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Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction réservés'pour tous pays, y compris l'U.R.S.S.

© 1963, Editions Gallimard.

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A GEORGES LAMBRICHS

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Introduction

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THÈME ET MODULATION

Nous entendons par thème, ici comme dans notre précé- dent ouvrage x, la trace qu'un souvenir d'enfance a laissée dans la mémoire d'un écrivain (et, en généralisant, dans celle d'un artiste, d'un savant, d'un philosophe, etc.). Ce souvenir, ou souvenir thématique2 n'est pas toujours inconscient. Ce qui l'est, en revanche, presque toujours,

c'est la relation du thème à l'œuvre 3.

Nous entendons par modulation, tout analogon du thème, en d'autres termes, le thème symbolisé. Ainsi, chez Poe, le village circulaire du Diable dans le Beffroi4 symbolise ou

i. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, chap. I, Du thème (pp. i3-i8).

2. A quel âge le souvenir thématique s'imprime-t-il dans la mémoire?

Entre deux et dix ans, disions-nous dans Genèse (p. 5o6), avec un maximum entre six et huit ans « l'âge des premières significations à la fois complexes et ordonnées ». Ainsi Vigny a été « imprégné vers sept ou huit ans; Hugo, entre sept et neuf ans; Baudelaire, vers six ans; Mallarmé, aux environs de dix ans; Verlaine vers quatre ans; Valéry à trois ans; Claudel, certai- nement avant quatorze ans; Apollinaire entre trois et sept ans. Ajoutons que le souvenir thématique de Nerval date de ses « premières années » (sans doute avant sept ans, cf. Œuvres de Nerval, Bibl. de la Pléiade, p. l55) celui de Lautréamont, de l'éveil (précoce) à la sexualité; celui de Kafka, des années précédant et suivant l'admission au Gymnase (donc sans doute vers huit-neuf ans); celui de Julien Gracq, enfin, de l'âge de onze ou douze ans. Nous ne savons rien de certain de sur l'âge du souvenir thé- matique chez Gogol, mais il nous paraît évident qu'il doit dater également des premières années de la vie consciente.

3. Notons pourtant deux ou trois exceptions. Gracq est parfaitement conscient du rôle que joue le lancement de 1'lle-de-France dans son œuvre (cf. infra, p. 20,5; mais aussi p. 328, n. i). De même, Hugo sait qu'une

« petite estampe » peut devenir pour le poète, une fois adulte, « une grande et formidable vision », et il compare ce« fantôme », cette « chimère », à un rayon ou à une flamme qui « traverse n nos songes « et, selon le reflet colorant, le même rêve est une gloire céleste ou une apparition de l'en- fer a (cf. Genèse, p. io3). On pourrait relever chez Lorca (que nous n'étu- dions pas dans cet ouvrage) des aveux analogues.

4. Cf. infra, pp. 37-41.

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Domaines thématiques

module, avec ses soixante maisons toutes semblables, le cadran circulaire d'une horloge, il en est l'analogon ou la

modulation. Nous pensons que la quasi-totalité de l'œuvre

d'un écrivain (et, en généralisant, la quasi-totalité des pensées, des actes, des sentiments de chacun) constitue le

domaine modulateur du thème privilégié, ou, si l'on préfère,

peut s'interpréter comme un ensemble de modulations du thème. Ainsi, que l'on prenne Le Diable dans le Beffroi ou Le Corbeau, La Chute de la Maison Usher ou Une Descente dans le Maelstrom, chacun de ces textes s'explique comme modulant le thème de l'Horloge1; que l'on analyse, chez Gogol, Le Nez ou Les Mémoires d'un Fou, on y retrouve une modulation du thème du Bulbe, aperçu à la fois comme Nez et comme Coupole 2 qu'on lise, de Julien Gracq, tel

poème en prose ou Le Château d'Argol, Un Balcon en

Forêt ou Le Rivage des Syrtes, toujours ce que nous voyons se profiler, derrière le texte explicite, c'est un ensemble de modulations du thème Navire lancé 3, etc.

