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3.1 Le domaine TMD0: un élément essentiel pour l’association et les processus d’inhibition?

Peu d’informations sont disponibles sur les mécanismes moléculaires impliqués dans la régulation croisée des deux sous-unités des canaux KATP, et la manière dont la fixation de nucléotides ou d’effecteurs pharmacologiques à SUR entraîne des modulations des propriétés d’ouverture de Kir6.2 reste méconnue. Dans un souci d’identification des domaines de SUR impliqués dans cette régulation, nous nous sommes tout d’abord attachés à caractériser le rôle joué par le domaine N-ter TMD0, essentiel pour l’association entre les deux sous-unités (Chan et al., 2003; Babenko et Bryan, 2003).

Les résultats présentés ici montrent que ce domaine est indispensable et irremplaçable pour permettre la formation de canaux à la membrane plasmique: en effet, son remplacement par le domaine équivalent de MRP1, présentant une homologie de 33 % et des prédictions de structures secondaires proches, ne permet pas l’adressage membranaire de canaux fonctionnels. A l’inverse, et de manière surprenante, l’adressage de MRP1 n’est pas perturbé par le remplacement de son TMD0 par celui de SUR2A, suggérant un rôle beaucoup plus critique pour ce domaine chez SUR que chez MRP1. Ce résultat est cohérent avec l’idée déjà évoquée que le domaine TMD0 n’est pas essentiel et joue un rôle mineur dans l’activité de transport chez MRP1 (Bakos et al., 1998 et 2000). Toutefois, la construction MRP1(TMD0 SUR2A) n’a pas été testée fonctionnellement pour le transport, et il serait intéressant de déterminer si elle est toujours capable de prendre en charge les substrats de MRP1. De plus, il semble que la partie N-terminale de ce domaine adopte une structure flexible particulière (Chen et al., 2002 et 2006; Binyamin et al., 2005) qui le différencie peut-être du domaine équivalent de SUR: présentant deux topologies distinctes, ces domaines ne seraient en fait pas aisément interchangeables ce qui expliquerait que toute tentative d’approche chimérique entre les TMD0 de SUR et MRP1 se solde par l’absence de canaux donnant lieu à des courants enregistrables (constructions Chim1/2/3/4). Reste à déterminer si cette absence de courant résulte d’une absence de canaux à la membrane, et donc d’un problème de trafic, ou de la présence de canaux non fonctionnels.

Plusieurs arguments expérimentaux ainsi que des mutations retrouvées chez certains patients souffrant de diabète néonatal et d’hyperinsulinémie congénitale semblent indiquer

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que le domaine TMD0 de SUR puisse être impliqué dans les mécanismes de régulation de l’activité de Kir6.2. En effet, coexprimé seul avec Kir6.2, le domaine TMD0 de SUR est capable de s’associer avec le canal et de modifier sa probabilité d’ouverture ainsi que sa sensibilité à l’ATP (Babenko et Bryan, 2003; Fang et al., 2006). De plus, une mutation localisée dans la boucle cytoplasmique CL2 de l’isoforme SUR1, changeant une phénylalanine en leucine (F132L), a été identifiée comme étant associée à une forme de diabète néonatal (Proks et al., 2006): la caractérisation électrophysiologique de ce mutant révèle une sensibilité décrue à l’inhibition par l’ATP (et au tolbutamide) permettant d’expliquer le défaut de sécrétion d’insuline et la pathologie. D’un point de vue mécanistique, l’hypothèse prévalent est que cette mutation entraînerait une perturbation de l’association entre le TMD0 de SUR1 et Kir6.2. D’autres mutations survenant dans le TMD0 de SUR1 associées avec des cas d’hyperinsulinémie ont d’ailleurs été rapportées comme affectant l’association entre SUR et Kir6.2 et viennent renforcer cette hypothèse, comme c’est le cas des mutations A116P et V187D (Chan et al., 2003), ou encore le trafic du complexe à la membrane, comme c’est la cas pour les mutations G7R, N24K, F27S, R74W, et E128K (Yan et al., 2007). Enfin, le fait que la sensibilité au tolbutamide du canal soit également affectée par la mutation F132L soulève la possibilité que le domaine TMD0 participe aux mécanismes d’inhibition que cette sulphonylurée initie, et intervienne donc dans les voies de régulation négatives de Kir6.2. Ceci est également illustré par le fait que ce domaine module l’inhibition du canal par la rhodamine 123 de manière nucléotides-dépendante (Hosy et al., 2007).

Ainsi, en plus de son rôle associatif, le domaine TMD0 pourrait donc également avoir une fonction régulatrice au sein du canal KATP et être notamment impliqué dans les processus d’inhibition.

