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Le comportement de l’animal domestique et les techniques modernes d’élevage
J.P. Signoret
To cite this version:
J.P. Signoret. Le comportement de l’animal domestique et les techniques modernes d’élevage. INRA
Productions Animales, Paris: INRA, 1991, 4 (1), pp.13-20. �hal-00895921�
J.P.
SIGNORETINRA / CNRS Laboratoire de
Comportement
animal37380
Nouzilly
Le comportement
de l’animal
domestique
et les techniques
modernes d’élevage
Les techniques modernes de productions animales intègrent les progrès
des connaissances
surla biologie de la nutrition, de la reproduction,
sur
l’hygiène et les exigences socio-économiques de prix de revient,
de conditions de travail, de relation à l’environnement. Elles sont caractérisées à la fois par la mise
en ceuvrede techniques complexes et
raffinées et par
uneréduction considérable du temps consacré par l’homme à chaque animal.
Mais l’animal, qui
enest l’objet et le but, est aussi acteur de la production :
il n’est pas
unorganisme passif de transformation des aliments, il
intervient activement. Au fil des siècles, l’éleveur
ajoué
unrôle décisif : c’est grâce à
saconnaissance des capacités comportementales de l’animal que toutes les techniques d’élevage ont pu apparaître. Cependant, la rapidité et l’importance des changements actuels
nepermettent pas
touj ours les adaptations nécessaires. Par ailleurs, nombreux sont ceux,
dans le public
comme ausein du monde agricole, qui
sepréoccupent des
conditions de vie imposées à l’animal. La connaissance du comportement des espèces domestiques permet de déterminer objectivement les besoins fondamentaux des animaux et leurs capacités naturelles d’adaptation, et,
par là, d’améliorer les méthodes d’élevage
oude proposer des techniques
nouvelles.
Résumé
_________________________La connaissance du
comportement peut
contribuer à la mise aupoint
de techni-ques nouvelles ou améliorées prenant en
compte l’adaptation
et le bien-être des animauxdomestiques.
Les études
développées,
notamment àl’INRA,
ontpermis
de connaître les méca-nismes
d’organisation
des relations entre les animaux.Le comportement maternel repose essentiellement sur une reconnaissance olfac- tive. L’établissement du lien maternel
implique
la sécrétion desoestrogènes,
maisaussi les stimulations sensorielles chez la mère.
L’organisation
socialeimplique
des relations de dominance-subordinationqui
résolvent les conflits.Cependant,
des liens sélectifs maintiennent la cohésion du groupe et accroissent la tolérance mutuelle.La sélection sur des critères de
production
fait évoluer lescaractéristiques
com-portementales
vers uneadaptation plus
facile aux contraintes del’élevage.
Ces
résultats,
ainsi que la connaissance des mécanismes ducomportement
sexuel peuvent être utilisés pour améliorerl’adaptation
et le bien-être des animaux dans les conditions del’élevage
moderne.La relation entre l’homme et les animaux
domestiques
n’estqu’un
casparticulier
des rap-ports interspécifiques,
où toutes les situations peuvent se retrouver : association, commensa-lisme, parasitisme.
L’animaldomestique
trouveprotection
et nourriture, mais sesproductions
sont détournées au bénéfice de l’homme. Il occupe ainsi une niche
écologique
définie par l’éleveur. Dès le début de l’histoire de ladomestication,
des contraintesimportantes
ontété
imposées
à l’animal. Elles ontporté
sur l’en-vironnement
physique :
limitation desdéplace-
ments ou contention,
logement
dans des bâti-ments
spécialisés,
etc. Les relations interindivi- duelles sont, elles aussi, bouleversées. Or, dans la vie del’animal,
la relation auxcongénères
est un aspect essentiel. Elle
organise
la repro-duction, l’élevage
desjeunes
et le fonctionne-ment de tous les groupes. Pour
s’adapter
à cesChez la
brebis,
lecomportement
t maternelapparaît
aumoment de la mise
bas, sous
ladépendance
de lasécrétion
d’œsfro!énes.
