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Chapitre III Furane, benzodifurane et fluorescence

I. Fluorescence

1. Généralités

La fluorescence et la phosphorescence sont deux formes de luminescence qui peuvent se manifester après l’absorption d’un photon par une molécule. Le photon incident excite la molécule et le retour à l’état fondamental engendre l’émission de lumière. La différence entre les deux phénomènes est liée au temps de vie de l’état excité : très court pour la fluorescence (entre 10-14 et 10-10 s), plus long pour la phosphorescence (de quelques microsecondes à plusieurs secondes).

Figure 42 : A gauche, (A) fluorite sous illumination naturelle, (B) fluorite sous irradiation UV. A droite, un scorpion sous irradiation UV.131

La fluorescence est observable dans la nature, que ce soit dans le monde minéral avec par exemple la fluorite qui donne son nom au phénomène, ou dans le monde animal comme chez certains scorpions (Figure 42). Il s’agit aussi d’une propriété qui peut être exploitée.132 L’éclairage, par exemple, avec les « néons » ou ampoules à basse consommation, qui sont constitués d’un tube dont les parois sont recouvertes de poudres fluorescentes et qui contiennent des gaz. Ces gaz, une fois ionisés, émettent un rayonnement ultraviolet qui est transformé en lumière blanche par fluorescence des poudres sur la paroi. On utilise aussi ce phénomène dans la caractérisation de matériaux, par spectrométrie de fluorescence X133 ou encore dans l’imagerie biomédicale134 avec l’utilisation de sondes fluorescentes.

2. Phénomène physique

Les phénomènes de photoluminescence sont illustrés par un diagramme de Perrin-Jablonski qui représente les divers états énergétiques de la molécule (Figure 2).135 Les états énergétiques sont caractérisés par leur spin S et leur multiplicité M qui sont liés aux spins des électrons si présents sur les orbitales frontières de la molécule.

131 https://fr.wikipedia.org/wiki/Fluorescence

132 C. A. Parker, W. T. Rees, Analyst, 1962, 87, 83-111.

133 M. West, A. T. Ellis, P. J. Potts, C. Streli, C. Vanhoof, P. Wobrauschek, J. Anal. At. Spectrom., 2015, DOI : 10.1039/c5ja90033f.

134 S. A. Hildebrand, R. Weissleder, Curr. Opin. Chem. Biol., 2010, 14, 71-79.

135 B. Valeur, Molecular Fluorescence Principles and Applications, Wiley, London, 2001.

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𝑆 = ∑ 𝑠𝑖 ; 𝑀 = 2𝑆 + 1

Ainsi l’état fondamental d’une molécule organique est le plus souvent de spin S = 0 et de multiplicité M = 1 soit un état singulet (Figure 43). Les états excités peuvent être soit dans un état singulet, lorsque l’électron qui migre sur des orbitales plus hautes garde son spin, ou dans un état triplet (S = 1, M = 3), lorsque le spin électronique change.

Figure 43 : A gauche, états électroniques et leur illustration. A droite, diagramme de Perrin-Jablonski.136 CI : Conversion Interne, CIS : Conversion Inter-Système, RV : Relaxation Vibrationnelle.

Une molécule fluorescente va tout d’abord subir l’attaque d’un photon incident qui va la faire passer de son état fondamental S0 à un état excité S1. C’est le retour à l’état fondamental par un processus radiatif qui entraine l’émission de lumière. Cette transition S1 S0 est très rapide.

Pour une molécule phosphorescente, l’attaque du photon incident fait passer la molécule de l’état S0 à l’état S1. Un couplage spin-orbite va permettre à la molécule de passer de l’état S1 à l’état T1, transition interdite sinon. Enfin la transition T1 S0 entraine l’émission d’un photon. Le temps de vie de l’état excité est plus long que lors du processus de fluorescence car l’état triplet est plus stable que son homologue singulet. Comme la phosphorescence correspond à une transition interdite, elle est en concurrence avec des phénomènes de relaxation non-radiatifs, comme la vibration. Néanmoins, à basses températures ou à l’état solide, ces phénomènes non radiatifs peuvent être bloqués et la phosphorescence peut être observée.

On caractérise la fluorescence, et par extension la phosphorescence, par deux caractéristiques : le temps de vie de l’état excité τ le rendement quantique de fluorescence Φ et le déplacement de Stokes Δλ.

Le rendement quantique de fluorescence correspond à la proportion de molécules excitées qui retournent à l’état fondamental par émission de lumière. Cela équivaut au rapport entre le nombre de photons émis et le nombre de photons absorbés.

Le déplacement de Stokes correspond à la différence entre les longueurs d’ondes d’absorption maximale et d’émission maximale.

136 http://gvallver.perso.univ-pau.fr/?p=164

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3. Inhibition de la fluorescence

Des facteurs structuraux, inter ou intramoléculaires, peuvent entraîner une inhibition de la fluorescence. La molécule préfèrera alors une voie de désexcitation autre que l’émission d’un photon.137

a. Mécanismes intramoléculaires

La présence d’atomes lourds, comme les halogènes, aura tendance à faciliter le couplage spin-orbite entre les états excités singulet et triplet. Le couplage spin-orbite est proportionnel à Z4, où Z correspond au nombre atomique, donc plus l’atome est lourd plus ce couplage est important. En conséquence, on favorise la population de l’état triplet de l’état excité au détriment de l’état singulet.