PHÉNOMÉNOLOGIE DES THÈMES

Que sont ces thèmes? Dans Genèse de l'Œuvre poétique, nous avons tenté de montrer que, tout en s'enracinant toujours dans un sol infantile ou enfantin, ils peuvent

affecter une extrême diversité de formes 4. Le thème est

tantôt un objet, comme l'Horloge chez Vigny 5, ou mais autrement chez Poe 6. Et l'on découvre chez Gogol non pas un, mais au moins deux objets la Coupole russe

et le Portail gothique unis, il est vrai, par une antithèse

à la fois architecturale et idéologique, et vus à travers une identification infantile à un Nez ou à un Visage 7. Tantôt le thème est une légende illustrant une gravure ainsi, chez Hugo, la légendaire Tour des Rats8 et, chez Nerval, les récits concernant la mère morte, aux traits rendus présents

i. Cf. infra, pp. 37 sqq.

2. Cf. infra, pp. 87 sqq.

3. Cf. infra, pp. 295 sqq.

4. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, pp. 5o4 sqq.

5. Ibid., pp. 33 sqq.

6. Cf. infra, chap. i.

7. Cf. infra, chap. 11.

8. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, pp. io3 sqq.

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Introduction

par une gravure intitulée la Modestie 1. Parfois le thème est une agrégation de souvenirs touchant un aspect fonc- tionnel de l'existence enfantine tel, centré sur l'Oiseau chu et mort, chez Mallarmé, l'ensemble des réminiscences relatives à la capture des petits oiseaux2 ou encore, chez Lautréamont, l'ensemble des souvenirs, pensées et senti-

ments axés sur un certain Mal d'Aurore 3. Au moins une

fois chez Baudelaire il s'agit d'un fantasme, celui du Revenant qui vient retrouver son épouse vivante 4. Mais, le plus souvent, le thème est la trace d'un souvenir événe- mentiel, unique ou multiple celui d'une Procession de Pénitents, chez Verlaine 6, d'un sevrage accompli au moyen d'une technique particulièrement repoussante, chez Claudel 6, d'une Noyade parmi les Cygnes, chez Valéry 7, de l'Allumage du Feu chez Nerval 8, du Lancement de l'Ile-de-France, chez Gracq 9.

Considéré à un autre point de vue, chaque thème pré- sente, presque toujours, une pluralité d'aspects. Ainsi l'Horloge thématique est vue, chez Poe, tantôt comme Cadran, tantôt comme Rencontre d'Aiguilles, comme rythme du pendule ou comme poids baissés et remontés 10.

La même Noyade peut être présente, dans l'œuvre de Valéry, selon l'aspect thématique du Bassin, des Cygnes, de l'asphyxie ou de la résurrection u. Et, à chacun de ces aspects, correspond souvent un cycle relativement auto- nome dans l'œuvre citons, chez Poe, le cycle de Douze heu- res, de Six heures, des Poids, etc.; chez Hugo, le cycle du Ciel de Fête, le cycle de la Naissance monstrueuse, etc. 12.

Ajoutons que chaque thème peut être modulé selon un analogon privilégié qui, à son tour, devient thème d'un ensemble de modulations indirectes. Ainsi, dans l'œuvre

1. Cf. infra, pp. i3g-i4i.

2. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, pp. 224 sqq.

3. Cf. infra, chap. iv.

4. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, pp. i85 sqq.

5. Ibid., pp. 297 sqq. Il est probable que Verlaine a contemplé plu- sieurs processions.

6. Ibid., pp. 338 sqq. Il s'agit d'une technique contemplée, non subie.

7. Ibid., pp. 338 sqq.

8. Cf. infra, pp. i4i sqq. Le thème en question peut cristalliser plu-

sieurs expériences de ce type.

9. Infra, pp. 295 sqq. Il est difficile de se prononcer sur la structure du souvenir thématique d'Apollinaire. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, pp. 499 et 539-541.

10. Cf. infra, pp. 67-72.

il. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, chap. VII.

12. Cf. ibid., chap. 11.

Extrait de la publication

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Domaines thématiques

claudélienne, le thème de l'Arbre n'est sans doute qu'une modulation du thème, plus fondamental, du Sein doux-

amer 1. Mais l'Arbre est à son tour le thème d'un domaine

modulateur particulièrement riche, et sans référence directe au Sein doux-amer, puisque tous les poèmes de Connais- sance de l'Est, en particulier, s'expliquent par l'Arbre 2.

