plus en plus vives recommandant l’arabisation de l’enseignement, y compris l’enseignement scientifique. En passant, nous examinerons les différentes réformes du système éducatif tunisien depuis la première réforme introduite et supervisée par le ministre Mahmoud El-Messadi en 1958. Dans ce cadre, nous nous attarderons notamment sur la dernière réforme de juillet 2002 appelée « Plan exécutif de l’École de Demain » qui a été sujet

(23)

d’une large consultation aussi bien interne qu’externe1. Nous verrons les conditions de mise en place, l’esprit et les stratégies de cette réforme. Nous examinerons en particulier les curricula d’enseignement scientifique, élaborés en vertu de cette réforme. En conclusion de cette partie, nous préciserons en quoi l’analyse historico-éducative est intéressante pour la démarche curriculaire.

3.3 A

PPROCHE ANALYTIQUE ET CRITIQUE

L’articulation et la confrontation des éléments théoriques développés dans le cadre de la première partie (les cinq logiques ci-dessus évoquées), et les éclairages que nous apportera la deuxième partie sur l’évolution historique, les spécificités et les programmes scientifiques de l’enseignement de base en Tunisie, nous serviront de base de référence pour élaborer, dans la troisième partie, des grilles d’analyse (en tant qu’outils d’investigation), et procéder à un examen analytique minutieux (procédure d’investigation) des manuels scolaires scientifiques de l’enseignement de base tunisien (matériau d’investigation).

L’objectif ultime de cette analyse est de rendre compte d’un certain nombre d’aspects pédago-didactiques, anthropo-culturels et historico-épistémologiques, lesquels, pris en compte lors de toute élaboration curriculaire, aideraient à donner plus de sens aux enseignements scientifiques et auraient un effet positif sur la motivation des élèves et leur goût pour l’apprentissage des sciences.

Nous signalons, enfin, que maints postulats théoriques et/ou démarches pratiques exposés dans ce travail ne sont aucunement l’apanage exclusif du domaine de l’enseignement scientifique. Les développer dans ce cadre particulier, n’exclut en rien la possibilité d’étendre leur champ de validité à d’autres facettes du vaste domaine de l’enseignement et de la formation.

§§§

1 Plusieurs acteurs on participé, directement ou indirectement à la conception, l’élaboration, l’analyse et la négociation du projet « Approche par les compétences » prôné par cette réforme. Par exemple, le Ministère tunisien de l’éducation a fait appel à des experts internationaux qui sont intervenus aux différentes étapes d’élaboration, de négociation et d’évaluation du projet, et a lancé une large opération de consultation interne où des acteurs éducatifs et sociaux tunisiens ont participé aux débats et aux négociations du projet à ses différents niveaux.

(24)

P REMIERE PARTIE : E NSEIGNEMENT SCIENTIFIQUE

THEORIES ET PRATIQUES

• C

HAPITRE

1. I

NTRODUCTION

• C

HAPITRE

2. P

ARADIGMES EDUCATIONNELS

BASES THEORIQUES ET PROLONGEMENTS PEDAGOGIQUES ET DIDACTIQUES

• C

HAPITRE

3. E

NSEIGNEMENT SCIENTIFIQUE

APPROCHE

ANTHROPOLOGIQUE ET CULTURELLE

• C

HAPITRE

4. D

EMARCHE CURRICULAIRE ET DEMARCHE D

ANALYSE

C

HAPITRE

5. C

ONCLUSION

§§§

(25)

1. I NTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE

§§§

Cette première partie correspond, en quelque sorte, à l’infrastructure théorique du présent travail. Compte tenu de l’objectif général de notre recherche et du schéma méthodologique global que nous avons défini, nous essayerons tout au long des quatre chapitres qui vont suivre d’approcher l’enseignement scientifique sous l’angle de cinq zones d’éclairage correspondant aux cinq logiques précédemment définies, à savoir : la logique développementale, la logique pédagogique et didactique, la logique épistémologique, la logique anthropologique et culturelle et, enfin, la logique curriculaire et analytique.

