Evolution structurale d’alliages Pd-Si amorphes
en
fonction de la température (*)
J. F. Sadoc
(**)
et M.Laridjani (***)
(**) Laboratoire de Physique des Solides, Bât. 510, Université de Paris-Sud, 91405 Orsay, France (***) CEN Saclay, DPC/SSS, 91191 Gif sur Yvette Cedex, France
(Re!vu le 3 juillet 1981, accepte le 2 octobre 1981 )
Résumé. 2014 Nous avons étudié sur deux types
d’alliages Pd80-Si20 préparés
parpulvérisation cathodique
et par trempeultra-rapide
l’influence de latempérature
sur la structure.Les fonctions d’interférence ont été obtenues par la méthode de diffraction des rayons X avec analyse
d’énergie
àangle
fixe (méthode nondispersive).
Cette méthode permet l’étude de la diffraction d’un échantillon maintenu dansun four à
température
bien déterminée.Nous n’observons pas de différence fondamentale dans l’évolution des deux types d’échantillon. Les fonctions d’interférence I(K) et de distribution radiales W(R) évoluent avec un accroissement de la
température
(20 ~ 340 °C). Par contre aucune évolution sensible des fonctions I(K) etW(R )
à 300 °C n’est observée lors d’un maintien 24 h à cettetempérature.
Si la durée de maintien au-delà de 300 °C est courte(quelques
heures), onobserve un comportement quasi-réversible. Par contre, si le maintien à haute température (~ 300 °C) est long (~ 24 h), les fonctions I(K) et W(R ) obtenues
après
retour à 20 °C ont évolué par rapport aux fonctions initiales.Ces résultats peuvent être
interprétés
par l’accroissement de lasymétrie
locale (sitestétraédriques plus parfaits)
avec l’accroissement de la
température.
Abstract. 2014 We have studied the thermal behaviour of two kinds of
amorphous Pd80Si20 alloys prepared by sputtering
andby rapid quenching
from the melt.Interference functions were determined
by
the X-raynon-dispersive
method. This method allows the diffractionstudy
of asample
held in a furnace at a stable temperature. We do not observe any difference between the two kinds ofsamples.
Interference and radial distribution functions evolve with
increasing
temperature (20° ~340°C).
Neverthelessno sensitive evolution of the functions I(K) and W(R ) at 300 °C is observed
during
an isothermalannealing
of 24 h.If the isothermal
annealing
athigh
temperature (~ 300 °C) is short, there is aquasi-reversible
behaviour ; but ifthe
annealing
islong
(24h)
the functions I(K) and W(R ) obtained after return to 20°C are modified relative tothe initial functions. These results are
analysed
in terms of an increase of the tetrahedralperfection.
Classification
Physics Abstracts
61.40
La stabitite des
composes amorphes
est encore unphénomène
malcompris.
11 est admis que 1’etat cris- tallin est 1’etat leplus stable, l’energie
interne etantminimum. Par contre, il n’est pas clairement montre si 1’etat
amorphe correspond
a unequilibre
metastableou a un etat hors
d’equilibre
avec une evolution extre- mement lente vers 1’etat cristallin.Les
experiences
que nouspresentons
ici nerépon-
dent pas directement a cette
question,
mais contribue-ront
peut-etre
a elucider ceprobleme
difficile.Les echantillons de
PdgoSi2o
ont eteprepares
soitpar
trempe ultra-rapide
apartir
duliquide,
soit parpulverisation cathodique.
1.
Principe
del’experience.
- Les echantillons ont ete etudies par diffraction de rayon X atemperature
stabilisee dans un four a
atmosphere
controlee(vide primaire
ou heliumgazeux).
Defaçon
a reduire autantque
possible
les temps de mesure et a accroitre lareproductibilite
desrésultats,
nous avons utilise la méthode de diffraction nondispersive
avecanalyse d’energie.
Pour cela tout lespectre
d’emission d’un tube de rayon X(anticathode d’argent)
estanalyse
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphyslet:019810042022048500
L-486 JOURNAL DE PHYSIQUE - LETTRES
apres
diffraction par 1’echantillon a 1’aide d’un detec-teur solide
Si(Li) [1].
