• Nenhum resultado encontrado

Chapitre 4 Les activités narratives et la diversité des domaines d'application domaines d'application

4.4 Discussion et conclusion de l'étude

présenter les choses était volontaire afin d'en faciliter la lisibilité. Cependant, ce panorama est beaucoup plus mouvant et itératif, que dans notre description ci-dessus. Nous avons identifié l'existence d'itérations au sein de certaines formes d'activité, autrement dit certaines activités semblent revenir au cours du temps sans être exclusivement confinées à un moment donné. De plus, nous avons identifié des itérations au sein des ensembles d'activité instrumentée de médiation pragmatique et épistémique :

• Il peut exister une itération du terrain permettant ainsi une alternance entre un mouvement d'ouverture, d'élargissement du champ de vision provoqué par la confrontation au terrain, à l'imprévisible (imprégnation) et un mouvement de fermeture, de synthèse, de digestion des éléments observés, vécus (sélection, montage). Certaines narrations s'inscrivent donc dans le temps incluant des allers-retours sur le terrain, afin d'approfondir, de compléter le recueil sur une thématique de manière appropriée. Ceci concerne principalement les ethnologues et les ergonomes.

• Au même titre, la prise de contact peut également s'inscrire dans des boucles itératives, à partir du moment où le participant effectue des allers et retours sur le terrain, il sera amené à recroiser, réinterroger des personnes rencontrées au préalable. Cela concerne donc les ergonomes, les ethnologues mais également les journalistes.

• De même l'évocation que nous avons décrit à T3, peut également pour certains (essentiellement passionnés, ethnologue) avoir lieu au cours du déplacement à T2 pendant le recueil asynchrone.

• La collaboration n'échappe évidemment pas non plus aux itérations, que ce soit à T1, T2 ou T3, les participants peuvent confronter leurs documents sources aux personnes rencontrées au cours du déplacement, mais également en amont ou en aval, à des spécialistes. Plus ponctuellement, il existe des itérations fortes à T3 entre la collaboration et la production. A ce moment là ce sont les productions intermédiaires que le participant utilise comme support d'échange.

• Bien que nous les ayons déjà présentées comme entremêlées, rappelons que la plupart du temps, les ensembles d'activités instrumentées pragmatiques et épistémiques (qu'elles soient réflexive, interpersonnelles ou liées à la narration) à un moment donné sont inextricables chez les sujets, et plus encore lorsque nous appréhendons ces activités par le bais d'entretiens sans observation de l'activité réelle.

Il était important de souligner cette caractéristique, en effet la présence de ces itérations rend ce panorama plus dynamique et réaliste, enfin les fortes intrications des ensembles d'activité instrumentés à médiation pragmatique et épistémique montrent que les composantes épistémiques et pragmatiques sont nécessairement co-existantes, et difficilement distinguables dans les activités narratives instrumentées.

discriminantes entre profil. La durée du déplacement semble prédominante sur l'organisation de ces ensembles d'activité. Il existerait des cycles longs et des cycles courts. Enfin selon les profils, les objets de l'activité (se déplacer pour découvrir une nouvelle contrée, ou se déplacer pour produire une narration), la place laissée à l'imprégnation, la prise de contact, le recueil et ensuite la rédaction et l'organisation varie. A posteriori, les profils appréhendant un terrain avec un questionnement de fond auront plus d'activité de sélection et de recherche d'information. Cette étude nous apporte quelques éléments supplémentaires vis-à-vis de l'état de l'art : nous avons notamment identifié des caractéristiques importantes telles que l'efficacité des instruments de recueil, le rôle de ces instruments dans la relation interpersonnelle et enfin, les éventuelles complémentarités, redondances entre les activités synchrones et asynchrones ainsi que l'importance de la notion d'esthétisme pour les touristes lambda. Ceux-ci présentent une activité très stéréotypée, avec peu de recherche d'information, peu de recueil. Cependant une dimension fondamentale parce que soulignée à plusieurs reprises serait la nécessité d'un outil de partage de leurs narrations de vacances esthétique et personnalisable. La condition sine qua non de partage serait donc de pouvoir afficher, montrer aux proches un ensemble très attirant et esthétique, cela s'inscrit dans la logique des pages personnelles (Beaudouin et Velkovska, 1999 ; Allard et Vandenberghe, 2003). Ces modes de partage sont une présentation publique de soi, les participants désirent donc afficher une image d'eux soignée et valorisante. De plus, concernant les activités narratives post-mobiles, nous retrouvons l'importance de l'étalage du recueil, déjà soulignée dans la littérature (Bationo, 2003 ; O'hara et al., 2002). Cependant à ce stade, il s'avère encore difficile d'établir un lien entre les concepts de la narratologie et l'activité narrative comme nous avons proposé de le faire au cours de ce travail. Enfin, ce panorama nous a permis de mettre en évidence des ensembles d'instruments tels que les instruments de recueil, d'exploration, mémoriels, source etc.… . Si nous nous centrons sur les instruments de recueil, nous avons repéré qu'ils permettent de recueillir des éléments de différentes nature (environnement, impression, tout venant, entretiens….). Nous sommes donc maintenant en mesure de nous demander s'il existerait des instruments plus fins à mettre en évidence et transverses aux différents médias. Nous chercherons donc dans les prochaines études à les décrire plus finement en évitant l'impasse de la recherche d'actions invariantes universelles à tous les sujets et transposables en automatismes. A ce titre, Marshall (1998) à travers son étude a bien mis en évidence une hétérogénéité importante dans les actions d'annotations d'ouvrages, et donc l'impossibilité d'en faire émerger des formes invariantes. Par ailleurs, nous avons mis en évidence la présence facultative d'instruments supportant l'imprégnation des narrateurs, ainsi que le rôle important des instruments mémoriels. Ces deux types d'instruments présentent la caractéristique de médiatiser l'activité du sujet avec soi même, autrement dit le sujet par le biais de ces instruments, dialogue avec lui-même, prend connaissance de lui-même, se gère et se transforme. Cependant, ces propriétés réflexives peuvent également être imputées aux instruments de recueil asynchrone, notamment lorsque le narrateur utilise son carnet de notes comme instrument d'acculturation. Les deux études suivantes nous permettront d'affiner la présence de cette médiation réflexive au sein des activités de recueil instrumentées.

