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Academic year: 2021

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Le concept de formation économique et sociale

Fábio Fonseca de Castro

Doutor de Sociologia,

Professor da Faculdade de Comunicação da UFPA

Resumo: O artigo indaga sobre as origens e o densenvolcimento da noção de Formação

Econômica e Social no pensamento marxista. Partindo da utilização da noção de forma aberta, por Marx, inadaga sobre os desdobramentos objetivistas e subjetivistas na noção, elaborado, afiunal, a questão sobre a pertinência do conceito para a teoria sociológica e historiográfica.

Palavras-chave: Marxismo, economia política, intersubjetividade.

Présentation

Cherchant à élaborer un modèle d'analyse du processus historique vécu par les populations étudiées, je prends pour base le concept de formation économique et sociale - FES, élaboré par Marx et enrichi par diverses contributions. Pour cela, j'établis un parcours composé de trois parties : dans un premier moment je présente le concept en vue d'une discussion sur la complémentarité entre le concept de FES et celui de mode de production. J'inclus dans cette première section une discussion sur la compréhension du rôle de la structure économique comme élément déterminant de la FES. Dans un second moment je discute de la possibilité d'appliquer le modèle à travers une voie herméneutique, en l'opposant à la voie dialectique et en étudiant l'hypothèse d'établir ainsi de meilleures conditions de perception et d'imbrication entre superstructure et infrastructure. Avec Godelier (1984), je pars de la proposition selon laquelle ces deux sphères sont complémentaires, inséparables et non surdéterminées l'une par l'autre. Je tente de rejeter une perception économiciste du complexe de la FES. Puis, dans la suite de ce second chapitre, je cherche à appliquer le modèle - cette voie herméneutique - à l'interprétation de la formation économique et sociale de l'Amazonie brésilienne, et en particulier de son estuaire.

Cherchant à rendre objectif le caractère méthodologique de ce travail, je peux dire que je tente d'identifier, avec le concept de FES par la voie herméneutique et l'adoption de la perspective godelienne de l'imbrication de superstructure et infrastructure, une méthode d'observation des dynamiques culturelles d'une société, ou plutôt une méthode qui ait une incidence sur une sociologie de la culture.

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Le concept de FES de l’économie à l’anthropologie

Partons de la définition du concept de FES. Le terme trouve son origine dans la préface de Contribution à la critique de l'économie politique, écrit en 1859, où il apparaît comme Ökonomische Gesellschaftsformation - littéralement "formation économique de la société". Toutefois, le concept est antérieur à ce terme. Mais ce concept est antérieur au terme puisqu'on le trouve dans la première élaboration complète de la conception matérialiste de l'histoire, L'idéologie allemande, écrite en 1846. La périodisation de l'histoire mondiale en blocs historiques basés sur le développement des forces productives inhérentes à chaque époque et entreprise dans cette œuvre suggère implicitement ce concept. Marx y aborde le "mode de production" (Weise der Produktion) de chaque période, en démarquant cette apparition initiale et pourtant déjà structurelle de la pensée marxiste.

Entre "L'idéologie allemande" et la préface de la "Contribution à la critique de l'économie politique", le concept apparaît sous le terme partiel - transitoire, provisoire - de "forme sociale" (Gesellschaftsform), et évolue vers "formation sociale" (Gesellschaftformation), des expressions qui marquent divers écrits de cette période, comme les "Grundrisse".

Le caractère statique de "forme sociale" substitué par le caractère dynamique de "formation sociale" indique la volonté de nommer un concept qui puisse rendre compte de l'action du processus historique sur la totalité de la structure sociale. Le terme "formation" revêt une inhérence historique et un caractère dynamique, et peut peut-être être mieux visualisé comme "conformation", c'est-à-dire comme la situation socio-temporelle qui constitue une société déterminée à une époque déterminée à travers l'expérience historique.

Les marxistes du temps de la II Internationale faisaient montre d'une totale incompréhension de ce concept, exception faite de Antônio Labriola et Franz Mehring qui, même sans une perception immédiate - ou littérale selon le cas - du concept marxiste, ont capté le sens général du caractère dynamique des transformations socio-économiques et l'importance de cette signification dans la pensée marxiste.