Dans la relation K = 4 7r sin
OIA (ou
bienon fait varier A
(ou
E eneV)
defa~on
aexplorer
undomaine de
1’espace reciproque,
alors que dans uneexperience classique
de diffraction c’est 0 que l’onexplore.
Troispoints importants
ont orienté notrechoix vers cette methode :
- La
géométrie
dumontage
est tressimplifiee
carI’absence de
balayage
enangle
permet I’utilisation d’un fourenveloppant
bien Fechantillon.- Les
temps d’acquisition
d’unspectre
sont courts(500
a 1 000s).
- L’absence de
piece mobile,
donc Finvariabilite desparametres geometriques
durant uncycle complet d’experiences
est un facteur contribuant a avoir uneprecision relative,
sur la variation des fonctions d’inter- ference tressuperieure
a laprecision
absolue sur cesfonctions
qui dependent
deparametres
pas tres bien determines(absorption,
spectre du tube de rayonX,
facteur dediffusion, etc.).
Les taux de
comptage
utilises conduisent a uneprecision
relative sur lesspectres
de l’ordre de1 % .
La stabilite des conditions
experimentales permet
alorsd’apprecier
des variations des details des fonctions d’interference avec uneprecision
du meme ordre.D’autre
part,
les resultats que nouspresentons
ontete
repetes plusieurs
fois sur des echantillons nouveauxafin de confirmer les faibles variations des details des fonctions d’interference.
L’ensemble des fonctions
presentees
a ete obtenu parrecoupement
de resultats obtenus pour troisangles
de mesure
(20= 25, 40
et700)
et un domained’energie
des rayons X variant de
6,6
a 20 keV. Une fonction de reference a ete determinee par diffractionangulaire classique
a 1’aide d’ungoniometre (0 -
20)
a la tem-perature
ambiante(Fig. 1).
Lalongueur
d’onde utiliseeFig. 1. - Fonction d’interference de Pd8oSi2o obtenue par dif- fraction des rayons X (méthode de dispersion angulaire).
[A
Pd8oSi2o interfetence function obtained by X-ray diffraction (angulardispersion).]
(À
=0,56 A ; AgKa)
apermis
d’obtenir une fonctionjusqu’a
K =20,4 A-1.
Une fonction de distribution radiale a ete deduite par transformation de Fourier(Fig. 2).
Les deux fonctions desormaisclassiques
sonten accord avec les resultats anterieurs
[2, 3].
Nean-moins,
il estexceptionnel
que par diffraction des rayons X une valeur deKmax
= 20A 1
soit atteinte.Cette fonction a
permis 1’etalonnage
des fonctions obtenues par la methode nondispersive
en comparant les spectres obtenus a latemperature
ambiante avecla courbe de reference. Les corrections ainsi calculees
ont ensuite ete
appliquees
auxspectres
mesures(Fig. 3)
a diverses
temperatures
defagon
a obtenirdes
fonc-tions d’interference normalisees.
Fig. 2. - Fonction de distribution radiale reduite, obtenue par transformation de Fourier de la fonction d’interférence avec
KM = 20,4 A-1.
[Radial distribution function obtained by Fourier transform from interference function with KM = 20.4
A - 11
Fig. 3. - Exemple de spectre experimental. On distingue les raies caracteristiques du tube AgKIX et K~, les raies de fluorescence du
palladium (Ka et K~). On remarque la modulation du spectre continu par les anneaux d’interference.
[An
example of experimental spectrum. Characteristic lines of the target (AgKa and K~) and fluorescence line (PdKa and K~) areshown. Note the modulation of the continuous spectrum by inter-
ference rings.]
