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La Fausse Suivante, ou la dynamique du triangle

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Academic year: 2017

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La Fausse Suivante

, ou la dynamique du triangle

*

María Teresa Ramos Gómez

Universidad de Valladolid

mtramos@fyl.uva.es

Resumen

La dramaturgia de la comedia de Ma-rivaux La Fausse Suivante trenza las rela-ciones de los personajes en una geometría triangular, cambiante por las máscaras que ocultan su verdad. El eje del sistema de triángulos inestables es la triple identidad de la protagonista, que le permite invertir su posición inicial de víctima codiciada, para dirigir la acción de los demás persona-jes, crear las pruebas que muestren sus artimañas e impartir a todos su lección moral. La comedia, con su itinerario de pruebas psicológicas y teatro en el teatro, es plenamente representativa de las caracterís-ticas teatrales de Marivaux, que combina la comicidad con la llamada a humanizar las relaciones interpersonales.

Palabras clave: Marivaux; Fausse Suivante; dramaturgia; triángulo; máscara; morali-dad.

Abstract

The dramaturgy of Marivaux’s comedy

La Fausse Suivante weaves the relationships of its characters into a triangular shape. It is a changing inter-action due to the presence of masks hiding their truth. This system of unstable triangles’ axis is the triple identity of the comedy’s main character, allowing her to change her initial position of coveted victim, into leading the action of the rest of the characters, creating the evidence that unveils their artifices and teaches everyone a moral lesson. This comedy, with its path of psychological tests and theatre within thea-tre, fully represents the theatrical features of Marivaux, which combine humour with issuing an appeal for humanized interper-sonal relations.

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0. Introduction

Le masque et le secret sont les deux motifs de référence autour desquels s’articule la dramaturgie de La Fausse Suivante –comédie de Marivaux qui date de 1724–, caractérisée par une géométrie triangulaire. En effet, dans le jeu de tromperies et de faux-semblants, la chorégraphie des masques dessine un système de rapports relationnels des personnages en pas de trois, trio qui se transforme sous nos yeux, entrecroisant les identités changeantes des protagonistes, leurs buts cachés et ceux affichés. Car tout se passe comme si la relation strictement à deux n’existait pas, comme si elle avait toujours lieu à trois –le masque symbolisant de ce fait l’impossibilité de nouer de vrais rapports de personne à personne.

1. Un faux Chevalier

Rappelons la métahistoire, que l’héroïne apprend au spectateur en confiant à son valet Frontin le récit qu’il devra transmettre à la sœur de sa maîtresse (I,2)1: lors

d’un bal masqué, une jeune fille noble se déguise en Chevalier; sous cet habit elle fait par hasard la connaissance de Lélio, le gentilhomme qu’on lui destine pour époux, et de la Comtesse qui l’accompagne. C’est en la croyant un jeune homme de condition que le gentilhomme l’invite à une partie de campagne chez la Comtesse, proposition que la Demoiselle accepte, décidant de profiter de son travesti masculin pour observer Lélio à son aise2 et en savoir un peu plus sur ses relations avec la Comtesse.

L’exposition semblerait donc présenter le schéma canonique du triangle amoureux: un fiancé infidèle, une fiancée jalouse, et sa rivale. Or les apparences sont trompeuses, comme la comédie le prouvera tant aux personnages qu’aux spectateurs. Car même si la situation initiale montre un homme entre deux femmes (le gentil-homme, la Comtesse et la Demoiselle de Paris), ce n’est pas une simple histoire de jalousie qui se déroulera sur scène, car ce que la jeune fille tente d’obtenir n’est point l’amour de Lélio; elle prétend sonder l’homme qui pourrait devenir son époux, et non évincer une rivale: dans son équipée, c’est à la quête de la connaissance qu’elle part. Lélio et la Demoiselle ne se sont jamais vus auparavant; leur mariage a été quasiment arrêté, par lettres, par le beau-frère de la Demoiselle, et celle-ci ne désire pas épouser le gentilhomme à l’aveuglette, mais «cherche à se mettre au fait de l’état de son cœur et de son caractère» (I,2). Son déguisement masculin, sa fausse identité de Chevalier mettront à l’abri sa recherche de la vérité. Quelle est l’identité morale du gentil-homme qui désire l’épouser?

1 Les références entre parenthèses renvoient au découpage en scènes de l’édition du Théâtre Complet de Marivaux de F. Deloffre et F. Rubellin (2000).

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À son tour, Lélio cherche à sonder le Chevalier: est-il «scrupuleux», ou «au-dessus des bagatelles de l’honneur»? Satisfait de ses réponses, il explique sans tarder à son nouvel ami la raison pour laquelle il l’a invité à l’accompagner chez la Comtesse: il a besoin de son aide pour se débarrasser d’elle –à qui il a promis le mariage–, afin de pouvoir épouser un meilleur parti, une demoiselle bien plus riche. Il ne veut pas rompre cavalièrement avec la Comtesse, car il lui serait doublement débiteur, lui ayant emprunté dix mille écus pour l’achat d’une propriété; d’autant plus qu’ils ont tous deux signé un dédit obligeant celui qui romprait l’engagement de mariage à payer à l’autre dix mille écus. De ce fait, si Lélio venait à quitter la Comtesse, il de-vrait lui payer vingt mille écus; tandis que si la Comtesse rompt avec lui, il n’aurait pas à la rembourser, le dédit compensant la dette. Ce gentilhomme cherche donc à ne pas honorer ses engagements, qu’ils soient amoureux ou financiers.

Le plan qu’il a conçu le délivrerait des deux problèmes à la fois: il s’agit d’introduire un rival sur place qui le décharge de la Comtesse –voilà le rôle du Cheva-lier. Si ce cadet désargenté réussit à se faire aimer de la riche Comtesse, en l’épousant il ferait fortune, et Lélio serait libre d’épouser la richissime Demoiselle de Paris sans bourse délier. C’est donc une bonne affaire qu’il propose au Chevalier. Dans ses cal-culs, évidemment, les sentiments n’y sont pour rien:

Lélio. - En fait d’amour, j’en fais assez ce que je veux. J’aimais la Comtesse, parce qu’elle est aimable; je devais l’épouser, parce qu’elle est riche, et que je n’avais rien de mieux à faire; mais dernièrement, pendant que j’étais à ma terre, on m’a proposé en mariage une demoiselle de Paris, que je ne connais point, et qui me donne douze mille livres de rente; la Comtesse n’en a que six. J’ai donc calculé que six valaient moins que douze. Oh! l’amour que j’avais pour elle pouvait-il honnêtement tenir bon contre un calcul si raisonnable? Cela aurait été ridicule. Six doivent reculer devant douze; n’est-il pas vrai? (I,7).