Par lasuite,
le lienmère-jeune dépend
essentiellement de la
reconnaissance olfactive.contraintes, les
espèces qui
ont été domesti-quées possèdent
descaractéristiques qui
sontsusceptibles
de rendre compte de leuraptitude
à une relation de domestication.
L’empirisme
des éleveurs traditionnels a per- mis la mise aupoint
de méthodes assurant les fonctions essentielles del’animal,
saproduc-
tion et sa
reproduction.
Dansl’élevage
intensifmoderne,
le milieuartificiel,
les conditions delogement,
la mécanisationimposent
descontraintes nouvelles et
parfois
accrues. L’éle-vage
extensif, malgré
des conditions apparem-ment « naturelles » n’est pas exempt de pro- blèmes. Une utilisation
inadéquate
dupâturage peut dégrader profondément
lemilieu,
l’animal peut ne pas réussir à survivre à des conditionsclimatiques difficiles,
etc.Nous passerons en revue
quelques
travauxrécents sur les différents aspects du
comporte-
ment des
espèces domestiques.
Lapremière
relation sociale est celle dujeune
avec sa mère.Ensuite vient son
intégration
dans la structuredes adultes et le
jeu
des relationssociales, enfin,
laparticipation
à lareproduction.
Nousenvisagerons
ensuite lespossibilités
offertespar l’évolution des races et la sélection. Dans
chaque
cas, nous tenterons de voir commentles connaissances
acquises
permettentd’expli-
quer les succès et les limites de
l’adaptation
desespèces domestiques,
mais aussi de proposerune évolution vers de nouvelles méthodes
tenant compte
objectivement
du «point
de vue de l’animal ».1 / Les relations interindividuelles
1.
1
/ La relation mère-jeune
Les
jeunes
de presque toutes lesespèces domestiques atteignent
à la naissance un stade dedéveloppement
leurpermettant
une autono-mie motrice
précoce.
Lecomportement
mater- nels’y exprime
par un liensélectif,
dont l’im- portance est laplus grande
chez les mammi-fères, puisque
la surviedépend
de l’allaitement.La mise en
place
de ce lien est à la fois trèsrapide
etefficace,
les mécanismes sensoriels etphysiologiques
en ont été étudiés en détail chez les Ovins.a / Mise en
place
et évolution du lienmaternel
chez les OvinsLors de la naissance de leurs
jeunes,
les femelles s’isolent pour unepériode
variant dequelques
heures àquelques jours,
au maxi-mum,
puis rejoignent rapidement
le groupe où elles vivent habituellement. Au sein du trou- peau le lien exclusifqui
associe la mère à sonpetit
se manifeste aussitôt : elle repousse, sou- vent avecviolence,
un agneauétranger.
La for-mation du lien
mère-jeune
repose sur l’identifi- cation individuelle dujeune
par son odeur. La brebisprivée
de l’odoratperd
toute sélectivité : elleaccepte
d’allaitern’importe quel
agneau.La brebis et son agneau restent
proches
au seindu
troupeau
et cette associationpersiste,
le caséchéant, après
le sevrage.b / La motivation maternelle et ses mécanismes
Jusqu’à l’approche
de la misebas,
la brebisest indifférente ou même
agressive
envers unagneau nouveau-né. La situation
change
alorsbrusquement. L’apparition
de la motivation maternelle est associée àl’équilibre
hormonalqui
caractérise laparturition (Poindron
etLe Neindre 1980,
figure 1).
Il a pu être démon- tré que la sécrétion massived’oestrogènes qui
se
produit
à ce moment en est une conditionessentielle. Il est
possible,
par un traitementapproprié,
d’en induirel’apparition
chez unefemelle non gestante.
La
première prise
de contact de la mère et dunouveau-né est la
conséquence
d’une attractiontrès forte de la mère envers les fluides foetaux.
Ces
produits, qui
sont ordinairementrépulsifs,
deviennent subitement attractifs dès avant la naissance
elle-même, pendant
lesquelques
heures où ont lieu les contractions utérines. Il
en résulte un
léchage
très actif du nouveau-néqui
facilite laprise
de contact et l’établissement du lien maternel. En l’absence de cesfluides,
si, parexemple, l’agneau
est lavé dès sa nais-sance, le
comportement
de la mère est très per- turbé(Lévy
et Poindron 1987,figure 2).