Dans un souci de clarification théorique et méthodologique, il convient de préciser dès l’instant comment, de notre point de vue, se positionne chacune de ces logiques par rapport à l’enseignement scientifique. "Enseignement scientifique" appréhendé ici, non pas en tant que

"processus pratique" en situation de classe, mais comme "objet" et/ou "processus d’étude et de recherche".

À cet égard, dans la conception qui est la notre, la logique développementale et la logique pédagogique se situent essentiellement en amont du processus de recherche

"enseignement scientifique". Elles jouent pour ce dernier un rôle d’étayage en ce sens qu’elles lui permettent de se procurer des points d’appui psychopédagogiques et de développer des postulats et des outils à la lumière des connaissances acquises en ces deux domaines.

Les logiques didactique et épistémologique se situent, elles, au cœur même de la recherche sur l’enseignement scientifique. En effet, si la didactique des sciences fait de l’apprentissage et de l’enseignement des sciences (essentiellement en tant que contenus, mais aussi en tant que procédure) son objet d’étude, l’épistémologie examine de son côté la nature des savoirs scientifiques et le processus d’élaboration des concepts et des démarches et, à ce titre, se présente elle-même comme objet de réflexion et de recherche en didactique des sciences.

L’anthropologie culturelle constitue, pour ainsi dire, une discipline limitrophe du domaine de l’enseignement scientifique. En effet, à partir du moment où l’on envisage un enseignement des sciences qui s’adresse à l’élève considéré et reconnu comme Sujet au sein

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du processus enseignement/apprentissage, il devient nécessaire de prêter une grande attention au "comment constitutif" de cet élève et à son appartenance, aussi bien socioculturelle et géographique, que sociohistorique et civilisationnelle. À ce titre, la logique anthropo-culturelle constitue, de nos jours, une zone d’éclairage essentielle pour la recherche sur l’enseignement scientifique.

Enfin, nous situons la logique curriculaire et analytique à la fois en amont et en aval de la recherche en matière d’enseignement scientifique. En amont de cette recherche car un travail réflexif et analytique préalable sur les curricula scientifiques constitue toujours une base de référence intéressante pour penser l’enseignement scientifique. Et, en aval du processus, en ce sens que les savoirs issus de la recherche sur l’enseignement scientifique servent à leur tour de canevas fort intéressant aussi bien pour l’analyse que pour l’élaboration des curricula scientifiques.

Dans le chapitre suivant, nous commencerons par expliquer, en nous appuyons sur certaines références théoriques spécialisées, ce que nous entendons par "théorie développementale", "paradigme éducationnel", "modèle d’enseignement" et "méthode pédagogique", ainsi que leur mode d’agencement théorique. Ensuite, nous procèderons à une analyse documentée et critique des théories et paradigmes qui semblent être les plus féconds du point de vue de l’enseignement scientifique, à savoir, le cognitivisme, le constructivisme et le socioconstructivisme. Nous attacherons dans ce cadre un intérêt particulier à la didactique des sciences, où nous étudierons notamment l’objet, les directions de recherche, les grands concepts, ainsi que les apports et les limites de cette discipline.

Dans le cadre du troisième chapitre, nous tenterons de montrer en quoi l’approche anthropologique et culturelle est utile pour le domaine de l’enseignement scientifique.

Le quatrième chapitre sera consacré à discuter du curriculum et de la démarche curriculaire, sa signification, son utilité et ses liens avec la démarche d’analyse.

Enfin, pour conclure, nous formulerons les principaux résultats de l’investigation théorique effectuée dans le cadre de cette partie et nous préciserons l’intérêt de ces résultats pour l’implantation et le développement d’un enseignement scientifique approprié.

§§§

(27)

2. P ARADIGMES EDUCATIONNELS : BASES THEORIQUES ET PROLONGEMENTS PEDAGOGIQUES

§§§

2.1 T

HEORIES

– P

ARADIGMES

– M

ETHODES

Dans le domaine de l’éducation et de la formation scolaire, plusieurs expressions sont souvent utilisées indifféremment pour désigner des schémas théoriques et/ou des systèmes de valeurs et de croyances auxquels adhère un individu ou une communauté de personnes, et qui servent à soutenir et guider l’effort scolaire d’enseignement et d’apprentissage. On parle alors de : théories éducatives, courants pédagogiques, visions éducatives, modèles d’enseignement, paradigmes éducationnels, théories d’apprentissage, méthodes éducatives, méthodes d’enseignement, méthodes pédagogiques, etc.