Lélio révèle sa nature intéressée dès son entrée en scène; cupidité qui se dou-ble d’un cynisme écœurant lorsqu’il parle avec le Chevalier sur les femmes et le ma-riage. Ses principes sont ceux du petit-maître libertin, qui tire sa vanité du nombre de ses conquêtes3, sa gloire du nombre de «réputations blessées à mort». À ses yeux, nulle

femme ne mérite considération, même pas celle qu’il compte épouser –et immédia-tement délaisser ou pire encore:

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Lélio. - Est-il besoin d’aimer sa femme? Si tu ne l’aimes pas, tant pis pour elle; ce sont ses affaires et non pas les tiennes. […] quand on vit mal avec elle, cela vous dispense de la voir, c’est autant de gagné. […] crois-tu, par exemple, que j’aimerai la demoiselle de Paris, moi? Une quinzaine de jours tout au plus; après quoi, je crois que j’en serai bien las. [Et si elle venait à se dépiter] j’ai une terre écartée qui est le plus beau désert du monde, où Madame irait calmer son esprit de vengeance (I,7).

Pour Lélio, le mariage n’est donc que la convention qui lui permettrait de s’approprier légalement de la fortune de son épouse; méprisant sa future femme par avance, il n’envisage que des rapports de domination. Rien d’étonnant à ce qu’il cher-che à changer de promise: puisque pour un petit-maître les femmes, dépourvues de qualités propres, se valent toutes, pensant à se marier il ne les évalue qu’à l’aune de leur fortune, ce qu’il exprime d’ailleurs sans ambages: «j’épouserai les douze mille livres de rente» (II,3). Désirant donc «duper sa maîtresse pour se débarrasser d’elle» (I,7) malgré son engagement, la stratégie de Lélio est de susciter un triangle amoureux dont il semblerait la victime, défaite apparente qui le rendrait en fait gagnant. C’est au Chevalier de feindre l’amour pour la Comtesse, et à Lélio de prendre le masque de l’amant jaloux, du promis délaissé. Il s’agit bien sûr de jouer avec les émotions fémi-nines, de manipuler les sentiments de la Comtesse, de la détacher de Lélio, de l’enflammer pour le Chevalier. Il n’y aurait donc que la Comtesse de trompée –doublement trompée–, croyant à l’amour de Lélio comme à l’amour du Chevalier, et doublement extorquée. Or la réalité sera bien plus complexe, le Chevalier étant précisément le beau parti que Lélio cherche à épouser!

Bien évidemment, ayant appris ce qu’elle voulait connaître –la sorte d’homme qu’est Lélio–, et renonçant donc très précocement (dès la 7e scène de la comédie) à épouser celui qu’elle était venue observer, la Demoiselle pourrait quitter les lieux. Mais elle y restera, se donnant un nouveau but, qui en fait est triple: «continuons pour me divertir et punir ce fourbe-là, et pour en débarrasser la comtesse» (I,8). Si elle partait, en effet, dès que son mariage avec Lélio serait rompu, celui-ci se rabattrait sur les six mille livres et épouserait la Comtesse, qui se trouverait prise au piège... La Demoiselle choisit donc le parti généreux de délivrer la Comtesse de la menace que suppose Lélio, le parti périlleux de prolonger son travestissement (pour sa diversion et surtout celle des spectateurs, puisqu’il suppose l’amour du jeu, donc l’amour du théâ-tre) et encore le parti de faire justice, cherchant à punir le fourbe. Ayant satisfait sa quête de vérité, c’est donc à la conquête de la Comtesse que part le faux Chevalier, feignant de la sorte d’entrer dans les vues de Lélio.

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promis de la part d’une fraîche connaissance –le Chevalier– ou pis encore, d’une es-pèce d’aventurière qui se déguise en homme? La communication sincère s’avérant impossible ou inutile, on est bien obligé de passer par des voies détournées4.

Pour susciter chez la Comtesse la disposition à faire confiance au Chevalier et la détacher de Lélio, il est donc nécessaire que le Chevalier se fasse aimer de la dame –la naissance d’un nouvel amour exigeant la mort de l’ancien5. Et dans ce but, elle va

subvertir la trame du gentilhomme, utilisant son scénario pour que la Comtesse puisse découvrir, derrière le masque de Lélio amoureux, le visage de l’homme, avant qu’il ne devienne celui du mari.

Lélio croit donc mener le jeu d’un trio formé par deux hommes complices pour tromper une femme, alors que le spectateur sait que les trois nobles sont en fait un homme et deux femmes – la Comtesse croyant à l’amour de son promis, et la Demoiselle cherchant, en tant qu’homme, à susciter l’amour de la dame. Les trian-gles, donc, se multiplient:

Plan de Lélio

un triangle (A) en cache un autre (B)

Plan de la Demoiselle

un triangle (A’) en cache un autre (B’)

(A) Une femme entre deux hommes (Lélio / Comtesse / Chevalier)

(A’) Une femme entre deux hommes (Lélio / Comtesse / Chevalier) But: se débarrasser de la Comtesse sans avoir

à payer le dédit

But: délivrer la Comtesse de Lélio triangle libérateur

(B) Un homme entre deux femmes (Comtesse / Lélio / Demoiselle)

(B’) Deux égocentriques à l’épreuve de la vérité (Comtesse / Demoiselle / Lélio)

But: épouser la Demoiselle, sa fortune dou-blant celle de la Comtesse

But: donner une leçon aux deux égocentriques

triangle prédateur triangle réparateur

Puisqu’il se trouve entre deux femmes, Lélio compte placer la Comtesse entre deux hommes: par ce double triangle, il cherche à obtenir un gain au détriment et de

4 La formule théâtrale marivaudienne par excellence est bien ce jeu du faux et du vrai: «c’est derrière le masque, et par lui, que la vérité se fait jour», écrit Schérer (1960: 41); et Goldzink: «on entre ainsi dans une dialectique du mensonge et de la vérité, de l’apparence et de la transparence» (1995: 93). Il décrit d’ailleurs le théâtre de Marivaux comme une dramaturgie du secret: «le masque est une forme-sens de la dramaturgie marivaudienne» (2000: 299); «les manipulations, les stratagèmes, les plans […] extra-lucides disparaissent comme par enchantement des romans et des œuvres morales [de Marivaux]. Il s’agit donc bien de formes propres à [sa] construction dramatique, de formes spécifiquement théâtra-les» (2000: 248).

5 Démarche qui rappelle celle de La Double Inconstance, comédie de 1723, l’année précédant celle de La

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la Comtesse et de la Demoiselle; sa relation au monde est égocentrique, et le sien est bien un triangle prédateur. Tout au contraire, la Demoiselle ne cherche qu’à donner: elle désire libérer la Comtesse du piège que suppose le fait d’épouser Lélio, évitant ainsi qu’elle ne soit victime de son aveuglement; et elle n’interviendra dans la vie émotionnelle de la Comtesse –à travers la mise en scène du Chevalier jouant sur le remplacement– que pour affaiblir d’abord, et ensuite éliminer l’emprise de Lélio sur la dame. Sa stratégie triangulaire est donc conçue comme libératrice: Lélio étant une menace pour la Comtesse, il est nécessaire qu’elle découvre la véritable personnalité de Lélio pour échapper au mariage –mais sans être responsable de la rupture, pour ne pas avoir à acquitter le dédit, ce qui revient à ne pas subir la perte de la grosse somme prêtée à Lélio. Et d’autre part, la Demoiselle envisage son triangle également comme réparateur, car s’il s’agit de «punir le fourbe» en lui donnant une bonne leçon, c’est pour qu’il puisse en tirer un avertissement salutaire – ce qui est valable également pour la Comtesse. Dans sa dynamique –tel un thérapeute placé en «tiers aidant» lors de sa pratique avec ses patients6–, la Demoiselle cherche à «soigner» les deux

égocen-triques, à être l’instrument qui permette à chaque personnage de réfléchir à sa propre démarche, à sa façon de se penser en relation avec les autres.

