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1.3 - L’antériorité des collectivités en matière de dispositifs de pilotage

trois champs aux logiques différentes » (Lorrain, 1991 : 466). On peut, à partir de cette grille de lecture, interpréter le développement du managérialisme public local comme le reflet de la montée en puissance de la fonction de production des collectivités locales. Mais, en retour, on peut considérer que les rationalités politiques et territoriales viennent pondérer la rationalité managériale par delà la force du discours entrepreneurial.

Au total, si les termes précis du NPM étaient, de façon générale, irrecevables en France durant les années 1980, les réformes décentralisatrices amorcées dans les années 1970 ont conduit à une intégration progressive des outils de gestion inspiré du secteur privé, qui ont par la suite été consacrés au niveau de l’Etat. L’exemple de la LOLF est à cet égard révélateur puisqu’

une grande partie des dispositions qu’elle prévoit sont depuis longtemps applicables aux collectivités territoriales.

- En premier lieu, les collectivités locales doivent mettre en place un débat d’orientation budgétaire (DOB). Celui-ci constitue une étape importante dans le cycle budgétaire annuel des collectivités locales. Imposé aux départements depuis la loi du 2 mars 1982, le DOB est devenu obligatoire pour les régions et les communes de plus de 3 500 habitants depuis la loi Administration Territoriale de la République (ATR) du 6 février 1992.

Le DOB est obligatoire et constitue une formalité substantielle dans la procédure d’adoption du budget : une délibération sur le budget non précédée de ce débat est entachée d’illégalité et peut entraîner l’annulation du budget. A l’inverse, la LOLF n’a institutionnalisé qu’un DOB facultatif pour l’État, dont l’absence n’empêche pas la discussion des projets de lois de finances et n’entache pas d’irrégularité leur procédure d’examen.

- En deuxième lieu, les modalités offertes au niveau du vote des budgets comportent déjà une certaine souplesse dans l’utilisation des crédits. Le CGCT prévoit pour les collectivités territoriales que les crédits sont votés par chapitre. Le vote des crédits par chapitre confère à l’exécutif local une certaine liberté d’action. Si l’exécutif est limité au niveau du chapitre, il reste libre au sein du même chapitre. Il peut procéder à des virements de crédits à l’intérieur du même chapitre. De plus, il existe un cas particulier où les crédits peuvent être utilisés encore plus librement : la procédure des dépenses imprévues autorise, dans certaines limites, l’exécutif à effectuer des virements du chapitre de dépenses imprévues aux autres chapitres à l’intérieur d’une section. Certaines procédures offrent encore plus de souplesse dans la gestion des crédits.

- En troisième lieu, le principe d’équilibre qui s’impose aux collectivités locales est beaucoup plus contraignant que pour l’État. Le principe d’équilibre budgétaire applicable aux collectivités locales est issu de la loi de décentralisation du 2 mars 1982. Celle-ci donne une définition stricte de ce qu’elle nomme «l’équilibre réel» en imposant le respect de trois conditions cumulatives : 1) L’équilibre doit être réalisé par section : cela signifie que la règle de l’équilibre s’applique à l’ensemble des éléments du budget principal et que chaque section doit être votée en équilibre ; 2) Les chiffres du budget doivent être évalués de façon sincère ; 3) Le remboursement de la dette en capital doit être exclusivement couvert par des recettes propres de la collectivité concernée.

- Enfin, les modalités de présentation budgétaire témoignent d’une prise en compte de

communes et à leurs groupements ont été prévus dès 1992 avec la loi ATR. Ils permettent une gestion pluriannuelle des équipements par le biais de la procédure des autorisations de programme et crédits de paiement (AP/CP) ; procédure qui permet également de respecter la règle de l’annualité en évitant de gonfler les masses budgétaires par l’inscription de dépenses et de recettes qui concernent des opérations à caractère pluriannuel. Une réforme récente modifie substantiellement le périmètre d’utilisation de ces dispositifs. En effet, l’ordonnance du 26 août 2005 relative à la simplification et à l’amélioration des règles budgétaires et comptables applicables aux collectivités territoriales, à leurs groupements et aux établissements publics locaux qui leur sont rattachés, étend les mécanismes de gestion pluriannuelle d’une part, à l’ensemble des communes et de leurs groupements sans limitation démographique et d’autre part, aux dépenses de la section de fonctionnement.

Ainsi, les principes de sincérité, d’équilibre, de lisibilité et de responsabilisation consacrés par la LOLF s’inspirent en grande partie des pratiques des collectivités locales (Steckel, 2007).

