• Nenhum resultado encontrado

EN(VAR) - 1 DOSE

I.3.3.4. Les modificateurs synthétiques de PEV 1. MATH20

Figure 20 : Protéine D1 et modification dose-dépendante de la PEV de white-mottled La protéine D1 est une protéine essentielle dont la mutation à l’état homozygote est létale à épuisement du stock maternel de protéine. L’happloinsuffisance de D1 (mutation EP473 à l’état hétérozygote) induit une suppression de la PEV qui se traduit par la restauration d’une coloration rouge normale de l’œil (la quantité de protéine est indiquée sous la forme n x D1 où n représente la dose). À l’inverse, l’ajout d’une dose de D1 conduit à une augmentation de la PEV et une répression de l’expression de l’allèle white-mottled. Cet effet haplo-suppresseur, triplo-enhanceur de PEV est caractéristique des facteurs impliqués dans l’assemblage de l’hétérochromatine. Un tel phénotype est retrouvé pour la protéine HP1 qui reconnaît la lysine 9 de l’histone H3 méthylée ainsi que pour les protéines HDAC et SUVAR3-9 qui participent à réaliser cette modification. L’expression des protéines artificielles D1!E et MATH20 composées exclusivement de motifs A•T hook et dépourvues de la fonctionnalité de recrutement de partenaires protéiques portée par le domaine carboxy-terminal de D1 provoque

GAIN DE FONCTION PERTE DE FONCTION LETALITE

EMBRYON NAIRE

3x D1

0x D1 2x D1 1x D1

WHITE-MOTTLED D1

ESSENTIELLE

VARIEGATION RETRACTION PROPAGATION

HETEROCHROMATINE

37 MATH20 s’associe aux séquences A•T riches

Initialement développée dans l’équipe d’Ulrich Laemmli afin de démontrer la fonc- tion des séquences SAR (Scaffold Associated Regions) riches en A•T dans la dynamique des chromosomes (Strick and Laemmli 1995), la protéine artificielle MATH20 est consti- tuée par la répétition de 20 motifs A•T Hook (Reeves and Nissen 1990) issus de la pro- téine HMG-A humaine. Les auteurs de ce travail ont proposé que les SAR jouent un rôle dans la définition des boucles de chromatine en assurant l’attachement de celles-ci à l’échafaudage protéique qui constitue en métaphase le « squelette » des chromosomes et permet leur assemblage. En accord avec cette hypothèse, les séquences SAR consti- tuent un site préférentiel d’interaction pour la protéine topoïsomérase II, cette dernière assurant un rôle majeur dans la condensation des chromosomes (Adachi, Luke et al.

1991).

De par leur composition nucléotidique particulière (les SAR sont composées de nombreux enchaînements homopolymeriques dA•dT), ces séquences possèdent des ca- ractéristiques structurales typiques des séquences A•T riches et communes aux séquen- ces satellites III. Ces caractéristiques sont une courbure intrinsèque de la double hélice et un sillon mineur à la fois étroit et profond. L’importance de ces propriétés structurales pour l’attachement des séquences SAR au « scaffold » est souligné par les travaux de l’équipe de Laemmli (Adachi, Kas et al. 1989; Kas, Izaurralde et al. 1989).

En effet, l’utilisation de la distamycine (Baraldi, Nunez Mdel et al. 2004), un antibioti- que isolé du champignon Streptomyces distallicus et capable de s’insérer dans le petit sillon des séquences riches en A•T, provoque la dissociation des interactions entre les séquences SAR d’une part et la topoïsomérase II et l’histone H1 d’autre part (Adachi, Kas et al. 1989). Compte tenu du mode de reconnaissance des SAR par la distamycine, Strick mit au point une stratégie basée sur la reconnaissance du petit sillon afin d’interférer au niveau des SAR avec les interactions protéines-ADN. De par l’homologie entre le motif A•T Hook et la distamycine, la protéine MATH20 est capable d’interagir avec une très haute affinité ainsi qu’une grande spécificité avec ces séquences riches en A•T. Utilisée pour titrer les séquences SAR cette protéine gène la structuration des chromosomes mi- totiques ainsi que, dans certaines conditions, leur condensation.