La mère n’est pas sélective au moment de la naissance, mais elle le devient très
rapidement,
en moins de deux heures.
Cependant,
lors-qu’une
brebis ne peut pas avoir de contact avec son agneau nouveau-né, sacapacité
de réaction maternelledisparait rapidement (Poindron
etLe Neindre 1980,
figure 3).
c / Conclusion et
applications
Le
comportement
maternel des Ovins semanifeste par un lien sélectif
qui persiste
au- delà de l’allaitement. Sa mise enplace
reposesur le
jeu
de mécanismes neuroendocriniens.Sa
persistance,
au contraire, met enjeu
la per-manence des communications
sensorielles,
enparticulier
à distance. Il semble en être demême chez les autres ruminants. Par contre, la truie est
beaucoup plus passive :
lesjeunes
choisissent enquelques jours
une mamelle et la défendent contre les autres. En éliminant éven- tuellement unétranger,
ilsjouent
un rôleimportant
dans l’établissement du lien mère-jeune.
La brièveté de la
période
de motivationmaternelle rend facile et sans
conséquences majeures
laséparation
d’avec lejeune.
La capa- cité deproduction
de la vache ou de la chèvre laitière n’est que peu ou pas modifiée etpeut
être
exploitée
aisément.Le
jeune
établit un lien avec les individusavec
qui
il est en contact lors de sespremiers jours.
Pour réaliser uneadoption,
laprécocité
est donc un facteur
critique
pour les ruminants, ainsi que lesmanipulations
dessignaux
olfac- tifs. Enrevanche,
elle estplus
aisée etpeut
êtreplus
tardive chez la truie.Chez les oiseaux
l’apparition
du comporte-ment de couvaison pose des
problèmes impor-
tants pour la
production
d’oeufs. L’étude des mécanismes neuroendocriniens de cephéno-
mène et son déterminisme
génétique
est entre-prise
afind’envisager
sasuppression.
1.
2 / Les relations sociales
Les animaux
domestiques appartiennent
à desespèces qui
vivent en permanence en groupes. Chez lesongulés
sauvages, l’unité de base est constituée par un groupe de femellesd’origine
matriarcale. Les mâles y sont associés d’une manièrebeaucoup plus
lâche et formentsouvent des groupes
indépendants.
a / Facteurs
généraux
Chez tous les animaux, il existe une distance minimum en
deçà
delaquelle
laprésence
d’uncongénère
est considérée comme uneagression
et entraîne des menaces, coups ou combats.
Les caractères
spécifiques
ou individuelsd’agressivité
en font varierl’importance.
Cheztoutes les
espèces domestiques,
cette distanceest très faible. Le porc ou la
poule
peuvent même rechercher un contactcorporel
avec uncongénère.
Par
ailleurs,
chez desespèces qui
vivent enpermanence en groupes, les occasions de conflit sont nombreuses : accès à
l’aliment,
àun lieu de
gîte,
à unpartenaire sexuel,
etc.Elles sont résolues par l’existence d’une hiérar- chie sociale
qui
assure la solution non violente des conflits cequi permet
la permanence du groupe. Le fonctionnement en a été étudié endétail chez les bovins.
b / Fonctionnement
du
groupe social des BovinsL’observation d’un groupe de bovins met en
évidence l’existence de relations de domi- nance-subordination entre tous les individus
pris
deux à deux. Les manifestations comporte- mentales sont unidirectionnelles : le subor- donné nedirige
ni coup ni menace vers le dominant. Toutefois les manifestations agres- sives sont rares. Laplupart
des situations de conflit -compétition alimentaire, préséance -
sont résolues par de
simples
menaces, ou unévitement
spontané
du subordonné. Les coups sont rares et les véritables combatsexception-
nels.
