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Etude de l’homodimérisation de LFY FL in planta

Si les données dans la levure constituent déjà un apport in vivo, l’étape ultime de notre travail est d’étudier l’importance de LFY dans son contexte naturel.

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a) Mise en évidence d’une dimérisation de LFY chez A. thaliana

Pour tester si LFY est capable de s’homodimériser dans son contexte natif, nous avons reproduit l’équivalent de l’expérience de simple hybride réalisée avec LFY et lfy-VP16 chez A. thaliana, à la différence qu’ici les constructions sont placées sous le contrôle du promoteur natif de LFY. Pour cela, j’ai réalisé différents croisements décrits en matériel et méthodes à partir de plantes F0 hémizygotes lfy- 5-VP16/., lfy-12/lfy-12 accession Columbia (gracieusement fournies par Detlef Weigel, Institut Max Planck, Tuebingen, Allemagne) pour obtenir des plantes de génotype lfy-5-VP16/lfy-5-VP16, lfy-12/lfy- 12 et des plantes de génotype lfy-5-VP16/lfy-5-VP16, LFY/LFY.

Avant de m’intéresser aux phénotypes de ces plantes, je vais décrire les phénotypes des plantes mutantes lfy-5 et des plantes LFY-VP16 nécessaires à l’interprétation de cette expérience.

La mutation lfy-5 obtenue par criblage EMS a été décrite dans l’article de Weigel et collaborateurs (1992). Cette mutation occasionne un phénotype lfy faible chez A. thaliana. Les fleurs les plus touchées ressemblent à des structures pouvant être intermédiaires entre une inflorescence et une fleur, avec des organes parfois surnuméraires de type feuilles caulines au niveau de la couronne externe et des fleurs dans la fleur. De manière générale, les pétales et étamines sont les organes les plus affectés, remplacés par des organes de type sepalloïdes à carpelloïdes (Fig.50A).

121 Les plantes LFY-VP16 ont été décrites dans l’article de Parcy et collaborateurs (1998). Leurs phénotypes peuvent présenter différents degrés de sévérité, mais ils résultent tous d’une activation ectopique d’AG. Les phénotypes les plus faibles présentent des fleurs avec des pétales staminoïdes en deuxième couronne (Fig.50B). Les phénotypes intermédiaires présentent des sépales carpelloïdes, un nombre réduit d’étamines qui viennent prendre la place des pétales, et des carpelles surnuméraires (Fig.50C). Les phénotypes forts présentent quant à eux une structure carpelloïde principale, des couronnes surnuméraires, et une phyllotaxie en partie spiralée (Fig.50D). Il est important de noter ici que le phénotype LFY-VP16 est étroitement dépendant du nombre de copies de LFY endogène (en

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considérant 0 copie chez une plante lfy/lfy, 1 copie chez une plante LFY/lfy, et deux copies chez une plante LFY/LFY): moins il y a de copies de LFY endogène, plus le phénotype LFY-VP16 est fort (Parcy et al., 1998).

Les fleurs lfy-5-VP16/lfy-5-VP16, lfy-12/lfy-12 présentent un phénotype marqué par une couronne externe composée d’un ou plusieurs organes allongés qui s’assimilent à des organes de type feuilles caulines, un nombre faible voire souvent nul de pétales et étamines, et une grande fréquence de fleur dans la fleur (Fig.50E). Les fleurs se composent essentiellement d’organes de type sépale ou carpelle (Fig.50F). Toutes ces caractéristiques montrent donc que les plantes lfy-5-VP16/lfy-5-VP16, lfy-12/lfy- 12 présentent un phénotype mutant lfy. La fusion traductionnelle lfy-5-VP16 est donc partiellement à totalement inactive, perte d’activité d’autant plus remarquée que normalement, LFY-VP16 entraîne un phénotype LFY-VP16 fort dans le fond lfy.

