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5. Choix de l'assiette de paiement du service et structure du tarif

1.3. Eléments de définition de la qualité et du prix du service au travers des documents réglementaires et évolution

1.3.1. Les obligations de résultats

1.3.1.1. La qualité de l'eau

Le contrôle de la qualité de l'eau produite et délivrée s'est imposé comme un moyen naturel de répondre aux objectifs des pouvoirs publics : s'assurer de la qualité de l'eau distribuée aux usagers.

BUFFAUT (1986) en reprend les principales évolutions et recense le nombre de paramètres pris en compte dans les textes parus depuis 100 ans (voir tableau 3).

Pour la première fois en 1885, l'instruction accompagnant la circulaire en date du 5 septembre prévoit une analyse qui doit être effectuée sur l'eau devant servir à une alimentation en eau potable.

Une analyse sommaire est prévue pour les eaux de source, alors qu'une analyse chimique et un examen microscopique de l'eau sont requises pour les eaux de rivière. Quatre niveaux de qualité de l'eau sont distingués (eau très pure, eau potable, eau suspecte et eau mauvaise). Des valeurs limites fixées pour chacun des paramètres suivants permettent la classification :

- chlore,

- acide sulfurique,

- oxygène emprunté au permanganate en solution, - perte de poids du dépôt par la chaleur rouge,

- degré hydrotimétrique persistant après ebullition.

Paramètres organoleptiques Paramètres physico-chimiques Substances indésirables Substances toxiques (*) Paramètres microbiologiques Radioactivité

Total

1885 0 5 0 0 0 0 5

1929 3 1 0 0 1 0 5

1954 3 4 6 4 3 0 20

1961 3 1 6 5 3 1 19

1980

(C.E.E.)

4 15 24 13 6 0 62

1984

(O.M.S.)

4 7 9 31

2 2 55

1989 4 9 16 12 5 1 47 (*) : l'ensemble des pesticides est compté comme une substance

Tableau 3 : Evolution du nombre de paramètres de qualité de l'eau pris en compte dans les textes de 1885 à 1989 (d'après BUFFAUT - 1986).

Très rapidement, le problème des laboratoires susceptibles d'effectuer les analyses de l'eau se pose. En 1889, un laboratoire est créé spécialement, et en 1900, une instruction prévoit la possibilité de confier les analyses d'eau aux laboratoires des facultés de province.

C'est en 1929 qu'apparaissent les premières véritables normes en matière d'analyses chimiques et bactériologiques pour les paramètres suivants :

- température (inférieure à 14*C en été), - saveur (pas de saveur),

- odeur (pas d'odeur),

- couleur (légère teinte bleue), - limpidité (limpide),

- fer (inférieur à 0,2 mg/l),

- manganèse (inférieur à 0,1 mg/l),

- bactériologique (absence de tout germe pathogène ou suspect).

En 1935, le code de la santé publique est modifié pour introduire une obligation du résultat au niveau de la distribution : "tout distributeur est tenu de fournir une eau bactériologiquement et chimiquement pure".

L'utilisation de la mention "chimiquement pure" montre bien que la définition des obligations de moyens est à cette époque très liée aux possibilités d'analyse et au manque de connaissances médicales sur les phénomènes de toxicité chimique. En conséquence, l'attention se porte naturellement vers les paramètres organoleptiques, non pas à cause de l'importance accordée, à l'époque, aux qualités organoleptiques de l'eau, mais parce que ce sont des paramètres facilement évaluables, certainement considérés comme des indicateurs de la qualité chimique et microbiologique de l'eau.

A partir de 1954 (circulaire du 24 novembre) les progrès importants réalisés dans le domaine toxicologique et analytique, mais aussi l'évolution des pollutions chimiques des ressources en eau, se traduisent par des normes beaucoup plus précises et un nombre de paramètres observés beaucoup plus important. Une circulaire du 15 mars 1962 définit l'eau potable comme "une eau bactériologiquement pure, ne comportant aucun germe de contamination fécale". La notion de pureté

chimique introduite en 1935 est abandonnée, pour concentrer l'attention sur la qualité microbiologique de l'eau, dont il est vrai qu'elle constitue l'élément premier de l'innocuité de l'eau.

Dans un premier temps, les paramètres de type organoleptique deviennent moins importants : plus de référence ni à l'odeur, ni au goût, ni à la couleur dans les normes de 1954 (seule la turbidité est évoquée) ; la coloration est de nouveau introduite dans l'arrêté du 10 août 1961. Il faut attendre le décret du 3 janvier 1989, traduction en droit national de la directive européenne du 30 août 1980, pour que l'odeur et la saveur soient de nouveau présents dans la norme. La réapparition progressive des paramètres organoleptiques se fait cette fois pour fixer de véritables objectifs de qualité en la matière, et non en tant qu'indicateurs pouvant servir à traduire d'autres aspects de la qualité de l'eau.