En effet, la Demoiselle cherche à corriger non seulement Lélio, mais aussi la Comtesse. La déloyauté, la sécheresse de cœur et l’amour-propre de Lélio sont évi-dents, et d’ailleurs il est jugé dès le sous-titre de la pièce, le fourbe puni; mais l’attitude de la Comtesse envers ses amants est également égocentrique. En fait, ces deux per-sonnages se refusent à l’amour: dominés par la vanité, le libertin le nie et la coquette l’exige, car «la coquette ne sait que plaire, et ne sait pas aimer»7, faisant montre de son

inconstance. Dans les deux cas «l’amour y apparaît comme une illusion, une forme mystificatrice de la vanité, la formation du lien amoureux comme le produit d’une comédie» (Bonhôte, 1974: 123). À la volonté de donner le change du faux soupirant fait pendant le déguisement aveugle de l’amour-propre, l’ignorance de soi de la fausse amoureuse.

Vanité, égoïsme et coquetterie forment un trio très uni que Marivaux combat constamment dans toute son œuvre: Lélio qui joue l’amant transi et la Comtesse qui se croit amoureuse sont tous deux cibles de la satire dans La Fausse Suivante, et ce n’est sans doute pas par hasard que dans la même scène où Lélio, comptant sur la connivence masculine, se présente au Chevalier comme un roué, la Comtesse soit jugée coquette, autrement dit volage, par les deux interlocuteurs:

Le Chevalier. - Mais crois-tu que je puisse surprendre le cœur de la Comtesse?

6 On peut en effet rapprocher la démarche de certains personnages des comédies de Marivaux d’un modèle de psychothérapie visant l’apprentissage relationnel.

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Lélio. - Je n’en doute pas.

Le Chevalier, à part. - Je n’ai pas lieu d’en douter non plus.

Lélio. -Je me suis aperçu qu’elle aime ta compagnie; elle te loue souvent, te trouve de l’esprit; il n’y a qu’à suivre cela8 (I,7).

La coquetterie de la Comtesse qui va de pair avec son inconstance est donc un trait qui marque le personnage dès avant son apparition sur scène. Uniquement vouée à elle-même9, elle pose en idole pour ceux qui doivent la vénérer tout en se

reconnaissant indignes d’aspirer à son cœur; son amour n’est point un don de soi, mais le paiement10 des regards et des égards qu’elle exige de ses galants: il n’est que le

désir d’être aimée, et se ramène entièrement à la satisfaction de son amour-propre. La Comtesse. - Je voulais une inquiétude douce, qui a sa source

dans un cœur timide et bien touché, et qui n’est qu’une loua-ble méfiance de soi-même […]; on craint seulement de n’être pas toujours aimé, parce qu’on ne croit pas être digne de l’être. (II,2).

La coquette, «fascinée par tous les miroirs et notamment par ce miroir vivant qu’est à ses yeux un soupirant dont la seule fonction est de lui renvoyer son propre reflet» (Rousset, 1972: 104), n’a d’existence qu’en tant qu’objet d’adoration, et ne peut s’attacher à personne. En fait, posant en objet de vénération, la Comtesse n’est qu’objet de manipulation, puisque soumise d’elle-même à la valorisation masculine11.

8 Alors que le mariage est imminent (on n’attend que le frère de la Comtesse pour le conclure), Lélio compte sur la réussite du Chevalier auprès de la dame, malgré le manque d’exploits galants avoué par son complice. C’est parce que le Chevalier est «beau et bien fait» que Lélio l’a engagé à les accompa-gner, car avec ces atouts le succès est garanti: c’est dire s’il croit l’amour de la Comtesse bien solide! 9 L’accusation est constante dans l’oeuvre de Marivaux; l’autre n’est qu’un instrument

d’auto-satisfaction pour la coquette (comme pour le petit-maître, d’ailleurs). Un exemple: «Je me dis à moi-même: Je fais la passion d’un homme aimable; cette idée me flatte, c’est une preuve de mérite; je m’en estime avec plus de sûreté de conscience, et je ne suis pas fâchée de trouver alors sur mon chemin un hommage de petits soins: je m’en amuse sans scrupule; ils me répètent ce que je vaux: je les encourage quelquefois par un coup d’oeil, un geste, un souris…» Lettre de M. de M*** contenant une aventure.

JOD, p.78.

10L’expression est de Marivaux: «Un amant est une espèce de créancier qui a donné son coeur à une femme, et qui vient lui demander d’en être payé en même valeur. Donnez-moi le vôtre, lui dit-il d’abord; elle le renvoie, et ne veut point entendre parler de cette dette-là. […] Eh! bien, nous verrons, ne me pressez point. Soit, dit-il, mais donnez-moi toujours quelque chose à compte. Et quoi? Un mot; dites seulement que je ne vous déplais point. Eh! qui vous dit que vous me déplaisez? A ce discours, elle rougit; c’est-à-dire qu’elle entre en payement. Sa réponse et sa rougeur sont deux acomptes. […] Et ainsi d’acomptes en acomptes, qu’elle lui distribue petit à petit, qu’elle fait durer plus ou moins […] . Rien ne va si vite que le payement de ces intérêts-là, quand il est une fois commencé.» Le Cabinet du philosophe, cinquième feuille. JOD, p.378-379.

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Lélio, séducteur expérimenté, connaît la facilité de se faire aimer de cette sorte de femmes, tout comme il connaît la manière de provoquer leur désamour: cherchant à déplaire à la Comtesse, Lélio blesse sciemment son amour-propre par ses critiques et ses exigences, feignant le dépit amoureux pour provoquer une querelle –ce qui nous donne une magnifique scène de chicane de couple planifiée (II,2).

La Comtesse. - Non, Monsieur, on n’a jamais dit à une femme ce que vous me dites là; et je n’ai vu que vous dans la vie qui m’ayez trouvé si ridicule. […] Oh! je n’y saurais tenir; capri-cieuse, ridicule, visionnaire et de mauvaise foi! le portrait est flatteur! Je ne vous connaissais pas, Monsieur Lélio, je ne vous connaissais pas […] (II,2).

