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L’objectif de cette première section réside dans la définition des voies de recherche suggérées par l’ensemble des travaux antérieurs, que ceux-ci soient issus de la psychologie ou du comportement du consommateur. Cet objectif apparaît comme un préalable nécessaire à la justification du positionnement adopté.

Un point de départ à l’explication du comportement se trouve dans les travaux basés sur le lien entre l’attitude et le comportement. La problématique spécifique au comportement du consommateur réside plus dans la prédiction du comportement d’achat que dans son explication.

1 - Ladaptation des théories existantes : de la psychologie au marketing

Cette présentation de l’ensemble des voies de recherche proposées par l’analyse psychologique repose intégralement sur les conclusions antérieures de ce courant, avec d’une part la prise en compte de l’intention au sein du lien entre attitude et comportement, et d’autre part l’intégration de la force de l’attitude. Deux apports susceptibles d’interactions.

1.1 - L’intégration de l’intention en tant que variable à part entière

Au sein des recherches en psychologie, l’attitude tient lieu de variable explicative du comportement. Les comportements les plus fréquemment étudiés, que ce soit dans les recherches sur le lien attitude – comportement ou dans le cadre de l’amélioration du concept d’attitude, n’incluent aucune dimension de consommation à proprement parler. Qualifiés de

« psychologiques », il s’agit, entre autres :

?? Du comportement de vote ;

?? De la participation à des enquêtes ;

?? Du comportement racial.

Parallèlement, les recherches en marketing s’intéressent essentiellement à l’intention d’achat comme indicateur du comportement, sans qu’aucune place ne soit laissée aux attitudes.

La volonté de tirer profit de chacune des deux approches comportementales rend nécessaire un positionnement précis de chacune des variables. Ainsi, il convient de s’attacher à définir la séquence qui les unit, préalablement à toute volonté d’amélioration de la relation entre intention d’achat et comportement.

Les recherches de Bagozzi (1981b, 1982), mais également les modèles intégrateurs du comportement du consommateur (Bettman, 1979 ; Engel et al., 1978 ; Howard & Sheth, 1969 ; Nicosia, 1966), mettent l’accent sur l’attitude en tant qu’antécédent de l’intention d’achat.

Elles permettent de justifier une utilisation conjointe de ces deux variables dans le but

d’expliquer le comportement d’achat, selon la séquence attitude – intention d’achat – comportement.

De plus, la mise en œuvre de l’intention d’achat au sein des recherches issues de la macroéconomie et des prévisions de consommation rend cette variable incontournable dans le cadre du comportement du consommateur.

Finalement, si le lien global entre attitude et comportement se révèle empiriquement difficilement vérifiable (Wicker, 1971), l’introduction de l’intention d’achat devrait permettre de le diviser en deux relations :

?? Une première entre l’attitude et l’intention d’achat ;

?? Une seconde entre l’intention d’achat et le comportement d’achat.

La prise en compte de ces deux relations souligne ainsi le rôle médiateur de l’intention comportementale, démontré par certains auteurs (Bagozzi, 1981b, 1982 ; Bagozzi & Yi, 1989 ; Bentler & Speckart, 1981 ; Fishbein & Ajzen, 1975 ; Ryan & Bonfield, 1980 ; Triandis, 1977), sans pour autant faire l’unanimité (Albrecht & Carpenter, 1976 ; Bentler & Speckart, 1979 ; Budd, 1986 ; Kahle & Berman, 1979 ; Manstead et al., 1983 ; McGuire, 1976).

Cette division doit essentiellement mettre en avant la faiblesse de la seconde relation par rapport à la première. En effet, de nombreuses études relatives au comportement

« psychologique » démontrent que l’attitude est une variable explicative du comportement en mesurant ce dernier par l’intention. Ainsi attitude et intention semblent reliées de manière satisfaisante. D’un autre côté, les études plus spécifiques au comportement d’achat n’arrivent que trop rarement à montrer un lien empirique solide. Il apparaît donc souhaitable de s’attacher plus spécifiquement à cette seconde relation.

Ainsi, l’introduction de l’intention en tant que médiateur du lien attitude – comportement dans le cadre d’un comportement d’achat repose sur un choix théorique qui doit permettre une étude plus approfondie de ce dernier, et la clarification de la place de cette variable.

1.2 - Les apports de la force de l’attitude et les questions en suspens.