Il n'en va toutefois pas de même pour la majorité des auteurs de cette période. Chez Plejanov par exemple, on ne trouve pas plus de douze références au concept de FES dans les cinq épais volumes de ses "Œuvres" -, un nombre très faible si l'on considère qu'il y a dans les œuvres de Marx, que Plejanov cherche à commenter de façon exhaustive, près de quarante références à ce concept.

On observe le même manque d'importance de ce concept chez Karl Kautsky, un autre exposant de la II Internationale. Selon Sereni (1984: 68), la seule fois où le concept de FES apparaît chez Kautsky est une citation de Marx, mais il est alors immédiatement réinterprété comme synonyme de "mode de production".

La non perception du concept par Kautsky, pour qui les analyses historiographiques ont eu une grande importance, est encore plus paradoxal que chez Plejanov, et cela en raison du caractère essentiel du concept de FES pour la compréhension du matérialisme historique: comment élaborer une analyse marxiste sans la géologie économique? La question marque le champ

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d'articulation possible au concept et, sur un autre plan, le degré de visibilité de la pratique qui, historiquement, a lu (et donné sa forme) au marxisme. On constate effectivement par la lecture de Sereni que l'essence du matérialisme historique, notamment chez Marx, a été dévoilée à travers plusieurs degrés de visibilité successifs.

Lenine a entrepris de restaurer ce terme à partir de 1894, année où il a écrit et publié Qui sont les "amis du peuple"? . Chez Lenine, le concept de FES exprime l'unité - ou la totalité, comme le suggère Sereni (1984: 69) - de la théorie marxiste. Il est considéré comme un super-concept capable de réunir des concepts fragmentés, comme "mode de production", "structure économique de base", "superstructure juridico-politique", "idéologie", et de rendre compte en même temps des différentes sphères de la vie sociale.

Superconcept, bien entendu, dans le sens où il possède la capacité de rendre compte du processus historique comme un tout: unité de toutes les sphères, structurelles et superstructurelles, et paradoxalement unité de la continuité et de la discontinuité des processus historiques. Lenine souligne et valorise ce concept, en réhabilitant cette partie insoupçonnable de la pensée marxiste et en établissant les conditions théoriques au dépassement d'un certain économicisme laïc qui génère des analyses historiques dépourvues d'une interprétation cohérente de l'ensemble interrelationnel des différentes sphères économiques de la société. Pour cela, Lenine soulève deux questions, l'une générale et l'autre spécifique, au sujet de ce concept :

1. En quoi consiste à proprement parler le concept de FES ? et

2. Dans quel sens le développement d'une FES doit (ou peut) être considéré comme un processus historico-naturel ?

À la question générale, Lenine répond en centrant le concept sur l'essence même de la théorie sociale marxiste, à savoir en la comprenant comme une méthodologie de perception ouverte, qui embrasse les diverses interactions sociales. La question spécifique de Lenine sur le concept part non de la formulation initiale de celui-ci que l'on trouve, pour Marx, dans Contribution à la critique de l'économie politique (1846), mais de sa formulation - reformulation ? - dans la préface du premier tome du Capital (1867) où l'on peut lire:

Celui qui, comme moi, conçoit le développement de la formation économique de la société comme un processus historico-naturel, ne peut rendre l'individu responsable de l'existence de relations dont, socialement, il fait partie, bien que subjectivement, il se considère très au-dessus d'elles (apud Sereni, 1984:59).

Il ne fait pas de doute que le caractère marxiste du concept de FES est le plus large possible et rend compte de la totalité des relations établies entre les hommes et la nature à travers des mécanismes sociaux et naturels, ce qui pourrait être identifié comme une perception d'unité et de totalité propre au concept, son essence consistant en cela.

Cette notion d'unité et de totalité du processus historique a été défendue par Engels dans sa correspondance tardive et corroborée par Antonio Labriola. Tous deux ont critiqué l'économicisme en affirmant que les relations entre superstructure et infrastructure ne peuvent être réduites à une relation de cause à effet, et ont souligné le caractère de l'action réciproque

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(Wechselwirkung) qui existe entre elles. Ces auteurs insistent surtout sur la notion d'unité et de totalité du processus historique, un présupposé sur lequel se construit l'idée de la scientificité même de l'histoire (Sereni, 1984: 76).

