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Dans leur ouvrage fondateur, Ferlie, Pettigrew, Ashburner et Fitzgerald développent une théorie générale du NPM basée sur le constat empirique de sa différenciation interne.

Autrement dit, la mise en œuvre des principes du NPM a engendré des trajectoires différentes qui ont abouti l’émergence de plusieurs modèles de NPM. Ils proposent donc une conception élargie du NPM susceptible de rendre compte de la variété des initiatives managériales publiques. Ferlie et al. (1996 : 11) élaborent ainsi une typologie des idéaux types du NPM et

isolent quatre modèles de NPM : le modèle de l’efficience, le modèle du downsizing et de la décentralisation, le modèle de l’excellence et l’orientation de service public.

2.1.1 - Le modèle de l’efficience :

Il s’agit du premier modèle à avoir émergé. Dominant jusqu’au milieu des années 1980, il est désormais remis en question. Ce modèle visait à rendre le secteur public identique à l’entreprise, orientée par l’efficience. Les consultants et les corps d’inspection ont joué un rôle capital dans la diffusion de ce modèle dans le secteur public. C’est le modèle qui correspond le plus étroitement à la définition canonique du NPM (cf. supra).

Les principes de ce modèle sont :

- Renforcer le contrôle financier : les gains de productivité et le rapport coût/valeur doivent être au centre des préoccupations. Il faut faire plus avec moins en renforçant les directions des finances et en améliorant le système d’information financier.

- Renforcer la dynamique managériale en renforçant les pouvoirs de la direction : il faut appliquer les principes hiérarchiques tout en clarifiant les objectifs et le suivi de la performance. Réduire la régulation par métiers et corps dans la fonction publique.

- Etendre le champ d’investigation des audits financiers et professionnels, promouvoir les méthodes transparentes d’évaluation de la performance, multiplier les standards et les comparaisons de performance.

- Accroître la part des fournisseurs privés ; promouvoir la logique marchande et l’orientation client.

- Renouveler les formes de la gouvernance : marginaliser les représentants élus et les représentants syndicaux. Affaiblir les conventions collectives et accroître la proprotion de contractuels. Favoriser l’individualisation des salaires et les primes à la performance.

Renforcer la mobilité du top management dans le secteur public.

La filiation de ce modèle avec les préceptes néo-libéraux, tayloriens et fayoliens est flagrante à tel point que Pollitt parle à son propos d’approche néo-taylorienne du management public (1990 : 24). Ce modèle correspond à la politique menée par Margaret Thatcher où le secteur public était considéré comme paralysé, dépensier, sous-performant et ultra-bureaucratique. La formule de R. Reagan résume bien la philosophie de la démarche « l’Etat n’est pas la solution, l’Etat est le problème ». Selon Ferlie et al. (1996 : 12), il serait simpliste de réduire tous les changements néo-managériaux à un épiphénomène du thatchérisme, car certains des principes affichés dans le courant des années 1990 sont clairement contradictoires avec les principes de ce modèle.

2.1.2 - Le modèle du downsizing et de la décentralisation :

Le modèle du donwsizing a commencé à prendre de l’importance dans les années 1990. Ce modèle part du constat qu’une orientation vers un modèle post-fordiste d’organisation a eut lieu dans les secteurs public et privé. Cette rupture historique aboutit à de nouvelles formes organisationnelles plus petites et plus flexibles, à une limitation de la standardisation, à une décentralisation accrue des responsabilités budgétaires, à la délégation accrue des services publics et à une séparation entre un centre stratégique concentré et une périphérie opérationnelle diffuse.

Les principes de ce modèle sont :

- Une extension de la logique marchande par l’introduction de mécanismes de type marché (MTM). Les MTM doivent remplacer la planification traditionnelle et devenir le support de l’allocation de ressources dans le secteur public.

- L’abandon du principe hiérarchique au profit d’une relation contractualisée et par la création au niveau local d’organisations publiques plus autonomes.

- Séparer le centre stratégique de la périphérie opérationnelle pour externaliser ou mettre en concurrence les fonctions non stratégiques. Réduire drastiquement la masse salariale des organisations publiques et diminuer les niveaux hiérarchiques

Ce modèle est toujours emprunt d’un managérialisme de type instrumental mais l’influence des principes de l’OST y est atténuée. Il s’agit ici de limiter au maximum la taille des organisations publiques, de les fragmenter pour jouer le plus possible sur les mécanismes contractuels et formels de régulation.

2.1.3 - Le modèle de l’excellence :

Influencé par l’ouvrage « In search of excellence » de Peters et Waterman (1982) il tente d’appliquer aux services publics les préceptes du Mouvement des Relations Humaines et insiste sur l’importance de la culture organisationnelle. Ce modèle s’inscrit dans la lignée de la psychosociologie du travail depuis les expériences pionnières d’Elton Mayo à l’usine Hawthorne de la Western Electric Company entre 1924 et 1932. Tout comme les psychosociologues, ce modèle conçoit l’entreprise comme un lieu dénué d’intérêts contradictoires, où des logiques différentes peuvent être combinées grâce à une bonne organisation gestionnaire. Le manager est vu comme un « agent de changement », qui doit libérer la créativité des individus et développer leur motivation.

Ce modèle rejette la perspective hautement rationnelle du modèle 1 et souligne le rôle déterminant des valeurs, cultures et rites sur le comportement réel des individus. Ce modèle peut-être divisé en deux approches : bottom-up et top-down.

