III. Calcul approché d’intégrale
III.1. Calcul approché d’intégrale dans le savoir savant
fonctions élémentaires. D’autres intégrales analogues sont découvertes comme les intégrales de Fresnel
∫
x t dt0
sin 2 ,
∫
x t dt0
cos 2 ou l’intégrale
∫
exxdx.On s’assurera aisément par notre méthode que l’intégrale
∫
exxdx, dont les Géomètres se sont beaucoup occupés, est impossible sous forme finie... (Liouville, cité par Hairer et Wanner, 2000, p. 126)Les mathématiciens sont donc confrontés à de nouvelles fonctions qui doivent être calculées par de nouvelles méthodes. Dans L’analyse au fil de l’histoire, Hairer et Wanner exposent les trois méthodes suivantes : développement en série, calcul numérique, et développement asymptotique.
III.1.1. Développement en série
Regardons ci-dessous un exemple du calcul des intégrales de Fresnel par développement en série présenté dans L’analyse au fil de l’histoire par Hairer et Wanner :
∫
x t dt0
sin 2 =
∫
xt −t +t − dt0
10
2 6 ...
! 5
!
3 = ...
! 5 . 11
! 3 . 7 3
11 7
3 − x + x −
x
∫
x t dt0
cos 2 =
∫
x −t +t dt0
8 4
!...
4
!
1 2 = x – ...
! 4 . 9
! 2 . 5
9
5 + x −
x
Le choix de la valeur 0 pour la borne inférieure de chacune de deux intégrales permet de simplifier le résultat final du calcul, la série entière ∑∞
=1 n
n nx
c ayant pour valeur numérique 0 en x = 0. Cette méthode basée sur le développement de la fonction à intégrer en série entière et sur l’intégration terme à terme de la série dans le domaine de convergence, donne une primitive de la fonction à intégrer sous forme de série entière. L’infinité de termes de cette primitive rend impossible l’usage de la formule de Newton – Leibniz pour calculer exactement l’intégrale de la fonction en question sur un intervalle donné. En revanche, on peut calculer une valeur approchée des intégrales de Fresnel pour une valeur de x donnée en conservant un certain nombre des premiers termes de la primitive et en négligeant le reste, selon la précision souhaitée. Quand on veut augmenter la précision du calcul, on doit augmenter le nombre de termes retenus. Nous présenterons dans le tableau 47 quelques valeurs approchées des intégrales de Fresnel pour x = 1.
Nombre de termes retenus 1 2 3 4 5
Valeur approchée de
∫
10
sint2dt 0,3333 0,3095 0,3179 0, 3165 0,3165
Valeur approchée de
∫
10
cost2dt 1 0,9 0,9046 0,9045 0,9045
Tableau 47. Calcul approché des intégrales de Fresnel pour x = 1
III.1.2. Méthodes numériques
Pour calculer numériquement l’intégrale
∫
ba
dx x
f( ) , on fixe un naturel strictement positif N, on subdivise l’intervalle [a, b] en N sous-intervalles de longueur h =
N a b−
et d’extrémités x0 = a, x1 = a + h, ..., xi = a + ih, ..., xN = b, et on approche sur chaque sous-intervalle [xi, xi+1] la fonction f par des polynômes plus faciles à intégrer. En fonction du degré des polynômes, on a des méthodes numériques différentes :
a. Méthodes des rectangles, méthode du point milieu : Les polynômes ont pour degré 0.
b. Méthodes des trapèzes, méthode des tangentes : Les polynômes ont pour degré 1.
La méthode des trapèzes consiste à approcher sur chaque sous-intervalle [xi, xi+1] la fonction f par la fonction affine passant par deux points (xi, f(xi)), (xi+1, f(xi+1)).
L’intégration se ramène aux calculs d’aires algébriques des trapèzes d’où vient le nom de la méthode. Une somme de Riemann d’une fonction f relativement à une subdivision de [a, b] est également une valeur approchée de b∫
a
dx x
f( ) par la méthode des rectangles.
xi-1 xi xi+1 x
y
y = f(x)
On a :
∫
ba
dx x
f( ) ≈
∑
−=1 + +
0
1)) ( ) ( 2(
N
i
i
i f x
x h f
=
+ + + + − +
2 ) ) (
( ...
) ( ) 2 (
) (
2 1 2 1
0 N
N
x x f
f x
f x x f
h f
L’erreur de calcul est d’autant plus faible que le pas h est petit.
c. Méthode de Simpson : Les polynômes qui approchent la fonction à intégrer ont pour degré 2. La méthode consiste à approcher sur chaque double intervalle [xi, xi+2] la fonction en question par le polynômes d’interpolation de degré 2 passant par 3 points (xi, f(xi)), (xi+1, f(xi+1)), (xi+2, f(xi+2)). La méthode nécessite que le nombre de sous-intervalles N soit pair.
Elle est exacte pour l’intégration des polynômes jusqu’au degré 3 inclus.
x
0x
1x
2x y = f(x)
x
3x
4x
5x
6A
1A
2A
3On a la formule de Simpson suivante pour N pair :
∫b a
dx x f( ) ≈
3
h(f(x0) + 4f(x1) + 2f(x2) + 4f(x3) + 2f(x4) + ... + f(xN))
d. Méthode de Newton-Cotes d’ordre d : La méthode, du nom de Newton et de Roger Cotes (1682 – 1716), est une généralisation des méthodes des trapèzes et de Simpson pour le calcul numérique d'une intégrale.
