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1. Autisme et Sensorialité

1.6. Les particularités sensorielles : critères diagnostiques ou comorbidité ?

diagnostiques

Depuis une quarantaine d’années, l’intérêt des chercheurs et des cliniciens pour les spécificités sensorielles des personnes avec TSA n’a cessé de croître. Pourtant, en dépit de l’ensemble de ces travaux, jusqu’à aujourd’hui, les troubles sensoriels ne faisaient pas partie des critères diagnostiques de l’autisme et n’apparaissaient qu’indirectement dans le DSM-IV-TR (APA, 2000). Ce contraste, déjà relevé par Mottron en 2005, s’est accentué ces dernières années face à la multiplication des travaux scientifiques traitant des aspects perceptifs et sensoriels dans les TSA.

Dans le DSM-IV-TR (APA, 2000), une des deux classifications internationales de référence actuelle pour établir un diagnostic d’autisme avec la CIM-10 (OMS, 1999), les symptômes autistiques majeurs sont répertoriés dans les deux premières catégories de la triade : « les altérations qualitatives de la communication » ainsi que « les altérations qualitatives des interactions sociales ». Ces deux grandes catégories de troubles répertorient un ensemble de symptômes socio-communicatifs pathognomoniques de l’autisme. Les troubles sensoriels, très communément constatés dans les TSA comme nous l’avons largement démontré précédemment, ne sont mentionnés que de manière implicite au sein de la troisième catégorie de symptômes qui concerne le « caractère restreint, répétitif et stéréotypé des comportements, des intérêts et des activités ». Ainsi, sont mentionnées : les « préoccupations persistantes pour certaines parties d’objets ».

Les spécificités sensorielles des personnes avec TSA étaient pourtant évoquées dès le moment où l'autisme a été défini en tant que tel par Kanner (1943). Un peu plus tardivement, les particularités sensorielles ont fait leur apparition au sein des critères

44 diagnostiques du DSM-III (APA, 1980). Elles n’étaient pas incluses dans la triade autistique mais étaient décrites clairement comme des symptômes susceptibles d’être associés au syndrome : « (…) les troubles sensoriels comme en témoignent les réponses à des stimuli atypiques (par exemple, toucher, son, lumière, mouvement, odorat, goût).

Les réponses peuvent impliquer une réaction excessive, l’indifférence ou le retrait ».

Elles ont ensuite été retirées des classifications diagnostiques devant l’absence de consensus des données scientifiques. En effet, tandis que certains chercheurs tendent à montrer que les perturbations sensorielles sont une composante de base des déficits des TSA, d’autres les considèrent comme un phénomène de comorbidité. Lors des procédures diagnostiques de l’autisme, les intérêts sensoriels inhabituels et les anomalies sensorielles sont pourtant souvent recherchées mais, jusqu’à maintenant, les considérer ou non comme un déficit de base des TSA faisait encore débat. Inclure les désordres sensoriels comme un critère diagnostique de l’autisme implique qu’il y ait suffisamment de preuves démontrant le caractère universel (présent chez quasiment toutes les personnes avec TSA), unique (qui diffère de personnes avec d'autres diagnostics) et spécifique (différent des autres symptômes de base) du symptôme (Sigman, 1994). Or, les données actuelles témoignent de résultats contradictoires qui ne permettent pas une bonne connaissance de la nature, de l’étiologie et du pronostic de ces symptômes (Ben-Sasson et al., 2009). Néanmoins, leur apparition dans le DSM-5 (APA, 2013) témoigne de leur place capitale au plan symptomatologique. Les troubles sensoriels viennent de prendre place dans le critère diagnostique des TSA comme suit :

« Modèles de comportements, activités ou intérêts restreints et répétitifs », caractérisés par au moins deux des éléments mentionnés, comme le 4ème élément des 4 indiqués. Ils sont caractérisés en termes d’hyper ou hyporéactivités aux stimuli sensoriels ou intérêts inhabituels pour les aspects sensoriels de l’environnement tels que l’apparente insensibilité à la douleur, à la chaleur, au froid ; la réponse inadéquate à des sons spécifiques ou des textures ; les flairages et le toucher excessif des objets ; la fascination pour les lumières ou l’alignement des objets.

1.6.2. Sévérité des troubles sensoriels et sévérité des troubles autistiques

Peu d’études examinent les corrélations entre les perturbations sensorielles et la sévérité des symptômes autistiques. Les travaux de Kern et al. (2007) mettent toutefois en évidence une corrélation positive significative entre les désordres sensoriels et la

45 sévérité des troubles autistiques chez un groupe d’enfants avec TSA âgés de 3 à 12 ans.

Cependant, ils démontrent que cette corrélation ne perdure pas au fil du temps. En effet, chez le groupe d’adolescents avec TSA ainsi que chez les sujets adultes (au-delà de 26 ans), aucune corrélation n’est observée entre les troubles sensoriels et le degré de sévérité des troubles autistiques. Ces données suggèrent une maturation des processus neurologiques impliqués dans l’intégration sensorielle avec le temps et/ou une meilleure mobilisation de stratégies adaptatives chez les sujets avec l’âge qui leur permet de mieux tolérer les stimuli sensoriels. Toutefois, ces hypothèses ne sont pas confirmées par les auteurs.

1.6.3. Troubles sensoriels et retard mental

D’autres études investiguent les relations entre les troubles sensoriels et le retard mental en essayant de déterminer si les désordres sensoriels identifiés dans l’autisme diffèrent de ceux d’enfants sans autisme mais avec un niveau intellectuel similaire. Les résultats des travaux de Freeman et al. (1981) démontrent que peu de différences sont observées entre l’échantillon de sujets avec autisme et retard mental et le groupe de sujets avec retard mental sans autisme. Cependant, des différences beaucoup plus prononcées sont identifiées entre les sujets d’un groupe d’enfants avec autisme sans retard mental et un groupe d’enfants au développement typique. Les recherches de Leekam et al. (2007) trouvent des résultats assez proches en démontrant que les particularités sensorielles ne sont pas spécifiques à l’autisme et sont aussi observées chez les personnes avec retard mental. Néanmoins, ils mettent aussi en évidence que les troubles sensoriels sont davantage présents chez les enfants avec autisme que chez les enfants qui présentent un retard développemental et que les troubles sensoriels sont majorés chez les enfants avec autisme et retard mental associé. Ils démontrent ainsi le lien entre le degré de retard intellectuel chez les enfants avec autisme et l’intensité des troubles sensoriels. Les dysfonctionnements sensoriels chez les personnes avec autisme et retard mental touchent notamment davantage de modalités sensorielles que les dysfonctionnements sensoriels des personnes avec autisme ayant un quotient intellectuel plus élevé.

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