PHÉNOMÉNOLOGIE DESMODULATIONSS

Formellement, les modulations sont d'une extrême diver- sité. La modulation peut être une intrigue de roman (Hugo), un sujet de conte (Apollinaire, Poe, Gogol). Mais un destin peut également moduler le thème du poète (Poe comme horloge détraquée, le suicide de Nerval, rue de la Vieille-Lanterne, et qui module à la fois le Portrait de soi- même, accroché au lacet mortel, et l'Allumage du Feu vital à une lanterne 3). Plus simplement, une modulation peut être le canevas implicite d'un poème (ainsi dans Le Titan d'Hugo 4), une source de métaphores et d'images (en parti- culier chez Gracq B), celle d'un vers ou d'une strophe 6. Elle peut être aussi une doctrine religieuse7 ou un système philosophique 8.

L'allure globale des modulations peut également varier d'un auteur à l'autre, ou même d'un versant à l'autre d'une œuvre. Il semble qu'on puisse distinguer au moins trois faciès faciès à paillettes thématiques, où les modulations sont présentes de façon rhapsodique et dispersée, ainsi dans les Orientalesou dans Liberté grande 10; faciès panora- mique, où chaque œuvre module à sa façon l'essentiel du thème ainsi dans les poèmes de Valéry, dans les contes

i. Ibid., pp. 354 sqq.

2. Ibid., pp. 338-354.

3. Infra, pp. 212-213.

4. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, pp. i35-i37.

5. Cf. infra, chap. vi.

6. Ainsi, chez Valéry,

Ce toit tranquille où marchent des colombes

module certainement la surface, toit, du Bassin thématique, où nagent des cygnes, et sur lequel va marcher ce « cygne improvisé », l'Enfant (Genèse de l'Œuvre poétique, p. 438).

7. Ainsi chez Nerval cf. infra, p. 184.

8. Cf. notre étude, en préparation, sur Henri Bergson.

9. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, pp. 94-97.

10. Cf. infra, pp. 296 sqq.

Extrait de la publication

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Introduction

d'Apollinaire, dans les récits de Kafka 1; enfin faciès à

horizons successifs: ainsi les romans de Gracq et d'Hugo, où s'inscrivent symboliquement, à côté des divers aspects

du thème lui-même (lancement du navire, ou châtiment du mauvais évêque), un ensemble d'horizons implicites (la mer, la construction du navire, les voyages en mer, chez Gracq; le Moyen Age, les ruines, les enfantements mons- trueux, chez Hugo 2).

LA MÉTHODE

Quelle méthode emploierons-nous pour découvrir un thème, et pour en suivre le destin esthétique à travers le

dédale de ses modulations? Bornons-nous à rappeler les

pages de la Genèse de VŒuvre poétique relatives à cette question 3.

a) Les souvenirs d'enfance.

La technique la plus simple consiste à partir des souve-

nirs d'enfance dûment authentiqués. Ainsi, le texte de Valéry intitulé En f ance aux Cygnes4 nous a fourni presque immédiatement la clef d'une foule de poèmes, aperçus

aussitôt comme modulations analogiques de ce thème 5.

De même, le souvenir d'enfance raconté par Rimbaud à Ernest Delahaye, et sur lequel insiste Mme S. Briet 6, pourrait bien être le « chiffre » des Illuminations.

Mais cette méthode n'est pas toujours praticable. Com-

ment savoir, parmi les dix ou quinze souvenirs d'enfance souvent offerts au lecteur, quel est celui qui a cristallisé en

thème? Il faut chercher, creuser au-dessous du texte expli- cite, viser des analogies qui peuvent s'avérer partielles,

trop lointaines, illusoires. Fréquemment, le souvenir

i. Cf. Genèse, chap. vu et VIII, et infra, chap. v.

2. Cf. Genèse, chap. n, et infra, chap. vi.

3. Pp. 19-29.

4. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, p. 388.

5. Ibid., chap. vu en entier.

6. Dans une étude inédite. Il s'agit du Rimbaud de Delahaye, p. 17, où figure un bassin d'argent jeté à terre alternativement par le père et la mère du poète.