De ces
fonctions,
une transformation de Fourier(limite d’integration Kmax
=12,5 Å - 1)
donne desfonctions de distribution radiale. Afin d’accroitre la resolution de ces
fonctions,
nous les avonsprolongees
entre
12,5 A -’
et20,4 A -’
en utilisant la queue de la fonction de reference. Ceci revient anegliger
leseffets
thermiques
sur cettepartie
de courbe.2. Resultats. - 2.1 CRISTALLISATION. - Les pre- mieres
experiences
ont consiste a suivre des montéesen
temperature
a vitesse de chauffereguliere (avec
despaliers
de 500 s pour lescomptages) depuis
20 ~Cjusqu’a
400 °C en 4 h environ.L’apparition
de lacristallisation est tres brutale a 370 ~C.
Nous avons
egalement
etudie 1’effet delongs
main-tiens a 200 °C
pendant
6jours;
aucune cristallisationn’apparait.
Il en est de memequand
latemperature
reste 24 h a 300 ~C.
2.2 EVOLUTION STRUCTURALE. - La
comparaison
entre echantillons
trempes
etpulverises n’indique
pas de differences notables dans 1’allure et lecomporte-
ment des fonctions d’interference. Des 200
~C,
onremarque une evolution des fonctions
d’interference,
Fig. 4. - Evolution de I(K) et de W(R ) lors d’un cycle court (20 ~C, 340 oC, 20 oC).
[Some evolution of I(K) and W(R) during a short cycle (20 ~C, 340 ~C, 20
oQ.]
en
particulier
un renforcement de1’epaulement
dudeuxieme anneau. Par contre, aucune variation de l’intensité du
premier
anneau n’est observable. Cette evolution continuejusqu’a
340 ~C(Fig. 4).
Si le maintien au-dela de 250 ~C ne
depasse
pas 3 a 4 h lors du retour a latemperature ambiante,
lafonction d’interference
reprend
son allure initiale.Nous avons alors etudie 1’evolution
lorsque
latempe-
rature est stabilisée a environ 300 ~C. On n’observe pas de modification
dependant
dutemps
car les cour- bes obtenues a 300 °C au bout d’une heure ou de 24 h sont semblables avec, enparticulier,
unepaulement
sur le 2e anneau, assez
marque.
Mais la fonction d’inter- ference obtenueapres
retour a latemperature
ambiantea subi des modifications relativement a la courbe ini- tiale obtenue a 20 ~C. Elle conserve un souvenir de 1’allure de la fonction a 300 ~C.
Ces modifications sont surtout observables sur
1’epaulement
du 2e anneau de la fonction d’interfe-rence
(Fig. 5a).
Enparticulier,
lacomparaison
descourbes des
figures
4a(21)
avec les courbesfigure
5a(22)
et
figure
4b(21)
etfigure
5b(22) permet d’apprecier
lesvariations des fonctions etudiees.
Nous observons donc une
quasi-reversibilite
lors decycles thermiques
courts( ~ 1 h)
entre latemperature
Fig. 5. - Effet d’un maintien prolongé a 300 °C sur I(K) et W(R ).
[Influence
of a long annealing at 300 °C on the function I(K) andW(R).]
L-488 JOURNAL DE PHYSIQUE - LETTRES ambiante et une
temperature juste
inferieure a la tem-perature
de cristallisation. Nous observonsegalement
un effet de
reorganisation
pour des durees de recuit a’300 ~C de l’ordre de 24 h. Notons enfin un
léger
effetsur le
pied
du 1 eranneau
de la fonction d’interference(K N 3,5 Å - 1) :
la fonction decroit moinsrapidement
a basse
temperature qu’a haute temperature. Quoique
a la limite de la
precision experimentale,
cet effetsemble moins
marque
pour les echantillonspulverises.
3. Discussion. - revolution des fonctions réduites de distribution radiale est caracterisee par un accrois-
sement de la
symetrie
de l’ordre local moyen avec latemperature.
Cecipeut
etre observe surplusieurs
desdistances caracteristiques
des fonctions de distributionradi~/.Des
travaux anterieurs[4] permettent d’expli- quer 1’allure
du debut des fonctions de distribution radiale(R
6A)
par deux familles de distances :- distances Pd-Pd :
1 er voisins a a ~
2,80 A,
2e voisins a
4,7 A
=1,80
Q , 3e voisins a5,4 A 2
- distances Pd-Si :
1 er voisins cr’ =
2,40 A ,
2e voisins à
4,40 A,
3e voisins a
5,12 A
cr +les distances Si-Si tres peu visibles aux rayons X
ayant
un effetinsignifiant.
