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Dans l’institution française, 5 des 12 enseignants jugent la difficulté d’une intégrale par l’apparence « trompeuse » de l’expression algébrique de la fonction intégrante, non par les techniques d’intégration requises.

Pour trois intégrales e + dx x

x

1

ln

1 , ∫ +

e x x

e dx e

11 ,

2

ln

e

ex x

dx , « la présentation en quotient empêche de nombreux élèves de percevoir les formes uu ». Pour l’intégrale e x

1

ln ,

« penser à une intégration par parties quand il y a une seule fonction apparente n’est pas évident ». Ces intégrales ne sont pas considérées comme les intégrales difficiles dans l’institution vietnamienne car les techniques d’intégration nécessaires sont l’objet d’un apprêtage par les enseignants (voir tableau 36).

Par ailleurs, 14 des 44 enseignants vietnamiens jugent que l’intégrale d’une fonction rationnelle quelconque est une intégrale difficile car la décomposition d’une fonction rationnelle en éléments simples est totalement à la charge de l’élève.

Soit à calculer I = +

2

1 4

2

1

1 dx

x

x . L’enseignant attend que l’élève écrive :

4 2

1 1

x x +

= 2 2 2

2

2 ) 1 (

1

x x

x

+

=

) 1 2 )(

1 2 (

1

2 2

2

+

+ +

x x

x x

x =

1

2+ 2 +

+ x x

B

Ax +

1

2 2 +

+ x x

D Cx

et calcule la valeur numérique de A, B, C, D (en résolvant un système d’équations) pour obtenir :

4 2

1 1

x x +

= 



+

+ +

+

1 2

2 2 1 2

2 2 2 2

1

2

2 x x

x x

x x

En France, la forme générale :

4 2

1 1

x x +

=

1

2 + 2 +

+ x x

B

Ax +

1

2 2 +

+ x x

D Cx

est à la charge de l’institution. L’élève n’a qu’à calculer A, B, C, D. C’est pourquoi, l’intégrale de fonctions rationnelles n’est pas jugée difficile dans l’institution française.

- L’aire et la primitive sont liées indirectement par l’intermédiaire de l’intégrale.

En particulier, l’ostensif ∫ permet de considérer le calcul de primitive comme celui d’une intégrale. L’intégrale indéfinie (les primitives) devient institutionnellement une intégrale sans bornes et vice-versa l’intégrale devient une intégrale indéfinie avec bornes. Ceci incite-t-il les élèves vietnamiens à assimiler les notions de primitive et d’intégrale à une seule notion ? Nous tenterons de répondre à cette question dans la partie C, à travers un questionnaire pour élève.

Dans l’apprêtage du savoir, les techniques d’intégration que les enseignants français cherchent à mettre en place sont conformes aux programmes. Par contre, les enseignants vietnamiens, sous les contraintes du savoir à enseigner, du baccalauréat et notamment du concours d’entrée universitaire, tout en conservant leurs relatives libertés, tentent d’introduire des techniques d’intégration hors du programme comme l’intégration de fonctions rationnelles et irrationnelles, etc.

La solution « géométrique » (mobilisant l’interprétation en terme d’aire de l’intégrale) est acceptée mais pas toujours privilégiée dans l’institution française. La bonne vie de cette solution nécessite la présence d’un graphique dans le texte de l’exercice. Par contre, la solution « géométrique » est refusée dans l’institution vietnamienne, même si elle est optimale. L’institution lui impose des contraintes dont la solution « analytique » est dispensée.

Quelle est la nature épistémologique des deux rapports institutionnels différents à l’objet de savoir « intégrale » ? Quel est l’écart entre le savoir de référence et le savoir à enseigner dans EMS en France et au Vietnam ? Quels liens entre aire, primitive et intégrale s’établissent dans l’émergence historique de la notion d’intégrale ?

Nous chercherons des éléments de réponses à ces questions dans le chapitre prochain.

Chapitre B3.

Une enquête épistémologique sur l’objet « intégrale » pour un retour sur l’analyse institutionnelle

Les analyses effectuées dans les chapitres précédents ont mis en évidence le rapport institutionnel à l’objet de savoir intégrale dans l’enseignement des mathématiques au Vietnam et en France. Nous en rappelons ici les aspects principaux :

1. Méthodes d’intégration. Outre l’intégration par parties, méthode commune aux deux institutions, chacune de ces dernières présente une méthode d’intégration différente : l’une expose le changement de variable, et l’autre la primitivation.

Les techniques d’intégration apprêtées en France sont identiques à celles à enseigner. Par contre, sous les contraintes du savoir à enseigner, du baccalauréat et du concours d’entrée universitaire, les enseignants vietnamiens tentent de mettre en place des techniques d’intégration hors du programme.

2. Différentiation et ostensif dx. Au Vietnam, la notion de différentielle et l’ostensif dx permettent d’effectuer le changement de variable comme substitution littérale formelle sans se référer aux formules de changement de variable présentes dans le cours. De plus, le manuel de la période 2000 – 2006 manipule l’ostensif dx pour effectuer le changement de variable implicite sans avoir besoin de nouvelle variable. En France, la notion de différentielle et le changement de variable sont hors des programmes. Ce dernier est remplacé par la primitivation.