3.2 Implication d’un domaine C-terminal de SUR2A dans les processus d’activation

Le linker cytoplasmique reliant les domaines TMD2 et NBD2 de SUR2A contient un fragment de 65 résidus (acides aminés 1294 à 1358) décrit pour être en interaction avec Kir6.2 (Rainbow et al., 2004a; Rainbow et al., 2004b) mais dont le rôle dans la fonction du canal n’est pas connu. Au cours de cette étude, nous avons étudié à l’aide d’une stratégie chimérique l’implication potentielle de ce fragment dans les mécanismes moléculaires intervenant dans la régulation du canal KATP cardiaque. A l’intérieur de ce fragment, nous avons identifié trois résidus de SUR2A intimement impliqués dans l’activation des canaux KATP par les ouvreurs pharmacologiques (P1075, SR47063) et le MgADP: E1305, I1310 et

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L1313. Ces trois résidus pourraient faire partie d’une voie de transduction couplant fonctionnellement les sous-unités SUR2A et Kir6.2 via le linker cytoplasmique reliant l’hélice transmembranaire 17 au domaine NBD2.

3.2.1 Les résidus E1305, I1310 et L1313 jouent un rôle critique dans l’association SUR2A-Kir6.2

Le rôle critique des résidus E1305, I1310 et L1313 a été découvert en appliquant une stratégie chimérique visant à étudier le rôle du linker TMD2-NBD2 dans l’expression et la régulation des canaux Kir6.2/SUR2A. La construction de chimères incorporant progressivement des fragments de plus en plus courts de ce linker de MRP1 dans SUR2A a mis en évidence que le remplacement de ces trois résidus est associé à une perte d’expression des canaux. Ce défaut d’expression va dans le sens des observations faites par Rainbow et al.

(2004a, 2004b), où la co-expression du fragment entier avec SUR2A et Kir6.2 prévient l’association des deux sous-unités, et plaide en faveur de la localisation de ces résidus dans une région critique à l’interface avec Kir6.2. Néanmoins, nous avons observé que ce défaut d’expression pouvait être modulé en fonction de la nature des acides aminés introduits en remplacement de ces résidus. En effet, leur mutation en alanines a des conséquences moins drastiques sur le niveau d’expression que leur remplacement par les résidus correspondant chez MRP1 (V1290, F1295 et Y1298), comme en témoignent les amplitudes des courants enregistrés pour les canaux Kir6.2/SUR2A(EIL/AAA). Il est intéressant de noter que le même type d’observations a déjà été rapporté pour une mutation dans l’isoforme SUR1 au niveau du résidu L1350, correspondant dans SUR2A au résidu L1313. La mutation L1350Q dans SUR1, entraînant une diminution de l’expression à la membrane plasmique des canaux, est retrouvée chez des patients souffrant d’hyperinsulinémie congénitale et semble provoquer la pathologie en prévenant l’expression de surface des canaux KATP dans les cellules β du pancréas (Yan et al., 2007). Ces résultats montrent que les résidus E1305, I1310 et L1313 ne sont pas absolument essentiels pour l’association physique entre SUR2A et Kir6.2, puisque leur mutation en alanines n’altère que partiellement l’expression des canaux à la membrane plasmique, mais ils suggèrent néanmoins que ces résidus sont susceptibles d’être localisés à l’interface entre les deux sous-unités. Cependant, l’absence de données structurales sur le canal KATP ne permet pas de conclure définitivement quant à leur localisation précise.

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3.2.2 La partie C-terminale proximale de SUR2A est impliquée dans les processus d’activation couplant la fixation de ligands à SUR2A aux modifications des propriétés d’ouverture de Kir6.2

Toutes les régions de SUR décrites pour être en interaction avec Kir6.2 représentent des voies de transduction potentielles à étudier, comme le montre la récente description de l’implication du domaine TMD0/L0 dans le contrôle du gating de Kir6.2 (Fang et al., 2006).

Nous avons donc cherché à savoir si les trois résidus identifiés sont impliqués dans les mécanismes moléculaires de régulation du canal.

La caractérisation des canaux Kir6.2/SUR2A(EIL/AAA) montre des réponses fortement altérées à un certain nombre d’activateurs des canaux KATP comparativement aux canaux sauvages: activateurs pharmacologiques, comme le P1075 et le SR47063, ainsi qu’activateur physiologique comme le MgADP. Néanmoins, les expériences réalisées étant purement fonctionnelles, il est difficile d’affirmer si les déterminants identifiés interviennent au niveau de la fixation des ligands ou plutôt dans l’étape de transduction suivant cette fixation et permettant l’activation des canaux. La première hypothèse n’est pas improbable puisque les résidus E1305, I1310 et L1313 sont localisés à proximité des sites de liaison respectifs des ouvreurs pharmacologiques et de l’ADP, situés respectivement au niveau de l’hélice 17 (Moreau et al., 2000) et du NBD2 (Matsuo et al., 2005). Dans le cas des ouvreurs synthétiques, cette hypothèse est néanmoins invalidée par la preuve expérimentale que les affinités apparentes pour le P1075 et le SR47063 ne sont pas modifiées suite aux mutations.