Expression de MATH20 et suppression de PEV dans la lignée de drosophile In(1)wm4h :

Figure 21 : Modèle d’initiation de l’assemblage de l’hétérochromatine péricentrique par la protéine MATH D1

Selon ce modèle, l’interaction entre D1 et les séquences satellites III via l’insertion du motif A•T hook dans le petit sillon des séquences A•T riches permet le recrutement des protéines HP1 et TOPOII via le domaine carboxy-terminal acide de D1. Le recrutement d’HP1 permettrait l’assemblage d’un compartiment d’hétérochromatine et, dans le contexte de l’inversion In(1)wm4h, l’inactivation stochastique de l’allèle white-mottled.

L’expression de D1!E, une forme de D1 tronquée de son domaine carboxy-terminal agit comme un dominant négatif de D1 par compétition avec la protéine endogène pour la fixation aux séquences SATIII. Elle conduit à la suppression de PEV de white- mottled qui traduit la perte des protéines HP1 et TOPOII des séquences SATIII observée par immunofluorescence. L’expression de la protéine artificielle MATH20 composée exclusivement de 20 motifs A•T hook et le traitement par l’oligopyrolle P9 conduisent tous deux par un mécanisme similaire de compétition à la suppression de la PEV et la

white-mottled

D1

SATIII

P9

TOPOII HP1

HETEROCHROMATIN ASSEMBLY

HETEROCHROMATIN DISASSEMBLY RECRUTEMENT

DEPLACEMENT DE D1 PERTE DE TOPOII ET HP1 COMPETITION

D1!E

38 Sur la base de ces résultats, Franck Girard a utilisé le système de ciblage mis au point par Bruno Bello chez Walter Gehring (Bello, Resendez-Perez et al. 1998) afin d’analyser, in vivo, l’influence sur les SAR de l’expression de MATH20 chez la drosophile (Girard, Bello et al. 1998). Un des résultats majeurs de ce travail est que l’expression de MATH20 dans les disques imaginaux d’oeil au troisième stade larvaire provoque la sup- pression de la PEV de l’allèle white-mottled dans la lignée In(1)wm4h.

Suppression de PEV par MATH20 et perte de D1 au niveau des séquences SAT III :

Plus récemment les travaux menés dans notre équipe (Monod, Aulner et al. 2002) ont permis d’élucider le mécanisme de suppression de la PEV de white-mottled par MATH20. Une analyse à la fois in vitro et in vivo de l’interaction de MATH20 avec les sé- quences satellites III a permis de mettre en évidence une compétition entre la protéine Multi A•T Hook artificielle MATH20 et la protéine Multi A•T Hook endogène D1 pour la fixation sur les séquences satellites III. Ces deux protéines reconnaissent les mêmes sites comme le révèlent les expériences de protection à la DNAse et l’expression de MATH20 conduit à une perte du marquage des satellites III par D1 in vivo (voir figure 21).

I.3.3.4.2. Polyamides

L’oligopyrrole P9 supprime la PEV de white-mottled :

L’oligopyrrole P9 appartient à la classe des polyamides, des polymères constitués par la répétition de noyaux pyrrole, imidazoles ou de combinaisons de ces deux motifs ou de leurs dérivés. Initialement développées par Dervan, ces molécules sont capables (tout comme la distamycine composée de trois noyaux pyrroles) d’interagir spécifiquement avec les séquences d’ADN via le petit sillon. Les efforts constants menés par Dervan et ses collaborateurs pour comprendre le mode d’interaction de ces composés avec l’ADN ont permis des améliorations notables dans leur conception aussi bien que dans leur production (Wemmer and Dervan 1997; Kielkopf, Baird et al. 1998; Kielkopf, White et al.

1998; Bremer, Szewczyk et al. 2000; Kielkopf, Bremer et al. 2000; Wurtz, Turner et al.

2001; Belitsky, Nguyen et al. 2002; Fattori, Kinzel et al. 2002; Dervan and Edelson 2003;

Dudouet, Burnett et al. 2003; Melander, Burnett et al. 2004; Dervan, Doss et al. 2005).

L’élucidation par cristallographie de la structure des complexes polyamide:ADN (Kielkopf, Baird et al. 1998; Kielkopf, White et al. 1998; Kielkopf, Bremer et al. 2000) a par ailleurs

permis à Dervan d’établir un code de reconnaissance des paires de bases Watson Crick par les polyamides (Wemmer and Dervan 1997; Dervan, Doss et al. 2005). Ces travaux ont donc ouvert la voie pour la synthèse de longs polyamides capables de reconnaître et de cibler virtuellement n’importe quelle séquence d’ADN avec une grande spécificité et une grande sélectivité. Les polyamides pouvant, à l’instar de la distamycine, (Adachi, Kas et al. 1989; Kas and Laemmli 1992) perturber les interactions ADN-protéines au niveau du petit sillon et l’essor de la chimie combinatoire offrant des possibilités croissantes de fonctionnalisation de ces composés, les opportunités de créer des outils hautement spé- cifiques rendent infini le nombre d’applications de ces molécules (Arndt, Hauschild et al.

