• Nenhum resultado encontrado

CHAPITRE 3 Effet des métaux sur des organismes aquatiques en conditions

3.3 Biodisponibilité des complexes lipophiles des métaux

3.3.1 Résultats

3.3.1.a Calculs de spéciation chimique Étude de l’influence du pH

L’influence du pH sur la formation de complexes des métaux avec l’oxine ou le DDC dans le milieu AAPm est illustré en figure 20.

4 6 8 pH 10 12 14

0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0

Col 97 vs Col 98 Col 97 vs Col 100 Col 97 vs Col 102 Col 97 vs Col 104

0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 µM 1.00.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0

4 6 8 pH 10 12 14

0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0

a

b

d c

µmol/L

Me++ ( ), MeL+ ( ), MeL2 ( ), complexes inorganiques ( ).

Les autres diagrammes sont présentés en annexe 1.

Figure 20 : Diagrammes de spéciation, à pH = 4 à 14, des mélanges Cu + oxine (a), Cu + DDC (b), Zn + oxine (c), et Zn + DDC (d). Calculs effectués dans le milieu AAPm (I = 0.001 mol/L), avec [Me] = 1 µmol/L et [L] = 2.2 µmol/L.

Le DDC, considéré comme un monoacide, présente un comportement simple : l’espèce Me(DDC)2 domine à pH inférieur à 12.0 pour le cuivre et inférieur à 9.7 pour le plomb. La complexation avec les carbonates domine à des pH supérieurs. L’espèce Me(DDC)+ n’est significativement présente à aucun pH. Le comportement est similaire pour le zinc, avec un changement de l’espèce majoritaire à pH = 8. Mais à cause de constantes de complexations du Zn(DDC)2 plus faibles, l’ion libre Zn++ est aussi présent à pH alcalin (60 % de zinc libre et 40 % de Zn(DDC)2).

Les diagrammes calculés pour l’oxine sont plus complexes car la molécule est un diacide. Le cuivre, parmi les métaux étudiés, présente la plus forte constante de complexation avec l’oxine ce qui entraîne la présence dominante de l’espèce Cu(oxine)2 sur une large gamme de pH (5 à 12). Pour les autres métaux, Me(oxine)+ est présent pour des pH entre 5 et 9 (maximum à pH = 7) et Me(oxine)2 présent à des pH entre 6 et 10 (maximum à pH = 9). Les espèces inorganiques dominent à pH inférieur à 5 (ion libre) et supérieur à 11 (complexes avec les carbonates).

La comparaison des diagrammes de spéciation en fonction du pH dans le milieu du biotest algal (milieu AAPm) et dans l’eau pure ne montrent pas de différences significatives (cf.

présentation de la totalité des diagrammes en annexe 1). La faible force ionique (I = 0.001 mol/L) est insuffisante pour avoir une influence. D’autre part, dans le milieu du biotest bactérien (20 g/L de NaCl, correspondant à I = 0.3mol/L et [Cl-] = 34 mmol/L), les complexes inorganiques avec les ions chlorures sont significatifs à pH acide, ce qui entraîne une baisse des concentrations en ion libre et en complexes MeL+. Cependant, les concentrations en complexe MeL2 sont inchangées.

Les résultats ont été obtenus pour des concentrations en métaux de 1 µmol/L et en ligand de 2.2 µmol/L, pour des pH de 4 à 14. Le premier paramètre à considérer pour l’interprétation est la valeur des constantes d’acidité (pKan) des ligands oxine et DDC (Tableau 10, page 52).

Étude de l’influence de la concentration en métal total

L’influence de la concentration en métal total (de 0.1 à 10 µmol/L) pour une concentration donnée de ligand (2.2 µmol/L) est illustrée, dans le milieu AAPm, par la figure 21.

Ces résultats montrent une présence significative des complexes MeL2 à une concentration en métal total [Me]t < ½[L]t : espèce majoritaire (> 99 % du métal total) pour les mélanges cuivre-oxine, cuivre-DDC et Pb-DDC, et de 20 % à 50 % du métal total pour les autres mélanges.

Quand les concentrations en métal total [Me]t > ½[L]t, les concentrations en complexe MeL2

décroissent (sauf pour le mélange Pb-DDC), avec une augmentation du complexe MeL+ (pour tous les métaux avec l’oxine, et pour le cuivre avec le DDC) et des complexes inorganiques (complexes avec les hydroxydes pour le cuivre et le zinc, avec les carbonates pour le cadmium et le plomb). Dans le milieu pour le bioessai bactérien, la forte force ionique favorise la formation de complexes inorganiques et décroît les concentrations en ion libre et

en complexes avec les ligands organiques, sauf pour le cuivre (avec oxine et DDC) et le plomb (avec le DDC).