Parallèlement à la prise en compte de l’intention, il est tentant de ne pas se préoccuper de l’attitude, puisque certains des auteurs (Bemmaor, 1995 ; Jamieson & Bass, 1989 ; Kalwani

& Silk, 1982 ; Morrison, 1979 ; Morwitz & Schmittlein, 1992) qui cherchent à prédire ou à

expliquer le comportement d’achat ne font aucune place à cette variable. Toutefois, la volonté de compréhension et d’explication ne peut être comblée sans un recours important aux théories comportementales, fondées sur ce concept.

En effet, l’évolution de la problématique attitudinale, d’une volonté de prédiction vers un objectif de compréhension justifie l’emploi de certaines variables modératrices, regroupées sous le terme de force de l’attitude (Krosnick et al., 1993), concept incontournable dans l’étude de la relation attitude – comportement (Fazio & Zanna, 1981).

Il s’agit donc de prolonger les conclusions attachées à la force de l’attitude, au sein d’une étude plus spécifique au comportement d’achat, tout en tenant compte du rôle médiateur de l’intention d’achat. Et ce, alors que la force de l’attitude est étudiée principalement au travers de comportements « psychologiques », dont l’intention est exclue. L’emploi conjoint de celle-ci à la force de l’attitude ouvre ainsi de nouvelles pistes de recherche, jusqu’alors inexplorées, qui se traduisent principalement par les questions suivantes :

?? Si la force de l’attitude est reconnue en tant que modérateur de la relation attitude – comportement, agit-elle en amont ou en aval de l’intention d’achat lorsque cette dernière s’ajoute à la séquence menant de l’attitude au comportement (Fazio &

Zanna, 1978b) ?

?? Découlant également de la prise en compte de l’intention d’achat, la force de l’attitude doit-elle être transposée, en « force de l’intention », ou au contraire, demeurer en tant que telle ?

Enfin, quel que soit le contexte de mise en œuvre de la force de l’attitude, ses multiples conceptualisations (Krosnick et al., 1993 ; Raden, 1985) nécessitent de définir préalablement une structure du concept s’inspirant de celles proposées.

L’application de la force de l’attitude dans le cadre du comportement de consommation permet donc de suggérer plusieurs voies de recherche, que ce soit au niveau de sa conceptualisation (Krosnick et al., 1993 ; Raden, 1985), de son rôle modérateur des relations entre attitude, intention d’achat et comportement (Fazio & Zanna, 1978b), ou encore de son application au comportement d’achat (Hérault, 1999).

2 - Pour une levée des hypothèses fortes du lien intention - comportement

L’amélioration de la relation restreinte entre intention et comportement passe essentiellement par des innovations méthodologiques, ou des ajouts de variables propres au concept étudié.

Ainsi, face à ces faiblesses, plusieurs voies d’amélioration ont été proposées :

?? Une meilleure mesure de l’intention d’achat (Juster, 1966) ;

?? Un retraitement probabiliste de l’intention d’achat permettant la prise en compte d’un changement d’intention aléatoire (Morrison, 1979) ou non (Jamieson & Bass, 1989) ;

?? L’abandon de l’hypothèse d’homogénéité des consommateurs (Bemmaor, 1995 ; Morwitz & Schmittlein, 1992) ;

?? La mise au jour des variables susceptibles de perturber le passage à l’acte (Belk, 1985 ; Dahr, 1995), telles que le variables situationnelles.

La mesure de l’intention d’achat par l’échelle de Juster (1966) est actuellement considérée comme tout à fait pertinente (Brennan & Esslemont, 1994 ; Day et al., 1991 ; Gan et al., 1985 ; Hamilton-Gibbs et al., 1992). La compréhension des déviances entre intention d’achat et comportement semble donc résider dans l’approfondissement des autres voies de recherche exposées ci-dessus.

2.1 - Les inspirations du courant probabiliste de l’intention d’achat, perturbations internes

Les modèles probabilistes, à finalité prédictive, ont permis un certain nombre d’avancées au niveau méthodologique. Ces modèles invitent à approfondir la levée des contraintes qu’ils proposent :

?? Le changement d’intention (Bemmaor, 1995 ; Jamieson & Bass, 1989) ;

?? L’hypothèse d’homogénéité des consommateurs, quasiment omniprésente, exception faite de quelques études qui tentent de segmenter les consommateurs (Bemmaor, 1995 ; Morwitz & Schmittlein, 1992).

2.1.1 - Le changement dintention pris en compte par la force de lattitude

Si le changement d’intention est pris en compte au sein des modèles probabilistes (Bemmaor, 1995 ; Jamieson & Bass, 1989 ; Morrison, 1979), certains auteurs tentent d’expliquer l’origine de ce changement.