Dans le fond LFY homozygote sauvage, les fleurs lfy-5-VP16/lfy-5-VP16 présentent un phénotype très sévère marqué par des structures composées uniquement de sépales carpelloïdes et de carpelles (Fig.50G). Des étamines se forment très occasionnellement entre ces organes (Fig.50H). Le phénotype des plantes lfy-5-VP16/lfy5-VP16, LFY/LFY peut donc être assimilé à un phénotype de type intermédiaire à fort LFY-VP16. Chez ces plantes, il semble donc que la présence de protéines LFY endogènes ait rendue active la fusion traductionnelle lfy-5-VP16.

Les analyses des plantes lfy-5-VP16 dans le fond lfy ou LFY sont donc cohérentes avec une possible interaction entre lfy-5 et LFY endogène lors de l’activation des gènes cibles de LFY, résultats en accord avec les homodimérisations de LFY observées in vitro et chez la levure.

b) Mise en évidence d’une oligomérisation partiellement nucléaire par Bimolecular Fluorescence Complementation (BiFC)

1-Principe du BiFC

Le BiFC est une technique de visualisation d’interactions protéiques in vivo (Hu et al., 2002). Les deux protéines d’intérêt (la seule protéine LFY dans notre cas) sont fusionnées traductionnellement soit à la moitié N-terminale (YFPN), soit à la moitié C-terminale (YFPC) de la YFP (protéine fluorescente jaune). Si les deux protéines interagissent, le rapprochement physique des deux moitiés de la YFP va permettre la reconstitution d’une YFP fluorescente. Si les deux protéines d’intérêt n’interagissent pas, aucun signal YFP ne sera émis (Fig.51A).

Quatre constructions sont réalisées à partir de 4 vecteurs d’origine (BiFC1 à BiFC4). Dans le vecteur BiFC1, le gène d’intérêt, LFY FL ici, est inséré en position N-terminale de YFPN (LFY-BiFC1).

Dans le vecteur BiFC2, LFY est inséré en position C-terminale de YFPN (LFY-BiFC2). Dans le vecteur BiFC3, LFY inséré en position C-terminale de YFPC (LFY-BiFC3). Enfin, dans le vecteur BiFC4, LFY est inséré en position N-terminale de YFPC (LFY-BiFC4; Fig.51B).

123 Dans le cas présent, l’expérience est réalisée par expression transitoire dans des feuilles de tabac et visualisée par microscopie confocale.

2-Test d’oligomérisation de LFY par BiFC

Sur les quatre combinaisons possibles, seules LFY-BiFC2/LFY-BiFC4 et LFY-BiFC1/LFY-BiFC4 ont donné des signaux différents du bruit de fond (Fig.52B et D), nettement plus fort dans le cas de LFY-BiFC2/LFY-BiFC4 que de LFY-BiFC1/LFY-BiFC4. Ces signaux possèdent un pic d’émission à une longueur d’onde proche de la YFP, confirmant qu’il s’agit bien d’un signal BiFC. Ces observations suggèrent donc fortement que LFY est capable de s’oligomériser in vivo.

Pour confirmer ces résultats, plusieurs contrôles ont été réalisés. D’une part, toutes les constructions étudiées ont été infiltrées seules et n’ont donné aucun signal. D’autre part, nous avons utilisé une paire de facteurs de transcription à boîte MADS d’A. majus, DEFICIENS (DEF) et GLOBOSA (GLO), capables d’interagir entre eux et subséquemment d’entrer dans le noyau (mécanisme caractérisé à partir de l’étude de leurs orthologues AP3 et PI chez A. thaliana; McGonigle et al., 1996).

