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L’actuelle popularité de l’approche DFT est relativement récente; W. Kohn ayant obtenu le Prix Nobel pour ses travaux sur la Théorie de la Fonctionnelle de la Densité en 1998. Les premiers codes commerciaux (DeMon [36], DGauss [37] et DMol [38]) sont apparus seulement au début des années 90 alors même que le concept de la DFT était tout au plus considéré comme une simple référence dans les manuels de chimie quantique de l’époque. Au milieu des années 90, la DFT a connu sa véritable ascension et plusieurs applications dans le domaine de la chimie bio-inorganique ont vu le jour. Dans les années 2000, les calculs DFT sur des systèmes possédant des métaux de transition ont régné en maître notamment dans les journaux à publications scientifiques tels que les très connus Journal of the American Chemical Society, Angewandte Chemie et bien d’autres encore. Très peu de temps après, un certain nombre de groupes de chercheurs expérimentaux se sont intéressés de près aux possibilités que pouvaient représenter les calculs théoriques de type DFT et se sont investis dans des collaborations en ce sens. De nos jours, l’approche DFT s’est notablement démocratisée et elle est maintenant perçue comme un outil performant accessible à tous.

Cependant, aux yeux de certains puristes, la DFT, étant une méthode dite "mono- déterminantale", elle ne peut a priori pas décrire correctement les systèmes multi- configurationnels tels que les centres métallique avec couplage de spin, les complexes formés de ligands dits "non-innocents" - pouvant jouer un rôle dans les processus rédox se produisant au sein de ces composés - ou encore les états de transition. En pratique, les calculs de type

"spin non-restreint" - incluant, si nécessaire, l’approche Broken Symmetry de Noodleman qui sera décrite ultérieurement - permet de réaliser d’excellentes études sur de tels systèmes.

Actuellement, les méthodes ab initio Hartree-Fock et Post-Hartree-Fock et DFT co-existent et sont même complémentaires l’une de l’autre comme dans le domaine de la chimie organique.

A contrario, il est à noter que l’approche ab initio est relativement absente en chimie bio- inorganique - la raison étant notamment la limitation que représente la taille des systèmes possédant un (des) centre(s) métallique à couche ouverte, communément étudiés dans ce domaine. Cette situation tend, tout de même, à changer comme nous allons le voir un peu plus loin dans ce paragraphe [39].

De façon générale, il est maintenant usuel d’intégrer des calculs de chimie quantique au sein de publications dans les domaines de recherche appliquée. Ces calculs peuvent servir soit à valider les conclusions établies à l’issue de l’analyse des données expérimentales soit à exclure les possibilités qui ont été proposées au préalable. Ainsi, dans le domaine de la chimie bio-inorganique, il devient crucial de pouvoir établir des corrélations entre les données issues de l’expérience et celles issues de calculs théoriques, et ce, en dépit de la complexité des structures électroniques provenant des systèmes ainsi étudiés ou des limites de précision intrinsèques à toute approche théorique. Il faut donc tenter de faire correspondre les calculs avec les contraintes bien connues de l’expérience et, compte tenu du large panel de données spectroscopiques accumulées dans le domaine précité, cela va se révéler très enrichissant pour le chimiste théoricien qui va pouvoir juger de la validité de sa méthode de calcul.

Chapitre I Chimie théorique : Concepts et Méthodes 29 Cette vision des choses peut s’appliquer aux points suivants [40]:

Géométries

Les méthodes DFT permettent d’effectuer une bonne estimation de la structure des systèmes bio-inorganiques. Les bases de type DZ plus polarisation pour le ligand et de type TZ plus un jeu de fonctions p (voir même un jeu de fonctions f) pour le(s) site(s) métallique(s) de tels composés sont recommandées pour obtenir des résultats de bonne précision et une convergence rapide des calculs DFT ainsi entrepris. Les programmes ADF [29-33] ou ORCA [41] sont actuellement parmi les plus performants pour optimiser les géométries. La fonctionnelle BP86 est celle qui semble donner les résultats les plus intéressants comparativement à la fonctionnelle B3LYP [22-23].

Energies totales

L’évaluation de cette observable dans les systèmes contenant des métaux de transition est rendue avec une assez bonne précision à l’aide de calculs DFT associés aux fonctionnelles hybrides telles que B3LYP. En dehors de rares exceptions, l’énergie totale calculée diffère entre 3 et 5 kcal/mol de la valeur attendue par l’expérience. Cette corrélation entre calculs et expérience pourrait être encore améliorée en diminuant la contribution d’échange exact qui est présent au sein de la fonctionnelle B3LYP [42].

