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un exemple illustrant notre propos au chapitre 6 lorsque nous voudrons simplifier les DRSs ob- tenues grâce à leur encodage dans la théorie des types tel qu’il a été proposé dans (Muskens, 1996c).

Remarquons pour terminer cette section que le fait de représenter les questions par des termes de typee→t, s’il peut certes être vu comme une amélioration par rapport à la représentation des questions par des termes de typet, n’en demeure pas moins une solution relativement limitée.

Par exemple, une telle représentation n’est pas adéquate pour des questions aussi simples que

« Does Vincent love Mia ? ». Pour un traitement plus élaboré de la sémantique des questions, on pourra par exemple se reporter à (Groenendijk, 2003), où la sémantique des questions est représentée à l’aide de partitions d’ensembles de mondes possibles.

Construction de représentations temporelles pour le polonais

Au chapitre 2, nous avions introduitNessie, un outil capable de construire des représenta- tions sémantiques sous la forme de termes de TYnà partir de lexiques et d’arbres. Puis, au cha- pitre précédent, nous avons montré que cet outil pouvait être intégré au systèmeCurtde (Black- burn et Bos, 2005b). Ce travail d’intégration nous a permis non seulement de vérifier le bon fonctionnement deNessie, en comparant les représentations qu’il permet de construire à celles construites par Curt, mais aussi de voir comment il était possible d’adapter une grammaire existante, de sorte qu’elle puisse être utilisée avecNessiepour construire la représentation sé- mantique des phrases qu’elle engendre. Nous allons à présent mettre à profit les enseignements tirés du chapitre précédent pour étudier l’impact du passage de la logique du premier ordre à la logique d’ordre supérieur avec types sur les tâches d’inférence. Cette question étant vaste, nous n’essaierons pas ici d’y apporter une réponse complète. Notre démarche consiste plutôt à consi- dérer un exemple de tâche nécessitant le recours à des outils d’inférence et à nous demander quels enseignements il est possible de tirer du traitement de cet exemple.

La tâche d’inférence que nous avons choisie de traiter ici est la construction de modèles (au sens de la logique du premier ordre) restituant le contenu temporel et aspectuel de phrases po- lonaises simples. Le choix de la langue polonaise s’explique par le fait que, dans cette langue, les verbes ont un contenu aspectuel à la fois riche et fortement lexicalisé, ce qui signifie que des phrases syntaxiquement simples peuvent exprimer une sémantique complexe. En d’autres termes, nous avons choisi la langue polonaise parce qu’elle offre la possibilité d’étudier des phénomènes sémantiquement riches sans avoir pour cela à recourir à une grammaire complexe.

Notre travail s’appuie en premier lieu sur (Młynarczyk, 2004), qui propose une classification des verbes polonais en cinq classes. Bien que cette classification ait été établie à partir de cri- tères et tests morphologiques, il s’avère que chacune des classes verbales ainsi dégagées a une sémantique temporelle et aspectuelle précise, distincte de celles des autres classes. Par la suite, Aalstein (Młynarczyk) et Blackburn ont proposé dans (Alstein et Blackburn, 2007), un article non publié à ce jour, d’exprimer la sémantique des classes verbales à l’aide d’événements, ces entités abstraites qui ont été introduites à la section 1.2.1. Cependant, cette proposition a été faite dans le cadre duλ-calcul non typé. En outre, aucune description formelle de l’ontologie utilisée pour rendre compte des événements n’est fournie, les auteurs se contentant de donner quelques intuitions quant aux propriétés qu’elle pourrait avoir.

Notre premier travail dans ce chapitre consistera donc à proposer une sémantique dans TYn pour une petite grammaire du polonais, ce qui implique, comme nous l’avons vu en section 1.2.1,

non seulement d’associer aux mots du lexique des représentations sémantiques dans TYn, mais aussi de formaliser les propriétés de l’ontologie utilisée. Une fois ces propriétés formalisées, nous les utiliserons pour envisager la construction de modèles proprement dite. Bien que le mo- dule d’inférence défini pourCurtdans (Blackburn et Bos, 2005b) utilise à la fois la preuve de théorèmes et la construction de modèles, nous avons choisi ici de nous intéresser plus spécifi- quement à la construction de modèles, car elle pose des problèmes qui n’apparaissent pas lors de la preuve de théorèmes. Cette dernière n’a en effet besoin que des axiomes régulant l’onto- logie considérée, tandis que pour la construction de modèles, il faut tenir compte du fait que les programmes qui la mettent en œuvre construisent des modèlesminimaux, qui ne sont pas néces- sairement les seuls modèles intéressants dans le contexte de la sémantique computationnelle.

