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Comment naissent, se développent et meurent les crises ?

P. C Service

2.2. Comment naissent, se développent et meurent les crises ?

La partie précédente a mis en exergue une double origine des crises. Cette partie a pour objectifs dans un premier temps, de comprendre la dynamique des crises, puis, de comprendre pourquoi les organisations privées et publiques génèrent des situations de crise. Au vu des caractéristiques des crises citées précédemment, la crise est une situation dynamique, déclenchée soit par un évènement soudain et surprenant qui provoque un état de crise pour les communautés ou les organisations, soit à la suite d’une accumulation de défaillances organisationnelles et/ou techniques qui sont mises en éveil par un évènement déclencheur. Les situations de crises sont donc étudiées soit comme un évènement inattendu, soit comme un long processus de maturation (Forgues, 1998 ; Boin, 2004 ; Roux-Dufort, 2005). Ces deux conceptions de la crise peuvent être mises en rapport avec deux approches des crises : l’approche de type évènement ou l’approche de type processus.

2.2.1. Une vision de la crise selon une approche de type évènement

Selon cette approche, l’état de crise résulterait d’un évènement déclencheur unique ou multiple, imprévisible, contingent et de faible probabilité d’occurrence (Shrivastava, 1995 ; Hale, 1997). Ce phénomène impacte de manière brutale, destructive, sans avoir été prévu, les communautés et des intervenants et provoque un état de choc, de surprise (Lagadec, 1991;

Choularton, 2001). De nombreuses difficultés apparaissent lors de la phase de réponse : spatialité et gravité des dommages, impacts des structures sociales, blocage de l’action des intervenants (Denis, 1993). La crise s’amorce par la matérialisation d’un risque majeur non prévu et non planifié par les organisations (Davies, 2005). Les trois entités d’étude du phénomène de crise sont donc l’évènement déclencheur, les conséquences et les organisations de réponse. Pourquoi du point de vue de l’évènement déclencheur, la situation est elle apparentée à une crise ?

2.2.1.1. L’évènement déclencheur et l’environnement de crise

L’approche de type évènement confond évènement déclencheur et crise. L’évènement déclencheur est qualifié d’inattendu, de soudain, de surprenant et résulte de la matérialisation d’un risque naturel ou anthropique, externe aux organisations. La nature, la dynamique de la crise évènementielle, la gravité et l’ampleur des dommages, sont conditionnées par les facteurs de contingence de l’évènement déclencheur (Denis, 2002) tels que :

− la localisation de la source de danger ;

− le moment de survenue de l’évènement. L’heure d’occurrence de l’évènement déclencheur a également son importance sur la gravité de la crise ;

− la cinétique influence le délai d’anticipation de l’aléa et la réponse des organisations ;

− la gravité (matières dangereuses relâchées, intensité des phénomènes météorologiques) ;

− la présence d’effet domino dans le cas d’évènements industriels ou terroristes. Les effets domino se définissent comme une cascade d’évènements dont les conséquences du premier sont augmentées par le suivant, spatialement et temporellement, conduisant à un phénomène majeur (Delvosalle, 1996) ;

− la simultanéité d’évènements similaires ou non c'est-à-dire l’occurrence successive d’évènements déclencheurs, sur un terrain devenu vulnérable par le précèdent ;

− les conditions météorologiques. Elles peuvent aggraver le potentiel danger et entraver le déploiement des moyens de secours.

Au-delà des caractéristiques contingentes à l’évènement déclencheur et à l’environnement, la vision évènementielle se focalise, a posteriori, sur les conséquences au sein des communautés.

2.2.1.2. Les conséquences de la crise sur les populations.

La gravité et l’ampleur des conséquences engendrées par une crise dépendent également du niveau de vulnérabilité d’un territoire et des enjeux. La vulnérabilité est une notion polysémique qui « exprime à la fois le degré de perte d’un élément ou d’un groupe d’éléments à risque résultant de la probabilité d’occurrence d’un évènement désastreux, exprimée sur une échelle allant de 0 à 1 et également à la prédisposition ou à la susceptibilité que possède un élément à subir des dommages. » (Cardona, 1993).

L’évaluation de la vulnérabilité s’appuie sur les approches semi quantitatives (Dautun, 2003).