- L’approche bottom-up cherche à comprendre les déterminants du développement et de l’apprentissage organisationnel. Les études révèlent le rôle de l’engagement des individus et de l’incrémentalisme dans le processus d’innovation au sein du secteur public. Le rôle du top management dans le changement organisationnel y est relativisé. Dans cette approche, les processus sont aussi importants que les résultats, les cultures collectives peuvent cimenter l’organisation plus décisivement que la hiérarchie. Les déviants, les hérétiques et les agitateurs (Pettigrew, 1985) peuvent susciter des processus de changement stratégique. De même, le leadership n’est pas forcément le monopole du top management et peut être exercé en réseau ou à une petite équipe. De plus, les individus et les groupes dans l’organisation peuvent apprendre même si l’organisation elle-même n’apprend pas.

- La variante top-down du modèle 3 considère la culture organisationnelle est plastique et de nature évolutive. Un changement voulu, dirigé et explicité peut donc enclencher un changement culturel. L’attention est portée sur la dimension charismatique du leader plus que sur le système de transaction qu’il instaure. Le leadership est ainsi, considéré comme personnel plus que collectif, venant d’un manager qui insuffle une nouvelle philosophie à l’organisation (correspond au modèle de l’action héroïque de Padioleau, cf. chap. 3)

Le modèle 3 peut être caractérisé par les indicateurs suivants :

- Dans la variante bottom-up : accent mis sur l’apprentissage et le développement organisationnels, la culture organisationnelle est vue comme un important facteur de cohésion, forte décentralisation et évaluation de la performance sur les résultats.

- Dans la variante top-down : le changement de culture est un objectif explicite, la vision de l’organisation est produite par le top management, des programmes de management du changement culturel sont lancés, des exemples de leader charismatiques sont identifiés comme des modèles pour la « nouvelle action publique » ; des programmes de formation au management sont lancés plus fréquemment, une gestion de la marque publique se développe : des logos apparaissent, des objectifs sont proclamés, des chartes de service élaborées, des uniformes apparaissent, une stratégie de communication est formalisée, le rôle stratégique des ressources humaines est affirmé.

Ce modèle est en rupture avec les modèles précédents dans la mesure où les influences néo- libérales sont peu prégnantes, voire rejetées. Il s’agit plutôt d’un managérialisme de type relationnel, où ce sont plus les vertus mythiques prêtées à l’image de l’entrepreneur qui sont recherchée que les outils et structures de l’entreprise elle-même. Dans cette perspective, chaque organisation est particulière, avec des valeurs, principes et modes d’organisation qui lui sont propres, que le management doit aider à coordonner, enthousiasmer et optimiser.

2.1.4 - Le modèle de l’« orientation de service public »

Selon Ferlie et al. (1996 : 14) ce modèle est peu appliqué16. Ce modèle cherche à concilier les idées du management privé aux spécificités du secteur public et à conserver en la reformulant la spécificité de la mission de service public. Il l’articule avec des objectifs de qualité, dont la réalisation est fondée sur une intensification de la « relation de service », plaçant au cœur des réformes le rôle des citoyens et des usagers, à travers des objectifs de qualité du service, de consultation et de participation des usagers. Mais cette mission de service public est rendue compatible avec les critères managériaux et tolère le transfert réfléchi de bonnes pratiques issues du secteur privé. Ce modèle confère une légitimité à un nouveau style de management public qui affirme avoir rompu avec les aspects pathologiques de l’ancienne organisation mais qui garde une identité et des finalités distinctes du secteur privé. Cette variante de centre- gauche du NPM selon Ferlie et al. (1996 : 15) implique d’assurer une forte redevabilité des services publics envers les usagers/citoyens peu apparente dans les autres variantes.

Le modèle de l’orientation de service public peut être caractérisé par les indicateurs suivant :

- Priorité accordée à la qualité de service, notamment par l’utilisation de démarches qualité. La création de valeurs s’appréhende en termes d’excellence du service public. Un ensemble cohérent de valeurs de service public sont affirmées. Méfiance à l’égard de la logique marchande dans les services publics.

- Attention portée à l’usager (pas de référence au client), à ses problèmes et à ses attentes ; les sources d’information sur l’usager reposent sur la gestion des réclamations plus que sur le taux de pénétration du marché. Une conception de la citoyenneté est explicitée et l’on considère que la participation des citoyens et la redevabilité envers ces derniers est une dimension légitime et fondamentale du management dans le secteur public. Les services délivrés sont considérés comme un des supports de la cohésion sociale et de l’apprentissage sociétal (projet de développement locaux, évaluation des besoins sociaux).

Le modèle de l’orientation de service public ne se contente pas d’affirmer la différence entre public et privé, il réside en une volonté de réfléchir à l’adaptation (transposition plutôt que

16 « is still to reveal its full potential ».

transfert) des idées apparues dans le contexte du secteur privé au secteur public. Ce modèle ne se limite pas à ignorer les principes et valeurs de la définition canonique du NPM, il les critique explicitement.

Ainsi, le NPM, si l’on suit la définition de Ferlie et al., comporte des principes contradictoires. En effet, les auteurs opposent les trois premiers modèles au modèle de l’orientation de service public (Ferlie et al., 1996 : 243). En fait, leur objectif ne semble pas tant de démontrer l’existence d’une unité entre les différents courants composant le NPM que de démontrer l’existence d’une forme contextuelle de management (ibid. : 244) et d’inviter les recherches en théorie des organisations à intégrer cette variété (ibid. : 246). Ainsi, l’identification de 4 modèles de NPM ne consiste pas à affirmer qu’ils ont tous un lien les uns avec les autres. Hood (1998) prolonge cet élan et analyse la diversité des cultures managériales publiques.

2.2 - La diversité des managements publics : l’approche culturaliste de