Dans une situation de
compétition,
en l’ab-sence de manifestations
agressives,
la seuleprésence
du dominant suffit donc à maintenir à distance le subordonné. Cette distanceapparaît particulièrement importante
au niveau de latête de l’individu. Un obstacle
placé
entre deuxBovins et limité à cette
partie
du corps suffit àpermettre
au subordonné l’accès àl’objet
de lacompétition (Bouissou
1985,figure 4).
La réunion d’animaux ne s’étant
jamais
ren-contrés auparavant a
permis
de constater que les relations de dominance-subordination s’éta-Lors
de
la constitutiond’un
groupe debovins, des
relationshiérarchiques
semettent en
place
trèsrapidement,
etelles
sont
d’autant plus
stables
qu’elles
ontété établies de
façon
moins violente.
blissent très
rapidement,
pour laquasi-totalité
en moins d’une heure. Les combats sont rares,
ils concernent environ le tiers des animaux
pris
deux à deux. Les relations de dominance- subordination ne sont donc pas, dans leurmajorité,
déterminées par la mise àl’épreuve
de la force
respective,
ou parl’aptitude
au com-bat des individus. Plus
surprenant, beaucoup
de ces relations sont d’emblée efficaces sans
contact
physique, après
unesimple
menace, ou même un évitementspontané (Bouissou
1974,figure 5).
Les relations ainsi établies sont très stables.
La
majorité
d’entre elles sontinchangées après plusieurs
années. Leur stabilitéapparaît
d’au-tant
plus grande qu’elles
ont été établies de manière moins violente. Cellesqui
ont été éta- blies à la suite de combats sont leplus
fré- quemment remises en cause.Lorsqu’il s’agit
d’un groupe d’animaux réu- nisdepuis
la naissance, les relations de domi- nance-subordinationapparaissent approximati-
vement lors de la
puberté
chez les femelles.Cependant,
en cequi
concerne lesmâles,
leurapparition
estbeaucoup plus tardive,
souventaprès l’âge
de deux ans. Les relations de domi- nance-subordinationn’expliquent qu’une
par- tie del’organisation
d’un groupe de Bovins : cellequi
concerne la solution des conflits. Des liaisons fortes entre les individus rendent compte de la cohésion du groupe. Ainsi, lespremiers
contacts ont uneimportance
décisivepour la formation d’associations sélectives :
lorsque
desjeunes
Bovins femelles sont élevésensemble,
ils établissent entre eux des liensqui persistent
àl’âge
adulte et se manifestent parune association étroite et une
grande
toléranceen situation de
compétition (Bouissou
et Hôvels1976,
figure 6).
c / Conclusion et
application
Les relations sociales sélectives
qui
s’établis-sent au cours du
développement
permettent la constitution de groupes stables et tolérants dans lescompétitions. Toutefois,
des animaux inconnus sontcapables
d’établir uneorganisa-
tion de
troupeau
d’une manière efficace etrapide.
Les modalités de maintien des relations peuvent être utilisées pour proposer un sys- tème de distribution alimentairequi
assure par desséparations adéquates
laprotection
vis-à-vis d’un voisin dominant et permet ainsi une
régularisation
desquantités
consommées(figure 6).
La modification des groupes entraîne des
perturbations
résultant de l’établissement de la hiérarchie. La stabilité des groupesd’élevage
est donc un facteur favorable. Dans le cas des oiseaux, il est
possible
de définir une tailleopti-
male du groupe -quelques
individus seulement-
qui
permet l’établissement d’une hiérarchie stable et évite combats et blessures.Figure
6. Effet d’un contact socialprécoce (com-
pagnons = animaux élevés ensemble
depuis
lanaissance)
sur lacompétition
alimentaire(d’après
Bouissou et Hôvels
1976). Temps
d’alimentationen minutes pour un maximum de 10 minutes et nombre
d’agressions
en 10 minutes.1.
3 / La reproduction
Chez les
ongulés domestiques,
mâles etfemelles ont une structure sociale relativement
indépendante.