Ainsi, il peut être :

?? Aléatoire (Morrison, 1979) ;

?? Dépendant de divers facteurs attachés ou non au consommateur (Jamieson & Bass, 1989) ;

?? Ou encore fonction de la qualité d’« acheteurs déclarés » ou de « non-acheteurs déclarés » (Bemmaor, 1995).

L’introduction de la force de l’attitude, par sa relation avec la persistance et la résistance de l’attitude (Krosnick et al., 1993 ; Raden, 1985) doit permettre d’approcher la prédisposition de l’individu à changer d’intention d’achat. Ainsi, il ne s’agit pas de prolonger les recherches explicatives de ce changement, mais de prendre en considération leurs conclusions relatives à sa possibilité d’occurrence.

Dès lors, il apparaît indispensable d’associer à l’intention d’achat un indicateur de sa stabilité dans le lien avec le comportement. Ce rôle est affecté à la force de l’attitude, qui doit autoriser une première approche de l’hétérogénéité des consommateurs. Cette approche se fonde sur une composante attitudinale ad hoc à l’objet de l’étude et non sur les caractéristiques stables du consommateur.

2.1.2 - Lhétérogénéité des consommateurs au travers des caractéristiques intra-personnelles

Parallèlement au changement d’intention, la présentation des travaux de recherche relatifs au lien entre l’intention d’achat et l’acte d’achat montre que ceux-ci s’intéressent à l’ensemble d’un échantillon considéré comme homogène, et rarement aux individus en tant que tels ou aux groupes d’individus distincts (Morwitz & Schmittlein, 1992). Ainsi, l’hypothèse d’homogénéité des consommateurs, si elle permet de déterminer la proportion des « acheteurs déclarés » qui achètent effectivement, n’autorise pas à rendre compte de la diversité des comportements individuels.

La prise en compte de l’hétérogénéité doit pourtant pouvoir être la clef de la compréhension du manque d’adéquation entre une intention d’achat et le comportement

associé. Ainsi, certains auteurs (Bemmaor, 1995 ; Morwitz & Schmittlein, 1992) ouvrent cette voie de recherche.

L’approche retenue par Bemmaor (1995) reste fortement probabiliste, puisqu’il s’agit de distinguer à l’intérieur même du modèle de Morrison (1979) deux intentions d’achat réelles sur la base de l’intention déclarée. Ainsi, l’objectif s’attache à la prévision des ventes, et n’apporte aucune explication concernant le passage au comportement.

Les travaux de Morwitz et Schmittlein (1992) permettent d’approcher l’écart entre l’intention et le comportement par les caractéristiques socio-démographiques des individus.

Toutefois, le lien entre cet écart et les caractéristiques socio-démographiques n’est pas explicite.

Ainsi, alors que parmi les « acheteurs déclarés », ceux qui ont effectivement acheté un ordinateur personnel vivent, en plus forte proportion, sur la côte ouest, sur la côte est et dans la région centrale du nord-est des États-Unis, aucune raison n’est proposée pour expliquer ce qui reste un constat. De plus, de telles caractéristiques des consommateurs ne sont pas généralisables, leur influence différant fortement d’un produit à l’autre (Morwitz & Schmittlein, 1992). Il est donc impossible de déterminer a priori le sens de l’influence de ces variables.

Ces deux approches de l’hétérogénéité des consommateurs ne s’intéressent donc pas au caractère de l’individu en tant que tel, ce que doivent autoriser les variables intra-personnelles.

Caractéristiques stables d’un consommateur, susceptibles de mettre au jour les prédispositions des consommateurs à se comporter selon l’intention d’achat déclarée :

« A vigorous exchange of hypotheses, constructs and methodologies between personality and attitude researchers would appear to benefit progress in both domains »

(Fazio & Zanna, 1981) Toutefois, les caractéristiques socio-démographiques prennent tout leur sens dans un cadre pratique, par exemple lors de la mise en place d’une communication ciblée. C’est pourquoi ces variables ne semblent pas devoir être exclues de l’analyse, afin d’être associées aux caractéristiques intra-personnelles dans le cadre de la mise en œuvre des conséquences managériales de cette recherche.

2.2 - Les variables situationnelles, perturbations externes

Les variables situationnelles apparaissent comme source de perturbation externe du lien entre intention et comportement (Belk, 1985 ; Cote et al., 1985). L’émergence d’une situation pouvant expliquer le comportement observé, et de là, l’écart avec l’intention déclarée.