2003; Melander, Burnett et al. 2004).

Sur la base de ces travaux et compte tenu de la difficulté d’étudier les séquences hautement répétées liée au manque d’outils adaptés, Laemmli et ses collaborateurs ont développé des polyamides conçus pour cibler spécifiquement les séquences satellites de la drosophile (Janssen, Cuvier et al. 2000; Janssen, Durussel et al. 2000). Parmi ces com- posés, le polyamide P9 cible les séquences satellites A•T riches (SAT I = (AATAT)n et SATIII) et supprime la PEV de white-mottled lorsqu’il est ingéré par des larves au troi- sième stade de développement (Janssen, Cuvier et al. 2000). Ces travaux indiquent que P9 provoque une ouverture de la chromatine au niveau des séquences satellites III comme le révèle l’accessibilité accrue des sites de coupure par l’enzyme de restriction HaeIII et par la topoïsomérase II. Ces résultats sont semblables à ceux déjà observés avec la distamycine (Kas and Laemmli 1992; Bell, Kittler et al. 1997). La corrélation entre ouverture de la chromatine et augmentation de l’expression de l’allèle white-mottled sug- gère que les polyamides peuvent être utilisés pour activer ou réactiver des gènes mis en silence par l’hétérochromatine.

Suppression de PEV par P9 et compétition avec D1 pour la fixation aux satellites III : Les travaux engagés dans l’équipe ont permis, comme dans le cas de l’expression de MATH20, d’élucider le mécanisme moléculaire impliqué dans la suppression de la PEV après traitement par l’oligopyrrole P9. Par des méthodes de protection à la DNAse, Nous avons ainsi pu montrer que les sites d’association de P9 sur les satellites III in vitro sont les mêmes que ceux reconnus par D1 et MATH20. De plus, par suite aux expériences de retard sur gel / compétition, il apparaît que P9 est capable de déplacer spécifiquement la

Figure 22 : Topoïsomérases et réactions de topoïsomérisation

Il existe trois types de topoïsomérases capables de modifier la superhélicité de l’ADN selon trois mécanismes distincts.

Les topoïsomérases de type IA (à gauche) catalysent le passage d’un brin de la double hélice au travers du second brin (le brin clivé).

Les topoïsomérases de type IB (au centre) clivent un brin de la double hélice ce qui permet la rotation libre du brin clivé autour du brin demeuré intact.

Enfin, les topoïsomérases de type II (à droite) réalisent le clivage des deux brins d’une hélice d’ADN et le passage d’un double hélice à travers le duplex clivé.

!Lk représente la variation du nombre de liaison pour un cycle catalytique ; sa valeur traduit la modification de la contrainte topologique.

Image tirée de (Corbett et Berger 2004).

protéine D1 d’un monomère SAT III. Plus frappant encore, le traitement de cerveaux de larves de drosophile perméabilisés puis incubés en présence d’oligopyrrole P9 provoque une totale délocalisation de la protéine D1 des séquences cibles de P9 (SATIII puis SATI) comme révélé par immunomarquage (Blattes, Monod et al. 2006) (voir figure 21).

Pris ensemble, ces résultats confirment le rôle essentiel assuré par D1 dans la mise en silence de l’allèle white-mottled par les séquences satellites III. De manière remarqua- ble, dans chacun des cas présentés ci-dessus, la perte de D1 des séquences SAT III s’accompagne d’une délocalisation de la topoïsomérase II, une cible majeure des théra- pies anti-tumorales. Comme nous le verrons dans la section suivante, l’identification de la topoïsomérase II comme composant fonctionnel de l’hétérochromatine, une des avan- cées majeures liée à nos travaux, éclaire d’un jour nouveau l’observation de son enrichis- sement sur les SAT III connue de longue date, mais pour lequel il n’était pas encore pro- posé d’explication (Kas and Laemmli 1992; Maeshima and Laemmli 2003).

I.4. Les topoïsomérases