Il n’existe pas de lien permanententre eux, leur rencontre est limitée à la
période
de l’activité sexuelle. Lors de lapériode
de
reproduction,
une recherche mutuelle dupartenaire
sexuel a lieu. Elle donne lieu à com-pétition
entre lesmâles,
tandis que les femellesse rassemblent en harems
temporaires
autour des dominants. Chez les Porcins, comme chez les Ovins et les Bovins, la femellejoue
un rôle décisif dans la rencontre dupartenaire.
Le mâle recherche le contact, mais de manière bienmoins sélective. Une fois en contact
direct,
la posturecopulatoire
de la femelle est induite lors de ses interactions avec le mâle. L’odeur du verrat, mais aussi ses émissions sonores, ont uneffet cumulatif pour faciliter
l’apparition
de cette posture. Le contact direct avec le mâle n’aqu’une importance
mineure. La réaction sexuelle de celui-ci est déclenchée par la pos- ture d’immobilisationcaractéristique
de laréceptivité
sexuelle de la femelle(Signoret 1972).
Bienqu’il n’y
ait pas de lien permanent, despréférences
existent de la part des mâles pour certainesfemelles,
sans que les méca- nismes n’en aient pu être élucidés.Les
phénomènes
de lareproduction
sedéroulent normalement chez des
sujets
desdeux sexes isolés ou élevés en
ségrégation
sexuelle. Un environnement socialappauvri
lors dudéveloppement - isolement,
absence de contact avec des femelles - peut, dans certainscas, apporter un
léger
retard dans la mise enplace
de l’activité sexuelle dujeune
mâle(Orgeur
etSignoret
1984,figure 7). ).
Les interactions socio-sexuelles peuvent moduler le déroulement
temporel
ou l’intensité des fonctionsphysiologiques
aussi bien chez la femelle que chez le mâle. Lors de l’anoestrus saisonnier de la brebis ou de lachèvre,
lapré-
sentation du mâle
peut
provoquer lareprise
descycles (Prud’hon
etDenoy
1969,figure 8).
Conclusions
etapplications
Le comportement sexuel des
espèces d’ongu-
lés
domestiques
est caractérisé par la facilité de mise en oeuvre desréponses sexuelles,
et l’in-dépendance qu’elles présentent
parrapport
auxfacteurs sociaux : absence de liens sélectifs chez les
adultes,
etdéveloppement
descapaci-
tés
comportementales indépendant
de l’envi- ronnement social. Ces résultats sont utilisés pourgérer
lareproduction
artificielle des mam-mifères : collectes de semence, détection d’œs-
trus. Ils peuvent aussi être
appliqués
enélevage
extensif pour
optimiser
l’utilisation des repro- ducteurs.Enfin,
les interactions socio-sexuelles(effet mâle) permettent
dedisposer
deméthodes « naturelles » de maîtrise et de syn- chronisation de la
reproduction.
2 / Domestication et évolution des
capacités adaptatives des
racesL’animal
domestique
occupe une niche éco-logique
dont les contraintes sont définies par l’homme. Lesespèces qui
ont étédomestiquées possèdent,
dans leurs relationssociales,
descaractéristiques qui
sontsusceptibles
de rendrecompte
de cetteaptitude
à une relation de domestication. Deplus, chaque
type deproduc-
tion constitue une niche
écologique particu-
lière. Parexemple,
la recherche d’uneproduc-
tion laitière comporte des contraintes
spécifi-
ques dans le domaine du comportement mater- nel. La différenciation de races
spécialisées
pour une
production correspond
à une formed’évolution
adaptative.
Cette
hypothèse
peut être mise àl’épreuve
en comparant les réactionscomportementales
dans des races
adaptées
à différentesproduc-
tions et en tentant de réaliser des
expériences
de sélection sur des critères
d’adaptation
auxcontraintes de
l’élevage.
Ainsi, des animaux de deux races bovines : la Frisonne,
spécialisée
dans laproduction
lai- tière, et laSalers,
racerustique
peuspécialisée,
ont été
comparées (Le
Neindre 1984,figure 9).