Plusieurs approches situationnelles coexistent :

?? Une approche par les scenarii au sein de laquelle il convient de distinguer situations subjectives (Lutz & Kakkar, 1975) et objectives (Belk, 1974, 1975a, 1975b). Cette approche s’attache à l’impact des situations sur l’intention d’achat ;

?? Une approche behavioriste, mesurant le comportement réel, parallèlement aux situations effectives (Cote et al., 1985 ; Hornik, 1982).

Tableau IV.1 – Caractéristiques des approches situationnelles

Scenarii Behavioriste

Appliquée à des choix entres différents produits ou marques

Mesure une intention Pas de mesure d’intention

Pas de mesure du comportement Mesure un comportement effectif Étude de scenarii attachés aux situations de

consommation Étude de situations non exclusivement attachées à la

consommation

Pas de période d’observation Courtes périodes d’observation

Point commun de ces approches, elles mesurent l’impact d’une situation sur le choix entre différentes alternatives d’achat (Chips, Sandwich, etc.), que ce choix soit intentionnel ou comportemental. L’acte de consommation est donc systématiquement présent, en intention ou de manière effective, d’où la possibilité de lui associer une situation « relati[ve] à un instant et à un espace donnés » (Belk, 1974). Ainsi, les situations de consommation n’expliquent pas un comportement d’achat versus un comportement de non-achat, mais un choix parmi plusieurs achats envisageables.

Les différences résident essentiellement dans la méthodologie permettant la prise en compte des situations.

L’approche par les scenarii invite l’individu à se mettre dans une situation de consommation « lorsque vous souhaitez effectuer un repas rapide » (Lemoine, 1999), et à effectuer un choix entre les alternatives de consommation qui lui sont proposées. Le scénario comprend donc une situation attachée à la consommation des produits, et permet de mesurer l’intention d’achat associée à un produit ou une marque. Aucun comportement réel n’est mesuré, donc aucune période d’observation n’est nécessaire. C’est l’influence de la situation sur la décision

qui est mise en évidence. La construction de scenarii possède donc les limites liées au mode déclaratif (Reingen, 1976).

Parallèlement, le courant behavioriste ne propose pas différents scenarii à l’individu, mais mesure son comportement et les variables situationnelles qui l’ont entouré. Ainsi, il ne s’agit pas de mettre l’individu en situation de consommation, mais de relever des situations susceptibles d’influencer un comportement. Ces dernières sont des « stimuli externes à lindividu et à lobjet de la consommation » (Cote et al., 1985), non directement liés à la consommation du produit : « un membre de la famille est malade » (Cote et al., 1985). Les périodes d’observation sont courtes, de l’ordre d’une journée (Hornik, 1982) ou d’une semaine (Cote et al., 1985). Ce qui autorise un relevé des situations intervenues durant la période et susceptibles d’influencer le comportement, sans pour autant que cette influence soit systématique.

Ainsi, alors que les situations sont proposées comme explicatives de l’écart entre intention et comportement (Belk, 1985), les approches situationnelles mises en œuvre jusqu’ici ne mesurent que l’une ou l’autre de ces variables :

?? Les scenarii mesurent l’intention mais ne s’attachent pas au comportement ;

?? Le courant behavioriste mesure un comportement, mais rarement l’intention.

Dans ce second cas, les situations peuvent expliquer le comportement, mais rien n’indique si elles sont intégrées dans l’intention associée. Les rares travaux de recherche qui permettent d’approcher l’influence des situations sur le lien entre intention et comportement sont ceux de Cote et al. (1985) : l’intention d’achat est mesurée, les habitudes de consommation sont relevées par observation préalable, et les situations imprévues expliquent l’écart entre les habitudes et la consommation de la période d’observation.

Toutefois, cette méthode nécessite une anticipation des situations par l’individu interrogé, afin de dissocier les situations prévues des situations imprévues. Si cette anticipation semble réalisable sur une semaine, des périodes d’observation plus longues poseraient a priori plus de difficultés.

Ainsi, l’introduction des situations préconisée par Belk (1985), en tant que variables explicatives de l’écart entre intention et comportement, semble pouvoir faire l’objet d’améliorations par la prise en compte des situations lors de la mesure de l’intention, et de celle du comportement. De plus, il semble intéressant de mettre en œuvre ces variables afin

d’expliquer le choix effectué entre un comportement d’achat et un comportement de non-achat, et non plus entre différentes alternatives d’achat. La difficulté sous-jacente résultent de la prise en compte d’une situation alors que l’instant d’un non-achat ne peut être défini comme l’est celui d’un achat.