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Modélisation en milieu urbain à l’échelle de surfaces élémentaires

K 3NPnEO

9.2 Modélisation en milieu urbain à l’échelle de surfaces élémentaires

9.2.1 Les processus liés aux polluants dans le milieu urbain – Modélisation à base physique à l’échelle de petites surfaces

Etant donné l’échec des modèles conceptuels à reproduire correctement les pollutogrammes, c’est-à-dire la dynamique de la concentration en polluants, à

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l’exutoire des bassins versants urbains (Dotto et al., 2010; Kanso, 2004), le choix qui a été fait et qui a orienté fortement la suite de mes travaux a été d’essayer de mieux comprendre les processus à l’œuvre concernant l’accumulation et le lessivage des polluants sur les surfaces urbaines, afin d’être capable de proposer peut être un jour des modèles conceptuels de nouvelle génération.

Les travaux ont été réalisés principalement dans le cadre de la thèse de Yi Hong (2013-2016) en lien avec le laboratoire MAPMO d’Orléans, en particulier avec Minh Le Hoang. Ces travaux étant rattachés au projet Trafipollu, les terrains étudiés se sont concentrés sur des milieux urbains routiers. En effet, l'utilisation croissante des véhicules est à l'origine de la contamination des eaux de ruissellement. La compréhension précise et détaillée des processus de mobilisation des contaminants et de transport par ruissellement des contaminants sur les surfaces urbaines est essentielle pour la gestion des eaux urbaines. Cependant, les approches de modélisation existantes sont rarement à base physique pour modéliser la mobilisation et l’entrainement des polluants, en raison de données trop peu précises pour pouvoir faire une modélisation à base physique. Les approches habituelles consistent à relier la masse de polluants lessivées au débit par une loi de puissance ou éventuellement au débit et à la masse restant possible à mobiliser à chaque pas de temps. Dans ces approches :

MERO (t) = MR(t).C1.q(t)C2.dt MR(t+dt) = MR(t)- MERO (t)

Avec MR la masse restante sur la surface et MERO(t) la masse érodée entre t et t+dt, C1 et C2 sont ici les deux paramètres pour le lessivage.

Au début de la simulation, une masse initiale est déposée sur la surface urbaine (déterminée par calibration), puis ensuite elle s’accumule à nouveau pendant le temps sec selon une fonction linéaire de la durée de temps sec.

La stratégie qui a été adoptée a consisté à adapter à l’environnement urbain un modèle initialement conçu pour modéliser l’érosion en milieu naturel, à l’aide d’un modèle physique très détaillé (FullSWOF) couplé à un code d’érosion pour le transfert particulaire (Hairsine et Rose) (Delestre et al., 2009)(Hairsine et al., 2002; Heng et al., 2011). Le concept associé au modèle d’Hairsine est exposé sur la Figure 20.

58 Figure 20 Schéma de principe du modèle de Hairsine et Rose pour l'érosion des particules (tiré de (Hong et al., 2016b)).

Les principales équations du modèles d’Hairsine et Rosse sont les suivantes :

Avec :

L’objectif était de de bien représenter les processus de mobilisation des particules par la pluie et l’advection lors du ruissellement urbain sur un bassin versant routier de taille intermédiaire (Le Perreux sur Marne, Val-de-Marne, France, 2661 m²). Le

e

ri

: Le détachement par la pluie;

r

ri

: Le détachement par le ruissellement;

-

mi/mT: La proportion d’une classe de particules - ad: La détachabilité des sédiments;

- P: L’intensité de pluie;

- 𝛺 e: La puissance effective d’écoulement;

- h: La hauteur d’eau.

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bassin versant routier est représenté sur la Figure 21. Ce bassin versant a une surface de 2661 m2 et une pente moyenne d’environ 2%

Figure 21 Bassin versant routier étudié dans le cadre du projet ANR Trafipollu (tiré de Hong et al., 2016b)

La plupart des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) mais aussi certains métaux se trouvant dans la phase particulaire, l’effort a porté sur la correcte simulation de la dynamique particulaire lors des évènements de pluie. C’est la première fois qu’un modèle aussi précis a été appliqué pour progresser dans la compréhension des processus de lessivage. Ceci a aussi été rendu possible par l’acquisition de données de topographie extrêmement précises par le véhicule Stéréopolis, à 10cm de résolution (voir Figure 22).