Comme nous l’avons laissé entendre, la construction des modèles sera implantée dansCurt, qui reste responsable de l’analyse syntaxique et de l’inférence, tandis que le calcul sémantique est externalisé et confié àNessie.

Nous commençons par énoncer (section 4.1) quelques propriétés de la langue polonaise, concernant principalement les verbes et les groupes nominaux. Puis, dans la section 4.2, nous introduisons d’abord la classification des verbes polonais établie dans (Młynarczyk, 2004), puis la proposition de donner aux verbes une sémantique à base d’événements, développée dans (Al- stein et Blackburn, 2007) et utilisant leλ-calcul non typé. Dans la section 4.3, nous donnons une sémantique dans TYnpour le fragment de polonais considéré. Comme nous le verrons, il s’agira surtout de trouver une représentation convenable pour les verbes. Celle à laquelle nous abouti- rons nous permettra de réutiliser, pour les autres catégories syntaxiques, les représentations qui leurs sont classiquement associées dans TY1. Cette section décrit également l’implantation de cette méthode à l’aide d’une DCG et deNessie. Nous poursuivons (section 4.4) par l’axio- matisation des événements. Après l’avoir présentée, nous montrons comment elle permet de construire un premier modèle minimal pour les représentations sémantiques considérées ; nous verrons aussi que les annotations en types présentes dans le lexique sémantique de Nessie peuvent être utilisées pour générer automatiquement une théorie du premier ordre axiomatisant les contraintes exprimées par les types. Enfin, dans la section 4.5, nous donnons un algorithme qui, étant donné un modèle minimal tel que celui construit précédemment, est capable, en le

« perturbant », de construiretousles modèles pertinents de la représentation sémantique consi- dérée, du point de vue du temps et de l’aspect.

4.1 Quelques pré-requis sur le polonais

Nous commençons par introduire la notion d’aspect, puis expliquons comment elle est expri- mée en polonais. Nous évoquons ensuite le temps, tant dans sa dimension morpho-syntaxique que dans sa dimension sémantique. Nous terminons cette petite introduction au polonais par une remarque sur les groupes nominaux.

4.1.1 La notion d’aspect

Il nous semble que l’aspect est, en général, une notion relativement floue et dont la définition a pu évoluer au cours du temps. En résumé, nous dirons que l’aspect est le point de vue avec

lequel on s’intéresse à une action. Ce point de vue peut être soit ponctuel, soit considérer l’action comme prenant du temps. Dans le cas où le point de vue est ponctuel, on parle d’aspectperfectif.

Dans le cas où c’est l’action dans sa durée qui est considérée, on parle de point de vueimper- fectif. Ainsi, voici la définition donnée par Saussure des points de vue imperfectifs et perfectifs :

« Le perfectif représente l’action dans sa totalité, comme un point, en dehors de tout devenir ; l’imperfectif la montre en train de se faire, et sur la ligne du temps » (Saussure, Linguistique Générale, 1916, p. 162).

4.1.2 Expression de l’aspect et du temps en polonais

En polonais, les verbes à l’infinitif existent tous sous au moins deux formes : l’une imperfec- tive et l’autre perfective. Le passage d’une forme « racine » à la forme dérivée (ou aux formes dérivées) se fait grâce à des règles morphologiques précises. Par exemple, le verbe français

« marcher » existe en polonais sous une forme racine imperfective « spacerowa´c » et sous une forme perfective dérivée de la première par l’ajout du préfixe « po- », à savoir « pospacerowa´c ».

Pour d’autres verbes, c’est la forme perfective qui est la forme racine et la forme imperfective qui est obtenue par dérivation. C’est par exemple le cas pour le verbe « acheter » dont la racine perfective est « kupi´c » et à partir de laquelle est construite la forme dérivée imperfective « kupo- wa´c ». Il convient également de remarquer que toutes les formes perfectives n’ont pas la même sémantique, et qu’une même racine imperfective peut donner lieu à plusieurs formes perfectives dérivées. Pour illustrer les différentes sémantiques des formes perfectives, nous pouvons remar- quer que, si la plupart d’entre elles se réfèrent à la fin d’une action, à l’action accomplie, certaines formes perfectives ont une lectureinchoative, ce qui signifie qu’elles se réfèrent au moment à partir duquel une action commence à avoir lieu, ou à partir duquel il est vrai qu’une propriété est satisfaite. Par exemple, les deux formes possibles du verbe « aimer » sont « kocha´c » (racine im- perfective) et « pokocha´c » (forme dérivée perfective), ce dernier verbe pouvant se traduire par

« avoir commencé à aimer » ou, peut-être plus naturellement par « être tombé amoureux de ».