Les résultats de cette étude, considérés de manière isolée sont donc limités, cependant, ils ont le mérite de faire émerger des questionnements : A quoi correspondent ces ensembles d'activité mis en évidence ? Seraient-ils des familles d'activité ? Des classes de situation ? N'ayant pu approfondir l'analyse, de par la méthodologie employée, nous ne pouvons préciser les actions, l'occurrence d'apparition des actions et de ces ensembles d'activité. Comment différencier les différents niveaux de l’activité, des objets de l’activité, des instruments, des classes de situations, et de l'activité… ? A priori, le statut de tous ces éléments nous semble versatile, ces éléments changent de statut, se

modifient, s'intercalent au long cours. De plus, l'analyse des entretiens nous renvoyait constamment à un certain nombre d'interrogations : Notamment comment attraper les objets de l'activité ? Quelle méthodologie nous y aiderait ? Comment faire émerger les divers objets de l’activité et leur évolution au cours du temps ? Quelle est la légitimité du chercheur pour présenter l'objet de l'activité ? S'il n'est pas légitime, comment interroger les sujets ? En effet, dans la psychologie russe (Barabanschikhov, 2000), il existe les objets de l’activité qui font référence à une réalité objective (objekt), indépendant du sujet percevant et l'objet de l'activité (premyet) comme saisie subjective de l'objet, comme engagement. Concernant les activités narratives, nous serons amenée à explorer l'objet de l'activité premyet. Cependant, d'autres différenciations ont été effectuées, Forzy (2003) distingue les objets de l'activité sur lesquels on agit (espace de travail), des objets de l'activité en terme de finalités (objets de l'activité psychologique). Face à ces différentes conceptualisations, et ces distinctions, nous nous sommes tout de même heurtée à la difficulté de décrire finement les objets de l'activité des activités narratives ainsi que les articulations possibles au cours du temps. Ce premier jet nous a cependant permis de réaliser qu'à chaque moment, l'objet de l'activité est différent, mais laisse deux questions primordiales en suspens : Quelle adéquation possible entre un objet de l'activité des activités narratives qui se transforme de moment à moment avec la définition de l'objet de l'activité dans le cadre des théories de l'activité (Nardi, 1996) et comment systématiser cette analyse ?

En effet, pour rappel, Nardi (1996) précise que l'objet de l'activité peut être transformé au cours de l'activité mais ne change pas de moment à moment. De plus, elle souligne que dans les théories de l'activité, l'objet de l'activité est le début de l'analyse car il permet de distinguer une activité d'une autre. N'ayant pas accès à ce point de départ pour appréhender les activités narratives, cette étude a fait émerger l'importance de construire une grille de lecture opératoire pour rationnaliser, mettre de l'ordre dans les situations complexes et riches rencontrées. Plusieurs raisons sont à l'origine de la complexité de ces situations d'activité narrative : les percolations des domaines professionnels et privés, ainsi que la nature sémiotique de ce type d'activité narrative qui ne nous permet pas a priori de savoir ce sur quoi agit le sujet, contrairement à certaines situations de travail physique, mais encore les contrastes temporels entre la durée totale de l'activité narrative qui peut être longue et la durée plus courte d'un recueil très ponctuel. Il en ressort un besoin d'observer des activités narratives sur la longueur mais également des activités narratives dans un terme plus court pour comprendre ce qui se joue au niveau du temps. Il s'est donc avéré nécessaire de construire une méthodologie fine pour appréhender tout cela. C'est ce que nous mettrons en œuvre dans les deux études suivantes.

De plus, ce panorama nous a permis de matricer les activités narratives, ce qui irriguera de manière non négligeable les études suivantes. D'une part ce panorama a pour vocation de situer les résultats de prochaines études, et d'autres part les études ultérieures nous permettront de préciser, d'enrichir, d'affiner l'organisation des grands ensembles d'activité mis en évidence dans ce chapitre. Nous résumerons donc les apports réciproques de chaque étude dans une section de discussion générale. En effet, nous considérons que la plus value de cette étude se trouve dans une lecture complémentaire de ce panorama et des deux prochaines études.

Au cours des deux prochaines études, nous zoomerons plus précisément sur les ensembles d'activité du recueil synchrone, recueil asynchrone mais aussi recherche d'information, transcription et sélection, production, montage. Cependant, nous n'évacuerons pas les autres ensembles d'activité qui devraient logiquement apparaître ponctuellement, et/ou venir s'entremêler plus précisément à des classes de situations particulières. Or, nous pensons que cette première étude sera une ressource pour mieux comprendre les différentes dimensions non prédominantes au cours des activités narratives mobiles et

post-mobiles, mais qui ont une influence certainement non négligeable sur l'organisation plus précise des activités narratives.

Chapitre 5 Une étude de cas : les activités