Dans les conditions de l’allaitement
artificiel,
les veaux frisons isolésapparaissent
dès la nais-sance
plus vigoureux
que ceux de race Salers.Ils
ingèrent
enplus grande quantité
le colos- trum, cequi
est essentiel pour leur survie,puis
boiventplus
facilement le lait distribué au seau, et consommentplus
d’aliments solides.Au contraire, allaitement naturel et en
vêlage
en
plein-air,
les Salersréagissent
mieux que les Frisons. En cours delactation,
les Frisonnes sont moins sélectives et sontplus fréquemment
tétées par des veaux
étrangers. Après
uneexpé-
rience d’allaitement
naturel,
les vaches fri-sonnes peuvent être traites sans difficulté. Par contre, les Salers refusent activement de « don-
ner leur lait » ce
qui
conduit à une baisseimportante
par rapport à leurproduction potentielle.
Deux types de
comportements
semblent par- ticulièrement maladaptés
dans les conditions del’élevage :
les réactions de peur et les conduitesagressives.
Par rapport à leurscongé-
nères sauvages, les animaux
domestiques
serévèlent à la fois très
calmes,
peu émotifs et très tolérants envers leurscongénères. L’hypothèse
de la
possibilité
d’une évolutionadaptative
deces comportements a été mise à
l’épreuve
par desexpériences
de sélectiondivergente
entre-prises
sur le modèle de la caille(Mills
et Faure1991,
figure 10).
L’uneporte
sur la motivationsociale,
l’autre sur la réactivité émotionnelle.La réactivité émotionnelle peut être mesurée par le temps
pendant lequel l’animal,
àqui
on aimposé
uneimmobilisation,
maintientsponta-
nément cette
posture (immobilité tonique).
Lamotivation sociale est
quantifiée
par la distance parcourue par un animalplacé
sur untapis
roulantqui
le maintient à distance constanted’un groupe de
congénères.
Ces deux carac-tères
répondent
facilement à la sélection.Conclusions et
applications
Le choix des races pour une méthode d’éle- vage est
critique
car lescapacités d’adaptation
Figure
10. Effets d’une sélectiondivergente
chezla caille sur la réactivité émotionnelle et la motiva- tion sociale
(voir
texte pour les critèresmesurés).
(d’après
Mills et Faure1991). ).
peuvent
être très différentes. Ainsi le veauSalers est
plus rustique
pour des mise bas enliberté,
mais le Frisons’adapte
mieux à un éle-vage artificiel. La sélection sur la
performance
aentraîné des
changements
dans les réactionscomportementales.
Lespoules
modernes pro- duisentdavantage
en batteriequ’en
liberté alors que le contraire était vrai avec les souchesdisponibles
voici trente ans. Il estpossible d’imaginer
introduire desparamètres
de com- portement dans les critères de sélection pourun
type
donné deproduction.
3 / Le bien-être de l’animal
d’élevage et la relation
homme-animal
Pour évaluer les conditions d’entretien de l’animal
d’élevage,
lapremière
démarche estune recherche
d’objectivité :
il convient doncd’éviter
l’anthropomorphisme qui
consiste àprêter
à l’animal des réactionsqui
seraient lesnôtres. La base de l’évaluation est alors consti- tuée par la connaissance des
comportements exprimés
dans des conditionsoptimales.
Enpratique, cependant, ’chaque système d’élevage implique
des contraintes dontl’importance
etles
conséquences
doivent être estimées.Les critères du bien-être de l’animal d’éle- vage sont
multiples.
- Le
premier,
et leplus évident,
estl’intégrité physique
de l’animal : absence de blessures oude lésions diverses
qui pourraient
résulter de conditions delogement
ou de contention ina-daptées.
- La
présence
deperturbations
dans les com-portements
traduit uneinadaptation.
Il peuts’agir
destéréotypies (mouvements répétés)
mais aussi de
perturbations
dans lesrythmes d’activité,
dans lespostures.
- Si les réactions de peur ou de douleur sont
facilement
détectables,
il estplus
difficile demettre en évidence une situation de stress chro-
nique qui n’apparaîtrait
que par des mesuresphysiologiques
fines(dosages
hormonaux parexemple).
