• Nenhum resultado encontrado

Chapitre 6 Axe 1A - La valorisation comme mesure de la valeur d’un comportement

6.2. Étude 1 - Effet de la valorisation des comportements (dévalorisés, neutres, valorisés) dans

6.2.4. Discussion

Cette première étude avait pour objectif de tester l’hypothèse H1A selon laquelle la valeur des comportements (« bien vus par les gens versus mal vus par les gens ») module l’effet des variables sociales dans la prédiction des comportements et de tester l’hypothèse H2A selon laquelle les variables sociales n’ont pas toutes le même impact dans la prédiction de l’intention comportementale, notamment en fonction du gradient de valorisation du comportement mis en œuvre.

Rappelons que pour obtenir différents gradients de valorisation, nous avons conduit une recherche dans laquelle la valorisation a été opérationnalisée par le choix de comportements insérés dans la logique de comparaison. En effet, nous avons choisi de comparer deux comportements valorisés : (« utiliser son clignotant pour indiquer un changement de direction » et

« laisser la priorité à droite »), deux comportements neutres (« suivre scrupuleusement les limitations de vitesse » et « rouler sur un long trajet sans faire de pause ») et deux comportements dévalorisés (« emprunter les voies de bus » et « stationner sur les places réservées aux personnes à mobilité réduite »). De même, pour mesurer l’effet des variables sociales nous avons fait le choix d’en considérer trois : les normes subjectives, l’image et l’identité personnelle.

Au cours de cette étude, il nous a été donné de voir que l’hypothèse H1A est partiellement invalidée. Rappelons que cette hypothèse supposait que les comportements valorisés comme les

comportements dévalorisés seraient prédits par les variables sociales alors que ce ne serait pas le cas des comportements neutres. Nous allons d’abord présenter un rappel des résultats pour les comportements valorisés et dévalorisés, puis pour les comportements neutres.

Les résultats pour les deux comportements valorisés (« utiliser son clignotant pour indiquer un changement de direction » et « laisser la priorité à droite ») et pour les deux comportements dévalorisés (« emprunter les voies de bus » et « stationner sur les places réservées aux personnes à mobilité réduite ») sont en accord avec H1A. Plus exactement, nous avons vu que le comportement « utiliser son clignotant pour indiquer un changement de direction » est prédit par l’identité personnelle à hauteur de 6 % et que le comportement « laisser la priorité à droite » est prédit par les normes subjectives et l’identité personnelle, respectivement à hauteur de 7.4 et 3.5 %. De même, nous avons vu que le comportement « emprunter les voies de bus » est prédit par les normes subjectives, l’image et l’identité personnelle, respectivement à hauteur de 4.2, 7.7 et 19.9 % et que le comportement « stationner sur les places réservées aux personnes à mobilité réduite » et lui aussi prédit par les trois variables sociales (les normes subjectives, l’image et l’identité personnelle, respectivement à hauteur de 27.2, 25.7 et 12 %). Ces résultats sont conformes à nos attentes et valident l’idée selon laquelle la valeur dont sont porteurs ces comportements dévalorisés apparait comme une dimension déterminante de l’intervention des variables sociales dans leur prédiction. Ainsi, l’intention de réaliser un comportement dévalorisé peut être prédite non seulement par les attitudes manifestées par les personnes ou le contrôle comportemental perçu mais également, et de façon non négligeable, par les dimensions sociales comme l’image, l’identité et les normes subjectives. Dans nos résultats, comme dans ceux de Alleyne et Broome (2011), les normes subjectives sont le prédicteur majoritaire de l’intention de réaliser ces deux comportements dévalorisés. De plus, ce résultat contient une information importante, puisque tout se passe comme si la valeur du comportement déterminait dans la prédiction de celui-ci l’intervention des variables sociales. Les résultats dans cette dernière situation confirment les travaux de Manning (2009) qui argumentent l’idée selon laquelle ce serait la divergence entre les normes du groupe de référence et la norme sociale générale qui conduirait à une prépondérance de l’impact normatif pour des comportements dévalorisés.

Autrement dit, l’influence sociale est plus importante lors d’émission de comportements déviants.

Il s’agirait alors de comportements pour lesquels l’influence de référents plus proches (effet normes subjectives) renverrait à une forme de sanction sociale ce qui conduirait les individus à agir dans le but d’éviter une sanction.

Cependant, pour les deux comportements neutres (« suivre scrupuleusement les limitations de vitesse » et « rouler sur un long trajet sans faire de pause ») les résultats sont

contradictoires avec H1A. Plus exactement, « suivre scrupuleusement les limitations de vitesse » est expliqué par l’identité personnelle à hauteur de 2.7 %, et « rouler sur un long trajet sans faire de pause » est expliqué par l’image à hauteur de 13.4 %. Contrairement à nos attentes, les comportements neutres conduiraient également à une activation de valeur, ce qui expliquerait l’impact de variables sociales dans la prédiction de leur intention comportementale. Ces comportements, que nous avons dans le cadre de cette recherche considérés comme neutres, pourraient ne pas avoir la qualité que nous leur avons attribuée. De là, nous tenant à notre hypothèse et nous allons remettre une première fois en question la qualité de l’échelle de valorisation. En ce sens, il semblerait que ces comportements neutres, en dépit de leur « gradient neutre » dans l’échelle de valorisation, soient des comportements qui se distinguent quant à leur valeur. Il semble donc que le centre de l’échelle de valorisation ne se comporte pas comme les extrêmes dans la manière avec laquelle les variables sociales interviennent.