Figure 22 Données de topographie acquises sur le bassin versant du projet ANR Trafipollu par le véhicule Stéréopolis (IGN)

Sur le site expérimental, des mesures ont montré que seules les particules les plus fines de la route pouvaient être transférées à l'entrée du réseau d’assainissement lors d'événements pluvieux (voir article de (Béchet et al., 2015)). La Figure 23 illustre bien ces observations expérimentales.

60 Figure 23 Comparaison des particules mobilisées par le ruissellement et recueillies comme dépôt sur les surfaces urbaines (tiré de (Hong et al., 2016c)

Les simulations de différents événements de précipitations présentent des résultats prometteurs pour la reproduction des différentes dynamiques des flux d'eau et de sédiments transportés à l'échelle du bassin versant routier. Par le biais d’une analyse de sensibilité, il est confirmé que la vitesse de chute(Vs) et les stocks initiaux sur les surfaces(S) sont les paramètres les plus influents pour modéliser le lessivage des polluants sous forme particulaire (cf Figure 24). Il faut cependant noter que toutes les simulations réalisées l’ont été avec une masse sur les surfaces constante (1g/m2), moyenne « réaliste » tirée des observations et satisfaisant également une bonne calibration des modèles effectués. En outre, le détachement par advection des particules semble insignifiant dans notre étude, tandis que le détachement par des gouttes de pluie se révèle être la principale force pour détacher les sédiments de la surface urbaine étudiée. L’étude réalisée n’a considéré qu’une seule classe de sédiments et la suite des travaux conduits s’est focalisé sur l’influence de l’utilisation de plusieurs classes de sédiments pour modéliser les processus à l’œuvre.

61 Figure 24 Résultat de l'analyse de sensibilité pour quelques évènements de pluie à partir du modèle d'Hairsine et Rose

Dans un second temps, des distributions de tailles permettant de définir différentes classes de taille ont été introduites dans le modèle FULLSWOF-HR (pour Hairsine et Rose). Là encore, la simulation de l’écoulement de l'eau a été validée par l’observation du débit et à l’exutoire et de la hauteur d’eau. Les critères de performance de Nash obtenus sont tous très élevés pour ces simulations quantitatives (au-delà de 0.8). La modélisation de la qualité de l'eau a été réalisée dans ce travail en utilisant 3 classes de particules (d50 = 7 μm, 70 μm, et 250 μm). Ces classes ont été déterminées à partir des observations de terrain avec prélèvement des dépôts secs, comme cela est illustré sur la Figure 25.

V

s

S

b

a

d0

Ω0 0

F

0.8 1.6 2.4 3.2 4 4.8

0 0.5 1 1.5 2 2.5

Standard Deviation (𝜎)

x1000

Absolute Mean (𝜇*)

x1000

Scatter plots representing the results of the sensitivity analysis using the Elementary Effect (EE) method. For (a) the rainfall event of Oct.07.2014 using RMSD; (b) the rainfall event of Feb.28.2015 using RMSD; (c) the rainfall event of Oct.07.2014 using PCC; (d) the rainfall event of Feb.28.2015 using PCC.

V

s

S

b

a

d0

Ω0

0

F

0.3 0.6 0.9 1.2 1.5 1.8

0 0.2 0.4 0.6 0.8 1

Standard Deviation (𝜎)

x1000

Absolute Mean (𝜇*)

x1000

(a) Oct.07.

2014 RMSD

(b) Feb.28.

2015 RMSD

V

s

S

b

a

d0

Ω0

F

0 0.01 0.02 0.03 0.04 0.05 0.06 0.07 0.08 0.09

0 0.02 0.04 0.06 0.08

Standard Deviation (𝜎)

Absolute Mean (𝜇*)

V

s

S

b

a

d0

Ω0

F

0 0.01 0.02 0.03 0.04

0 0.02 0.04

Standard Deviation (𝜎)

Absolute Mean (𝜇*) (c)

Oct.07.

(d)

Feb.28.

62 Figure 25 Détermination des différentes classes de particules à partir des prélèvements réalisés.

L’analyse du processus de lessivage à l'échelle du bassin versant routier a confirmé que la plupart (> 90%) des particules fines sont éliminées au début de l'événement pluvieux, alors qu’environ 10% - 20% des particules de taille moyenne peuvent être mobilisées sur la dernière partie de l'événement, et presque pas de particules grossières (voir Figure 26).