0.1 1.0 10.0

0 255075100 0 25 5075100 0 255075 100 0 25 50 75100

0.1 1.0 10.0

Cu + oxine

Zn + oxine

Pb + oxine

Cd + oxine

Cu + DDC

Zn + DDC

Pb + DDC

µmol/L de métal

% du métal total

Me++ ( ), MeL+ ( ), MeL2 ( ), complexes inorganiques ( ).

Figure 21 : Diagrammes de spéciation avec [Me] = 0.1 à 10 µmol/L. Calculs dans le milieu du biotest algal, AAPm (pH = 7.5, I = 0.001 mol/L), avec [L] = 2.2 µmol/L.

Ces résultats s’expliquent clairement au regard des constantes conditionnelles de complexation dans les milieux des biotests (Tableau 10, page 52). Pour le DDC, Logβ'alg

pour le milieu AAPm (biotest algal) et Logβ'bact pour le NaCl 20 g/L (biotest bactérien) ne changent pas significativement des constantes de complexation Logβ. Par contre, Logβ'bact

pour la complexation du zinc, du cadmium et du plomb avec l’oxine sont très inférieurs (environ 1/3) aux Logβ correspondants, du fait de la formation de complexes avec les chlorures. Les différences entre les constantes de complexation Logβ et les constantes conditionnelles Logβ' sont les plus faibles pour le cuivre, qui garde une forte affinité pour les ligands organiques dans les deux milieux. Au contraire, les différences sont les plus fortes pour le cadmium en milieu NaCl 2%, dû à la forte affinité de ce métal pour les chlorures.

Les résultats issus des calculs de spéciation chimique montrent que, excepté pour le cuivre, les mélanges entre métaux et ligands lipophiles (oxine ou DDC) ne permettent pas d’effectuer les biotests avec la seule présence d’une espèce toxique (ion libre, MeL+ ou MeL2). Par conséquent, les résultats de toxicité seront interprétés en fonction des concentrations en ion libre, en complexes inorganiques et complexes lipophiles des métaux.

3.3.1.b Résultats de toxicité

Les résultats de toxicité ont été mis en relation avec la spéciation chimique calculée dans les milieux des bioessais. Ils ont été obtenus avec 1 µmol/L d’oxine ou de DDC dans le milieu, et un ajout de métal suffisant pour calculer les CE50 et TE50. Pour les deux organismes, aucun effet toxique n’a été observé en présence d’oxine ou de DDC (jusqu’à 10 µmol/L) en absence de métaux.

Vibrio fischeri

Les effets aigus sur la bactérie marine Vibrio fischeri (inhibition de la bioluminescence) ont été mesurés chaque minute pendant 45 min. La présence de ligands (oxine ou DDC) entraîne une augmentation de la toxicité à un temps donné (ex. : CE50 15min du cuivre = 9.1 ± 1.2 sans ligand ; 0.45 ± 0.2 avec oxine et 0.24 ± 0.16 avec DDC) mais influence aussi le temps nécessaire pour l’observation des effets. Une illustration en est donnée pour le cuivre ([Cu]t = 2.86 µmol/L) en figure 22. Ces résultats ont permis de calculer les TE50 (temps nécessaires pour atteindre 50% d’inhibition de la bioluminescence) pour chaque concentration en métal testée (Figure 23).

Temps (minutes)

0 15 30 45

Effet (% d'inhibition)

0 25 50 75 100

Résultats dans le milieu standard NaCl 20 g/L ( ), avec oxine 1 µmol/L ( ) et avec DDC 1 µmol/L ( ).

Figure 22 : Influence de la présence d’oxine et de DDC sur l’effet du cuivre sur la bactérie Vibrio fischeri, entre 2 et 45 min. Inhibition de la bioluminescence à [Cu]t = 2.86 µmol/L.

ET5 0

25 50 75 100

0 (minutes)

Cu (µmol/L)

0 15 30 45 60

Résultats dans le milieu standard NaCl20 g/L ( ), avec oxine 1 µmol/L ( ) et avec DDC 1 µmol/L ( ).

TE50(min)

Figure 23 : Influence de la présence d’oxine et de DDC sur l’effet du cuivre sur la bactérie Vibrio fischeri, entre 2 et 45 min. Régression inverse du premier ordre des concentrations totales en cuivre en fonction du TE50.

Cette représentation permet de mettre en évidence une relation inverse de premier ordre, exprimé par l’équation 5:

Équation 5 : Relation entre la concentration d’exposition en métal total dissous et le TE50

pour la bactérie marine Vibrio fischeri.

0 TE50

C C = +α

Dans cette équation, C0 (en µmol/L de métal total dissous) correspond au niveau de tolérance des bactéries sous lequel aucun effet n’est observé sur 45min, et α (min.L.µmol-1) est une expression du temps nécessaire pour obtenir 50 % d’effet à une concentration totale en cuivre donnée. Les valeurs des paramètres de régression obtenues pour les différents mélanges de métal et de ligand sont présentées dans le tableau 16.