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Alors que DEF et GLO donnent ensemble un signal de BiFC, aucun signal n’est visible lorsque la paire DEF-BiFC3/GLO-BiFC3 (YFPC) est exprimée en même temps que LFY-BiFC2 (YFPN) ou la paire DEF- BiFC2/GLO-BiFC2 (YFPN) est exprimée en même temps que LFY-BiFC4 (YFPC; images confocales similaires à celle reproduites en Fig.52A et C), témoignant de la spécificité des signaux LFY- BiFC2/LFY-BiFC4 et LFY-BiFC1/LFY-BiFC4.

3-Etude de la localisation subcellulaire de l’oligomère LFY

Pour déterminer la localisation subcellulaire de l’oligomère LFY, nous avons commencé par analyser la localisation de LFY à l’aide d’une fusion C-terminale (XW19(N)) à la protéine fluorescente verte complète (GFP; pic d’émission à 509 nm). LFY aurait deux sites d’adressage distincts. Le premier et principal est le noyau, en accord avec le rôle de facteur de transcription joué par LFY. Le second, qui

125 apparaît sous forme de ponctuations de tailles variables, correspondrait d’après Wu et collaborateurs (2003) aux plasmodesmes, ponts cytoplasmiques entre les cellules végétales (Fig.52E; Wu et al., 2003).

Pour déterminer où se trouve l’oligomère LFY, nous avons utilisé un marqueur nucléaire (l’histone H2B fusionnée à la mRFP1; Campbell et al., 2002), pour visualiser les noyaux grâce à leur fluorescence rouge. Trois situations ont alors été observées: i) l’oligomère LFY colocalise intégralement avec le marqueur nucléaire; ii) il n’occupe qu’une sous partie du noyau; iii) il est situé en périphérie du noyau (Fig.52F). Ces résultats sont donc en accord avec une oligomérisation de LFY en présence d’ADN (dans le noyau). Par contre, nous ne savons pas pourquoi dans certains cas tout le noyau est marqué, et dans d’autres qu’une sous partie du noyau. De plus, nous ne savons pas non plus si la présence de signaux BiFC en dehors du noyau a une signification biologique. Il pourrait s’agir d’agrégats conduisant à une interaction forcée des protéines LFY. Mais s’ils sont réels, ils signifient que LFY peut s’oligomériser en absence d’ADN. Dans quel compartiment cellulaire se situent alors ces signaux ? S’agit-il du réticulum endoplasmique par exemple, compartiment accolé au noyau ?

c) Mise en évidence d’une implication des résidus His387 et Arg390 dans la capacité de LFY FL à activer AP1 par expression transitoire chez le tabac (travail d’E.Thévenon)

De la même manière qu’il l’a pratiqué chez la levure, Emmanuel Thévenon a étudié l’importance des résidus clés de la coopérativité His387 et Arg390 in planta. Il a pour cela co-exprimé transitoirement deux constructions au niveau de feuilles de tabac: i) une construction effectrice codant pour des protéines LFY, sauvage ou mutantes, fusionnées au domaine activateur constitutif VP16, dont l’expression est sous le contrôle du promoteur constitutif fort 35S; ii) une construction rapportrice où le gène GUS codant l’activité β-glucuronidase est placé sous le contrôle du promoteur d’AG. Les résultats, montrant une baisse significative de la capacité de LFY H387A/R390A à activer AG par rapport à LFY sauvage, viennent confirmer les tendances observées chez la levure, validant l’importance biologique des deux résidus His387 et Arg390 in planta (Fig.53). Plusieurs remarques sont tout de même à faire ici. Dans le cadre de cette expérience, de fortes variabilités sur les mesures ont été observées, affaiblissant la qualité des résultats. De plus, comme indicateur du ‘bruit de fond’, nous avons agroinfiltré la construction rapportrice seule correspondant à l’expression résiduelle d’AG. La mesure d’activité de la β-glucuronidase révèle une activité plus forte à partir de ce contrôle négatif qu’à partir de LFY H387A/R390A-VP16: non seulement cette dernière ne parvient pas à induire l’expression d’AG, mais elle fait même baisser le bruit de fond, ce qui semble difficile à expliquer.

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