I. C ARACTERISATION DES MATERIAUX
I.1. L’analyse thermique
L’analyse thermique regroupe toute une série de techniques de caractérisation des matériaux basées sur l’étude des variations des propriétés physiques en fonction de la température. Elle consiste en des approches macroscopiques du comportement des matériaux. L’analyse de la réponse permet de mettre en évidence ces phénomènes
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(transition vitreuse, cristallisation, fusion, etc.), et d’en apporter une interprétation microscopique.
I.1.1. La transition vitreuse
La transition vitreuse est définie comme le passage d’un état vitreux à un état de liquide surfondu, ou caoutchoutique, lors du chauffage d’un matériau. Elle n’est pas à proprement parlé une transition thermodynamique en raison de son caractère cinétique. Dans les matériaux polymères, ce paramètre est particulièrement important car tout polymère possédant forcément des zones amorphes en quantité plus ou moins importante sera affecté par le phénomène de transition vitreuse. Toutes les propriétés du matériau changent considérablement lors du passage de la transition vitreuse. De nombreux paramètres affectent la température de transition vitreuse, comme la flexibilité de la chaîne principale, l’encombrement stérique et la polarité des groupements latéraux, le taux de cristallinité, la tacticité ou la masse moléculaire [64, 65].
La transition vitreuse conditionne le domaine d’utilisation d’un matériau, mais également ses conditions de mise en œuvre. Elle est d’autant plus apparente que le matériau est amorphe. En effet, dans un polymère semi cristallin seule la partie amorphe est concernée par le phénomène.
Le phénomène de transition vitreuse présente différentes manifestations physiques :
• Aspect mécanique : la transition vitreuse correspond au passage d’une zone de faible agitation moléculaire à une agitation moléculaire d’amplitude importante impliquant
l’ensemble de la chaîne macromoléculaire (transition α). On parle de mobilité délocalisée. Le module du matériau chute brutalement lors du passage de la transition vitreuse. Il chute typiquement de trois ordres de grandeurs dans le cas d’un
polymère totalement amorphe.
• Aspect volumique : la variation du volume spécifique en fonction de la température n’est pas monotone. En effet, le volume spécifique varie linéairement dans le domaine vitreux et dans le domaine caoutchoutique, mais on observe une discontinuité lors du passage de la transition vitreuse accompagnée d’une augmentation de la pente. Ces pentes permettent de déterminer les deux
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coefficients d’expansion (αl et αg) du matériau dans les domaines vitreux et caoutchoutique. Cette discontinuité est associée à une augmentation de la fraction
de volume libre dans le matériau. L’enthalpie du système varie de manière identique.
• Aspect entropique : l’entropie est constant, mais non nulle (entropie résiduelle) à l’état vitreux et augmente au passage de la transition vitreuse.
Cette transition s’accompagne donc d’une variation brusque des dérivés premiers des grandeurs thermodynamiques fondamentales (volume spécifique, enthalpie, etc.). Elle présente donc toutes les caractéristiques d’une transition du second ordre.
Les techniques généralement utilisées pour mettre en évidence la transition vitreuse sont la calorimétrie différentielle à balayage (DSC) et l’analyse mécanique dynamique (DMA). La DSC reste la meilleure méthode d’analyse pour déterminer la température de transition vitreuse. Ainsi, en DSC la transition vitreuse s’observe par une brusque variation de la capacité calorifique du matériau sur une gamme de température de l’ordre d’une dizaine de degré. En DMA, la transition vitreuse se manifeste par un phénomène de relaxation, appelée relaxation principale, au cours duquel le module de conservation chute brutalement, typiquement d’une valeur de l’ordre du GPa au MPa. Quelque soit la technique de mesure utilisée, la température de transition vitreuse dépend fortement de la cinétique de la mesure.
I.1.2. La cristallisation et la fusion
La cristallisation et la fusion des polymères sont des phénomènes liés à l’existence de domaines ordonnés, stables thermodynamiquement à basse température. Ils se produisent systématiquement à des températures supérieures à la température de transition vitreuse.
Le point de fusion représente la température pour laquelle les phases solide et liquide coexistent en équilibre. Le point de fusion est une constante physique caractéristique de chaque corps pur. La fusion est une transition thermodynamique du premier ordre (température constante lors du changement d’état). Lors de la fusion, les cristaux absorbent de l’énergie (phénomène endothermique) et cette énergie correspond à la chaleur latente de fusion, plus connue sous le nom d’enthalpie de fusion (ΔHf).
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Comme la transition vitreuse, la capacité d’un matériau polymère à cristalliser dépend de
nombreux paramètres comme par exemple [64, 65]:
• la tacticité (seuls les polymères iso ou syndiotactiques peuvent cristalliser);
• la structure;
• la masse molaire : quand celle‐ci augmente, la fraction cristallisée tend à diminuer;
• la présence de plastifiants tend à diminuer la capacité à cristalliser;
• l’histoire thermique du matériau : une augmentation de la vitesse de refroidissement lors de la mise en œuvre du matériau diminue sa cristallinité;
• l’histoire mécanique : par exemple l’étirage du matériau augmente sa cristallinité.
Le taux de cristallinité des polymères peut donc être déterminé à partir de leur enthalpie de fusion ou de cristallisation. L’expression permettant de l’évaluer est la suivante:
0
,
, 0
,
(%) 100
(%) 100
f c
f
f i c i
i f i
H H
H X H χ
χ
= × Δ Δ
= × Δ
× Δ
( IV‐1)
ΔHf0
= enthalpie de fusion du matériau 100 % cristallin
Xi = fraction massique de l’élément i
En connaissant l’enthalpie de cristallisation (ΔHc) du matériau mesurée lors de la montée en température, la valeur initiale de cristallinité peut être estimée par la relation (IV‐2).
0
0
(%) 100
f c f
c
H
H H
Δ Δ
−
× Δ
χ =
( IV‐2)Les techniques expérimentales effectuées dans cette partie de l’étude sont essentiellement la calorimétrie différentielle à balayage (DSC) et l’analyse mécanique dynamique (DMA).
L’analyse mécanique consiste à étudier la réponse d’un matériau soumis à l’application d’une contrainte mécanique.
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Tous les matériaux élaborés ont un rapport fibres/matrice de 3/7 en masse, à l’exception des matériaux à matrice caoutchouc naturel où plusieurs proportions ont été testées.