Paramètres de la régression inverse de premier ordre Métal

+ligand

α (min.L.µmol-1)

C0

(µmol/L)

Cu 114.43 (***) 0.45 0.882

+ oxine 6.77 (***) d -0.13 0.903 + DDC 12.42 (***) d -0.63 0.803

Zn 223.67 (***) -2.16 0.815

+ oxine 150.65 (***) d -3.15 0.924 + DDC 134.93 (***) d -2.26 0.975

Cd 1 008.40 (***) -2.34 0.998

+ oxine 1 100.56 (***) d -12.92 (**) d 0.993 + DDC 524.27 (*) d -47.83 d 0.530

Pb 13.84 -0.23 0.742

+ oxine 12.93 (**) -0.18 0.885 + DDC 4.08 (***) d -0.23 0.948

Entre parenthèses, les coefficients significativement différents de 0 sont marqués par ***

(P = 0.0001), ** (P = 0.001) ou * (P = 0.05). Il est aussi indiqué si les coefficients obtenus en présence de ligands sont significativement différents (d) des coefficients sans ligand (2×écart-type).

Tableau 16 : Toxicité des métaux pour la bactérie marine Vibrio fischeri (I = 0.3mol/L ; pH = 5.5) sans ligand et avec 1 µmol/L d’oxine ou de DDC.

Aucun des C0 n’est significativement différent de 0, sauf pour le mélange cadmium-oxine.

Pour ce dernier mélange, α est significativement différent de la valeur de α pour le cadmium sans ligand. Cela indique que l’oxine diminue l’effet du cadmium sur Vibrio fischeri (toxicité et vitesse d’apparition de la toxicité), ce qui est certainement dû à la formation de Cd(oxine)+.

De plus, les effets toxiques sont influencés par l’importante complexation du cadmium avec les chlorures. Pour les autres mélanges métal-ligand, α est plus faible en présence de ligand lipophile (statistiquement différent des expériences sans ligands pour tous les métaux, sauf pour le mélange plomb-oxine). L’effet est le plus marqué pour le cuivre, en accord avec sa forte affinité pour les ligands organiques.

Pseudokirchneriella subcapitata

Pour l’algue, la toxicité (inhibition de la fluorescence de la chlorophylle) a été testée en 1h pour les effets aigus, et en 72h pour illustrer la toxicité chronique des CLM. Les résultats sont reportés dans le tableau 17.

CE50 (µmol/L de métal total) Métal

+ Ligand 1 heure 72 heures

Cu 31 (20-47) 0.20 (0.19-0.21) + oxine 47 (30-74) 0.30 (0.27-0.35)*

+ DDC 11 (7-19)* 0.82 (0.34-1.07)*

Zn 63 (39-95) 0.40 (0.31-0.50) + oxine 66 (35-112) 1.13 (1.04-1.19)*

+ DDC 4 (2-8)* 0.19 (0.15-0.22)*

Cd 219 (89-585) 0.16 (0.13-0.20)

+ oxine 425 (154-533) 0.24 (0.20-0.30)*

+ DDC 32 (30-34)* 0.04 (0.03-0.04)*

Pb 61 (44-86) 2.53 (1.86-3.64) + oxine 120 (69-208)* 1.45 (1.13-1.86)*

+ DDC 32 (15-65) 0.06 (0.05-0.08)*

Les CE50 sont données avec leur intervalle de confiance entre parenthèse (P = 0.05). * indique la différence significative des CE50 avec ligand lipophile par rapport aux expériences sans ligand

(P = 0.05).

Tableau 17 : Toxicité des métaux pour l’algue Pseudokirchneriella subcapitata dans le milieu AAPm (I = 0.001 mol/L ; pH = 7.5) avec et sans ligand lipophile (1 µmol/L d’oxine ou de DDC).

L’oxine n'a pas augmenté la toxicité, et a même provoqué une augmentation significative de la CE50 pour le cuivre, le cadmium et le zinc (exposition chronique) et le plomb (exposition aiguë). Cependant, une augmentation des effets chroniques est observée pour le plomb (CE50 = 2.53 µmol/L sans ligand et 1.45 µmol/L avec oxine). Cette absence d’effet de l’oxine sur la toxicité a été attribuée à la faible solubilité des complexes Me(oxine)2 en eau douce, entraînant une adsorption sur les parois des microplaques et une floculation. Ces phénomènes ont en effet été observés pour des concentrations en ligand proches de la limite de solubilité des complexes (10 µmol/L), et a pu être aussi significatif à des concentrations plus faibles (bien qu’il n’ait pas été observé lors des expériences avec 1µmol/L d’oxine).

La présence de DDC a eu un effet plus marqué sur la toxicité aiguë des métaux pour l’algue (augmentation significative de la toxicité pour tous les métaux, sauf pour le plomb). L’effet est maintenu sur 72 h pour le zinc et le cadmium, et devient significatif pour le plomb.

Finalement, on peut noter que les faibles solubilités des complexes en eau douce sont sans doute une limite à l’observation des effets des CLM pour l’algue Pseudokirchneriella subcapitata.