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Domaines thématiques

d'enfance n'est pas au point de départ, mais au point d'arrivée. Ainsi, pour Verlaine, ce sont nos analyses et lectures antérieures qui sont venues converger, inespéré- ment, vers le souvenir de la Procession des Pénitents 1.

Disons que le souvenir d'enfance thématique est l'alpha ou l'oméga de la recherche analytique, que s'il s'aperçoit clairement et distinctement à travers la quasi-totalité des œuvres, son autorité n'a pas besoin d'être discutée, et que s'il vient à notre rencontre en fin d'analyse, la convergence en elle-même suffit à garantir la validité des lectures anté-

rieures.

b) Les textes révélateurs.

Un autre procédé consiste à partir du déchiffrement thématique d'un texte suffisamment bref et explicite pour que le thème s'y inscrive presque en clair, et d'emblée.

Ainsi notre analyse thématique de Poe a débuté par le Diable dans le Beffroi, conte bref où le village Quelle-heure- est-il se déchiffre immédiatement comme Cadran, et la rencontre du Diable et du Sonneur en haut du beffroi, à midi, comme rencontre des deux aiguilles en haut de ce Cadran même 2. Ainsi, chez Mallarmé, le Démon de l'Ana- logie offre presque sur-le-champ sa signification théma- tique comme symbole d'Oiseau tué dont le poète prend le deuil 3. Ainsi, chez Nerval, la Main enchantée peut être vue directement comme déployant un analogon théma- tique de l'Allumage du Feu 4.

c) Les hantises linguistiques.

Dans d'autres cas, c'est l'insistance de l'écrivain sur une idée ou sur un objet, c'est la persistance de certains noms, de certains verbes, de certains adjectifs, de certaines images

même, qui trahissent, involontairement, une obsession

inconsciente, et peuvent suggérer un souvenir d'enfance, qu'il appartiendrait au chercheur de découvrir.

i. Cf. Genése de l'Œuvre poétique, pp. 3io-3i6, et p. 335.

2. Cf. infra, pp. 38 sqq.

3. Cf. Genèse de l'Œuvre poétique, pp. 24i-a44- 4. Cf. infra, pp. 141-148.

Extrait de la publication

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Introduction

d) Exemples.

Mais, le plus souvent, la recherche thématique procède

par une combinaison plus ou moins libre des trois procédés

indiqués souvenir d'enfance authentique, texte révéla- teur, hantise stylistique.

Ainsi, pour donner des exemples précis, nous tenions le thème de Poe dès que nous avions aperçu l'analogie structu- rale entre le village circulaire du Diable dans le Beffroi et le Cadran d'une horloge; le souvenir transcrit dans William

Wilson est venu s'ajouter ultérieurement, et lorsque nous

avions déjà déchiffré bon nombre de contes, à notre appréhension du thème. Gogol nous a livré d'abord son thème dans l'équation linguistique Coupole = Bulbe = Nez 1, à l'aide de quoi nous avons aussitôt élucidé la signi- fication thématique du Nez et des Mémoires d'un Fou.

L'analogie Portail = Visage a ensuite surgi aidée par la lecture thématique de certains textes d'Hugo 2. Nerval nous est apparu d'abord, grâce à la Main enchantée, comme dominé exclusivement par l'Allumage du Feu; mais bientôt, découvrant Héloïse dans Promenades et Souvenirs, nous avons dû constater qu'il y avait chez.Nerval un grand nombre de textes ressortissant à un thème tout différent, celui de la Rencontre sous un Portrait; et c'est plus tard encore qu'on nous a suggéré que l'épisode d'Héloïse tire sans doute sa prégnance de ce qu'il module lui-même un thème plus profond, celui du Portrait de la mère absente (et cette thématique plus profonde et plus riche rend compte peut-être des souterrains nervaliens, modulant le tombeau, la rencontre avec la mère morte dans sa tombe 3).

