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Chapitre III La famille des A1b au sein de la famille des Légumineuses

C. Discussion

III. Variabilité d'activité entomotoxique

2) Analyses complémentaires

Pour tenter de confirmer la présence d'A1b dans les fractions à différentiel de toxicité ou essayer de détecter d'éventuels homologues dans des extraits fortement toxiques, quelques analyses complémentaires ont été réalisées.

De toutes les fractions testées par inhibition de liaison, aucune n'a permis de conclure à la présence d'homologues de PA1b. La présence d’inhibiteur de liaison dans ces fractions grossières est possible. Ces tests étant conçus pour des composés purifiés ces résultats décevants étaient néanmoins attendus. Toutefois, des analyses réalisées par Diol (2003) montrent que même un fractionnement par HPLC est insuffisant. Les pics de chromatographie, obtenus à partir des extraits MeOH60 des différentes plantes sélectionnées pour leur différentiel de toxicité, ne permettent pas d'observer de déplacement significatif de 125I-PA1b.

Une autre hypothèse pouvant expliquer l'absence de liaison pour des fractions présentant un différentiel de mortalité net serait la présence de facteurs toxiques non apparentés à PA1b mais agissant sur un domaine différent du même site de liaison que notre peptide.

De plus, travaillant sur des souches de charançons non isogéniques, on peut émettre l'hypothèse d'un caractère lié au gène portant la résistance ou sensibilité à PA1b et qui jouerait un rôle similaire face à d'autres composés toxiques (résistance multiple de la souche Chine), comme tendent à le montrer les résultats des tests biologiques sur charançons isogéniques.

Les électrophorèses sur fraction à différentiel net tendent à confirmer la présence supposée d'A1b, mais ne sont généralement d'aucune aide pour les extraits sans différentiel et particulièrement pour les espèces hors Galégoïdes et Phaséoloïdes. De plus, pour réellement confirmer que les peptides observés sont des A1b, un anticorps spécifique des A1b et reconnaissant des homologues de différentes espèces serait un outil beaucoup plus efficace. Dans ce contexte, la boucle peptidique correspondant aux acides aminés CSPFEMPPC, conservés dans tous les gènes caractérisés dans cette étude, a été synthétisée. Couplée à une protéine porteuse, elle sera utilisée pour produire des anticorps polyclonaux spécifiques qui devraient éventuellement permettre de détecter des A1b hors du pois (L. Quillien, communication personnelle).

On peut conclure que ces analyses complémentaires ne sont guères informatives, malgré les espoirs fondés dans la première partie de cette thèse, en particulier sur les tests d'inhibition de liaison, assez rapides et peu coûteux en matériel. La spectrométrie de

15 Un biais dans la composition en AT est attendu pour un pseudogène. Ce n’est pas le cas ici, le pourcentage d’AT de la séquence étant de 54 %, équivalent à ceux des autres séquences caractérisées.

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masse, qui s'est avérée un outil très efficace lors de l'étude des quatre plantes "test", doit être tentée, pour rechercher des peptides dans les fractions à toxicité différentielle.

Pour des espèces végétales phylogénétiquement éloignées des deux groupes positifs à l'approche de biologie moléculaire, et toxiques pour R et S (avec ou sans différentiel significatif), l'interprétation des tests biologiques reste difficile.

La purification d’isoformes potentielles chez quelques espèces de toxicité différentielle et de différents groupes, comme Cercis siliquastrum et Dalbergia purpurescens permettrait de confirmer le lien entre toxicité différentielle et homologues de PA1b, mais aussi de mieux cerner la variabilité de séquence des A1b.

IV.

Discussion et conclusions

Les objectifs principaux de l'élargissement de l'étude des A1b au sein des Fabaceae étaient, d'une part, de mieux comprendre cette famille (variabilité d'activité, de structure, répartition taxonomique) et d'autre part, d'en déduire des indications sur son mode d'action.

1) Variabilité et histoire évolutive des A1b

Nous avons montré la présence de gènes homologues à PA1b dans de nombreuses espèces de deux clades de Papilionoideae. De plus, nous avons détecté une toxicité différentielle, entre souches de S. oryzae sensible et résistante à PA1b, dans diverses espèces des trois sous-familles de Fabaceae. N'ayant pas pu caractériser de gènes homologues (ni par PCR ni par Northern) pour les espèces d'autres clades que Galégoïdes et Phaséoloïdes, la caractérisation d'une toxicité différentielle spécifique est la seule indication de la présence d'homologues de PA1b chez ces espèces. La purification puis le séquençage d'un peptide homologue à partir d'une fraction choisie pour son différentiel de toxicité devrait nous permettre de déterminer de nouvelles amorces dégénérées, plus spécifiques des séquences de la tribu ou sous-famille de l'espèce choisie. Ceci avait été tenté sans succès sur Cercis siliquastrum, plante la plus éloignée phylogénétiquement pour laquelle une toxicité analogue avait été observée. Une plante plus proche d'un point de vue taxonomique, au différentiel R/S total, a donc été choisie : il s'agit de Dalbergia purpurescens dont la fraction MeOH60 soluble acétone 80% présente un profil d'électrophorèse proche de la fraction équivalente du pois. Le fractionnement de cet extrait par HPLC est en cours.