Ces méthodes quantifient d’une part, le niveau d’endommagement potentiel des enjeux, et, d’autre part qualifie la vulnérabilité des enjeux et les capacités de réponse des populations exposées à un risque, sur un territoire donné. Les réactions des communautés sont variables dans l’espace et dans le temps et dépendent de quatre facteurs de vulnérabilité que sont (Thouret, 1996 ; Mc Entire, 2003) :

− les facteurs socio démographiques et économiques ;

− les facteurs fonctionnels et techniques ;

− les facteurs institutionnels ;

− les facteurs politico administratifs.

A ceci, s’ajoute le niveau d’acceptabilité et l’impact psychologique qui modulent les comportements et les réactions (D’Ercole, 1998, Léone, 1996). Certains comportements

irrationnels peuvent apparaître généralement dans les pays ou la culture du risque est peu développée.

En outre, l’ampleur et la gravité des conséquences sont conditionnées par les facteurs dits géographiques des phénomènes naturels (paramètres spatio-temporels de l’évènement tels que la localisation, l’ampleur spatiale du phénomène …) et l’émergence de facteurs conjoncturels externes ou internes liés par exemple aux dysfonctionnements des réseaux vitaux ou des institutions (Thouret, 1996).

2.2.1.3. Synthèse des éléments importants pour comprendre les crises de type évènement

Cette approche tend à confondre évènement déclencheur et crise. La crise serait donc conçue comme le paroxysme d’une catastrophe. L’ampleur et la gravité de la crise sont définies en fonction de trois paramètres que sont les facteurs de contingences de l’évènement déclencheur, le niveau de vulnérabilité d’un territoire et les capacités de réponse des organisations. Le tableau 4 synthétise ces facteurs. Cette vision de la crise s’apparente aux recherches sur les situations d’urgence et de catastrophe et peut être reliée d’une part au courant de « l’emergency management » et d’autre part au courant de la contingence organisationnelle. En s’appuyant sur la typologie de Hwang (2000), les crises évènementielles sont de nature abrupte.

Tableau 4 : Les facteurs de vulnérabilité et de contingence influençant la nature des crises

Facteurs de vulnérabilité Facteurs socio

démographiques et économiques (Thouret,

1996)

l’expérience antérieure face aux crises ;

la nature du tissu social ;

le type de société ;

le type d’intégration des populations ;

l’information préventive et la culture du risque ; Facteurs fonctionnels et

techniques

localisation des infrastructures en zone à risques (Mc Entire, 2003) ;

construction inadéquates des bâtiments (Mc Entire, 2003) ;

Facteurs institutionnels, organisationnels

l’expérience antérieure face aux crises ;

le degré de complexité du réseau organisationnel ;

le type d’infrastructure dédié à la gestion des crises ;

le niveau de préparation ;

l’inhabilité à utiliser efficacement des équipements d’alerte et de communication (Mc Entire).

Amont

Facteurs politico administratifs

Absence ou apathie envers des politiques de prévention et de préparation (Mc Entire, 2003).

Facteurs de contingence

Pendant

Facteur géographique, évènementiel

le lieu de la crise

la localisation de la source de danger ;

le moment de survenue de l’évènement ;

la cinétique ;

la gravité ;

la présence d’effet domino dans le cas d’évènements industriels ou terroristes ;

la simultanéité d’évènements similaires ou non ; les conditions météorologiques.

Facteurs structurels dysfonctionnements des infrastructures essentielles.

Une deuxième conception construit la crise comme la résultante d’un processus de maturation au sein des organisations.

2.2.2. La vision processus de crise

Turner (1979) était un des premiers à supposer que les désastres et les crises pouvaient résulter de l’action ou de l’inaction des organisations. Selon lui, ces situations étaient provoquées à la fois par une décharge d’énergie dans le milieu –intensité physique du phénomène et gravité des conséquences – et un traitement inadéquat des informations par les

organisations. Les organisations disposent d’une quantité importante d’informations qu’elles omettent d’interpréter ou qu’elles ne peuvent interpréter faute de connaissance suffisante.

Une concentration d’énergie présente dans les systèmes techniques ainsi que les pouvoirs organisationnels et les populations sont les pré-conditions aux désastres (Turner, 1979 ; Blockley, 1998).

En se basant sur plusieurs cas de crises passées, les crises sont définies selon 7 étapes successives comme l’expose le tableau 5 (Turner, 1978 ; Pauchant, 1995 ; Pearson, 1997 ; Gatot, 2000 ; Faulkner, 2001)

Tableau 5 : La séquence des évènements concourant à créer une crise

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