En effet, ces expressions peuvent être classées en deux groupes dont la signification est loin d’être la même :

- Un premier groupe qui renvoie à une dimension théorique, dans lequel on peut ranger les six premières expressions ci-dessus mentionnées.

- Un deuxième groupe se référant à une dimension pratique ou procédurale, sous lequel on peut ranger les trois dernières.

Ainsi, il convient de ne pas confondre "paradigme éducationnel" (appelé aussi "modèle ou courant pédagogique") qui désigne un schéma conceptuel explicatif des phénomènes de l’éducation, et "méthode pédagogique" qui a une portée plutôt pragmatique et qui désigne une

« organisation codifiée de techniques et de moyens ayant pour but de faciliter l’action éducative »1.

Le tableau suivant (1.1) présente des définitions que nous empruntons à Raynal et Rieunier (1997) des termes Théorie, modèle, paradigme et méthode.

1 RAYNAL, Françoise & RIEUNIER, Alain, Pédagogie : dictionnaire des concepts clés, ESF éditeur, Paris, 1997, p 227.

(28)

TABLEAU 1.1 : DEFINITIONS DES CONCEPTS DE THEORIE, MODELE, PARADIGME ET METHODE

Une théorie Ensemble de concepts, de définitions et de propositions, en relation les uns avec les autres, qui propose une vue systématique d’un phénomène en spécifiant les relations existantes entre les variables. La théorie a pour but d’expliquer et de prédire le phénomène.

Un modèle

Modèle d’enseignement

Représentation formelle d’un ensemble de phénomènes que l’on tente de cerner. Tant que son utilisation amène à des prédictions exactes, à des applications efficaces, le modèle garde son utilité. Un modèle est donc un système de représentation qui explique, qui formalise, différents objets particuliers.

Représentation formelle d’un ensemble de techniques d’enseignement organisées à partir d’une vision particulière de l’homme et de ses rapports avec la société, dans le but de développer chez les élèves certaines dimensions de la personnalité humaine.

Un paradigme Communauté de croyances, de présupposés, de représentations, édifiée à une époque donnée, en théorie dominante, pour en constituer le credo. Ce credo organise les directions et les technologies de la recherche jusqu’au moment où une révolution scientifique vient le frapper de caducité en renouvelant la vision des choses et en constituant un nouveau paradigme. (…) le paradigme sert de point de ralliement à une communauté de chercheurs. En partageant l’information en son sein, cette communauté renforce sa cohésion intellectuelle et sociale ; elle ne communique guère avec ceux qui suivent d’autres paradigmes. On se cite beaucoup entre chercheurs qui partagent une même conception, tandis que l’on tend à taire les travaux des collègues qui ont fait d’autres choix fondamentaux. Les tenants d’un paradigme ont leurs propres vues, leurs sociétés scientifiques, leurs rencontres.

Une méthode

Méthode pédagogique

Organisation codifiée de techniques et de moyens mis en œuvre pour atteindre un objectif ;

« codifiée » signifie ici que les parties du tout forment un ensemble cohérent, formalisé et communicable, qui, appliqué correctement, produit le même résultat. Pour mieux comprendre ce concept, il est impératif de différencier méthode et stratégie. (…) la différence réside dans le terme codifiée. Une méthode est une stratégie qui a réussi, et qui est répertoriée sous un nom de code précis. C’est un savoir objectivé, communicable, qui existe en dehors de l’individu. (…) Une méthode correctement appliquée donne, à quelque chose près, des résultats attendus ; en revanche, une stratégie donne des résultats aléatoires.

Organisation codifiée de techniques et de moyens ayant pour but de faciliter l’action éducative.

Une méthode pédagogique s’appuie toujours sur une certaine idée de l’homme, de la société, et des rapports souhaitables entre individu et société.

Source : Adapté de F. Raynal et A. Rieunier (1997), « Pédagogie : dictionnaire des concepts clés », Paris, ESF éditeur, pp.124, 227, 231, 260 et 361.