L'absence de séquence nucléique ou protéique dans les espèces hors Galégoïdes et Phaséoloïdes, malgré la présence de profils de toxicité semblable au pois (MeOH60, différentiel), ne permet pas de conclure définitivement quant à la présence de la famille des A1b au sein des trois sous-familles de Légumineuses. L'approche par spectrométrie de masse s'étant révélée d'une grande efficacité dans la première partie de ce travail, celle-ci pourrait être appliquée sur quelques fractions d'espèces choisies pour leur éloignement phylogénique et leur toxicité différentielle, comme les fractions MeOH de Parkia biglobosa (Mimosoideae) ou MeOH60 d'Amorpha fruticosa ou Baptisia australis. Ceci permettrait de détecter la présence éventuelle de peptides de masse proche de PA1b, et donc d'envisager quelques microséquençages qui pourraient confirmer l'appartenance de ces peptides à la famille des A1b et permettre de déterminer de nouvelles amorces dégénérées.

2) Diversité d'activité des extraits, A1b et autres composés de défense.

La diversité d'activité observée lors des tests biologiques ne peut pas être attribuée aux seuls A1b. Si la présence de toxicité différentielle totale (pas de toxicité sur Chine) est très probablement liée à la présence d'A1b dans l'extrait considéré, une mortalité sur les charançons résistants peut-être due à de nombreux autres composés. Les Légumineuses ont fait l'objet de nombreuses études de phytochimie. Plusieurs types d'alcaloïdes, d'AANP, de composés phénoliques, de terpènes, d'IP et de lectines, ont été décrits dans cette famille, dans tous les organes des plantes et particulièrement dans les organes reproductifs (cf. premier chapitre) (Bisby et al., 1994 ; Harborne et al., 1971).

Toutefois, en analysant rapidement la répartition de différents composés ou groupe de composés de défense (Bisby et al., 1994 ; Wink and Mohamed, 2003), on ne détecte pas de concordance évidente entre toxicité et présence/absence du composé. En effet, si l'on considère l'AANP canavanine, très étudié, soluble dans le méthanol 60%, on s'aperçoit qu'il est présent dans les graines de plantes dont la fraction MeOH60 est très toxique comme les Phaséoloïdes Canavalia brasiliensis, Sesbania sesban et Robinia pseudoacacia ou les Galégoïdes Caragana arborescens, Colutea arborescens et Lotus corniculatus, mais aussi dans les graines de Laburnum anagyroides qui ne montre aucune toxicité sur charançons résistants (hors de la fraction résidu). La présence de cet AANP dans les graines ne semble donc pas liée à la forte toxicité des espèces citées. D'autres AANP comme l'albizzine (soluble en méthanol) ou l'acide djenkolique (soluble en milieu aqueux acide ou basique) sont présents dans les graines de la plupart des Mimosoideae, dont Acacia dealbata et Parkia biglobosa sont deux espèces non toxiques sur la souche R (hors résidu), contrairement aux deux Albizia testés.

Les Génistoïdes présentent peu d'AANP mais des alcaloïdes quinolizidines (QA : solubles dans l'eau fortement acide) comme la lupanine des graines de lupin. Ces alcaloïdes interfèrent avec le système nerveux (récepteurs à l'acétylcholine et canaux Na+ K+) (Wink, 1993). La lupanine représente 70% des alcaloïdes des graines des deux espèces testées ici (L. angustifolius et L. albus) (Wink et al., 1995). Toutefois, le lupin blanc n'est quasiment pas toxique contrairement au lupin à feuilles étroites. Parmi les QA, les alcaloïdes α-pyridone comme la cytisine sont connus pour être 10 à 100 fois plus toxiques que la lupanine (Wink et al., 1995). Rare chez les lupins et commune chez les espèces des genres Baptisia (dont B. australis, non toxique sur Chine) et Thermopsis, on la trouve également, sous forme de méthylcytisine, chez L. anagyroides. Chez les Crotalarieae, dont C.

eremaea, très toxique, les QA sont remplacés par des alcaloïdes pyrrolizidines (PA).

Cependant, on retrouve de tels alcaloïdes chez L. anagyroides, très peu toxique pour les insectes résistants.

Les isoflavonoïdes, restreints aux Papilionoideae s'accumulent dans un grand nombre de taxons. Les anthraquinones, inhibiteurs puissants des Na+ K+ ATPase, sont représentées dans tous le genre Cassia et dans quelques espèces d'Abrus (Wink and Mohamed, 2003).

Toutefois, les graines de Cassia occidentalis ne montrent aucune toxicité dans les conditions de nos tests biologiques.

Les triterpènes et saponines sont plus répandus dans les Mimosoideae-Caesalpinioideae et les tribus basales des Papilionoideae, mais apparaissent aussi chez les Vicieae, Trifolieae, Cicereae et Phaseoleae ce qui ne permet pas de conclure quant à leur potentielle toxicité pour les charançons. Il en est de même pour les IP (inhibiteurs de trypsine ou chymotrypsine).

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Une étude plus poussée de la concentration des divers composés individualisés, dans la graine et au niveau de l'espèce végétale, s'avère nécessaire pour déterminer les composés responsables des toxicités observés sur les charançons résistants. Toutefois, ce n'est pas le propos de notre étude. Quelques tests biologiques avec certains de ces composés, comme la canavanine, un PA ou une anthraquinone, permettraient de répondre en partie à cette question.