Les fondateurs de la LOLF évoquent même « l’avance en termes de management public » des collectivités locales en regard de l’Etat (Migaud et Lambert, 2006). Si la LOLF accroît les impératifs de responsabilisation des gestionnaires, de contrôle de la performance et de transparence budgétaire par rapport aux pratiques des collectivités territoriales, leur expérience sur ces questions interdit de plaquer de manière contraignante la LOLF sur les collectivités. C’est ce que reconnaissent encore les initiateurs de la LOLF dans un rapport remis au Gouvernement en novembre 2006 : « La LOLF inspire de nombreuses collectivités locales souhaitant moderniser leur gestion. Il ressort des expérimentations en cours que ces collectivités adoptent, à partir de principes communs de gestion orientée vers les résultats, des organisations très différentes les unes des autres en raison de leurs spécificités. Il est préférable d’accompagner ces expérimentations plutôt que de tenter de les formater dans un moule commun qui découragerait leurs promoteurs » (Migaud et Lambert, 2006).

Outre l’antériorité des règlementations incitant les collectivités à développer les pratiques de pilotage, on peut expliquer l’affirmation du principe de libre adaptation de la LOLF aux collectivités (Carassus et Favoreu, 2005) par le fait que collectivités ont également développé spontanément des dispositifs de pilotage dès le milieu des années 1980. Le développement des pratiques de pilotage n’y est donc pas seulement le fruit de pressions externes.

En effet, l’enquête menée par Pariente (1998) en 1992, 1993 et 1995 montre que dès cette période, 50% des CT avaient recours à la comptabilité analytique, 30% utilisaient des tableaux de bord, 20% cumulaient comptabilité analytique et tableaux de bord, 10% avaient mis en place une direction par objectifs et 10% un système de BBZ. Seules 15% des collectivités n’avaient mis en place aucun outil de contrôle de gestion.

Dans la même perspective, une enquête menée par l’IFAC en 1996 (Reynaud et Bernadas, 1998) auprès de 174 collectivités montre que : (a) 16% sont satisfaites de leurs tableaux de bord de pilotage (35% n’en disposent pas) et (b) 15% sont satisfaites de leur fonction

« contrôle de gestion » (50% n’en disposent pas).

Des enquêtes plus récentes comme celles de Busson-Villa (1999), Chauvey (2006) ou de l’AFIGESE-CT (2006) indiquent un élargissement du portefeuille de dispositifs de pilotage mis en œuvre par les collectivités : évaluation, démarches qualité, balanced scorecard, méthode ABC… Ces études, bien qu’elles présentent quelques limites quant au nombre et à la représentativité des répondants (sur une population totale d’environ 37000 collectivités) montrent l’enthousiasme des collectivités vis-à-vis des outils de pilotage, même si l’usage de ces outils reste peu analysé. On peut néanmoins s’interroger à la suite de Gibert et Thoenig (1993) qui constatent une multiplication des comptabilités analytiques mais dont l’usage laisse à désirer au début des années 1990.

En conclusion, on peut donc constater que les collectivités ont un rôle moteur en matière de diffusion des outils et raisonnements managériaux dans le secteur public français. Ce caractère exemplaire des collectivités en matière de management public s’explique par l’antériorité de la diffusion des outils managériaux mais également du fait que cette diffusion repose en partie sur la libre volonté des collectivités. Si le débat reste ouvert quant à savoir si ces raisonnements et outils aboutissent à une conformation, une interprétation équilibrée du NPM ou une forme particulière de management, notre choix d’analyser les relations entre représentations de la performance et utilisation des outils de gestion dans le secteur public en collectant des données en milieu territorial est étayé. Reste à expliquer le choix d’étudier les OI.

Se S ec ct t io i on n 2 2 : : Ob O b je j ec ct t if i fs s et e t d d is i sp po o si s it ti if fs s de d e la l a co c o o o pé p é ra r at t io i on n in i nt t er e r co c om m mu m un na a le l e : : r ra a t t io i on na a li l is se er r l l a a g ge es s t t io i on n p p ub u bl l iq i q u u e e l lo o ca c a l l e e

Nous présentons ici les enjeux et les caractéristiques des Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) à fiscalité propre. Ces EPCI ont été choisis comme terrain d’observation pour notre recherche car ils constituent une véritable révolution du système politico-administratif local ayant pour objectif la diffusion d’une rationalité managériale. Ainsi, nous présentons dans un premier temps les enjeux et objectifs assignés à la coopération intercommunale (3-2-1) pour ensuite recenser les principales initiatives législatives visant à promouvoir cette coopération (3-2-2). Nous présentons enfin les dispositions prévues par la Loi Chevènement de 1999, qui institue les EPCI à fiscalité propre.

2.1 - Les objectifs de la coopération intercommunale : performance