On approche la fonction par des polynômes d’interpolation de degré d qui coïncident avec f aux d + 1 points équidistants xi, xi+1, ..., xi+d.
Pour d = 1 et d = 2, nous retrouvons les méthodes des trapèzes et de Simpson.
Pour d = 4 et d = 8, nous avons les méthodes de Boole-Villarceau et de Weddle-Hardy.
Pour obtenir un résultat plus précis, on préfère augmenter le nombre de sous-intervalle N plutôt que l’ordre d de la méthode. Toutefois, la non-stabilité et la non-convergence des formules de Newton-Cotes contraignent à n’utiliser que les ordres 1 ou 2.
Le tableau 48 ci-dessous résume la méthode de Newton-Cotes d’ordre 1, 2, 3 et 4.
Ordre Méthode Formule 1 Méthode
des
trapèzes
∫
10
) (
x
x
dx x
f ≈
2
h (f(x0) + f(x1)) 2 Méthode
de
Simpson
∫
20
) (
x
x
dx x
f ≈
3
h (f(x0) + 4f(x1) + f(x2))
3
∫
30
) (
x
x
dx x
f ≈
8
3h (f(x0) + 3f(x1) + 3f(x2) + f(x3)) 4 Méthode
de Boole- Villarceau
∫
40
) (
x
x
dx x
f ≈
45
2h(7f(x0) + 32f(x1) + 12f(x2) + 32f(x3) + 7f(x4))
Tableau 48. Méthode de Newton-Cotes d’ordre 1, 2, 3 et 4
Nous présenterons dans le tableau 49 le calcul numérique de l’intégrale elliptique I =
∫π −
2 0
cos2
96 , 0
1 xdx par la méthode des trapèzes avec six subdivisions différentes de l’intervalle [0, 2π].
N I = 2
∫
π −0
cos2
96 , 0
1 xdx
12 4,1 24 4,201 48 4,202 008 0 96 4,202 008 907 92
192 4,202 008 907 937 800 188 91
384 4,202 008 907 937 800 188 939 832 917 694 747 782 4
Tableau 49. Calcul approché d’une intégrale elliptique par méthode des trapèzes
III.1.3. Développement asymptotique
Alors que le développement en série et les méthodes numériques sont utiles pour des valeurs petites et moyennes de x, la méthode du développement asymptotique, terme dû à Jules Henri Poincaré (1854 – 1912), est bien adaptée pour des grandes valeurs de x.
Cette méthode est également utilisée par Pierre Simon de Laplace (1749 – 1827) en 1812 pour
∫
xe−t dt0
2 et par Cauchy en 1842 pour les intégrales de Fresnel.
Nous présenterons ci-dessous le calcul des intégrales de Fresnel par développement asymptotique.
On a dans l’analyse complexe :
∫
∞ 0cost2dt =
∫
∞0
sint2dt = 2 2 1 π
. On en déduit :
∫
x t dt0
cos 2 = 2 2 1 π
-
∫
∞x
dt t2 cos En intégrant par parties, on a :
-
∫
∞x
dt t2 cos = -
2 1
∫
∞x
dt t t t
cos 2
12
= 2
1 2
1sin x x -
2 1
∫
∞x
dt t t
2 2sin 1 De façon analogue, on a :
-2 1
∫
∞x
dt t t
2 2sin
1 = - 2 13cos 2 2
1 x
x + 2
2 3 . 1
∫
∞x
dt t t
2 4 cos 1 En continuant ainsi on obtient :
∫x t dt
0
cos 2 = 2 2
1 π
+ 2
1 2
1sinx
x - 2 13cos 2 2
1 x
x - 3 15sin 2 2
3 .
1 x
x + 4 17cos 2 2
5 . 3 .
1 x
x + 5 19sin 2
2 7 . 5 . 3 .
1 x
x - ...
∫x
dt t
0
sin 2 = 2 2 1 π -
2
1 2
1cos
x x - 2 13sin 2 2
1 x
x + 3 15cos 2 2
3 .
1 x
x + 4 17 sin 2 2
5 . 3 .
1 x
x - 5 19 cos 2
2 7 . 5 . 3 .
1 x
x - ...
L’intégrale, aussi donnée sous forme d’intégrale dépendant de la borne supérieure, est écrite sous la forme d’une infinité d’intégrations successives. Ce processus de calcul donne une série infinie comme primitive de la fonction à intégrer. Le calcul d’une valeur approchée de l’intégrale se ramène au calcul d’une valeur approchée d’une série de fonctions en un point donné.
III.1.4. Conclusion sur la place du calcul approché d’intégrale dans le savoir savant Les méthodes de calcul approché d’intégrale peuvent se caractériser par la présence ou l’absence du calcul de primitive. Le développement en série et le développement asymptotique appartiennent à la première catégorie et les méthodes numériques à la seconde.
Le développement en série et le développement asymptotique donnent une primitive de la fonction à intégrer, exprimée par une série infinie. On peut obtenir une valeur approchée de l’intégrale en traitant des premiers termes de la série. Pour augmenter la précision du calcul, on doit augmenter le nombre de termes traités.
Les méthodes numériques ne donnent aucune primitive de la fonction à intégrer. Elles approchent cette dernière par une fonction plus simple à intégrer sur chaque sous- intervalle. Pour augmenter la précision du calcul, on doit augmenter le nombre de sous- intervalles.