L’amour de la Comtesse –amour de vanité– est superficiel et inconsistant, donc facilement changeant. Vexée par la vision défavorable d’elle-même que Lélio lui rend, elle se tourne vers l’adorateur qui satisfait son amour-propre, et se laisse fléchir par le Chevalier –qui sait tirer profit de sa faiblesse–, dans une superbe scène (II,8) qui fait pendant à celle de la querelle suscitée par Lélio (II,2). La stratégie du pressant Chevalier est développée ailleurs par Marivaux:

Je l’ai rendu[e] si vain[e] du portrait flatteur que [ma con-fiance] lui faisait de [elle]-même, que la tête lui en a tourné d’orgueil et de reconnaissance, et dans la chaleur de ces mou-vements-là, passionné[e] comme [elle] était du plaisir d’être pris[e] pour un[e] si [aimable personne], [elle] s’est laissé mener comme j’ai voulu…12

La Comtesse, ravie, se voit l’héroïne d’un triangle amoureux; or tout y est faux, hormis la satisfaction de son amour propre flatté: elle croit être objet de l’amour des deux hommes, mais son pouvoir sur ses galants est fictif, puisque leur amour est feint, tout comme est feinte la jalousie de Lélio… Et c’est ce triangle dont la Com-tesse serait le sommet, triangle conçu par Lélio pour duper la ComCom-tesse, qui est utilisé par la Demoiselle pour affranchir celle qu’elle subjugue en tant que Chevalier.

En effet, la Comtesse se déprend de Lélio –parcourant vite le chemin qui va du «Lélio commence bien à me déplaire» (II,8) jusqu’à «[c’est] un homme haïssable, que j’ai toujours deviné que je haïrais» (III,6)– et s’enflamme pour le pseudo-chevalier: «Quelle différence de vous à Lélio […]!» (III,6). Conquise, elle donne pa-role de mariage au Chevalier, acceptant pour lui de perdre la somme du dédit –ce

relations between men and women but also the relation of women to themselves. The surveyor of woman in herself is male; the surveyed, female. Thus she turns herself into a object», John Berger (1977: 46-47).

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qu’il promet d’éviter si elle suit ses indications13. C’est ainsi qu’elle, à son tour, va

feindre consciemment, faisant pivoter le triangle des complicités; et lorsque Lélio la somme de choisir entre ses deux soupirants, la Comtesse lui assure de sa volonté de l’épouser. Déçu dans ses espoirs, Lélio joue alors sa dernière carte et montre à nu sa fourberie, se déclarant sans amour pour elle, mais cependant disposé à l’épouser, pour forcer de la sorte la Comtesse à se refuser au mariage –et donc à devoir acquitter le dédit. C’est alors que le Chevalier, qui avait trouvé un bon prétexte pour se faire re-mettre le document, le déchire sur-le-champ et révèle son identité à ses partenaires déconfits.

La stratégie de la Demoiselle a donc réussi, permettant à la Comtesse de cons-tater la fourberie du gentilhomme et la libérant du mariage avec celui-ci. Si Lélio croyait être le cerveau et le metteur en scène du jeu triangulaire, c’est bien au contraire la Demoiselle le véritable meneur de jeu, et l’épreuve qu’elle a fait subir à ses partenaires a contraint Lélio à se démasquer, et a prouvé l’inconsistance de l’amour de la volage Comtesse, créant aussi pour chacun d’eux les conditions d’initier une prise de conscience.

2. Une fausse suivante

Bien évidemment, il n’y a pas que des personnages nobles dans la pièce; d’ailleurs rien de ce qui a été avancé ne justifierait le titre de la comédie. Il n’a été question jusque là que d’un faux chevalier; parlons à présent de la fausse suivante –deuxième avatar de la Demoiselle– et donc des domestiques.

Frontin et Trivelin ouvrent la pièce: leurs noms correspondent dans la tradi-tion théâtrale à des serviteurs rusés et audacieux, et leur conversatradi-tion montre bien ces traits. Se rencontrant devant le château de la Comtesse, ils se mettent au courant des mésaventures survenues pendant les deux ans qu’ils ne se sont pas vus. Ayant fait tous les métiers et connu toutes les fortunes, aspirant à devenir «citoyen de Paris» ou «arri-ver à un état fixe», mais réduits à servir chez autrui, et bien que culbutés par le sort, ils n’ont rien perdu de leur vivacité ni de leur verbe. Trivelin, d’ailleurs, se vante de sa-voir adapter son masque aux circonstances:

Trivelin. - Depuis quinze ans que je roule dans le monde, tu sais combien je me suis tourmenté, combien j’ai fait d’efforts pour arriver à un état fixe. J’avais entendu dire que les scrupu-les nuisaient à la fortune; je fis trêve avec scrupu-les miens, pour n’avoir rien à me reprocher. Était-il question d’avoir de l’honneur? j’en avais. Fallait-il être fourbe? j’en soupirais, mais

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j’allais mon train. Je me suis vu quelquefois à mon aise; mais le moyen d’y rester avec le jeu, le vin et les femmes? Comment se mettre à l’abri de ces fléaux-là? […] Que te dirai-je enfin? Tan-tôt maître, tanTan-tôt valet; toujours prudent, toujours industrieux, ami des fripons par intérêt, ami des honnêtes gens par goût; traité poliment sous une figure, menacé d’étrivières sous une autre; changeant à propos de métier, d’habit, de caractère, de mœurs; risquant beaucoup, réussissant peu; libertin dans le fond, réglé dans la forme; démasqué par les uns, soupçonné par les autres, à la fin équivoque à tout le monde, j’ai tâté de tout; je dois partout (I,1). 14

Les deux compères s’entendent pour que Trivelin –qui est sur le pavé– rem-place Frontin auprès de son maître, puisque le Chevalier l’a chargé d’aller porter sa commission à Paris. Par mégarde, Frontin révèle qu’en fait de maître, «c’est d’une fille habillée en homme dont il s’agit» (I,1). Peu fier de son inadvertance, il cache quand même le rang de cette personne –peut-être parce qu’il la considère «la meil-leure fille»– et prie Trivelin d’être discret. Mais le «fort brave garçon» que Frontin présente au prétendu Chevalier profite aussitôt de l’atout du secret percé pour tour-ner la situation à son avantage: dans une scène (I,5) du plus haut comique qui compte avec la complicité des spectateurs –qui savent qu’il sait qu’il parle à une femme, alors que le Chevalier croit qu’il l’ignore–, il cumule les insolences devant un Chevalier déconcerté, puis embarrassé, jusqu’à renverser les rapports entre maître et serviteur. En effet, Trivelin, sachant avoir affaire à une femme fragilisée, car surprise en situation délicate, se fait fort, exige le dévoilement de l’intrigue et impose ses conditions:

Trivelin. - Souviens-toi, ma friponne, à ton tour, que je suis ton valet sur la scène, et ton amant dans les coulisses. Tu me donneras des ordres en public, et des sentiments dans le tête-à-tête.

Le valet, audacieux jusqu’à l’impudence, saute sur l’occasion offerte par la

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sition équivoque du «Chevalier». Celui-ci lui déclare être une soubrette, chargée par sa maîtresse –une dame de condition désireuse d’épouser Monsieur Lélio– de se faire passer pour gentilhomme pour attaquer le cœur de la Comtesse, afin que Lélio s’éloigne de celle-ci. Ce nouveau masque de la Demoiselle se justifie donc par un nouveau faux triangle amoureux formé par la jalousie. De son côté, Trivelin s’associe à l’intrigue par un pacte de complicité, et se fait payer la discrétion qu’il promet d’avoir. Son annonce des rapports changeants entre la jeune fille et lui, en fonction de la présence ou l’absence de témoins, dessine encore une figure triangulaire –tout en évoquant le topos du Theatrum Mundi15: le bal masqué de la métahistoire ne sert pas

seulement de prétexte à l’affublement masculin de la Demoiselle, mais encore de mé-taphore de la vie sociale16.

