Le tableau de bord prospectif (balanced scorecard) de Kaplan et Norton (1992) est un modèle qui constitue série de mesures quantifiables de la performance de l’entreprise à l’issu de ses différentes stratégies. Il rassemble les différents outils qui permettent d’établir la communication entre les employés et les acteurs externes. Il constitue de ce fait à la fois un outil de communication, de mesure de la performance et de système stratégique (Niven, 2010). Dans ce cadre, les différentes mesures de la performance tiennent compte des coûts, de la qualité, du temps et de la productivité de l’entreprise. Ce modèle de performance met en relief les données quantitatives sans pour autant délaisser la dimension qualitative de la performance (Cazier, et Poluha, 2007).
Le tableau de bord prospectif proposé par Kaplan et Norton (1992) présente quatre perspectives de l’entreprise qui sont interdépendantes. Il s’agit notamment de la perspective financière, la perspective client, la perspective des processus de gestion opérationnelle et la perspective d’innovation et d’amélioration.
La perspective financière se trouve au sommet du tableau de bord prospectif. Elle regroupe les indicateurs financiers ou économiques qui permettent d’évaluer la rentabilité
107Davis, J. (2008),“Determinants of human resources management performance on county efficiencies”:
A study of Florida Counties. ProQuest, p.38.
108Kaplan, R.S. and Norton, D.P. (1992), 'The Balanced Scorecard - Measures That Drive Performance', Harvard Business Review, Vol. 70, No. 1, Jan-Feb, pp. 71-79.
financière de l’entreprise. On peut la relier à la performance financière que nous avons déjà vue.
La perspective client est reliée causalement à cette première perspective dans la mesure où la perspective client de l’entreprise résulte de la capacité de l’entreprise à satisfaire ses clients et à les fidéliser. Dans ce cadre, la perspective client regroupe tous les indicateurs concernant les clients tels que la satisfaction des clients, les parts de marché de l’entreprise, le chiffre d’affaire, etc. On peut la relier à la performance commerciale et à la performance concurrentielle que nous avons vu en section I du 1er chapitre.
La perspective des processus de gestion opérationnelle se réfère à la chaîne de valeur de la qualité des produits et des services proposés par l’entreprise. Cette chaîne de valeur commence par les clients, puis elle englobe la recherche et le développement du nouveau produit ou de service, la conception, la réalisation, la production, la distribution, la vente et le service après vente proposé aux clients. Cette perspective englobe les indicateurs tels que le nombre d’innovation produits, le nombre de défauts de fabrication, le délai de mise sur le marché, etc. On peut la relier dans une certaine mesure à la performance de production et à la performance stratégique.
La perspective d’innovation et d’amélioration se réfère au capital intellectuel et organisationnel à la disposition de l’entreprise. Elle rassemble le système d’information, l’accumulation de savoir et de savoir-faire dans l’entreprise. Mais elle tient compte aussi de la culture de l’entreprise (Le Louarn, 2008). On peut la relier à la performance humaine, sociale et même stratégique.
Ces quatre perspectives mises en avant par le tableau de bord prospectif permettent de connaître la considération de l’entreprise par les clients, les actionnaires et les autres acteurs externes. Elles permettent selon Magakian, et Payaud, (2007)109de connaître la capacité de l’entreprise à améliorer et à créer de la valeur pour eux.
2.2 Hypothèses de recherche avancées par les auteurs
A travers leur recherche Kaplan et Norton (1992) sont parties de la constatation que les données financières ne permettent de récolter que des informations après activité de l’entreprise et ne reflètent de ce fait qu’à posteriori les différentes valeurs créées par l’entreprise. D’autre part, ces indicateurs ne donnent pas non plus des données en ce qui
109Magakian, J et Payaud, M. (2007),100 fiches pour comprendre la stratégie d’entreprise. Bréal, p. 203.
137 concerne les leviers qui permettent de créer plus de valeur. Dans ce cadre, les indicateurs financiers ne sont que des indicateurs rétrospectifs. Or, il est important pour l’entreprise non seulement de connaître sa performance dans le passé, mais également d’anticiper les différents leviers et les opportunités pour se développer d’où la nécessité d’un tableau de bord prospectif (Le Louarn, J. 2008). Les deux auteurs ont donc tenté de mettre en relief les différents liens de causes à effets entre les différentes perspectives que nous avons annoncées auparavant: l’axe client, financier, processus et apprentissage opérationnel (Magakian, et Payaud, 2007).