-
Enfin,
la notion de confort ou depréférence
peut être mesurée
objectivement
par desépreuves
de conditionnementopérant :
l’ani-mal est mis en situation
d’exprimer
son choixpour un
type
delogement,
unaliment,
etc. Si ellesparaissent séduisantes,
cestechniques
ne peuvent être utilisées sansprécautions.
Parexemple,
une limitation de la consommationspontanée
est souvent nécessaire à la santé de l’animal. Parailleurs,
les choixdépendent
sou-vent de
l’expérience :
si l’on propose à des pou- lets le choix entre un sol degrillage
ou de sciure, ils choisiront le type de sol surlequel
ilsont été élevés.
Enfin,
ilimporte
dequantifier
lanotion de
confort/inconfort.
Pour cefaire,
desépreuves
demandent à l’animal d’effectuer une manceuvre, parexemple d’appuyer
un certainnombre de fois sur un
levier,
pour obtenir une«
récompense
». En faisant varier laquantité
de« travail » demandé au
sujet,
il estpossible
demesurer
l’importance
pour l’animal de larécompense qu’il peut
en obtenir. C’est ainsi quepeuvent
être estimés les besoins en lon- gueur demangeoire
ou en espacedisponible
pour des
poules
en cages.Cependant, l’élevage
ne se limite pas aux interactions de l’animal avec son environne- ment, l’homme yjoue
un rôle essentiel. Il inter- vient de manière décisive : un bon éleveur réus- sira, même dans des conditionsdifficiles,
à entretenir des animauxéquilibrés
et en bonne santé, tandisqu’un
mauvais ne mettra pas àprofit
les meilleures installations. L’évaluation d’unsystème d’élevage
ne peut se faire valable- mentqu’en
prenant encompte
ce facteur. Pourcela, l’approche
de typeépidémiologique, qui prend
en compte l’interaction de tous les fac- teurs, ycompris
le rôle del’éleveur,
est seulecapable d’apporter
une solution. C’est par une telleapproche
quepourront
être déterminésavec sécurité les
problèmes posés
par un sys- tèmed’élevage.
Les contraintes sont sans doute
plus
évi-dentes en
élevage
intensif : limitation de l’es- pace,isolement,
mais elles sontégalement pré-
sentes dans les conditions « naturelles » de l’extensif :
prédation,
aléasclimatiques, parasi-
tisme. Le niveau de contrainte a des consé- quences souvent
importantes
sur le coût de laproduction.
La définition du niveau de contrainteacceptable
est, en fin de compte, un choix de société face au coût desproduits
ali-mentaires. Les études de comportement four- nissent des instruments de mesure, mais ne
peuvent permettre
deprendre
la décision défi- nitive.Références bibliographiques
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Les
études de comportement permettent de
quantifier le
niveaudes
contraintesappliquées
àl’animal,
contraintesqui
existent tant enélevage
intensif(limitation
del’espace...J
que dans lesconditions
naturelles(climat, t,
prédateurs...).
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Summary
Domestic animal behaviour and modern man-
agement
techniques.
Knowledge
of behaviour can contribute to thedevelopment
ofimproved
or new methods ofhusbandry taking
in accountadaptation
andwelfare of domestic animals.
Research, especially
in INRA, has led to anunderstanding
of the mechanisms of interin- dividual relations : maternal behaviour in ruminantsmostly
relies onolfactory recogni-
tion. The establishment of the maternal bond involves the
production
ofoestrogens by
theparturient
femaletogether
with the sensory stimulations ofparturition.
Socialorganiza-
tion involves dominance-submission relation-
ships
whichprovide
a solution tocompetition,
but selective bonds between individuals main- tain the cohesion of the social group
together
with
increasing
mutual tolerance.The selection for
production
criteria results inan evolution of domestic animal breeds towards better
adaptation.
Such
results,
could be used toimprove
theadaptation
of domestic animals and to take in account animal welfare under modern hus-bandry
conditions.SIGNORET J.P, 1991. Le comportement de l’animal
domestique
et lestechniques
modernesd’élevage.
INRA Prod. Anim., 4