Chez Lautréamont, nous avons été d'abord frappé par

la fréquence de motifs relevant d'un érotisme particulier, enfantin et solitaire; par la suite nous avons pu déchiffrer Maldoror comme Mal d'Aurore, interpréter correctement le texte sur le paraphimosis 4, et distribuer la quasi-tota-

lité des Chants de Maldoror selon les divers versants de ce

domaine modulateur. Chez Kafka, nous avons été d'abord intrigué par l'infantilisme des personnages du

1. Cette équation transparaît avec évidence en russe. Cf. infra, p. 92.

2. Cf. infra, pp. io4 sqq. et Genèse de l'Œuvre poétique, pp. 161 sqq.

3. Cf. infra, p. 14 1, n. 3.

4. Cf. infra, ]>p. 217 sqq.

Extrait de la publication

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Domaines thématiques

Château. Mais lorsque nous avons compris sa signification thématique d'Examen d'entrée, il a été facile de découvrir dans le Procès son pendant, l'Examen de passage, et une foule d'autres réminiscences lycéennes dans les poèmes en prose et les récits 1. Chez Gracq, ainsi que nous l'avons vu plus haut 2, c'est l'écrivain lui-même qui nous a guidé dans

ladécouverte du thème. Comme nous lui parlions, vers

1956, des travaux que nous avions entrepris pour situer dans une lumière thématique un certain nombre d'auteurs (en particulier Poe et Victor Hugo), Julien Gracq nous a indiqué que lui-même avait essayé de ramener à l'unité

« thématique » toute l'oeuvre d'André Breton, ajoutant que,

pour ce qui regarde ses propres poèmes, on pouvait trouver dans Farouche à Quatre Feuilles des indications assez pré- cises 3. Rien ne pouvait nous encourager davantage dans nos recherches que cette convergence d'idées.

Oserons-nous, revenant en arrière, relater le chemine- ment de nos pensées qui devait aboutir à l'analyse thé- matique des huit poètes antérieurement examinés?

Chez Vigny, le thème de l'Horloge nous a été suggéré d'abord par les hantises proprement linguistiques des poèmes 4, qui ont été presque aussitôt vérifiées par l'analyse de Laurette 5 un peu plus tard nous avons remarqué le

passage du Journal concernant l'horloge noire acquise par

le père de Vigny enfant 6; muni de ces indications conver- gentes nous avons alors parcouru en tous sens l'œuvre du poète à la recherche de modulations horlogères. Chez Hugo, nous avons d'abord trouvé le commun dénomina- teur des Orientales, le Ciel rougeoyant; nous nous sommes aperçus ensuite qu'un grand nombre de romans portait en filigrane l'image de la parturition, puis que le Titan module ce même thème avec plus de clarté encore 7; enfin, cherchant des réminiscences autobiographiques, notre

attention a été attirée par la légende de la Tour des Rats,

laquelle nous a fourni à la fois l'ancrage infantile des thèmes du Ciel rougeoyant et de la Naissance, et un fil conducteur pour la lecture thématique de l'ensemble de