Sereni cherche à se situer aussi en opposition aux partisans de la thèse sur la prédominance des forces productives (économicistes) et rappelle un commentaire de Engels sur la Critique à l'économie politique de Marx, dans laquelle sont décrites ce que cet auteur considérait comme les deux lisibilités possibles du processus social à travers la critique de l'économie politique : la méthode historique et la méthode logique.

La méthode logique correspondrait à une perception structurelle, ou systématique, du processus historique, car elle est basée sur la perception du système de relations intrinsèquement nécessaires à une réalité donnée. Quant à la méthode historique, elle juge que le traitement scientifique de toute réalité historique ne peut en aucune façon être exclusivement logique (systématique, structurelle) et doit nécessairement incorporer un élément proprement historique, qualifié ici de génétique (Sereni 1984: 86).

Sereni perçoit une complémentarité entre les deux méthodes d'analyse de l'économie politique et considère qu'une méthode génétique n'est pas non plus possible, qui exige un modèle systémique et structurel. En réalité, Sereni s'en remet à Luporini et à l'emploi fait par cet auteur de la terminologie développée par Bollhagen (Luporini, apud Sereni 1984) à travers laquelle il renvoie à la notion d'impossibilité d'individualiser les deux méthodes, avec la prédominance de l'une sur l'autre selon la lecture envisagée, et qui conduit à deux méthodes spécifiques, l'une structuralo-génétique et l'autre génético-structurelle.

La méthode structuralo-génétique s'impose pour les études d'aspects particuliers de la vie sociale et correspond à une perception sociologique de l'objet analysé, tandis que la méthode génético-structurelle s'impose quant à elle pour les études qui visent des aspects généraux, observant l'unité entre les continuités et les discontinuités des sociétés et est ainsi la méthode essentielle pour la recherche sur les FES. Cette seconde méthode correspond donc à une perception historique du processus.

Dans les deux cas, les éléments constitutifs sont analogues mais disposés de façon hiérarchiquement différente en fonction du modèle d'abstraction scientifique qu'ils combinent en privilégiant une étude sociologique ou une étude historique.

Avec la méthode structuralo-génétique (sociologique), l'étude d'une FES déterminée refléterait surtout le mode de production dominant dans la circonstance historique donnée. Au contraire, avec la méthode génético-structurelle (historique), l'étude de la FES se pose comme l'étude de processus généraux, successoraux, indiquant une succession de modes de production dominants.

Les deux méthodes reproduisent toutefois la thèse sur la prédominance des forces productives compromise avec l'orthodoxie marxiste qui suggère la prédominance de l'infrastructure économique sur les superstructures car, comme le dit Sereni:

En todo modelo estructural-genético ou genético-estructural el primer rasgo a poner de relieve en aquella formación o en su modelo

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correspondiente es, precisamente, el que está formado por su ley económica fundamental (...). Por lo tanto, la ley económica fundamental sigue siendo, debido a 'ley general de las formaciones sociales' enunciada por Marx y así designada por Luporini, el primer rasgo constitutivo de todo modelo estructural-genético o genético-estructural de la formación económico-social (1984: 91).

On suppose que même en échappant à l'économicisme, le modèle de FES retombe sur la thèse de la prédominance de l'infrastructure sur la superstructure. Il faut explorer davantage le modèle afin de percevoir, et c'est là mon objectif, des mécanismes méthodologiques de perception intégralisée des deux sphères.

Un pas important pour la compréhension du concept de FES réside dans la compréhension du concept de "mode de production". Associés et réunis dans plusieurs analyses de l'économie politique et de l'histoire, tous deux sont des concepts fondamentaux de la méthode matérialiste historique. En comprenant la FES comme une totalité sociale concrète, historiquement déterminée, on peut comprendre le mode de production comme un concept théorico-instrumental avec lequel on peut penser la réalité sociale. En termes généraux, une FES correspond à la combinaison des modes de production en vigueur dans une société donnée. En prenant les modes de production pour des objets formels abstraits et les FES pour des objets réels concrets, Fioravante (1978) considère que les deux concepts se complètent.