Figure 26 Fractions des particules restant sur le sol (en fonction de la classe de particules considérée)

Les résultats de l'analyse spatiale issue du modèle montrent que la profondeur de l'eau dans la gouttière étant beaucoup plus importante que celle sur la route ou le trottoir, la mobilisation des particules grossières est plus sensible à l'intensité des précipitations sur la route et le trottoir, tandis que ces mêmes particules sont préférentiellement accumulées dans le caniveau. La quantité de particules mobilisée par les gouttes de pluie est deux ordres de grandeur plus élevée que la quantité de particules entrainée par l’advection. De plus, on observe que le détachement par les

Particle Size Distribution (PSD) of the finest part (< 400µm) of the dry deposited particles.

(b) (a)

Ratios of remaining particles to initial deposits on the catchment surface. The d50 = 7-µm particles (solid blue line), d50 = 70-µm particles (solid green line) and d50 = 250-µm particles (solid magenta line) are evaluated for the events of (a) October 7, 2014; (b) February 28, 2015. Rainfall is plotted on the lower part (black line).

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gouttes de pluie dans le caniveau est considérablement réduit avec l’augmentation de la profondeur de l'eau, alors que le détachement commandé par le flux d’advection ne se produit que dans la zone du caniveau (voir Figure 27).

Figure 27 Localisation de l'érosion des particules sur le bassin versant considéré

Le travail réalisé a donné à la rédaction de 2 articles : (Hong et al., 2016b, 2016c).

9.2.2 Modélisation conceptuelle et stochastique à l’échelle de surfaces élémentaires

Dans le cadre de la thèse de Saja El Ali, nous avons pu à nouveau mettre à l’épreuve la pertinence des modèles conceptuels à l’échelle locale, sur le bassin

( b (

a

( d (

c

Mean detachment mass flux by raindrop-driven (a, c) or flow-driven (b, d) effects, for the gutter (solid blue line), road (solid green line) and sidewalk (solid magenta line). Mean flow velocities are plotted as dashed-dotted lines for the gutter (blue), road (green) and sidewalk (magenta). Rainfall intensities are plotted on the upper part (black line). For the rainfall events of October 7, 2014 (a, b), and February 28, 2015 (c, d).

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versant routier du projet Trafipollu, cette fois de manière différente des travaux réalisés par H. Kanso en 2004 en raison de l’apport de la mesure en continu.

L’article relatif à ces travaux a été publié (Al Ali et al., 2016).

Le but de ce travail était d'évaluer la capacité des formulations d’accumulation et de lessivage à simuler avec précision et à prévoir la variabilité temporelle des concentrations de solides en suspension dans les eaux de ruissellement. Les travaux se sont appuyés sur la base de données riche et en continu du projet ANR Trafipollu (environ une année de mesures), contrairement au travail réalisé auparavant par (Kanso, 2004) et qui n’évaluait les modèles que par un nombre réduit de prélèvements et d’analyses par évènement de pluie. Un algorithme de type Monte-Carlo avec chaine de Markov est appliquée pour calibrer les modèles et analyser l'incertitude des paramètres (Hastings, 1970). La capacité prédictive à court terme des modèles est évaluée pour chaque évènement et pour une série d’évènements. Les résultats suggèrent que la performance du modèle de lessivage est liée au type d’évènement en termes de dynamique du transport polluant. En effet, les évènements classés dans la catégorie « first flush » sont systématiquement les mieux reproduits par cette approche. La Figure 28 illustre cette observation.

Figure 28 Performance du modèle de lessivage, évalué avec le critère de Nash, en fonction du

"type" d'évènement pluvieux

Concernant le modèle d’accumulation exponentielle (issu du modèle SWMM), il révèle que de meilleures performances sont obtenues sur de courtes périodes et que les modèles d'accumulation reposant uniquement sur la période de temps sec précédente comme variable explicative, ne peuvent pas prédire de façon satisfaisante la masse accumulée sur la surface en début d’évènement. La capacité à prédire de manière inter-évènementielle, c’est-à-dire continue, un pollutogramme à partir du modèle

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d’accumulation de SWMM est totalement à remettre en cause, ce qui est pourtant l’objectif premier des modèles d’accumulation.

Les valeurs obtenues lors des différentes calibrations réalisées pour les différents paramètres calibrés montrent d’ailleurs des valeurs extrêmes obtenues pour les paramètres qui ne soutiennent pas l’idée d’une signification physique pour ces paramètres (voir Figure 29).

Figure 29 Variabilité des paramètres obtenus pour le stock initial, C1 et C2, en utilisant l’algorithme MCMC

En espérant que les paramètres calibrés aient tout de même une signification physique, nous avons voulu estimer s’il pouvait y avoir une validité sur une courte période du paramètre de stock initial tel que calibré pendant au moins quelques évènements pluvieux. Le test a été effectué sur 3 puis 6 puis 9 évènements pluvieux consécutifs. Comme le montre la Figure 30, la meilleure calibration est obtenue pour 3 évènements consécutifs, mais très rapidement, dès 6 évènements, la pertinence de la calibration doit être remise en cause car la performance de la modélisation chute fortement.

