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L’exploration de nouvelles pistes professionnelles

D e la prise en charge globale à l’accompagnement vers l’emploi

2.3. L’accompagnement vers l’emploi

2.3.3. L’accompagnement en pratique : exemples

2.3.3.3. L’exploration de nouvelles pistes professionnelles

(M) est reçue en entretien individuel le 16 septembre 2009. Elle est touchée par une autre pathologie que le VIH ou le VHC, une maladie orpheline générant des douleurs musculaires et articulaires. Elle a été orientée vers le chargé de projet emploi-formation par la psychologue. Lors de l’entretien, un long moment est consacré au récit de son parcours de vie.

(M) est d’origine portugaise. Elle détient une expérience importante dans la restauration car elle gérait jusqu’ici avec son mari un restaurant de spécialités gastronomiques portugaises. Elle a cessé son activité du fait des douleurs engendrées par sa pathologie. De ce fait, l’activité professionnelle ayant une place centrale dans sa vie quotidienne, elle décrit une situation d’isolement social due à l’inactivité. Sa caisse de retraite lui verse une indemnité de 262 euros par mois.

Avec le chargé projet emploi-formation, une demande d’AAH a été enclenchée et un dossier RSA a été constitué. On constate durant l’entretien que (M) n’a pas de suivi par un conseiller Cap Emploi, le milieu du handicap lui étant totalement

étranger du fait de sa trajectoire professionnelle. L’entretien précédant avait abouti à l’idée de contacter Cap Emploi, mais la démarche n’a pas été entreprise entre les deux rendez-vous. Le chargé de projet appuie l’idée que Cap Emploi pourrait être une porte d’entrée complémentaire pour son accompagnement vers l’emploi.

(M) affiche une volonté très marquée de retrouver rapidement un emploi sans utiliser ce levier d’insertion. Elle mentionne souvent l’avis de son mari, qui semble très influent. Le bilan des actions effectuées depuis le dernier rendez-vous est dressé. La première piste élaborée par (M) concernant son retour à l’activité professionnelle concernait le secteur de la garde d’enfants, les arguments associés à ce souhait étant son attachement aux enfants. Le premier constat face à cette piste de réinsertion fut que ce secteur peut être vecteur de fatigabilité incompatible avec la pathologie de (M). Les points abordés ensuite durant l’entretien concernent le niveau de formation de (M). Il consiste en des acquis professionnels en restauration, un diplôme équivalent au niveau 3ème et une expérience en restauration traditionnelle dans son pays d’origine. Le chargé de projet emploi-formation propose alors deux pistes différentes : faire une formation financée par l’AGEFIPH ou favoriser une insertion rapide dans des secteurs accessibles (aide à la personne, par exemple). Cette étape correspond à la phase exploratoire de l’accompagnement, c’est à dire à celle de l’identification du projet professionnel de la personne par rapport à ses souhaits.

La personne accompagnée, au fur et à mesure que se déploie l’accompagnement dans le temps, prend conscience des freins et des difficultés que l’état de santé produit sur les exigences de l’activité professionnelle envisagée. C’est en quelque sorte un deuil qu’elle doit faire, par rapport à son activité professionnelle antérieure. Les questions que pose alors l’accompagnant sont de l’ordre de :

« Qu’est-ce qu’il vous plairait de faire ? », dans la mesure où il s’agira sûrement

« d’accepter qu’il y a des choses que l’on ne peut plus faire. » Un constat de difficultés dans l’usage de la langue française est fait et une remise à niveau est envisagée, par le contact du chargé de projet avec un organisme de formation prestataire de Cap Emploi. Il s’agit également d’attendre les décisions concernant l’octroi de l’AAH. Le chargé de projet informe (M) que l’AAH sera cumulable

avec la reprise d’une formation. L’idée soutenue devient celle de profiter de cette période d’inactivité pour préparer le futur accès à l’emploi, par le lancement d’une formation qualifiante. L’idée de s’appuyer sur la RQTH est de nouveau également signalée.

L’interaction déroulée dans la relation d’accompagnement est centrée sur les compétences transférables de la personne, en prenant en compte les conséquences de son état de santé sur son ancien métier. On visualise bien lors de l’entretien qu’il est difficile à (M) d’envisager un autre métier. L’idée est que les compétences développées dans la restauration sont transférables dans un autre secteur. (M) a toujours, quant à elle, garder un optimisme par rapport à son état de santé : « Quand je me suis retrouvée malade, je me suis dit, cela va passer ». Or, trois opérations chirurgicales en 2006 montrent que ces problèmes de santé sont durables. L’interaction donne lieu à la co-construction d’une stratégie d’accompagnement, au regard de la dimension réflexive dans laquelle la relation s’inscrit. Le chargé de projet attire l’attention de (M) sur le fait qu’elle maîtrise trois langues (l’anglais, le français, et le portugais) et que cela représente une compétence forte à prendre en compte. Il est convenu, à partir de l’expérience de l’accompagnée, de partir des acquis de la trajectoire professionnelle dans la restauration pour définir des savoir-faire transférables. L’idée de se former à un autre métier est lancée, comme par exemple celle de transmettre les connaissances de (M) en matière de restauration dans le secteur de la formation professionnelle.

Au-delà de cette piste, la stratégie est de provoquer une prise de conscience de l’accompagné sur les différentes compétences qu’il détient, en dehors de son activité professionnelle antérieure. Durant toute la durée de l’entretien, on observe que l’accompagnant tente de faire ressortir ces compétences d’une manière de plus en plus précise. (M) met en avant son « art de la joie » et son « art de la simplicité » pour décrire sur sa conduite professionnelle.

Plusieurs décisions sont prises à l’issue de cet entretien d’accompagnement vers l’emploi. D’une part, il est décidé d’enclencher une remise à niveau en français ainsi que de faire une évaluation de la maîtrise des deux autres langues. D’autre part, le chargé de projet va mettre en contact (M) avec une entreprise d’insertion dans le secteur de la restauration traiteur et avec un organisme de formation sur

les métiers de l'hôtellerie et de la restauration. Il est également convenu d’effectuer les liens administratifs nécessaires à une prise en charge potentielle d’une formation future avec le réseau Cap emploi, ainsi que de lancer la demande de RQTH. Enfin, le chargé de projet demande à (M) de réfléchir à cette possibilité d’un transfert de savoir-faire à partir de la pratique de plusieurs langues vers le secteur de l’enseignement. On constate qu’aucune piste abordée lors de l’entretien n’est mise de côté, en fonction des souhaits de l’accompagné et des propositions de l’accompagnant. Durant tout l’entretien, pour se défaire du caractère dramatique que la situation peut revêtir, le mode de l’ironie et de l’humour façonne les échanges de manière importante. Un rendez-vous est fixé quinze jours plus tard, le 30 septembre.