Il est à noter que les calculs DFT sont toujours équivalents à des calculs réalisés dans le vide. Ainsi, si l’on souhaite modéliser l’interaction du système étudié avec son environnement, relatif à la protéine ou au solvant par exemple [43], les calculs couplant mécanique quantique et mécanique moléculaire (QM /MM) ou encore le modèle COSMO [44] implémenté au sein du programme ADF sont parmi les plus adaptés pour ce type de démarche, comme nous le verrons dans la suite de ce manuscrit.

Etats de spin

Le traitement de ce point semble le plus délicat. En effet, les erreurs issues de calculs DFT sont assez substantielles et peuvent excéder les 10 kcal/mol. De manière générale, les calculs effectués avec des fonctionnelles GGA ont tendance à favoriser les états de bas spin. A contrario, les méthodes ab initio favorisent les états de haut spin en raison du déséquilibre relatif à la prise en compte des trous d’échange et de corrélation. Ainsi, le meilleur choix pour ce type de calculs semble être celui des fonctionnelles hybrides sachant, de plus, que le gap existant entre les états de haut spin et de bas spin est lui-même fonction de la fraction d’échange introduite au sein de la fonctionnelle utilisée [43].

Couplage d’échange

La prise en compte du couplage d’échange est un enjeu majeur pour les systèmes contenant des sites métalliques interagissant magnétiquement. La méthode DFT associée d'une part au concept de Broken Symmetry développé par Noodleman et collaborateurs et d'autre part aux fonctionnelles hybrides est l’approche qui donne actuellement les meilleurs résultats. La problématique du calcul de la constante d’échange étant un des points-clé de ce travail de thèse, nous ne disserterons pas davantage sur cette question pour le moment.

30 Chapitre I Chimie théorique : Concepts et Méthodes

Propriétés électroniques

Les propriétés spectroscopiques de l’état fondamental étant intrinsèquement liées à la seule densité électronique, l’approche DFT apparaît comme la méthode la plus naturelle pour ce type de modélisation. Parmi les observables accessibles par des calculs DFT, nous pouvons citer le déplacement isomérique et l’éclatement quadrupolaire issus tous deux de la spectroscopie Mössbauer, méthode de choix pour la caractérisation de complexes de fer. Actuellement, les prédictions relatives à l’éclatement quadrupolaire ne diffèrent que de quelques dizièmes de mm/s (≈ 0.3 mm/s) des données expérimentales tandis que celles concernant le déplacement isomérique sont précises à 0.1 mm/s. Ceci explique que de nombreux groupes soient impliqués dans le calcul des paramètres Mössbauer de systèmes bio-inorganiques parmi lesquels Noodleman et collaborateurs ou encore Neese et collaborateurs.

Propriétés Magnétiques

La modélisation des paramètres relatifs à ce type de propriétés requiert plus de finesse que précédemment. Parmi ceux-ci, le tenseur g~ et le couplage hyperfin sont les deux principales observables issues de la spectroscopie RPE, méthode de choix pour la caractérisation d’espèces couplées magnétiquement. Ces deux paramètres sont, en première approximation, liés à l’interaction des spins électroniques et/ou nucléaires avec un champ magnétique. Les prédictions effectuées grâce à des calculs DFT se sont révélées très concluantes dans le cas des radicaux organiques [45-46] et il est possible, pour de nombreux cas, d’avoir un bon accord entre la théorie et l’expérience sur une fenêtre spectrale relativement large. Cependant, il faut noter la relative difficulté à modéliser ces paramètres dans leur intégralité. Cela se révèle quelque peu difficile, notamment dans le cas des complexes dont le site métallique est à couche ouverte. Ainsi, des calculs DFT associés à des fonctionnelles hybrides ont tendance à surestimer le facteur g même si ces fonctionnelles donnent de meilleurs résultats que les GGA ou les LDA usuelles. De la même manière, le couplage hyperfin issu du centre métallique est une propriété particulièrement difficile à calculer avec une bonne précision, la plupart des fonctionnelles utilisées habituellement surestimant la polarisation de spin du cœur métallique. De plus, il faut différencier plusieurs contributions de nature isotropes et anisotropes et si l’on est actuellement capable prédire correctement les contributions anisotropes, il en est clairement autrement pour celles qui sont de nature isotrope.

Il parait donc difficile d’affirmer que l’intégralité de la description physique de la structure électronique de complexes métallique à l’aide de calculs DFT soit modélisable.

Cette modélisation constituera également un des points-clé de ce travail de thèse.