Godelier considère une FES comme une alternative d'analyse de systèmes complexes de modes de production:

Comme il est fréquent qu'une société concrète soit organisée sur la base de plusieurs modes de production articulés entre eux de façon spécifique et avec la domination de l'un d'eux, on a recours à la notion de 'formation économique et sociale" pour désigner de tels ensembles articulés de modes de production (1976: 283).

Le concept de mode de production surgit de la corroboration d'une théorie scientifique de l'histoire, prétendue par la voie dialectique, et suggère l'idée d'une totalité sociale structurée autour de trois complexes : une structure économique, une structure juridico-politique et une sous-structure idéologique, la première correspondant à ce que l'on appelle l'infrastructure sociale, ou base, et les autres à ce que l'on appelle la superstructure. Chez Marx, comme l'affirme Harnecker, la sous-structure économique détermine les autres:

Le mode de production capitaliste, en produisant des biens matériels, reproduit les relations de production capitalistes et en même temps qu'il reproduit ces relations, il reproduit leurs conditions d'existence superstructurelles, c'est-à-dire les conditions idéologiques et les relations de pouvoir, ainsi que le rôle qu'elles jouent au sein de la structure sociale (Harnecker 1971: 141, apud Gebran 1978).

Marx est explicite sur la question et considère le rôle déterminant de l'infrastructure sur la superstructure :

L'ensemble des relations de production constitue la structure économique de la société, la base réelle sur laquelle s'élève une superstructure juridique et politique, à laquelle correspondent des formes déterminées. Le mode de production de la vie matérielle conditionne le processus de la vie sociale, politique et intellectuelle en général. Ce n'est pas la conscience des hommes qui détermine la réalité;

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au contraire, c'est la réalité sociale qui détermine sa conscience (Marx 1970: 37).

On connaît bien l'influence de cette position marxiste sur la pensée sociale des XIXe et XXe siècles1. Mais des contradictions croissantes ont émergé tout au long de ces deux siècles. Reproduisant une pensée assez commune à certains blocs pensants du matérialisme historique occidental, Gebran suggère que bien que les sous-structures économiques déterminent les modes de production, les sous-structures juridico-politiques et idéologiques peuvent parfois l'emporter au cours d'une période historique déterminée et dominent alors les autres (Gebran 1978: 14).

À ce sujet, les thèses sur la domination et la surdétermination des structures de production défendues par Althusser (1971) sont célèbres. L'auteur y dépasse la conceptualisation rigoureusement marxiste et suggère que le rôle de force sociale déterminante peut être joué par des sphères superstructurelles. Par exemple, suggère Althusser, dans le mode de production féodal, c'est la sous-structure idéologique qui dominait, avec la prédominance de la forme religieuse - le catholicisme -, tandis qu'à Rome et dans la Grèce classique, le rôle dominant serait revenu à la sous-structure juridico-politique.

La perception de Labriola sur la question souligne également une critique du réductionnisme économique:

Ya no se trata de separar el accidente de la sustancia, la apariencia de la realidad, el fenómeno del núcleo intrínseco, o cualquiera de las otras fórmulas que empleariam los partidarios de cualquier escolasticismo; sino de explicar el entrelazamiento y el complexo en cuanto, justamente, es entrelazamiento y complexo. No se trata de descubrir y de determinar el terreno social solamente, para después hacer aparecer sobre él a los hombres como marionetas, cujos hilos son tenidos y movidos, no ya por la providencia, sino por las categorias economicas. Estas categorias son ellas mismas productos de un devenir y arte para vencer, dominar, transformar y usar las condiciones naturales; porque los hombres cambian suas ideas y actitudes por la reacción de sus instrumentos sobre ellos mismos. Porque los hombres cambian en sus espectivas relaciones de asociación, y por ello dependen de diferente manera los unos de los otros (apud Sereni 1980: 75).