La volonté de domination de Trivelin, qui s’exerce de par son sexisme mascu-lin sur le pseudo-Chevalier, se manifeste encore dans ses rapports avec le valet de Lé-lio, le benêt Arlequin –éternel duo comique du clown blanc et de l’auguste–, à qui il en impose par ses lucratifs succès galants:

Trivelin. - Et c’est de sa main mignonne que je tiens ces louis d’or dont tu parles, et que le don qu’elle m’en a fait me rend si précieux.

Arlequin, à ce mot, laisse aller ses bras. - Je n’en puis plus.

Trivelin, à part. - Il me divertit; je veux le pousser jusqu’à l’évanouissement […]

Arlequin jette sa batte et sa ceinture à terre, et se jetant à genoux, il dit. - Ah! mon ami, je tombe à tes pieds pour te supplier, en toute humilité, de me montrer seulement la face royale de cette incomparable fille, qui donne un cœur et des louis d’or du Pé-rou avec; peut-être me fera-t-elle aussi présent de quelque échantillon; je ne veux que la voir, l’admirer, et puis mourir content.

Trivelin. - Cela ne se peut pas, mon enfant; il ne faut pas régler tes espérances sur mes aventures; vois-tu bien, entre le baudet

15 «All the world’s a stage,/ And all the men and women merely players…», Shakespeare, As You Like It (II,7), 1599; «No olvides, es Comedia nuestra vida,/ Y teatro de Farsa el mundo todo,/ Que muda el apara-to por instantes, / Que apara-todos en él somos farsantes…», Quevedo, Epicteto y Focílides en español con conso-nantes, 1635.

16 Par exemple, la Comtesse lance ironiquement à Lélio: «Qu’est devenu votre désespoir? N’était-ce qu’une passion de théâtre? […] Vous êtes un excellent comédien» (III,9). Le thème est constant dans l’entière œuvre de Marivaux, et fait tout le sujet du récit du «Voyageur dans le Nouveau Monde» (le Cabinet du philosophe, feuilles 6 à 11, JOD). Selon David Trott (1991: 28), «Le théâtre marivaudien se distingue du théâtre classique en ce qu’il met en valeur le jeu de rôles et l’autoreprésentation. Il sera relégué à des scènes non officielles – où il prospérera – pour avoir voulu trop tôt, avant Diderot et son

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et le cheval d’Espagne, il y a quelque différence (II,5).

Trivelin, un moment seul. - Je lui ai renversé l’esprit; ah! ah! ah! ah! le pauvre garçon! (II,6).

Débrouillard et cynique, Trivelin donne le ton à la pièce. Dans la scène d’ouverture il exprimait ouvertement sa rapacité –«je ne conseillerais encore à per-sonne de laisser [ses biens] à la discrétion de ma philosophie. J’en prendrais, Frontin, je le sens bien; j’en prendrais, à la honte de mes réflexions. Le cœur de l’homme est un grand fripon!»–, et sa première conversation avec son «maître» (I,5) prouve son attitude de prédateur. Mais si ses propos n’étonnent point dans la bouche du valet17,

ambitieux pour son compte et amant des soubrettes sans faiblesse de cœur, guettant la moindre occasion pour en tirer profit –car telle est la tradition théâtrale–, ils vont donner par contre un étrange relief à ceux de Lélio le gentilhomme qui entre en scène immédiatement pour proposer ses manigances au Chevalier.

Il est à noter que le titre nous présente la comédie dans la perspective de Tri-velin, ce qui souligne son importance: Lélio ne s’y rattachera que deux actes plus tard, en III,4. Avec Trivelin, Marivaux fait du valet effronté un personnage complexe18,

«tantôt maître, tantôt valet», peut-être pour suggérer que, de façon tout à fait inhabi-tuelle, le valet n’est point ici le double du maître, mais que, bien au contraire, c’est le maître19 qui semble être le double du type du valet.

En effet, Lélio et Trivelin manquent également de scrupules, cherchant à du-per autrui pour en faire leur proie: le noble libertin satisfait son amour-propre par ses conquêtes, s’achète de belles propriétés avec l’argent prêté qu’il ne veut pas rembour-ser, et veut regarnir sa bourse avec la dot d’une femme qu’il compte délaisser et me-nacer de confinement, tout comme le roturier ménage son amour-propre20, ne paie

17 «Second zanni, naïf et balourd, Arlequin est opposé au premier zanni (Brighella, Mezzetin, ou Trive-lin) débrouillard, intriguant, cynique. Chez Marivaux, on perçoit un rappel de cette opposition des zanni dans La Fausse Suivante où Trivelin l’emporte sur Arlequin», précise Françoise Rubellin (1996: 170).

18 Goldzink (1995: 182) présente «cette nouvelle grande figure de valet» comme «une esquisse fulgu-rante, mais à qui la structure de la pièce (centrée sur le Chevalier), la philosophie sociale de Marivaux et sa dramaturgie interdisent de prendre l’essor d’un Figaro […] figure saisissante, mais dont la force initiale s’épuise au cours de la pièce (au rebours exact de [Lélio et le Chevalier]. À la fin de la pièce, dupé et récompensé comme un enfant avec qui on a joué, Trivelin est bien retombé du côté d’Arlequin».

19 Faut-il rappeler le mot de Vauvenargues pour juger Lélio? «La noblesse est la préférence de l’honneur à l’intérêt; la bassesse, la préférence de l’intérêt à l’honneur», Introduction à la connaissance de l’esprit

(1746), Livre III, XLV.

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pas ses dettes (I,1), vole les maîtres qu’il sert (I,1), et extorque qui se trouve à sa por-tée. Chacun d’eux manque à la parole donnée21, cherche à établir un rapport de

do-mination avec autrui et vise à tirer profit de la femme soumise à sa contrainte –profit d’argent et de sexe, par le truchement du mariage-piège dans le cas de Lélio, par celui du rançonnement dans le cas de Trivelin. Le parallélisme que la pièce tisse entre le noble et le domestique est incontestable; tous deux, centrés sur soi, sont des préda-teurs, comme le souligne le terme employé par la Demoiselle: «pourquoi êtes-vous loup?» (III,5). C’est donc les deux fourbes que la jeune héroïne doit affronter –dans un schéma dramatique toujours triangulaire, jouant de sa triple identité: Demoi-selle, Chevalier et suivante, et tâchant de protéger son triple secret: son sexe, sa condi-tion et son but.