Les résultats de cette étude nous ont aussi permis de tester H2A, selon laquelle la variable image intégrée au cadre de la TCP est la variable sociale qui est la plus susceptible de prédire l’intention comportementale de comportements valorisés et dévalorisés, comparativement aux autres variables sociales (i.e. normes subjectives et identité personnelle). Cependant, nos résultats invalident l’hypothèse H2A. Ils montrent que le seul cas où la variable image prédit plus un comportement comparativement aux autres variables sociales, correspond au cas où le comportement est neutre (i.e. « rouler sur un long trajet sans faire de pause »). L’image semble toutefois être un bon prédicteur des comportements positionnés du côté des comportements dévalorisés (« emprunter les voies de bus » et « stationner sur les places réservées aux personnes à mobilité réduite »). Nous avons mentionné plus haut que la prédiction par les normes subjectives de comportements dévalorisés est susceptible de renvoyer à la présence de l’influence issue d’un groupe de référence faisant montre d’une forte désapprobation sociale. Il en serait alors de même pour expliquer l’effet de l’image dans le cas de comportements dévalorisés. Ainsi l’effet de l’image en lien avec l’influence du groupe de référence dans la prédiction de comportements dévalorisés, permettrait aux individus de répondre à la question de savoir comment à la fois affirmer sa conformité aux règles et normes d’un groupe de référence et, simultanément affirmer sa singularité par rapport aux membres de ce groupe ? Cette question issue des travaux de Codol (1975) sur l’effet de conformité supérieure à soi, nous permet d’aller plus loin dans l’interprétation. Plus exactement, dans la mesure où il existerait un groupe de référence dont l’influence sur l’individu sanctionnerait la réalisation de comportements anti-sociaux, il pourrait alors s’observer chez l’individu une tendance à affirmer qu’il est lui-même plus conforme aux normes en vigueur, que ne le sont les autres membres de ce groupe. Cette tendance étant d’autant

plus forte que le degré de contre-normativité de ces normes est élevé, nous trouverions ici l’explication d’un effet important de la variable image dans la prédiction des comportements dévalorisés. Les participants ne réaliseraient pas les comportements dévalorisés surtout pour éviter de donner une mauvaise image d’eux même. Ces comportements seraient ce qu’éviterait de faire à tout prix de faire un « bon conducteur ». Ainsi, si l’effet de l’image dans la prédiction de comportements dévalorisés renvoie à un effet de conformité supérieure à soi, alors toujours en s’adossant à Codol (1975), nous pouvons dire que l’individu évitant la réalisation de ces comportements affirme son identité personnelle à travers une appartenance au groupe. À cet endroit, nous devrions être en mesure de retrouver un effet de l’identité personnelle dans la prédiction de comportements dévalorisés, ce que sont en mesure de montrer nos résultats.

Finalement, même si les résultats de cette étude ne permettent pas de valider la seconde hypothèse, ils possèdent une certaine consistance eut égard à la proposition de Codol (1975) concernant un possible effet de conformité supérieure à soi.

Globalement, les résultats de cette étude (pour synthèse voir Tableau 18, ci-après) valident l’hypothèse H1A à la fois pour les comportements valorisés ou dévalorisés, autrement dit pour les comportements porteurs de valeur. En effet, ces comportements valorisés et dévalorisés sont prédits par l’attitude et le contrôle comportemental perçu, mais également par les dimensions sociales comme l’image, l’identité et les normes subjectives, en raison de cette attribution de valeur, dont ils sont l’objet. Tout se passe comme si c’était la valeur du comportement qui déterminait, dans la prédiction de celui-ci, l’intervention des variables sociales. Mais il apparait dans le même temps que les comportements neutres sont également prédits par les variables sociales.

Tableau 18 Synthèse des résultats de l’étude 1

Type de mesure des variables sociales Valorisation

du

comportement

Description comportement Score

z

Modèle TCP1 Normes subjectives

Modèle TCP2 Image

Modèle TCP3 Identité personnelle Valorisés 32 Utiliser son clignotant pour indiquer un changement de

direction

1,15 - - 6.0 a

29 Laisser la priorité à droite 0,94 7.4a - 3.5 a

Neutres 16 Suivre scrupuleusement les limitations de vitesse 0,03 - - 2.7 a

15 Rouler sur un long trajet sans faire de pause -0,44 - 13.4 a -

Dévalorisés 10 Emprunter les voies de bus -1,03 4.2 a 7.7 a 19.9 a

3 Stationner sur les places réservées aux personnes à mobilité réduite

-1,36 27.2 a 25.7 a 12.0 a Note. a : pourcentage de variance expliquée de chaque variable sociale