Sur les fonctions obtenues a la
temperature
ambianteon
distingue quelques
detailscaracteristiques
de cesdistances
(Fig. 2) :
- les deux distances de
premiers
voisins Pd-Pd etPd-Si sont presque
completement
resolues sur lescourbes obtenues par coupure a K = 20
Å -1,
- les distances de troisiemcs voisins
apparaissent
comme un
epaulement
sur le flanc du deuxième anneau.De faibles
changements
depente
sur cet anneau peu- vent etre attribues aux deux familles Pd-Pd et Pd-Si.Lors du
chauffage,
on observe unesymetrisation
despics principaux correspondant
aux distances Pd-Pd etune diminution des
pics
Pd-Si. Ceci est tres net pour lapremiere
distance.Donc,
les distances Pd-Si serapprochent
des distances Pd-Pd. On n’observe pas de variation de lalargeur
du 1 erpic, probablement
enraison de
Felargissement
resultant de 1’effet de termi- naison.Nous concluons donc a un accroissement de la
symetrie
locale moyenne lors de 1’elevation de latemperature.
Dans des travaux
anterieurs,
lacomparaison
desresultats de diffraction des rayons X et des neutrons a
permis
d’obtenir des fonctions d’interference par- tielles pour Pd-Pd et Pd-Si avec uneprecision
d’envi-ron
5 %
a10 %
dans un domainepermettant
d’obtenirpar transformation de Fourier des fonctions de distri- bution
partielles (Fig. 6).
Sur ces fonctions
partielles
on remarque que lepic
des
premiers
voisins Pd-Si estbeaucoup plus dissy-
Fig. 6. - Fonctions partielles. 20132013 ~pd-pd~ ... yYPd-Si·
[Partial functions. 20132013 ~pd-pd’ ... WPd-s;.]
metrique
que celui des distances Pd-Pd. Donc lapartie repulsive
dupotentiel
d’interaction Pd-Si est beau- coupplus abrupte
que celle dupotentiel Pd-Pd;
parconsequent,
une elevation detemperature
accroit ladistance Pd-Si moyenne et
symetrise
larepartition.
Sile maintien a haute
temperature
est court, cet effetdisparait
par retour a latemperature
ambiante. Par contre, si le maintien a environ 300 °C estlong (24 h)
lors du retour a la
temperature ambiante,
nous voyons decroitre la distance Pd-Si entrepremiers voisins,
maisnous observons une modification de la
repartition
desdistances de 2e et 3e voisins. Ceci
apparait egalement
comme un accroissement de
1’epaule
sur le 2e anneaude la fonction d’interference. Une
augmentation
de laperfection
des sitestetraedriques (Fig. 7) ayant
ceseffets,
c’est1’hypothese
que nousadopterons.
Un recuita donc tendance a renforcer la
symetrie
des sites tetra-edriques,
c’est-a-dire a accroitre l’ordre local. L’etudeFig. 7. - Fonction de distribution radiale pour un modèle d’empi-
lement compact tetraedrique avec une grande perfection des tétra-
edres.
[Radial distribution function for close packing model with a high
tetrahedral perfection.]
des structures
amorphes
montre que ceci entraine unaccroissement des defauts de la structure
[5],
donc desfluctuations de la densité
plus importantes.
Une miseen ordre de ces defauts n’est d’ailleurs pas a exclure
comme le montrent de recentes
experiences
de diffu-sion centrale
[6].
Bibliographie
[1] GASGNIER, M. and MALAURENT, J. C., J. Appl. Crystallogr. 11 (1978) 141.
[2] SUZUKI, K., FUKUNAGA, T., MISAWA, M. and MASUMOTO, T., Mat. Sci. Eng. 23 (1976) 215.
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[5] SADOC, J. F., J. Non-Cryst. Solids 44 (1981) 1.
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