66 Figure 30 Diminution de la performance de la fonction d'accumulation en fonction du nombre d'évènements de pluie consécutifs pris en compte.

Finalement, il a été tenté d’approcher la masse initialement présente sur une chaussée par une technique de type assimilation de données. Les résultats ne sont globalement pas très bons (voir Figure 31) en particulier pour les évènements de first flush. Cette méthode est très intéressante pour les pratiques de gestion en raison de sa simplicité et sa mise en œuvre facile.

Figure 31 Evolution du critère de Nash pour une sélection d'évènements en prenant en compte un nombre variable de points pour la calibration

Ces travaux issus de la thèse de Saja El Ali sont par ailleurs en accord avec les travaux antérieurs et similaires aux résultats obtenus dans le cadre de la thèse de de Jérémie Sage, alors même que dans ce dernier cas un certain nombre d’éléments nous

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laissaient à penser que le dispositif de mesures n’avait pas toujours fonctionné de manière idéale. Ces travaux ont été publiés dans (Sage et al., 2015).

Dans le cadre de la thèse de Jérémie Sage, travail que j’ai encadré pour la partie modélisation en lien avec l’équipement expérimental du site de Sucy en Brie, les modèles d’accumulation et de lessivage couramment utilisés ont été testés pour la modélisation continue de la contamination des eaux de ruissellement urbaines et évalués sur une base de données de 11 mois de turbidité et de débit acquises sur un bassin versant routier de la commune de Sucy-en-Brie (94). Le calibrage et l’analyse des incertitudes ont été effectués en utilisant la méthode de Monte-Carlo avec chaine de Markov pour évaluer le flux de polluants et les concentrations à l’exutoire du bassin versant. L'ensemble des données étudiées suggère en effet que le processus d'accumulation est assez imprévisible et ne peut pas être représenté de manière satisfaisante avec des modèles d'accumulation habituels à moins de considérer de courtes périodes. En ce qui concerne les flux de matière en suspension, la performance des modèles est nettement meilleure, mais des résultats similaires pourraient aussi bien être obtenus avec des modèles plus simples à concentration constante. À moins d’estimations très précises de concentrations dans les eaux de ruissellement, la représentation de leurs variabilités temporelles au cours des événements de pluie ne peut donc être toujours nécessaire pour les charges polluantes, que les charges sont en fait principalement expliquées par les volumes de ruissellement.

9.2.3 Bilan intermédiaire à propos de la modélisation à petite échelle Les travaux menés à l’échelle locale montrent que les formulations conceptuelles ne fonctionnent pas durablement pour reproduire les pollutogrammes. La durée de validité des modèles d’accumulation et de lessivage est extrêmement courte. Une calibration pour chaque évènement permet globalement de reproduire le pollutogramme enregistré mais les paramètres optimaux changent d’un évènement à l’autre. Par ailleurs, le modèle de lessivage fonctionne plutôt bien, mais cela provient sans doute de la faible variabilité des valeurs des paramètres lors du processus de calibration. Des techniques de type assimilation de données à partir des premiers enregistrements de chaque évènement de pluie peuvent donner des résultats intéressants, mais pour cela il faut au moins une quinzaine de points d’observation pour fiabiliser la prévision, ce qui ne permet donc pas de prévoir le comportement d’évènements de pluie de courte durée.

Les modèles détaillés et à base physique apportent par contre de très nombreuses informations sur les processus à l’œuvre et ont des niveaux de performance tout à fait satisfaisants mais ne peuvent pas facilement être utilisés à des fins opérationnelles en raison du nombre très important de données d’entrée qui sont nécessaires, ce qui constitue un obstacle pour leur transposition à plus grande échelle. Leur évaluation complète nécessiterait la mise en place de campagnes de mesures très ambitieuses où puissent être collectées en plusieurs points du bassin versant les dépôts sur la surface urbaine, tout au long d’un évènement de pluie. De plus, leur niveau de performance est bien meilleur pour le premier pic de concentration en polluants rencontré que pour les suivants, pour le cas où il s’agisse d’évènements comprenant plusieurs pics. Dans ce cas, les coefficients de Nash sont de l’ordre de 0.4 ou 0.5 selon les évènements de pluie.

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9.3Différentes stratégies de modélisation intégrée à l’échelle du