Dans le cas de l’ADP, l’activation étant totalement abolie chez le mutant SUR2A(EIL/AAA), il n’est pas possible de comparer les affinités respectives des canaux sauvages et mutants. Il est donc concevable que le défaut d’activation par l’ADP puisse résulter d’un défaut de fixation au niveau du NBD2. Néanmoins, le fait que les ouvreurs pharmacologiques et l’ADP soient affectés simultanément, bien qu’ils aient des sites de fixation à SUR2A distincts, plaide en faveur de la perturbation d’un seul et même mécanisme en aval de la fixation des ligands dans les processus d’activation. De ce fait, il semble que l’interprétation la plus appropriée de ces résultats soit que les résidus E1305, I1310 et L1313 participent aux mécanismes moléculaires de transduction du signal couplant la fixation de ligand à SUR2A et l’activation de Kir6.2.

On peut remarquer que contrairement à la chimère S7M, totalement insensible aux ouvreurs, la triple mutation n’entraîne pas l’abolition complète des réponses au P1075 et au SR47063, suggérant que d’autres déterminants encore non identifiés sont présents dans la

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zone étudiée. Cependant, les activations résiduelles observées sont très faibles, ce qui permet de penser que ces déterminants sont d’une importance minime par rapport aux résidus E1305, I1310 et L1313. De plus, la réintroduction des trois résidus sauvages dans la chimère déficiente S7M suffit à restaurer le phénotype sauvage d’activation par les ouvreurs pharmacologiques et le MgADP. Bien que nous soyons conscients des risques que comporte la sur-interprétation de résultats de mutagenèse, la combinaison d’expériences montrant à la fois une perte de fonction des canaux Kir6.2/SUR2A et un gain de fonction des canaux Kir6.2/S7M constitue un ensemble solide d’indications impliquant un rôle des résidus E1305, I1310 et L1313 dans les processus d’activation du canal KATP dépendant des ouvreurs pharmacologiques et du MgADP.

3.2.3 Les processus d’inhibition et d’activation des canaux KATP reposent sur des voies de transduction différentes

Les processus d’activation et d’inhibition des canaux KATP sont encore méconnus. Il est notamment difficile de dire si ces processus relèvent d’une seule et même voie de transduction entre SUR2A et Kir6.2, ou s’ils reposent sur des mécanismes distincts. Un segment de SUR2A riche en aspartate et glutamate, localisé après le domaine NBD1 (résidus 948 à 962), a récemment été décrit pour être critique à la fois pour les processus d’activation (MgADP, ouvreurs pharmacologiques) et d’inhibition (glibenclamide) du canal (Karger et al., 2008). Ce segment pourrait faire partie d’une voie commune de transduction en association avec le domaine TMD0 et/ou le segment C-terminal étudié dans ce travail, dont on sait qu’ils sont tous deux en interaction physique avec Kir6.2. Néanmoins, il est intéressant de noter que dans notre cas, la mutation d’un segment C-terminal de SUR2A entraîne l’altération de l’activation mais pas de l’inhibition des canaux KATP cardiaques. En effet, contrairement aux activateurs (MgADP, ouvreurs pharmacologiques), l’inhibition par l’ATP et le glibenclamide ne sont pas affectées par nos mutations. Cette observation invalide l’hypothèse d’une voie de transduction unique et argue en faveur de l’existence de plusieurs voies de transduction couplant fonctionnellement SUR2A et Kir6.2. Il est ainsi possible d’imaginer que les processus d’activation du canal reposent sur une voie de transduction empruntant le linker reliant les domaines TMD2 et NBD2, et qu’une voie différente dépendant du domaine TMD0 soit requise pour les processus d’inhibition (Figure 77).

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Kir6.2 KCO

TMD1

KCO

K+

TMD0 TMD2

NBD1

NBD2 ADP

ADP

Θ

Θ

Kir6.2 KCO

TMD1

KCO

K+

TMD0 TMD2

NBD1

NBD2 ADP

ADP

Θ Θ

Θ Θ

Figure 77 : Représentation schématique de la voie de transduction empruntée lors de l’activation par les ouvreurs pharmacologiques et l’ADP. La fixation des KCO au niveau de l’hélice 17 ou d’ADP au niveau du domaine NBD2 entraîne l’activation de Kir6.2 par une voie reliant la partie C-terminale cytoplasmique de SUR2A aux parties cytoplasmiques de Kir6.2.

Seul un panel représentatif d’effecteurs des canaux KATP a été testé au cours de cette étude, et il n’est pas exclu que d’autres mécanismes de régulation empruntent des voies de transduction encore inconnues. Néanmoins, ces résultats suggèrent qu’au sein du canal KATP, la partie C-terminale proximale de SUR2A est un lien critique entre la fixation de ligands à SUR2A et l’activation de Kir6.2.

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B