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2. Caractérisation des associations entre SE : données cartographiques des SE

2.3. Indicateurs de SE

Les cartes de SE peuvent représenter différentes facettes des SE (fourniture potentielle, demande ou fourniture réelle). Dans le premier chapitre, les cartes de SE que nous avons comparé représentent le flux de SE. Par exemple, le SE de régulation des crues est estimé en considérant i) d’une part la capacité des milieux à limiter le ruissellement (fourniture potentielle) et ii) d’autre part la présence en aval d’infrastructures sensibles aux inondations (demande). Plusieurs auteurs ont souligné l’importance de considérer les flux de SE pour opérationnaliser l’utilisation des SE dans les processus de prise de décision car cette mesure correspond à l’utilisation réelle des SE (Hein et al. 2006).

Cependant, comme d’autres auteurs, je pense que l’analyse séparée de chaque facette permettrait d’améliorer notre capacité d’interprétation des associations spatiale entre SE (Crouzat et al. 2016). Notamment cette approche permettrait de faire la distinction entre i) les processus écologiques responsables des associations de fourniture potentielle et ii) les processus sociaux

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Discussion générale

responsables de la demande. Cette distinction permet à terme d’interpréter les associations spatiales de flux de SE (i.e. la fourniture réelle en SE résultant du croisement entre fourniture potentielle et demande) ce qui s’avère particulièrement délicat sans étapes intermédiaires (chapitre I). Toutefois, pour certains SE tels que le SE de production agricole il est délicat de séparer les différentes facettes – fourniture potentielle, demande, flux (Lescourret et al. 2015). En parallèle la spatialisation de la demande constitue à ce jour un défi pour la plupart des SE (Wolff et al. 2015).

En conséquence les études qui considèrent d’une part la fourniture potentielle et d’autre part la demande sont peu fréquentes et la majorité des travaux de cartographie de SE considèrent uniquement la fourniture potentielle (Lautenbach et al. 2015). Du fait des difficultés rencontrées pour séparer les facettes des SE de nombreuses études considèrent simultanément des facettes différentes (fourniture potentielle, flux) dans l’identification des bouquets (Spake et al. In Review;

Crouzat et al. 2015; Meacham et al. 2016; Mouchet et al. 2017). Ceci rend difficile l’utilisation des résultats dans un but scientifique – identifier les processus qui dirigent les interactions entre SE – ou comme de support à la décision (Spake et al. In Review; Crouzat et al. 2015).

2.3.2. Indicateurs de SE

La majorité des SE sont difficiles à mesurer (Dale and Polasky 2007). Pour rendre compte de leur état nous utilisons des indicateurs afin de représenter de façon synthétique et simplifiée le niveau de fourniture ou de demande des SE (Layke et al. 2012; Müller and Burkhard 2012;

Kandziora et al. 2013). Par exemple, dans le projet VOLANTE la séquestration du carbone dans la biomasse et les sols (C/km²/yr) est utilisée comme indicateur du SE de régulation du climat.

J’évoque dans cette partie l’indicateur en tant que tel. J’ai déjà présenté dans la partie 2.2.1 et 2.2.2 les données et les modèles utilisés pour quantifier ces indicateurs. Idéalement, un indicateur de SE doit avoir un lien de causalité avec l’objet qu’il doit représenter. Dans le cadre des SE, ce lien de causalité doit être suffisamment sensible pour identifier les variations spatiales et temporelles. Dans la mesure du possible, un indicateur doit également être simple et son élaboration doit reposer sur des données disponibles (Dale and Polasky 2007).

Pour chaque SE, il existe une grande diversité d’indicateurs (Layke et al. 2012; Maes et al.

2016). Cette diversité d’indicateurs peut s’expliquer par la complexité inhérente à la mesure des SE et par l’absence de consensus sur les indicateurs à utiliser (Johnston and Russell 2011; Boerema et

Discussion générale de SE :

L’absence d’une définition unique des SE participe à la multiplication des indicateurs utilisés pour cartographier les SE (Reyers et al. 2013). Parmi les situations pouvant illustrer l’impact d’une absence de définition faisant consensus sur les indicateurs de SE, nous pouvons mentionner la prise en considération variable de la place de l’homme. Cette question se pose notamment pour le SE de production agricole. La production agricole finale (exploitée par la société) résulte de la combinaison entre la capacité des écosystèmes à soutenir la production de biomasse et les interventions humaines permettant d’orienter et d’optimiser cette capacité (entre autre au travers du travail humain et de l’utilisation de technologies). Selon que le travail humain soit considéré ou non dans la définition des SE, les indicateurs du SE de production agricole correspondent au rendement final des cultures ou à la participation nette des écosystèmes (Johnston and Russell 2011; Lescourret et al.