Propriétés Optiques

De manière usuelle, la méthode TD-DFT est la plus adaptée à ce type de modélisation, notamment pour ce qui du calcul des simples excitations au sein de systèmes à couche fermée dont la déviation vis-à-vis des données expérimentales est inférieure au millier de cm-1. La situation est très différente en ce qui concerne le traitement des systèmes à couche ouverte. La principale raison réside dans le fait que la TD-DFT est liée à une approximation adiabatique et ne permet donc pas de prendre en compte la relaxation électronique au sein de tels composés.

Chapitre I Chimie théorique : Concepts et Méthodes 31 Les alternatives à cette méthode sont nommées Delta-SCF et approche de l’état de

transition de Slater et correspondent aux techniques que nous avons notamment utilisées au cours de ce travail.

La méthode Delta-SCF correspond à la différence d'énergie de deux calculs SCF relatifs aux états suivants :

un premier état correspondant à l'état fondamental du système;

un second état issu de la relaxation de l'état fondamental du système étudié et correspondant à la promotion d'un électron vers un niveau orbitalaire vacant.

Ces deux états pouvant être respectivement décrits par un seul déterminant, la simple soustraction des énergies orbitalaires de ces deux états permet d'accéder à l'énergie d'excitation monoélectronique ainsi décrite.

Alternativement à l'approche Delta-SCF, on trouve la méthode de l'état de transition de Slater [47]. Celle-ci est basée sur le calcul d'un état du système pour lequel le niveau initial et le niveau final engagés dans une promotion monoélectronique sont peuplés par un demi électron chacun. La différence d'énergie orbitalaire entre ces deux niveaux partiellement occupés permet d'évaluer l'énergie d'excitation monoélectronique considérée.

Considérons maintenant les trois schémas orbitalaires suivants :

(a) E

1

, n

1

E

2

, n

2

E

1

’, n

1

E

2

’, n

2

(b) (c)

E

1

, n

1

E

2

, n

2

Figure 1.B.1 : Etats orbitalaires du problème

L'état (a) est l'état fondamental (initial) d'énergie E avec n1=1 et n2=0; l'état (b) est l'état excité (final) d'énergie E' avec n1'=0 et n2'=1 et l'état (c) est l'état de Slater avec

2

1 n

n = =0,5.

La méthode de l'état de transition de Slater consiste à développer l'énergie totale du système considéré en une série de Taylor sur les occupations orbitalaires. L'énergie totale associée à la configuration ni s'écrit comme suit [47] :

( )

= +

∑ (

)

+

∑∑ (

) (

)

+

i i j

j j i i ij i

i i

i E n n n n ...

2 n 1 n E E

n

E (1.B.27)

32 Chapitre I Chimie théorique : Concepts et Méthodes Dans l'équation 1.B.27, E correspond à l'énergie totale lorsque les occupations sont

i

i n

n = , les termes E sont les dérivées premières de l'énergie identifiées comme les i énergies des orbitales moléculaires du système et les termes Eijsont les dérivées secondes de l'énergie. L'énergie totale de la configuration ni' sera donnée par le même développement en série de Taylor que celui de l'équation 1.B.27.

Dans le cas considéré en figure 1.B.1, les énergies totales de l'état fondamental (initial) et de l'état excité (final) s'écrivent :

12 2

1 E

8 E 1 2 E 1 2 E 1

E= + − − et ' 1 2 E12

8 E 1 2 E 1 2 E 1

E = − + − (1.B.28)

La différence d'énergie entre ces deux états est alors donnée par :

1 2

' E E E

E − = − (1.B.29)

Cette équation montre que la méthode de l'état de transition de Slater permet le calcul des énergies d'excitations monoélectroniques au moyen d'un état artificiel correspondant au peuplement de l'état initial et de l'état final par un demi-électron chacun.

Les deux approches que nous venons de décrire étaient notablement utilisées avant l’invention de la TD-DFT mais elles possèdent aussi certains inconvénients. Tout d’abord, il faut noter que ce ne sont pas des méthodes générales dans le sens où il n’est pas toujours possible de converger tous les états électroniques qui nous intéressent. Ce sont, de plus, des techniques laborieuses à mettre en oeuvre car elles requièrent un certain nombre de calculs itératifs de type SCF et l’orthogonalité des états excités vis-à-vis de l’état fondamental n’est pas garantie. Par ailleurs, les intensités des transitions optiques ne sont pas accessibles avec une approche Delta-SCF et les états excités qui sont dégénérés seront difficiles à traiter avec ce type de méthodologie. Mais, de façon générale, ces deux approches se révèlent très utiles lorsque la relaxation électronique au sein des systèmes étudiés est importante et dans la majorité des autres cas, la TD-DFT est la technique la plus adaptée. Il a également été démontré que l’association de méthodes ab initio comme CASPT2 avec les méthodes DFT pouvait être pertinente.

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