Godelier a lui aussi contribué à la discussion et considère que les analyses qui privilégient un seul aspect de la réalité sociale - le matériel ou l'idéel quel qu'il soit - sont incomplètes:

Toute analyse qui commence par séparer la pensée des autres composantes de la réalité sociale (l'idéel du non idéel) et entreprend ensuite de déduire celles-ci de celle-là (démarche idéaliste) ou celle-là de celles-ci (démarche matérialiste) s'enferme par son principe même dans une impasse (1984: 192).

Godelier observe dans le débat la permanence de deux thèses sur les relations entre l'idéel et les réalités sociales - il s'agit ici du débat sur la prépondérance ou non de l'infrastructure sur la superstructure:

• la thèse selon laquelle les idées sont à l'origine des formations historiques (par exemple, les grandes religions forment les hommes selon leurs modèles);

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• la thèse selon laquelle une société ne se réduit pas aux idées, mais renferme des forces constamment renouvelées capables de générer de nouvelles idées.

Il propose une analyse imbriquée d'infrastructure et de superstructure, en entrevoyant l'interaction entre l'idéel et le réel, et suggère que:

Tout rapport social (…) existe à la fois dans la pensée et hors d'elle, et la part de lui-même qui est dans la pensée est donc de la pensée, une réalité idéale (1984: 221).

et que :

Tout rapport social, quel qu'il soit, inclut une part idéelle, une part de pensée, de représentations ; ces représentations ne sont pas seulement la forme que revêt ce rapport pour la conscience, mais font partie de son contenu (1984: 171).

De fait, Godelier formule une hypothèse dans laquelle il explicite le rôle des différentes activité sociales, dans leur contexte de production:

Pour qu'une activité sociale - et avec elle les idées et institutions qui lui correspondent et l'organisent - joue un rôle dominant dans le fonctionnement et l'évolution d'une société (donc dans la pensée et l'action des individus et des groupes qui composent cette société), il faut nécessairement qu'elle assume directement, en plus de sa finalité et de ses fonctions explicites, la fonction de rapport de production (1984: 194).

La pensée de Godelier semble avoir pour origine son analyse du mode de production asiatique (1978) dans laquelle, en étudiant des formations sociales européennes, africaines et américaines2, il suggère que ce mode de production constitue comme une étape de passage d'une économie pré-capitaliste vers une économie capitaliste. Il semble que ce soit du choc entre les modes de production que se reproduit, dans l'environnement plus large des formations économico-sociales, l'interaction socio-mentale entre infrastructure et superstructure.

Le concept d'infrastructure renvoie à la combinaison des différentes conditions matérielles et sociales qui permettent aux membres d'une société de produire et de reproduire les moyens matériels de leur existence (Godelier 1984: 173). On en identifie en général trois ensembles :

• les conditions écologiques et géographiques présentes dans un scénario historique déterminé ;

• les formes productives disponibles, comprises comme les moyens matériels et intellectuels de production ;

• les différentes relations de production établies ou passibles d'être établies, qui se subdivisent, en fonction de leur nature, en trois catégories de fonction:

o -la fonction de détermination de la forme sociale d'accès aux ressources et de contrôle des moyens de production ; o -la fonction de distribution de la force de travail ;

2 Et plus précisément les royaumes misènique et étrusque, en Europe, les empires de Mali et de

Ghana et le royaume Bamum, au Cameroun, en Afrique, et les sociétés américaines pré-colombiennes (Godelier, 1987: 74).

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o -la fonction de détermination de la forme sociale de circulation et de redistribution des produits du travail individuel et collectif.

Godelier conçoit la part idéelle du réel à travers un recensement des fonction des pensées et des représentations. Ces fonctions seraient au nombre de quatre:

a) représenter (rendre présentes dans la pensée les réalités extérieures ou intérieures de l'homme, qui peuvent être matérielles ou immatérielles, visibles ou invisibles, concrètes ou imaginaires) ;

b) interpréter (produire des abstractions capables de rendre compte des éléments et des processus de la vie matérielle) ;

c) organiser (établir des connexions capables d'établir des relations de prépondérance des hommes entre eux et avec la nature) ;

d) légitimer (ou ne pas légitimer selon le cas, les relations des hommes entre eux et avec la nature).