Bien que Trivelin connaisse par Frontin qu’elle est femme dès la scène d’ouverture, elle est crue longtemps homme par le reste des personnages. Arlequin, le niais valet de Lélio, sera le premier à découvrir son sexe (II,7), et ce sera par ses ba-lourdises que Lélio commencera à avoir des doutes (III,1) –même s’il échoue piteu-sement à les éclaircir!22– et apprendra la vérité (III,4). Néanmoins, pour la Comtesse

le Chevalier ne redevient fille que lors du dévoilement final (III,9). Entre-temps, la Demoiselle est crue soubrette par les trois hommes: rançonnée par Trivelin depuis le début, elle devra payer également la «discrétion» d’Arlequin, toujours assoiffé de vin, d’argent et de femmes. Femme servile pour Trivelin et Arlequin –«femme en chair et en or», selon la belle expression de Jean Goldzink (1995: 180)–, homme de condition pour Lélio (longtemps) et pour la Comtesse, la jeune fille est nettement le sommet de deux triangles dans ses rapports avec les autres personnages, dessinant de la sorte la sphère des domestiques et celle des maîtres: la composition géométrique est d’autant plus claire que Marivaux a pris soin de faire disparaître Frontin dès les scènes d’exposition, et de priver la Comtesse de suivante. Et dans chaque sphère, c’est au personnage prédateur d’exercer la domination, donc de vouloir conduire l’action: Lélio expose son plan et pose en maître devant le Chevalier son complice, novice en libertinage23; Trivelin prend le dessus sur la suivante et dicte ses conditions (I,5) pour

immédiatement vouloir mener l’intrigue sans consulter sa partenaire:

déclare peu heureux en amour (I,5).

21 Tout comme Lélio trahit ses engagements, Trivelin trahit la promesse de discrétion faite à Frontin (I,1) et celle faite à la fausse suivante (I,5) puisqu’il essaie de vendre à Lélio (II,3) les informations obtenues.

22 Lélio provoque en duel le Chevalier pour le démasquer, mais la décision avec laquelle son partenaire relève le défi dissipe ses soupçons, dont il s’excuse. «Avec une quenouille, mes pareils vous battraient encore», le raille le Chevalier dans une scène (III,3) riche d’équivoques.

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Trivelin. - Me voici comme de moitié dans une intrigue assez douce et d’un assez bon rapport, car il m’en revient déjà de l’argent et une maîtresse; ce beau commencement-là promet encore une plus belle fin. Or, moi qui suis un habile homme, est-il naturel que je reste ici les bras croisés? […] Si je disais au seigneur Lélio que le cœur de la Comtesse commence à capitu-ler pour le Chevalier, il se dépiterait plus vite, et partirait pour Paris où on l’attend (II,1).

Or, l’espiègle jeune fille, en tant que chevalier ou suivante, fera échouer leurs convoitises. Ce sera elle le moteur de l’action, sans défaillance; Protée se glissant dans tous les rôles, elle sait changer aisément de masque selon le partenaire et les imprévus. Ainsi lorsque Arlequin commet la bévue de révéler son sexe en présence de Lélio,

Arlequin. - Je vous demande pardon si je vous suis importun, Monsieur le Chevalier; mais ce larron de Trivelin ne veut pas me rendre l’argent que vous lui avez donné pour moi. J’ai pourtant été bien discret. Vous m’avez ordonné de ne pas dire que vous étiez fille; demandez à Monsieur Lélio si je lui en ai dit un mot; il n’en sait rien, et je ne lui apprendrai jamais (III,4).

Sans se décontenancer, elle change de statut et de rôle, dans un jeu toujours triangu-laire:

Lélio. - Qu’êtes-vous venue faire ici?

Le Chevalier. - Tirer votre portrait, afin de le porter à certaine dame qui l’attend pour savoir ce qu’elle fera de l’original. […] On a su que vous étiez à Paris incognito; on s’est défié de votre conduite. Là-dessus on vous suit, on sait que vous êtes au bal; j’ai de l’esprit et de la malice, on m’y envoie; on m’équipe comme vous me voyez, pour me mettre à portée de vous connaître; j’arrive, je fais ma charge, je deviens votre ami, je vous connais, je trouve que vous ne valez rien; j’en rendrai compte; il n’y a pas un mot à redire.

Lélio. - Vous êtes donc la femme de chambre de la demoiselle en question?

Le Chevalier. - Et votre très humble servante. (III,5).

Et elle propose immédiatement un nouveau pacte de complicité qui met entièrement Lélio sous sa dépendance:

Le Chevalier. - Tenez, je ne fais point l’hypocrite ici; je ne suis

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pas, non plus que vous, à un tour de fourberie près. […] pour conclusion, faites ma fortune, et je dirai que vous êtes un hon-nête homme; mais convenons de prix pour l’honneur que je vous fournirai; il vous en faut beaucoup […], moyennant quoi, je vous laisse ma maîtresse, et j’achève avec la Comtesse (III,5).

C’est le dédit qui servira de gage pour la somme que Lélio doit payer à la fausse suivante, en plus d’une bague qu’il lui donne déjà; et c’est donc en possession du dédit que le Chevalier persuadera la Comtesse de l’épouser et de mettre Lélio à l’épreuve. Celui-ci a d’ailleurs perdu toute possibilité d’initiative, et ne peut que jouer le rôle dicté par la jeune fille24, son sort étant entre ses mains. Il n’est plus qu’un pois-son ferré qui se débat au bout de la ligne. Lui qui se croit un habile homme, il ne devine pas l’hameçon qu’il a gobé, ne doutant point de l’intérêt d’une soubrette à vouloir gagner une forte somme d’argent au terme de l’intrigue. Acteur à son insu dans la petite comédie que lui joue la Comtesse sous la direction du Chevalier, Lélio déclare pour une fois la vérité: il est tout à fait disposé à épouser une femme sans l’aimer –et si la Comtesse n’y trouve pas son compte, elle n’a qu’à payer le dédit. La comédie est devenue réalité: la Demoiselle a mené Lélio là où elle a voulu, jusqu’à ce que la vérité perce à travers le masque. La jeune fille n’a plus qu’à déchirer le dédit et découvrir son identité; elle a démasqué l’imposture –le manque de probité de Lélio et la légèreté de la Comtesse.

L’humiliante épreuve que subissent l’un et l’autre les force à regarder leur vrai visage, à s’examiner en vérité: se re-connaître est bien la première étape qui pourrait aboutir à un examen de conscience et au repentir, ouvrant l’être à l’altérité. La recon-naissance de l’autre sera le parcours des naufragés de L’Île des esclaves (1725); La Fausse Suivante (1724) en indique l’acheminement. C’est dans cette perspective que la surprenante question que la pseudo-soubrette a posée à Lélio s’avouant malheureux prend alors tout son sens: «vous repentez-vous du mal que vous vouliez faire, ou de celui que vous n’avez pas fait?»25 (III,5).

24 «Le Chevalier. - Voici la Comtesse. Quand j’aurai été quelque temps avec elle, revenez en colère la presser de décider hautement entre vous et moi; et allez-vous-en, de peur qu’elle ne nous voie ensem-ble» (III,5); «Le Chevalier. - Si elle continue à vous offrir sa main, tout le remède que j’y trouve, c’est de lui dire que vous l’épouserez, quoique vous ne l’aimiez plus. Tournez-lui cette impertinence-là d’une manière polie; ajoutez que, si elle ne veut pas, le dédit sera son affaire» (III,8).