Ce tableau nous invite à être extrêmement vigilants quant à l’usage des acceptions et aux sens que nous attribuons aux concepts. Il n’est pas rare, en survolant la littérature spécialisée, de rencontrer des expressions comme « théories éducatives », « théories pédagogiques » ou « théories de l’enseignement ». En fait, il nous semble que ces expressions sont utilisées pour décrire des modèles, des paradigmes ou des méthodes et non des théories au sens ci-dessus défini du terme.

Au lieu de parler de « théories éducatives » qui, jusqu’à nouvel ordre, relèvent de la fiction plutôt que de la réalité, il convient de parler de « paradigmes éducationnels ».

Un paradigme éducationnel est un schéma conceptuel formé de croyances, de présupposés et de représentations, se rapportant au domaine de l’éducation et de la formation scolaire, et se référant à une ou plusieurs théories ayant pour objet d’étude l’enfant ou l’être humain en général du point de vue de son développement psychocognitif et affectif, du mode

(29)

de fonctionnement de sa pensée et de la structuration de ses connaissances, ainsi que de ses interactions avec le monde extérieur qu’il soit naturel ou humain et des attitudes et valeurs qui régissent ces interactions. Dans le cadre de ses références théoriques, un paradigme éducationnel guide la recherche qui lui est inhérente en définissant ses directions générales et en précisant ses technologies.

Ainsi défini, un paradigme éducationnel comporte plusieurs dimensions qui interagissent et se complètent : une dimension concernant les conditions générales d’acquisition du savoir, une dimension liée au développement psychocognitif et psychoaffectif de l’apprenant et, enfin, une dimension socioculturelle et idéologique.

Les paradigmes éducationnels sont l’œuvres de plusieurs personnes ou communautés de personnes, voire de générations entières. Les pédagogues s’appuient sur un ou plusieurs paradigmes éducationnels et sur leur expérience personnelle pour élaborer des modèles d’enseignement et pour mettre au point des méthodes pédagogiques.

Le tableau 1.2 expose de façon plus explicite la distinction que nous faisons entre les concepts de « paradigme éducationnel », « modèle d’enseignement » et « méthode pédagogique ». Il tient compte du tableau conceptuel précédent adapté de Raynal et Rieunier, et des éclaircissements que nous venons de formuler ci-dessus concernant ces trois concepts.

Tableau 1.2 : Paradigme éducationnel, modèle d’enseignement, méthode éducative

PARADIGME EDUCATIONNEL MODELE DENSEIGNEMENT METHODE PEDAGOGIQUE

Schéma conceptuel (croyances, présupposés, représentations).

Se réfère à une ou plusieurs théories de développement de l’être humain (particulièrement de l’enfant) dans sa globalité.

Se rapporte au domaine de l’éducation et de la formation scolaire et y définit les directions générales et les technologies de la recherche.

Sous entend une certaine conception de l’homme dans son rapport avec la société, et une certaine vision de l’apprentissage.

Représentation formelle d’un ensemble de techniques d’enseignement.

Organisée à partir d’une vision particulière de l’homme et de ses rapports avec la société.

Dans le but de développer chez l’élève certaines dimensions de la personnalité humaine.

Organisation codifiée d’un ensemble de techniques et moyens.

S’appuyant sur une certaine idée de l’homme, de la société et des rapports souhaitables entre "individu" et

"société".

En vue de faciliter l’action éducative.

Ainsi appréhendés, ces concepts peuvent être illustrés par un organigramme hiérarchique à quatre étages, dirigé du haut vers le bas, mais perméable latéralement (Figure 1.a).

(30)

FIGURE 1.a : LIENS ENTRE THEORIES, PARADIGMES EDUCATIONNELS, MODELES DENSEIGNEMENT ET METHODES EDUCATIVES

Les flèches dirigées vers le bas dans ce schéma veulent dire que tout paradigme éducationnel, tout modèle d’enseignement, toute méthode éducative, est plus ou moins conçu(e) ou édifié(e) sur un fond théorique de référence qui lui donne une ligne directive et permet son intelligibilité (théories issues de la psychologie du développement et de l’apprentissage, théories humanistes et transpersonnelles, théories psychanalytiques, etc.).