Quant au fait qu’une racine imperfective puisse donner lieu à plusieurs formes perfectives, nous pouvons l’illustrer en citant les différentes formes disponibles en polonais pour les verbes

« écrire » et « toquer ». La forme racine de « écrire » est « pisa´c » (imperfectif) à partir de laquelle sont construites deux formes perfectives, « napisa´c » et « popisa´c ». La différence sémantique entre ces deux derniers verbes porte sur la manière dont l’écriture s’est arrêtée. Dans le cas de

« napisa´c », on sait que non seulement l’écriture s’est arrêtée, mais qu’en plus ce qui était en train d’être écrit l’a été complètement. Par la suite, nous dirons qu’il y a eu culminationpour indiquer le fait qu’une action s’est arrêtée « naturellement », parce qu’elle avait atteint son terme, produit le résultat qu’elle devait produire. La variante « popisa´c », quant à elle, dit exactement le contraire, à savoir que, bien que l’écriture se soit arrêtée, elle n’a pas été jusqu’à son terme naturel, ayant été interrompue prématurément et donc avant que le résultat attendu ait pu être produit. Ce verbe indique donc que ce qui était en train d’être écrit ne l’a pas été complètement.

Quant au verbe « toquer », sa racine imperfective est « puka´c » qui signifie « être en train de toquer ». À partir de cette racine sont construites trois formes perfectives dérivées : « zapuka´c »,

« popuka´c » et « pukna¸´c ». La première forme signifie simplement « avoir toqué ». La seconde peut se traduire par « avoir toqué pendant un certain temps », tandis que la troisième a une lecture sémelfactive, c’est-à-dire qu’elle signifie « avoir toqué une seule fois ».

Enfin, comme nous l’avons laissé entendre, toutes les formes verbales que nous venons d’exa- miner, qu’elles soient racine ou dérivées, perfectives ou imperfectives, sont des formes à l’in- finitif. Chacune de ces formes verbales peut donc être conjuguée, et c’est la conjugaison qui permet d’ajouter une information temporelle à l’information aspectuelle dont le verbe à l’infi- nitif est déjà porteur. Au niveau morphologique, il y a deux temps disponibles en polonais : le passé et le présent. Cependant, le temps sémantique d’un verbe conjugué dépend à la fois du temps morphologiqueetde l’aspect du verbe conjugué. En effet, si un verbe perfectif est conju- gué au présent, il doit être interprété comme un futur, le temps de l’action se situant après le temps de l’énonciation. Pour reprendre l’exemple du verbe « pospacerowa´c » (forme perfective de « spacerowa´c », se promener », la phrase « Piotr pospaceruje » dans laquelle « pospacerowa´c » est conjugué au présent est à interpréter à l’aide d’un futur et peut donc se traduire par « Pierre se sera promené ». Les autres interactions entre temps morphologique et aspect s’interprètent d’une manière plus intuitive. Le présent morphologique d’un verbe imperfectif signifie que l’ac- tion décrite est en train d’avoir lieu au moment de l’énonciation. Le passé morphologique, quant à lui, interagit de manière « monotone » avec l’aspect. En d’autres termes, le passé d’un verbe imperfectif traduit une action en cours dans le passé et le passé d’un verbe perfectif traduit une action qui s’est terminée dans le passé. En résumé, l’aspect « morphologique » d’un verbe ne se traduit pas seulement par l’aspect sémantique, il a aussi des conséquences sur le temps séman- tique du verbe. L’aspect morphologique est donc porteur de deux informations : l’une ayant trait à l’aspect sémantique, l’autre étant utilisée, en combinaison avec le temps morphologique du verbe, pour déterminer son temps sémantique. Cette remarque pourrait sembler anodine, mais son importance devrait apparaître lorsque nous présenterons les diverses approches possibles pour la construction compositionnelle de représentations sémantiques.

4.1.3 Groupes nominaux

La dernière précision d’ordre général que nous aimerions apporter sur le polonais concerne les groupes nominaux. Plus précisément, il faut savoir qu’en polonais, comme dans les autres langues slaves, un groupe nominal peut être construit à partir d’un nom uniquement, sans qu’on ait besoin de l’accompagner d’un article. Ainsi, le nom « list » (lettre) constitue à lui seul un groupe nominal. En l’absence d’article, l’interprétation de tels groupes nominaux est source d’ambiguïté, puisqu’on ne sait pas si le nom est à interpréter de façon définie ou indéfinie. La

« bonne » lecture dépend du contexte et les locuteurs slaves parviennent à désambiguïser ce type de construction sans difficulté. Pour ce qui est des outils de traitement automatique des langues, un outil réaliste de construction sémantique pour une langue slave se doit de générer les deux interprétations possibles de chaque groupe nominal de cette forme. Nous reviendrons sur ce problème lorsque nous présenterons notre implantation de la construction sémantique pour un fragment de polonais.