La fluorescence est alors diminuée et la phosphorescence est favorisée (Tableau 15).138

Tableau 15 : Comparaison des rendements quantiques de fluorescence et de phosphorescence de naphtalènes en fonction de l’halogène qu’ils portent.

Molécule ΦF / % ΦP / %

Naphtalène 55 5,1

1-Fluoronaphtalène 84 5,6 1-Chloronaphtalène 5,8 30 1-Bromonaphtalène 0,16 27 1-Iodonaphtalène < 0,05 38

D’autres mécanismes intramoléculaires peuvent défavoriser la fluorescence : les transitions non- radiatives.139 Elles sont associées aux vibrations et rotations internes de la molécule et provoquent la relaxation de l’état excité vers l’état fondamental sans émission de photon. Ces phénomènes résultent de la conversion interne qui se produit quand un état vibrationnel d’un état excité peut se coupler avec un état vibrationnel d’un état de spin identique mais de plus basse énergie. Cette transition entraine un dépeuplement de l’état excité S1 et donc une diminution de la fluorescence.

b. Mécanismes intermoléculaires

D’autres phénomènes extérieurs à la molécule fluorescente peuvent entrainer une baisse de la luminescence. Ce type de « quenching », est dû à l’interaction avec une molécule tierce.140 En interagissant avec son environnement, la molécule excitée retourne à son état fondamental par divers mécanismes : par collision, par formation d’une nouvelle espèce ou par transfert d’énergie.

Par collision avec un autre composé, la molécule excitée va transmettre l’énergie qu’elle a accumulée au cours de l’irradiation à un nouveau système. Ce nouveau système pourra, dans le meilleur des cas, à son tour fluorescer, sinon il retourne à son état fondamental par des processus non radiatifs. Le dioxygène peut supprimer la fluorescence des molécules de cette façon.

La formation d’une nouvelle espèce peut se faire de deux façons : soit par réaction chimique, soit par interaction pour former un complexe, excimère ou exciplexe. Une réaction chimique, à l’instar d’une isomérisation de double liaison C=C, peut être activée par irradiation lumineuse. Elle entraine la formation d’une nouvelle espèce chimique dont les propriétés physiques peuvent être différentes de la

137 E.J. Bowen, Q. Rev. Chem. Soc., 1947, 1, 1-15.

138 G. G. Guilbault, Practical Fluorescence, Marcel Dekker, New York, 1990.

139 E. Lippert, W. Rettig, V. Bonacic-Koutecky, F. Heisel, J. A. Miehé, Adv. Chem. Phys., 1987, 68, 1-173.

140 B. L. van Duuren, Chem. Rev., 1963, 4, 325-354.

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molécule de départ, notamment la fluorescence. La formation d’excimère, et par extension d’exciplexe, survient lorsque la molécule excitée interagit avec une autre molécule pour former un complexe qui n’existe qu’à l’état excité.

Dans ces deux cas, la diminution de la population de la molécule à l’état excité entraine la perte de la fluorescence.

c. Agrégation

De nombreux exemples montrent que la fluorescence est inhibée par l’augmentation de la concentration ainsi que par l’agrégation, ce qui est décrit par ACQ (Aggregation-Caused Quenching ou Quenching Causé par Agrégation).141 Ce phénomène résulte en partie des mécanismes intermoléculaires décrits précédemment. Un grand nombre de composés organiques fluorescents comporte des systèmes conjugués qui établissent des interactions π à hautes concentrations et à l’état solide. Ces interactions sont nuisibles à la fluorescence de la molécule puisqu’elles entrainent une dissipation de l’énergie de l’état excité qui ne peut plus retourner à l’état fondamental par émission de lumière.

L’effet ACQ est d’autant plus dommageable qu’il limite les applications des molécules fluorescentes.

Celles-ci fluorescent en solution, mais lorsqu’elles sont à l’état solide elles n’émettent plus de lumière comme dans le cas de la fluorescéine. Cette molécule est soluble dans l’eau et insoluble dans beaucoup de solvants organiques dont l’acétone. En faisant varier la proportion d’acétone dans un mélange acétone-eau, on constate une diminution de la fluorescence jusqu’à l’extinction complète (Figure 44).

Figure 44 : Fluorescéine et évolution de la fluorescence d’une solution de Fluorescéine dans un mélange acétone : H2O en fonction de la fraction en acétone (en vol%, C = 15 µmol.L-1).142

Les équipements susceptibles de bénéficier des propriétés fluorescentes des matériaux organiques, à l’instar des OLEDs, les utilisent sous forme de films.143 Pour contrer l’effet ACQ, il est possible d’introduire dans le matériau des agents qui vont séparer les chromophores et diminuer ainsi les interactions intermoléculaires entre eux.144 Une autre approche consiste à tirer profit d’un phénomène qui est l’exact opposé de l’effet ACQ, l’effet AIE.

141 G. Chen, W. Li, T. Zhou, Q. Peng, D. Zhai, H. Li, W. Z. Yuan, Y. Zhang, B. Z. Tang, Adv. Mater., 2015, DOI : 10.1002/adma.201501981

142 J. Mei, Y. Hong, J. W. Y. Lam, A. Qin, Y. Tang, B. Z. Tang, Adv. Mater., 2014, 26, 5429-5479.

143 C. W. Tang, S. A. Vanslyke, Appl. Phys. Lett., 1987, 51, 913-915.

144 S. Hecht, J. M. J. Fréchet, Angew. Chem. Int. Ed., 2001, 40, 74-91.

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