C’est la raison pour laquelle nous pensons qu’il est nécessaire de mettre l’accent sur les idées- forces relevant des théories de référence, avant de discuter des paradigmes éducationnels, des modèles d’enseignement ou des méthodes éducatives qui s’y réfèrent.

Quant aux doubles-flèches horizontales, elles veulent attirer l’attention sur le fait que, dans le monde de l’éducation, les paradigmes, les modèles et les méthodes, ne sont jamais tout à fait étanches les uns par rapport aux autres et que, bien souvent, des idées et/ou des techniques passent d’un terrain théorique ou pratique à un autre où elles seront utilisées telles quelles ou bien revues et adaptées pour qu’elles soient opérationnelles dans le nouveau contexte éducationnel.

Pour R. Vienneau, les trois écoles théoriques (écoles de pensée dit l’auteur) qui ont laissé le plus leurs empreintes sur l’éducation et la formation scolaire dans le monde sont : l’école "béhaviorale", l’école "cognitive" et l’école "humaniste" (Vienneau, 2005, p 58). Selon l’auteur, ces trois écoles ont donné naissance à cinq courants pédagogiques (ibid., p 89) :

Théories de développement et/ou d’apprentissage

Autres théories

Paradigme éducationnel (A)

Paradigme éducationnel (B)

Paradigme éducationnel (C)

Modèle d’enseignement (1)

Modèle d’enseignement (2)

Modèle d’enseignement (3)

Méthode pédagogique (a)

Méthode pédagogique (b)

Méthode pédagogique (c)

(31)

Le courant béhavioral (issu de l’école béhaviorale) ; le courant cognitif (issu de l’école cognitive) ; le courant constructiviste (issu de l’école cognitive) ; le courant humaniste (issu de l’école humaniste) ; le courant transpersonnel (issu de l’école humaniste).

L’auteur intègre dans le courant constructiviste les théories constructivistes et socioconstructivistes. En outre, il donne la définition suivante au concept de courant pédagogique :

« Le courant pédagogique est un terme générique qui correspond au cadre théorique (paradigme éducationnel) et idéologique (paradigme socioculturel) déterminant l’orientation générale donnée au processus enseignement-apprentissage dans un contexte d’apprentissage donné (par exemple un système scolaire, une école) »1

Signalons que, dans la conception qui est la notre et comme nous l’avons déjà précisé ci-dessus, la dimension socioculturelle et idéologique est une partie intégrante du paradigme éducationnel. Autrement dit, nous considérons ce dernier comme un système paradigmatique englobant, dans une perspective éducationnelle, d’autres dimensions (des sous-paradigmes) se rapportant aux différents aspects de la vie humaine individuelle et sociétale. À ce titre, le terme paradigme éducationnel, tel que nous le concevons, est très proche de ce que Vienneau dénomme courant pédagogique.

Notons enfin que, étant donné que nous nous préoccupons essentiellement de l’enseignement scientifique dans le cadre de ce travail, notre analyse se limitera aux écoles de pensée qui ont influencé le plus ce domaine, à savoir, les théories behavioristes, cognitives et constructivistes. Bien entendu, les apports respectifs des théories humanistes et transpersonnelles dans le champ de l’enseignement et de l’apprentissage scolaire sont loin d’être négligeables. Mais ces apports concernent essentiellement des variables liées à certaines valeurs comme l’épanouissement personnel, l’appartenance au groupe, l’engagement, la coopération, la conscientisation, etc. (Vienneau, 2005). En revanche, ce sont essentiellement le constructivisme et, plus récemment, le socioconstructivisme et le cognitivisme qui serve

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Tableau 1.2 : Paradigme éducationnel, modèle d’enseignement, méthode éducative
Figure 1.f : Modèle de base du S. T. I. selon Newell et Simon
Figure 1.g : Modèle de traitement de l’information de Robert Gagné (1974)  Source : Raynal, F
Tableau 1.6 : Décomposition de l’addition en sous-compétences selon Thorndike  Source : Crahay, M., 1999, p
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Referências

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