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3. La Demoiselle

Point de volonté de vengeance chez la Demoiselle, donc, malgré tout ce que de nombreux critiques (et non point des moindres!)26 ont écrit à cet égard. Le Cheva-lier, briseur de rêves égoïstes, est un éveilleur de réalité. Il est vrai que Lélio et la Comtesse restent sans consolation (à l’égal du philosophe et de sa sœur dans Le Triomphe de l’amour, par exemple), leur échec étant la possibilité de leur catharsis. Mais pourquoi qualifier de vengeance le fait d’empêcher le méchant de nuire? Lélio n’épousera point la Comtesse, et devra lui rembourser la somme qu’elle lui avait prê-tée; et la Comtesse –on l’espère– changera d’attitude envers ses galants27, ou du moins gagnera en sens commun et ne promettra plus sa main à la légère, ayant appris «qu’il n’est de sentiment qui ne doive lentement mûrir en nous si nous en voulons être as-surés» (Roy, 1947: 64-65). La Demoiselle punit Lélio en l’humiliant, par le seul moyen de lui faire avouer ses mauvais desseins, et voilà tout: curieuse vengeance, en somme! Il est clair que la jeune héroïne est animée par l’esprit de justice, et non pas par celui de revanche.

Et si elle punit le fourbe gentilhomme, par contre elle pardonne aux valets28, à qui elle donne la bague de Lélio. «Tenez, mes enfants, vendez cela, et partagez-en l’argent» (III,9), leur dit-elle: ces mots si simples méritent pourtant qu’on s’y arrête, car ils renferment la triple leçon adressée tant aux valets qu’aux maîtres. Avec l’objet de prix que la Demoiselle donne aux valets cupides, les invitant à partager, elle donne exemple de générosité et d’altruisme aux chasseurs d’expédients, nobles et roturiers, qui agissent au détriment d’autrui pour s’enrichir; aux narcissiques qui rapportent tout à soi, elle donne exemple de dévouement, veillant sur Trivelin et Arlequin, qu’elle appelle ses enfants, malgré leurs harcèlements précédents: troisième leçon adressée aux rancuniers, leçon d’oubli et de pardon.

C’est en utilisant les mots de ses interlocuteurs qu’elle finit la comédie et in-troduit le divertissement final: «Voyez-la [la fête], puisque vous êtes ici. Vous partirez

26 Jean Goldzink, qui pourtant refuse le discours “moderne” de la cruauté marivaudienne, écrit: «La

Fausse Suivante, en cela unique, ne semble vouée qu’à la vengeance […]: de la jeune fille qui ne voulut pas subir la loi des marchandises, nous ne saurons jamais que ses roueries, la jubilation tremblante de la vengeance, la froideur impitoyable d’une descente aux enfers du monde social» (1995: 189-190); «La Fausse Suivante forme une frontière du côté de la noirceur, par la figure du libertin, avide de se jouer des femmes au profit des dots, et par l’idée d’une vengeance féminine que n’adoucirait nul amour» (2003: 271).

27 La leçon donnée à la Comtesse est explicite: «Regardez le chagrin qui vous arrive comme une petite punition de votre inconstance; vous avez quitté Lélio moins par raison que par légèreté, et cela mérite un peu de correction» (III,9).

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après; ce sera toujours autant de pris.» Alors que les autres personnages, guidés par leur seul intérêt, ne cherchent qu’à tirer profit des autres, qu’à prendre, il est révéla-teur que le champ lexical privilégié de la Demoiselle –à ne pas confondre avec la pa-role de ses avatars, bien sûr–, soit celui du don:

Le Chevalier (seul). - Je regarde le moment où j’ai connu Lélio, comme une faveur du ciel dont je veux profiter, puisque je suis ma maîtresse, et que je ne dépends plus de personne. […] J’ai du bien; il s’agit de le donner avec ma main et mon cœur; ce sont de grands présents, et je veux savoir à qui je les donne (I,3)29.

Le divertissement s’intègre à l’action; les musiciens attendus depuis le premier acte –«Arlequin, n’oublie pas d’avertir les musiciens de se rendre ici tantôt» (I,6)– arrivent pour fêter le mariage prévu de Lélio avec la Comtesse. Mais ni ce mariage, décidé avant le lever de rideau, ni les autres évoqués en cours de route –celui du «Chevalier» avec la Comtesse (III,6) ou celui de Lélio avec la Demoiselle– n’auront lieu. Les différents mariages envisagés sont le fruit d’un leurre, que la comédie a mis au jour, et à Lélio déguisant sa cupidité sous le masque de l’amour pour la Comtesse correspond la Demoiselle déguisant son sexe sous l’habit masculin. Les parcours amoureux étant faux, le mariage disparaît de la comédie, puisqu’il devient illégitime dans l’univers marivaudien30. Les parties chantées correspondent bien à cette vision,

tant le divertissement qui finit le premier acte31 que celui qui conclut la comédie. En

effet, les paroles du premier expriment nettement que le mariage fondé sur le seul désir sexuel est bien fragile, et celles du second, qui chantent d’abord l’inconstance, finissent par la crainte que suscite l’union avec un conjoint méconnu:

Amants, si votre caractère, tel qu’il est, se montrait à nous, quel parti prendre, et comment faire? le célibat est trop austère:

Faudrait-il se passer d’époux? Mais il nous est trop nécessaire.

Bien évidemment, c’est le mariage non fondé sur des assises solides qui est mis en cause dans les divertissements, celui-là même que la comédie présente comme

en-29 Le contraste entre le désir de lucidité de la Demoiselle et le désir de la Comtesse de s’aveugler est frappant.

30 Dans La Commère, le parcours amoureux est également faussé, ce qui rend encore impossible le mariage envisagé dès avant le lever de rideau. Cf. Ramos Gómez (sous presse).

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jeu. Marivaux force les spectateurs à voir le mariage d’intérêt –de norme à son épo-que– depuis la perspective de la Demoiselle, promise par son beau-frère à un Lélio inconnu; à adopter le point de vue de la jeune fille, qui met tout son savoir-faire en œuvre pour empêcher la Comtesse de tomber aveuglément dans le piège d’un ma-riage désespérant. La comédie joue avec le feu, «comme si la mission comique était justement de frôler indemne le danger», signale pertinemment Philip Stewart (1982: 194). La pièce «traduit dans le registre comique ce que les Journaux disent sur le mode de l’indignation et de la sensibilité frémissante» (Goldzink, 2000: 181).

Sans la jeune fille, le climat moral de la pièce aurait pu faire penser –toutes distances gardées– à celui du Turcaret de Lesage (1709), à propos duquel Yves Mo-raud écrit (1981: 87):

C’est dans ce microcosme social, parcouru de rapaces sans foi ni loi, ou plutôt dont la loi est celle-là des rapaces, dans cet univers où derrière la comédie de la coquetterie, de l’amour et du bel esprit, on n’a pas de mal à discerner le combat brutal des convoitises attisées par l’odeur de l’argent, que le valet va évo-luer, l’œil à tout et à tous, fauve parmi les fauves que rien ne rappelle plus à ses ancestraux devoirs de fidélité et de dévoue-ment.