3. Calcul approché. Dans les programmes de la période 1980 – 2002 en France, l’approximation d’intégrale est effectuée par calcul numérique. Elle est aussi présente dans la partie exercices des manuels de la période 2002 – 2006 par encadrement numérique d’intégrale. C’est la seule trace de l’approximation d’intégrale dans les épreuves du baccalauréat français des trois périodes. Le calcul approché d’intégrale est toujours absent au Vietnam.

4. Les liens établis entre aire, primitive, intégrale dans la partie exercices sont quasiment inchangés dans chacune de deux institutions pendant les trois périodes.

Ces liens influence fortement le statut de l’interprétation géométrique de l’intégrale dans chacune de deux institutions. En France, l’interprétation géométrique de l’intégrale est institutionnalisée, y compris dans les solutions attendues dans des tâches de calcul d’intégrale et dans l’encadrement numérique des intégrales. Au Vietnam, elle est institutionnellement marginalisée.

En France, dans les deux dernières périodes, l’institution a l’intention de séparer le calcul de primitive du calcul d’intégrale. Le calcul d’une primitive quelconque d’une fonction est effectué sans l’ostensif ∫. En revanche, l’intégrale dépendant de la borne supérieure sert à calculer la primitive s’annulant en un point donné d’une fonction et à générer de nouvelles fonctions comme les fonctions exponentielle et logarithmique. Au Vietnam, dans la dernière période, primitive et intégrale sont indifférenciées dans la praxis en raison de la présence de l’ostensif commun ∫. Étant présente dans le logos mais absente de la praxis, l’intégrale dépendant de la borne supérieure ne sert ni à générer de nouvelles fonctions, ni à calculer la primitive s’annulant en un point donné.

Le lien direct entre aire et primitive n’est établi dans aucune des deux institutions.

5. Baccalauréat en France et au Vietnam. Concours d’entrée universitaire au Vietnam.

Les types de tâches présents dans le baccalauréat des deux institutions concernent un même genre de tâches « Calculer ». Trois objets fondamentaux sont concernés par ces calculs : primitive, intégrale, aire. Dans les épreuves du baccalauréat français, ces calculs sont susceptibles de servir à une étude de suites, d’équations différentielles ou de probabilité. Ils ne le sont jamais dans les épreuves du baccalauréat vietnamien.

Il y a un écart significatif entre les techniques d’intégration exigées au concours d’entrée universitaire au Vietnam et celles dans le manuel. Cet écart exige un véritable déplacement du topos de l’élève de l’EMS vers celui du candidat du concours auquel participent les cours supplémentaires préparant au concours.

Ceci nous mène à formuler de nouvelles questions, de nature épistémologique, qui nous permettent d’interroger l’écart entre un savoir de référence et le savoir à enseigner dans EMS en France et au Vietnam :

1. Comment et pourquoi apparaît dans l’histoire des mathématiques chacune des deux méthodes d’intégration « concurrentes » : changement de variable et primitivation ? Quelles organisations mathématiques sont attachées à l’une ou à l’autre ? Comment ces organisations sont-elles présentes dans le savoir à enseigner ?

2. Quels sont les significations et les valences instrumentale et sémiotique du dx dans la notation

b

a

dx x

f( ) que dans les ouvrages universitaires de référence ? Comment sont-elles transposées dans les manuels des EMS en France et au Vietnam ?

3. Quels liens entre aire, primitive et intégrale s’établissent dans l’émergence historique de la notion d’intégrale ? Comment ces liens sont-ils transformés par leur vie institutionnelle dans EMS en France et au Vietnam ?

4. Quel modèle pour une organisation mathématique de référence de la notion d’intégrale (de Riemann) ? Quel écart entre ce modèle et les organisations mathématiques à enseigner dans EMS en France et au Vietnam ?

Pour chercher des éléments de réponses à ces questions, nous allons effectuer une enquête épistémologique sur l’objet intégrale en nous référant aux ouvrages suivants :

Ouvrages sur l’histoire des mathématiques

1. Dahan-Dalmedico A. et Peiffer J. (1986), Une histoire des mathématiques, Éditions du Seuil, Paris

2. Hairer E. et Wanner G. (2000), L’analyse au fil de l’histoire, Springer 3. Laroche F. (2003), Promenades mathématiques, Ellipses, Paris

4. Pier J.-P. (1996), Histoire de l’intégration, Masson, Paris Ouvrages mathématiques

1. Bourbaki N. (1949), Éléments de mathématiques, Livre IV, Éditions Hermann et Compagnie, Paris.

2. Fikhtengolz G. M. (1968), Éléments d’analyse mathématique, Tome I, Éditions Hayĸa,

3. Rudin W. (1976), Principes d’analyse mathématique, McGraw-Hill, traduction en français (1995), Édiscience internationale, Paris.

4. Lang S. (1964), A first cours in calculus, Addison-Wesley, réédition (2000), Springer.