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Chapitre II. Complexes radicalaires de cuivre et nickel

Partie 6. Complexes hybrides dipyrrométhène-phénolates de cuivre et nickel

6.1 Introduction

Les porphyrines sont des macrocycles hétérocycliques entièrement aromatiques à 26 électrons comportant quatre sous-unités pyrrole reliées par quatre ponts méthylène (Figure 124-a). Cette forte conjugaison en fait des composés très colorés et souvent photosensibles.

Les porphyrines sont connues pour pouvoir complexer de nombreux métaux (fer, nickel, cuivre, zinc, manganèse…) et constituent d’excellents catalyseurs. Une fois métallées, on parle alors de métalloporphyrines. Elles jouent un rôle essentiel dans les milieux vivants et participent, notamment, au transport et au stockage de l'oxygène (hémoglobine, myoglobine), à l'oxydation de substrats (cytochromes) ou encore à la photosynthèse dans les plantes et bactéries photosynthétiques (chlorophylle). Les recherches concernant les porphyrines ont eu un impact considérable dans les champs de la chimie, de la physique et de la médecine. Ainsi, plusieurs milliers de métalloporphyrines ont été décrites durant les 30 dernières années,192 la plupart étant redox-²actives et pouvant subir plusieurs transferts électroniques.

6.1.1 Chimie redox des porphyrines

Les ligands porphyriniques sont redox non innocents et peuvent supporter une chimie redox à la fois en oxydation et en réduction (radicaux π cationiques ou anioniques). Comme dans les complexes salen, les processus d’oxydation ou de réduction peuvent être centrés sur le métal ou le ligand et dépendent de nombreux facteurs tels que la nature du métal, la fonctionnalisation du ligand porphyrinique, la présence de ligands exogènes coordinants ou encore des conditions de travail (solvant, température…).192 Les complexes [NiII(TPP)] 193 et [CuII(TPP)]194 (Figure 124-a) peuvent être réduits à un et deux électrons au niveau du macrocycle pour donner des radicaux π mono et dianionique ([MII(TPP)]- et [MII(TPP)••]--).192 Ces mêmes métalloporphyrines peuvent également être oxydées à un et deux électrons sur le macrocycle pour donner des radicaux π cationiques ([MII(TPP)]+ et [MII(TPP)••]++) (Figure 123):

192 Kadish, K. M.; van Caemelbecke, E.; Royal, G, in The porphyrin Handbook vol. 8, Electron transfers, Kadish, K. M.; Smith, K. M.; Guilard, R., Ed.; Academic Press London, 2000, pp 1-97.

193 Chang, D.; Malinski, T.; Ulman, A.; Kadish, K. M. Inorg. Chem. 1984, 23, 817.

194 Inamo, M.; Aoki, K.; Ono, N.; Takagi, H. D. Inorg. Chem. Comm. 2005, 8, 979.

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Figure 123: Représentation schématique des différents états redox accessibles des complexes [MII(TPP)] (M = Ni ou Cu)

Même si les radicaux π sont stabilisés par délocalisation sur le système entièrement aromatique du ligand porphyrine, la plupart des métalloporphyrines cationiques radicalaires se sont révélées peu stables en solution. La forme dioxydée du ligand porphyrine est encore moins stable et donc très peu caractérisée. Les complexes porphyriniques monooxydés à base de NiII sont également connus pour pouvoir être obtenus sous leur forme isomère cationique NiIII (principalement octaédrique) en présence de ligand exogène coordinant.

Figure 124: a) Complexe tétraphénylporphyrine MII(TPP), b) salen, c) ligand hybride H310 et d) complexes [MII(10)]-.

6.1.2 Ligands dipyrrométhènes

Le fragment dipyrrométhène peut être assimilé de manière simplifiée à une hémiporphyrine. Historiquement, la chimie des dipyrrométhènes s’est développée pour la synthèse de porphyrines. Elle a ensuite connu un essor avec leur utilisation pour l’élaboration de complexes métalliques,195 ce fragment étant en effet connu pour pouvoir complexer des ions métalliques généralement avec une stochiométrie métal:ligand 1:2 (Figure 125).195. Le ligand dipyrrométhène déprotoné anionique peut facilement coordiner une large gamme de métaux de transition, et un grand nombre de complexes hétéroleptiques et homoleptiques ont ainsi été décrits (Figure 125). Même si la chimie redox de ces composés est très peu ou mal décrite, des études électrochimiques ont montré que le fragment dipyrrométhène pouvait à la fois être oxydé et réduit. Cette activité redox s’explique facilement puisque le fragment dippyrométhène possède un système π conjugué analogue aux porphyrines. Bien que le fragment dipyrrométhène s’oxyde difficilement (potentiel d’oxydation relativement élevé

195 Wood, T. E.; Thompson, A. Chem. Rev. 2007, 107, 1831.

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pour le ligand), il a été montré que celui-ci se réduisait facilement. 195 Ce fragment constitue donc une excellente structure de base pour tenter de stabiliser des espèces réduites radicalaires dans les complexes métalliques.

Figure 125: Représentation schématique des différents états redox accessibles des complexes [MII(dippyrométhène)2]

6.1.3 Ligand hybride bis(di-tert-butyl-phénol)-dipyrrine

Compte tenu de l’excellente aptitude des complexes porphyriniques et salen à stabiliser différents états redox radicalaire du ligand, nous avons décidé d’étudier les propriétés de complexes hybrides bis(di-tert-butyl-phénol)-dipyrrine possédant une unité dipyrrométhène liée à deux phénolates (Figure 124-c). Le ligand tétradentate bis(di-tert-butyl- phénol)-dipyrrine H310 constitue un bon analogue de ligand salen puisqu’il possède également une structure rigide, une sphère de coordination de type N2O2 et deux unités phénols précurseurs de radicaux phénoxyles dans leurs formes déprotonées. Les phénols sont fonctionnalisés par des groupements –tBu encombrants pour éviter les phénomènes de dimérisation des complexes oxydés.

La synthèse et l’utilisation du ligand H310 (bis(di-tert-butyl-phénol)-dipyrrine) complexé avec des métaux tétravalents (TiIV, ZrIV, GeIV, SnIV) a récemment été décrite à des fins catalytiques, notamment pour la copolymérisation d’époxydes avec le dioxyde de carbone.196 Ce ligand possède une structure entièrement conjuguée à 24 électrons et est trianionique dans sa forme entièrement déprotonée. Cette charge formelle est plus importante que celle des ligands salen et porphyriniques considérés indépendamment (dianionique dans leur forme déprotonée) et peut constituer un atout quant à la stabilisation de complexes à un haut degré d’oxydation. D’un autre coté, le fragment dippyrométhène devrait également favoriser une activité redox en réduction centrée sur le ligand. Nous avons développé ici des complexes de métaux divalents (CuII et NiII) et étudié leur chimie redox en oxydation et en réduction que nous comparerons à celle des charpentes originelles salen et porphyriniques.

196 Nakano, K.; Kobayashi, K.; Nozaki, K. J. Am. Chem. Soc. 2011, 133, 10720.

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