Godelier observe l'interaction entre ces deux facteurs et suggère une commutation structurelle entre eux. C'est là que réside la valeur de sa contribution.

Critique du concept

En reconstruisant le cadre méthodologique suggéré dans la section précédente, on obtiendrait la configuration graphique suivante:

Application économiciste du modèle Modèle

de FES Méthode structuralo-génétique Application

intégralisée Méthode Godelier du modèle

Méthode génético-structurelle

Selon la critique ébauchée, je suppose qu'une application intégralisée du modèle, capable d'identifier la cohérence interne des sphères infrastructurelles et superstructurelles, a historiquement subi des tords dans son application. L'effort de Godelier qui, d'une certaine façon, allie la méthode structuralo-génétique à la méthode génético-structurelle, semble être le plus cohérent en direction d'un modèle intégralisateur, capable de percevoir la totalité du processus social. Je suppose que ce modèle découle du bénéfice de l'expérience culturologique propre à l'anthropologie. Ce n'est pas sans raisons que l'anthropologie, et surtout une anthropologie interprétative3, a été accusée

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de rompre le champ théorique tissé par le matérialisme historique, offrant ainsi de nouvelles possibilités d'appréhension des relations sociales.

Le modèle de FES présenté par Sereni (1984) est méritoire par sa capacité à articuler des faits historiques macro-sociaux à travers la critique économique, mais présente des lacunes en termes d'insertion d'éléments subjectifs. S'ils étaient inclus dans l'analyse élaborée, ces éléments auraient probablement un certain pouvoir corrosif sur certaines des systématisations suggérées. Il ne me semble pas bénéfique - si ce n'est comme exercice d'abstraction généraliste - de soutenir des modèles systémiques qui, parce qu'ils ignorent les spectralités et les fissures présentes dans le processus historique, décrivent des cadres harmonieux pour leur logique. Dans le sens, l'utilisation du concept faite par Godelier est plus large. Pour lui:

Il y a de l'idéel dans tout le réel (social), ce qui n'implique pas que tout soit idéel dans le réel (1984: 199).

J'aimerais ébaucher une critique d'une forme d'application du concept de FES déterminée, en opposant ce que j'appellerai ici une perception recensionniste et une perception amplificatrice des relations entre superstructures et infrastructures. La première, défendue par Sereni et pratiquée par la plupart des auteurs cités précédemment, aurait tendance à réduire l'importance de la dimension subjective des sociétés et serait caractérisée par l'application de ce que j'appellerai la voie dialectique dans l'interprétation des modes de production des sociétés. La seconde, soupçonnée mais non systématisée dans ce sens par Godelier, pratiquerait la voie herméneutique comme stratégie de perception des modes de production des sociétés. Comme suite à cette critique - et dans la prochaine section - j'aimerais proposer, bien qu'à caractère expérimental, l'analyse de la FES par la voie herméneutique, en visant l'application du modèle au cas amazonien, ou plus spécifiquement sur un cas amazonien - l'étude de la violence symbolique, ou plus exactement des formes d'exclusion sociale des heréus de l'île de Marajó - constituant ainsi la base méthodologique de ce travail de doctorat.

La critique que je tente d'ébaucher part de la substitution d'une nuance réductionniste (dialectique) par une autre amplificatrice (herméneutique) dans le concept de FES. Il ne s'agit pas d'invalider le concept, mais de chercher à le visualiser d'un point de vue herméneutique et non dialectique. Je suppose que la voie dialectique est basée sur la réduction des hypothèses à travers la généralisation des arguments, ce qui rendrait difficile l'inclusion de l'élément subjectivité dans le champ étudié. En sciences sociales, les modèles logiques ne fonctionnent qu'à travers la pratique de la réduction des faits. L'économie prétend cette vision du processus historique. C'est également le cas de l'histoire assistencialiste pratiquée par la méthode dialectique. Ce modèle présente des lacunes malgré ses mérites. Dilthey a suggéré l'interprétation comme méthode propre aux sciences sociales, une hypothèse présente dans la phénoménologie et qui atteint son principal but chez Gadamer et Ricœur4. Cette perception amplificatrice cherche à dépasser l'impérialisme de la logique ou tout du moins de la principale tradition logique occidentale - la métaphysique occidentale

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selon Heidegger -, en suggérant des modèles de compréhension de la réalité sociale plus adaptés aux dimensions de l'expérience5.