Mais c’est précisément la fidélité et le dévouement que la Demoiselle rappelle à tous les autres personnages, incarnant par là la figure morale qui se doit de ramener le sens perdu par une société en déroute, où les seules valeurs semblent être celles de la domination, de l’argent et de la vanité: fidélité dans les rapports maître-valet («mes enfants», III,9); fidélité en amour («vous avez quitté Lélio moins par raison que par légèreté», III,9); fidélité dans le mariage («mais je croyais qu’il fallait aimer sa femme», I,7). Leçon donnée avec gaieté, sans sermons, sans accabler de reproches ses interlocu-teurs, malgré leurs roueries. Face à des rapports humains dénaturalisés, monnayés même32 (le fameux dédit en est un bel exemple), elle pose le respect de l’autre comme

condition nécessaire de toute vie en société, la bienveillance comme son ciment, et pourrait parfaitement dire à ses partenaires, comme le fera un an plus tard le gouver-neur de L’Île des esclaves, que son désir est de «vous rendre sains, c’est-à-dire humains,

32 La Demoiselle se fait de la sorte porte-voix de la reconnaissance –cette reconnaissance dont nous éprouvons l’absence dans l’expérience du mépris– contre la réduction de l’individu à sa dimension marchande, à un être dépossédé de son «moi», abstrait donc interchangeable; son rejet du mariage avec Lélio projeté par son beau-frère en est la première preuve. Dans la comédie, Trivelin désire d’être re-connu pour ses capacités, pour ses mérites, incarnant l’individualisme compétitif; la perspective de la Demoiselle est d’ordre relationnel, mettant au centre la reconnaissance réciproque. Sujet toujours d’actualité: voir Axel Honneth, La lutte pour la reconnaissance (Paris, Cerf, 2000) et Paul Ricoeur,

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raisonnables et généreux pour toute votre vie»33 Car le discernement marivaudien

–dont fait si brillamment preuve la Demoiselle– ne conduit jamais à désespérer des hommes, malgré leur mauvaise foi, leur vanité, leur égoïsme, leur culte de l’intérêt, mais à rire de nos travers et à nous apprendre à coexister.

Je vais instruire votre esprit sans affliger votre cœur; je vais vous donner des lumières, et non pas des chagrins; vous allez devenir philosophe, et non pas misanthrope. Et le philosophe ne hait ni ne fuit les hommes, quoiqu’il les connaisse; il n’a pas cette puérilité-là; car sans compter qu’ils lui servent de spectacle, en qualité d’homme il est lui-même uni à eux par une infinité de petits liens dont il sent l’utilité et la douceur […]34.

Cette sympathie lucide engage tout le théâtre de Marivaux, et son œuvre en-tière. Si dans ses périodiques Marivaux décrit les mœurs de son temps, tissant obser-vations et réflexions, l’intense attention accordée aux autres, dont il fait preuve, cher-che à rapprocher-cher les êtres, à éveiller la chaleur humaine, à introduire plus de probité et de générosité dans les relations humaines. Pareillement, La Fausse Suivante véhicule une instruction morale qui oppose à la Cité de la concupiscence, fondée sur l’orgueil et la convoitise, la Cité de la générosité, fondée sur la bienveillance, sur l’amour du prochain –et certainement, pour le chrétien qu’est Marivaux, sur l’amour de Dieu. Le déguisement est indispensable pour délivrer un tel message à une société qui vit mas-quée, à des «porteurs de visages»35; déguisement que Marivaux réalise ici par le

tru-chement du théâtre (le travestissement de la Demoiselle dans la pièce en serait la mé-taphore), lui qui se moque aussi bien des sermons où le prédicateur ne cherche qu’à briller36, que des ennuyeux traités de morale, spirituellement raillés dans la sixième

feuille du Spectateur français.

Car Marivaux aime la gaieté, et dans ses comédies la disposition du moraliste et le goût du comique s’entrecroisent comme deux composantes indispensables, sans que la morale s’impose aux dépens de la comicité. C’est dire que son rire est convi-vial, non ricaneur, et son comique socialisant37. Il aime à rire et à faire le bonheur du

spectateur: «je ris de si bon cœur qu’il m’a pris envie de faire rire les autres.»38 Et

l’espiègle jeune fille de La Fausse Suivante, dont nous ignorons le nom, elle qui

33L’Île des esclaves, 1725, scène 2.

34Suite du Monde vrai, Le Cabinet du Philosophe, JOD, p. 391. 35Le Spectateur français, troisième feuille, JOD, p. 124. 36Le Spectateur français, quinzième feuille, JOD, p.194-195.

37 «Marivaux […] croit pouvoir concilier comique et sociabilité sans diluer le rire dans les larmes, ni substituer le spectacle de la vertu au dévoilement ironique des conduites, comme le voudront si tena-cement les Lumières dès les années 1730» (Goldzink, 2000: 184).

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s’amuse pour notre joie à faire la leçon à ses partenaires –castigat ridendo mores–, ne pourrait-elle pas tout simplement s’appeler Comédie?

C’est bien grâce à elle que la chorégraphie des masques, par la géométrisation des figures dramatiques, dessine un tétraèdre que la pièce fait tournoyer, pivotant sur l’identité triplée de la jeune fille –Demoiselle, Chevalier et suivante. Le tétraèdre, pyramide composée de quatre faces triangulaires, nous montre tout à tour le triangle des nobles, le triangle des domestiques et le triangle des complicités nouées; le sens de cette dynamique du triangle étant donné par la base du tétraèdre, qui réunit les moti-vations des personnages: Convoitise, Amour-propre et Générosité.

La Fausse Suivante raconte un bon tour, une farce –l’histoire d’un arroseur ar-rosé et d’«une tendre brebis qui échappe au loup» (III,5)–, qui suggère très discrète-ment que pour qu’il y ait une socialité humanisante, il ne s’agit point de triompher, mais de coexister et de construire des rapports vraiment humains. Marivaux montre aux spectateurs comment un personnage apparemment démuni, grâce à son audace, à sa lucidité et à son superbe talent d’actrice, affronte fourbes et égocentriques, parvient à faire échouer leur volonté d’utiliser l’autre comme un moyen pour soi, et donne à tous une souriante leçon d’altruisme. La comédie doit être perçue en tant que jeu

les nobles: Lélio Comtesse Chevalier les domestiques:

Trivelin Arlequin suivante

les motivations: Convoitise Amour-propre

Générosité

les complicités nouées par la jeune fille: avec Trivelin

avec Lélio avec la Comtesse

le tétraèdre: axé sur la triple identité de la jeune fille,

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malicieux, certainement, mais aussi comme une épreuve permettant la prise de cons-cience individuelle qui mènerait à une réforme intérieure, et ceci serait valable tant pour les personnages concernés que pour les spectateurs. La pièce qui, de par sa comi-cité, suscite une réaction de sympathie amusée, loin de bercer la conscience du specta-teur, cherche à éveiller en lui un processus réflexif pour qu’il en découvre les implica-tions morales. En fin de compte, le dernier jeu triangulaire de la pièce serait bien ce-lui-là.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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