2.3 Résultats de la recherche
Implications théoriques :
Le tableau de bord prospectif permet d’établir les liens existants entre les instruments traditionnels de contrôle de gestion et les autres indicateurs de performance notamment, ceux qui permettent d’atteindre les objectifs stratégiques de l’entreprise. Ce tableau de bord prospectif permet entre autre de définir les variables intermédiaires et explicatives qui permettent l’atteinte ou non des objectifs stratégiques de l’entreprise.
Implications managériales :
Le balanced scorecard permet d’identifier les différents leviers de la performance de l’entreprise et permet entre autre de connaître les différentes valeurs créées (Niven, 2010).
Elle sert de support de travail surtout dans l’aide à la décision.
Dans ce cadre, le gestionnaire peut exploiter des indicateurs de performance opérationnels qui ne sont pas des indicateurs financiers. Ces indicateurs correspondent aux mesures de la satisfaction des clients, l’efficacité des processus internes, ainsi que la capacité d’innovation et d’apprentissage de l’organisation (Finet A. 2009). Le tableau 16 montre les différents indicateurs de performance qui pourraient être exploités dans un balanced scorecard.
Tableau 16: Quelques exemples d’indicateurs de performance contenus dans un tableau de bord prospectif
Axe Question posée Objectifs Mesures
Financier Quel regard les actionnaires portent-ils sur
l’entreprise ?
Survivre Cash flows, coûts de revient, etc.
Réussir Croissance du chiffre d’affaires et du résultat d’exploitation, valeur ajoutée, etc.
Prospérer Augmentation de la part du marché, rendement de capitaux propres, etc.
Clients Comment les clients considèrent-ils
l’entreprise ?
Fiabilité Taux de retours des produits, etc.
Développement de nouveaux produits
% des nouveaux produits dans le chiffre d’affaire, part du marché par rapport aux concurrents directs, etc.
Ponctualité % de livraison dans les temps, etc.
Proximité Temps de réponse de la hotline ou du SAV, nombre d’accords de coopération, etc.
Processus internes
Qu’est-ce qui contribue à
fournir un avantage concurrentiel
à l’entreprise ?
Qualité Sensibilité des salariés à la démarche qualité
Production Productivité, durée du cycle de fabrication, coûts unitaires, etc.
Créativité Dépenses de R&D, brevets déposés, etc.
Lancement de nouveaux
produits
Comparaison entre le calendrier effectif et le calendrier prévisionnel, etc.
Innovation et apprentissage
L’entreprise innove-t-elle, s’améliore-t-elle et
génère-t-elle de la valeur ?
Leadership technologique
Dépenses de R&D, brevets
déposés, durée de
développement des produits, etc.
Apprentissage Durée du cycle de fabrication Accès au marché Lancement de nouveaux
produits, etc.
Motivation des salariés
Productivité des salariés, motivations des salariés, nombres d’heures ou budget de formation, % de turnover chez les salariés, nombre de suggestions par salariés, etc.
Source : Finet (2009) adapté de Kaplan et Norton (1992).
139
Limites de la recherche
Il a été reproché d’une part à ce modèle de ne pas porter trop d’attention à la culture organisationnelle et aux ressources humaines de l’entreprise. Il a été montré d’autre part, que le balanced scorecard ne permet pas de tenir compte de toutes les parties prenantes de l’entreprise. Par ailleurs, ce modèle qui met en exergue les différentes activités des collaborateurs et des fournisseurs omet de considérer l’environnement externe qui conditionne la réussite des différentes activités au sein de l’entreprise.
Enfin, ce modèle permet de retracer ce qui s’est passé au sein de l’entreprise sans pour autant se soucier des évènements à l’heure actuelle. Ce modèle ne permet pas non plus d’envisager la performance future de l’entreprise. L’évaluation permise par le balanced scorecard ne permet pas ainsi de connaître la valeur sur le marché de ses actifs.
3) Le modèle de performance de Morin, Savoie et Beaudin (1994)110