Il ne s'agit pas de combattre le concept de FES, mais de combattre le concept de FES qui ne comprend pas le jeu de complémentarité entre l'infrastructure et la superstructure. Des aspects culturels - ethnographiques, mentaux, idéologiques, subjectifs enfin, par exemple, ont été considérés d'une façon simpliste par des auteurs et leurs interprètes.

La proposition de la voie dialectique consiste à localiser, à dénoncer et à écarter les spectres (Gespensten) présents dans une idée ou une conformation socio-économique déterminée, et pense qu'ainsi, les esprits (Geisten) seraient plus évidents, permettant ainsi de voir la cohérence des processus. Mais le grand problème de la voie dialectique est qu'elle n'arrive pas à rester libre de la dynamique de spectralisation des concepts, même en limitant ses variables. Les spectres sont comme une ombre : ils peuvent être occultés mais sont intangibles et non changeables. Dans la pratique, le spectre conduit le sens en dépassant l'esprit.

Le mérite de la voie herméneutique consiste justement à s'appuyer sur la compréhension des spectres, sans prétendre les dissoudre. Si la voie dialectique propose la synthèse du processus à partir de l'identification des liens de dépendance, la voie herméneutique propose la cartographie et la sur-codification de ces mêmes voies, sans se préoccuper de la déduction.

La voie herméneutique peut être pratiquée dans la perception d'une FES déterminée comme un jeu entre deux tangentes toujours correspondantes: la contingence phénoménique (les esprits - la somme des productions matérielles, des discours, des idéologèmes, des mémoires et des actes) et l'immanence fantasmatique (les spectres - la somme des silences, des idéologies, des oublis et des vides).

L'application de la voie herméneutique à la compréhension d'une FES équivaudrait peut-être au champ méthodologique aujourd'hui appelé étude culturelle aux multiples variables : histoire culturelle, sociologie de la culture, sociologie de l'imaginaire, ethnographie interprétative, culture studies, sémiotique de la culture…

Hunt (1995) signale comment l'histoire d'inspiration marxiste a cherché de plus en plus à dépasser la rigidité déterministe de la relation base/superstructure. En se consacrant à l'étude de ce qu'il appelait "médiations culturelles et morales", Thompson (1984) cherche par exemple à montrer comment les populations agissent avec les expériences matérielles de façon culturelle.

Une perception similaire du complexe symbolique qui relie l'expérience à la subjectivité est présente chez la quatrième génération des historiens des mentalités de l'École des Annales, et en particulier chez Jacques Revel et Roger Chartier sur qui pèse la critique dévastatrice de la pensée foucaultien sur les présupposés de l'histoire sociale (Hunt 1995: 9).

5 La différence entre la voie dialectique et la voie herméneutique traversait le débat

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Au sujet de la tendance contemporaine vers une histoire culturelle qui se détache dans le panorama de l'histoire sociale, Hunt écrit :

Dans les dernières années (…), les modèles mêmes d'explication qui ont contribué de façon plus significative à l'ascension de l'histoire sociale sont passés par un changement important d'approche, à partir de l'intérêt toujours plus grand porté par les marxistes comme par les adeptes des Annales à l'histoire de la culture (1995: 6).

Cette perspective partagée de façon différente par les chercheurs des divers courants des thèmes culturels cités ci-dessus semble centrée justement sur le point où une vision amplificatrice de la relation base/superstructure est nécessaire.

Mais revenons à notre modèle peut-être parce qu'il n'a de sens que dans un scénario. Je tente de le faire en cherchant une méthodologie capable de rendre compte du jeu de complémentarité entre infrastructure et superstructure sociale dans le but de constituer un modèle d'analyse pour la question proposée dans ce travail.

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