1. Cf. infra, chap. v.

2. P. 9, n. 3.

3. Cf. infra, pp. 295-296. Ce texte (Les yeux bien ouverts) a été recueilli dans Préférences, Corti, 1961, pp. 51-69.

4. Cf. Genèse, pp. 3/J-43.

5. Cf. ibid., p. 49.

6. Ibid., p. i&.

7. Ibid., pp. 1 35 sq<(.

Extrait de la publication

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Introduction

l'œuvre, littéraire et pictural, du poète 1. Chez Baude- laire, confessons que nous avons été d'abord induit en erreur par la fréquence des allusions au sein, qui nous a paru orienter vers le thème de l'Allaitement. Pourtant, si quelques poèmes semblaient recevoir un sens thématique valable à la lueur du thème du Sein, un grand nombre d'autres textes demeuraient, malgré nos efforts, tout à fait en dehors de la thématique entrevue. Ayant alors aban- donné le déchiffrement de l'œuvre baudelairienne, nous avons eu soudain l'intuition, beaucoup plus tard, en lisant un ouvrage de Gide 2, qu'un fantasme analogue à celui que Gide avouait ainsi pouvait expliquer plusieurs poèmes 'de Baudelaire; intuition que nous avons pu à la fois vérifier par des recoupements biographiques, et généraliser au-delà de l'attente, puisque la quasi-totalité des poèmes de Baude- laire a fini par s'intégrer au domaine modulateur du Reve- nant 3. Chez Mallarmé, la fréquence des termes relatifs à l'Oiseau nous a dès l'abord persuadé qu'elle procédait d'un thème implicite, que nous avons aussitôt déchiffré dans le Démon de l'Analogie, et lu à travers les poèmes puis le destin du poète 4. Chez Verlaine, la Velléda nous avait d'abord semblé comporter la probabilité thématique la plus grande; puis, en lisant les Confessions 5, nous avons compris que la statue écaillée n'était qu'un reflet déjà modulateur d'un souvenir plus ancien, la Procession des Pénitents, ce qui a donné plus de consistance et de géné- ralité à notre analyse 6. Chez Claudel, nous avons d'abord trouvé le thème de l'Arbre, dès le début de Connais- sance de l'Est 7; mais la lecture des drames, tout en confir- mant partiellement cette hypothèse, a bientôt ajouté à notre matériel d'analyse le thème du Sevrage et du Sein doux-amer 8, lequel, d'abord aperçu en filigrane dans l'œuvre, a reçu une confirmation autobiographique dans un passage de l'Endormie 9. Enfin, chez Apollinaire,

1. Ibid., pp. io3 sqq.

2. Ibid., p. 188, n. i.

3. Ibid., chap. ni.

4. Ibid., chap. iv.

5. Ibid., pp. 3i3-3i5.

6. Ibid., chap, v.

7. Ibid., pp. 33g sqq.

8. Ibid., pp. 354 sqq.

9. Ibid., p. 354. Au texte cité p. 354 ajoutons celui-ci, qui nous avait échappé, et qui paraît devoir s'interpréter comme une première modu- lation du thème du Sein doux-amer, à la fois attirant et repoussant

« Oh! il n'y a pas de rat ni de singe aussi rusé qu'uno femme rusée! J'ai

Extrait de la publication

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Domaines thématiques

nous avons d'abord été frappé par la constance des motifs relatifs à la nourriture 1; un poème sur le Repasnous a paru avoir valeur d'une réminiscence autobiographique;

enfin, la lecture des proses d'Apollinaire, souvent injuste- ment négligées, a contribué à donner forme et corps à nos conjectures thématiques 3.

RÉSUMÉ DE LA MÉTHODE

Ainsi, pour analyser thématiquement un auteur, il faut,

semble-t-il

i° rechercher l'évidence des souvenirs clairs et distincts, que l'on puisse comparer ensuite aux différentes œuvres

de l'auteur;

20 trouver des textes simples, portant en filigrane de façon indubitable une signification symbolique;

30 discerner les hantises linguistiques et stylistiques, cherchant à les ramener à quelque souvenir attesté ou supposé;

40 enfin effectuer une exploration intégrale de l'œuvre, cherchant à la réduire, si possible, tout entière à la théma- tique proposée.

Il nous semble que l'analyse peut être tenue pour réussie lorsque le thème proposé, d'une part, suffit à interpréter facilement la quasi-totalité de l'œuvre, et, d'autre part, se trouve confirmé par un souvenir d'enfance de l'auteur 4.

vu une fois une petite fille qui se promenait avec son amie; tu sais, deux bouts de gamines avec de petites queues blondes et des jambes maigres comme des lattes; or, sur leur chemin il y avait un banc, et sur ce banc une énorme crotte de dindon. Eh bien, la maudite gamine n'a pas eu do cesse qu'elle n'ait réussi à installer le derrière de son amie au beau milieu de cette crotte, et cela avec une gravité et une dignité de maîtresse de mai- son tout à fait magistrales. » (L'Endormie, Bibl. de la Pléiade, t. I, p. 16-17).

On songe également à ce cri jeté par Claudel voyant un enfant tendre

ses mains vers l'hostie consacrée « Pas touche! caca! »

i. Ibid., pp. 452 sqq.

2. Ibid., p. 458.

3. Ibid., pp. 464 sqq.

4. On reconnaîtra une certaine analogie (aperçue après coup) entre les « règles » de la méthode que nous proposons ici, et les quatre « pré- ceptes » du Discours de la Méthode, que l'on a coutume d'appeler respec- tivement préceptes de l'évidence, de l'analyse, de la synthèse et de l'énu-

mération.

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