2015; Palomo et al. 2016). Par exemple, la mesure des rendements agricoles telle que nous l’avons proposée dans le troisième chapitre ne permet pas de distinguer la part des fonctionnements écosystémiques et la part de l’intervention humaine. Une alternative possible consiste à exprimer la production agricole finale en calories puis à retrancher l’équivalent énergétique du travail humain et des intrants pour obtenir la participation nette de l’écosystème à la production agricole. Il faut noter que la quantification de l’intervention de l’homme dans la production agricole requiert une grande quantité de données et pose des problèmes conceptuels importants (Lescourret et al. 2015).

L’objectif de la cartographie a une forte influence sur les caractéristiques des indicateurs de SE utilisés. Dans le cadre d’outil d’aide à la décision, les indicateurs sont des outils de communication qui doivent permettre aux décideurs de comprendre rapidement les enjeux des SE sur un territoire donné et rendre compte de l’impact des actions de gestion sur la fourniture de SE (Maes et al. 2016). Suivant les enjeux de gestion les indicateurs peuvent varier. Par exemple, si l’enjeu est d’identifier les pratiques de gestion forestière qui optimisent la participation des forêts à la régulation du climat, la séquestration annuelle du carbone dans la biomasse et les sols (utilisée dans le projet VOLANTE) me semble être un indicateur adapté. En revanche, si l’enjeu est d’identifier l’impact instantanée du changement d’occupation des sols (i.e. perte de milieu forestiers au profit de l’agriculture et

Discussion générale

vis-versa) sur le SE de régulation du climat, il me semble préférable d’utiliser un indicateur qui rende compte du stock de carbone (comme utilisé dans le projet ESNET). L’exemple que je viens de présenter repose sur deux enjeux différents pouvant être posés dans le cadre de processus de prise de décision. De la même façon, les indicateurs développés à des fins d’aide à la décision ne seront pas nécessairement optimum pour répondre à des objectifs scientifiques tels que l’identification des processus socio-écologiques qui dirigent les associations entre SE.

L’échelle d’analyse conditionne fortement les données les outils et les approches mobilisables pour élaborer les indicateurs (Norton et al. 2016). J’ai déjà discuté le compromis entre i) d’une part l’échelle spatiale et ii) d’autre part la résolution des données et les outils d’analyse dans les parties 1.2.1 et 1.2.2. Nous avons notamment montré que la précision spatiale et quantitative des indicateurs de SE (cartes de SE) est négativement associée à l’étendue spatiale considérée (Chapitre 2). Un aspect supplémentaire des liens entre échelles spatiales et indicateurs de SE réside dans la nature des approches pouvant être utilisées pour établir les indicateurs. Il est largement reconnu que les études à l’échelle locale favorisent l’engagement des acteurs du territoire et l’interdisciplinarité. Au-delà de l’intérêt scientifique associé à ces échanges, l’engagement des acteurs du territoire dans la définition des indicateurs renforce la légitimité des cartes de SE et favorise donc leur intégration dans les processus de décision.

La diversité des indicateurs de SE est parfois considérée comme un frein à l’opérationnalisation des SE. Parmi les trois facteurs que j’ai identifié pour expliquer la diversité des indicateurs de SE, le premier (i.e. l’absence de consensus sur la définition des SE) me semble effectivement porteur d’un manque de clarté (Saarikoski et al. 2015). Cette absence de consensus sur la définition des SE a fait et fait encore l’objet de nombreux débats. En réponse plusieurs cadres théoriques et de classification de SE ont été développés. A ce jour le cadre qui semble être le plus largement reconnu est la CICES (classification internationale commune des services écosystémiques). Nous pouvons espérer que l’existence de ce cadre de travail commun s’accompagnera dans les années à venir d’une diminution des discordances associées à la définition de SE. Cependant, je pense que les deux derniers facteurs que j’identifie pour expliquer la diversité des indicateurs (échelle spatiale et objectif) sont des sources de diversité et je ne pense pas qu’il soit envisageable et souhaitable de les réduire (Schröter et al. 2014). Selon moi la diversité des

Discussion générale

contraire de reconnaitre la singularité des différentes échelles spatiales et des différents enjeux associés à la cartographie des SE (Dale and Beyeler 2001). En revanche, la disponibilité des données est un obstacle majeur dans l’élaboration d’indicateurs de SE. Ce manque conduit fréquemment à utiliser des indicateurs peu adaptés aux questions auxquelles ils doivent répondre, ce qui limite l’utilisation des SE dans les processus de prise de décision.