La directive CEE du 30 août 1980 introduit véritablement la notion de niveau guide en plus des concentrations maximales admissibles jusqu'ici utilisées de manière exclusive. C'est un progrès important dans la conception de la qualité de l'eau distribuée. On notera toutefois que la notion de niveau guide n'est pas reprise dans le décret de 1989 qui traduit dans le droit français la directive européenne de 1980. En effet, un niveau guide n'a aucune place dans le droit français tel qu'il existe : le juge est seulement tenu de fonder son appréciation sur le fait qu'il y a ou non-respect de la réglementation. Dans un système de droit de type anglo-saxon, l'interprétation du juge est beaucoup plus souple ; il lui est ainsi possible de tenir compte d'éléments comme les niveaux guides dans les appréciations qu'il est amené à donner.

Parallèlement à l'évolution du nombre de paramètres observés, les méthodes d'analyse se précisent. En 1960, la périodicité des analyses de contrôle est fixée par arrêté préfectoral en fonction de la seule densité de population. Mais dès 1962, la notion de risque sanitaire est mieux appréhendée par l'introduction d'une modulation du rythme des analyses en fonction de la provenance de l'eau d'alimentation.

BUFFAUT note également que la nature juridique des textes relatifs à la qualité de l'eau s'est modifiée, passant de simples circulaires à des décrets. Mais l'explication tient plus au fait que, suite aux lois de décentralisation, seules des dispositions de type législatif ou réglementaire peuvent s'imposer aux collectivités locales, qu'à une plus grande attention portée par la puissance publique à la réglementation sanitaire. Le niveau de décision concernant les normes s'est également modifié, puisqu'il s'est internationalisé sous les actions de la C.E.E. et de l'Organisation Mondiale de la Santé.

L'évolution la plus récente en matière d'approche sanitaire se fait vers une interprétation beaucoup plus globale de la qualité sanitaire de l'eau distribuée en incorporant une approche plus statistique ainsi qu'une prise en considération de conditions particulières, temporaires ou locales : l'interprétation de l'obligation de résultats se fait plus souple. La circulaire du 29 avril 1985, qui prévoyait en particulier la possibilité de mettre en place des systèmes de dérogation temporaire aux normes sur les nitrates va dans ce sens tout comme l'article 3 du décret du 3 janvier 1989 relatif aux eaux destinées à la consommation humaine (modifié par le décret du 10 avril 1990). il prévoyait en effet des possibilités de dérogation aux exigences de qualité prévues par le décret dans les cas suivants :

" 1' Pour tenir compte de la nature et de la structure des terrains de l'aire dont est tributaire la ressource considérée ;

2* En cas de circonstances météorologiques exceptionnelles ;

3* En cas de circonstances accidentelles graves et lorsque l'approvisionnement en eau destinée à la consommation humaine ne peut être assuré d'aucune autre façon ;

4" Lorsqu'il ne peut être fait appel qu'à une ressource en eau superficielle dont la qualité ne respecte pas les limites de la qualité des eaux brutes fixées à l'annexe III du présent décret et qu'il ne peut être envisagé un traitement approprié pour obtenir une eau de la qualité définie à l'annexe 1-1".

Mais l'instauration d'une certaine souplesse dans le raisonnement sanitaire ne va pas sans poser quelques difficultés. TRICARD et BUFFAUT (1993) font état de procédures contentieuses déclenchées par la Communauté contre la France, suite à la transcription dans le droit français par le décret du 3 janvier 1989 de la directive communautaire 75/440 relative aux eaux d'alimentation. Le décret prévoyait initialement une teneur limite de 100 mg/l pour les nitrates pour les eaux utilisées ou devant être utilisées pour la production d'eau destinée à la consommation humaine, alors que la directive européenne prévoyait 50 mg/l. Malgré l'argumentation française basée sur les progrès réalisés dans le domaine de la dénitrification des eaux depuis le moment où la directive européenne avait été introduite (avant 1975), le décret de 1989 a du être modifié par le décret du 10 avril 1990, qui ramène la valeur limite à 50 mg/l.

Le système de contrôle de la qualité des eaux des distributions publiques qui s'est mis en place en France au cours des cent dernières années est sans doute encore largement perfectible, en particulier sur le plan d'une définition plus globale de qualité sanitaire, grâce notamment à une approche plus statistique de l'obligation de résultats imposée aux services d'eau. On peut encore lui reprocher une avancée trop timide sur le plan de la qualité totale, comme le font très justement remarquer MONTIEL et WELTE (1992).

Les cahiers des charges types d'affermage ou de concession n'apportent rien de plus concernant les obligations de résultats en matière de qualité de l'eau. Ils se contentent de reprendre les obligations imposées par la réglementation. Ainsi, l'article 63 du cahier des charges type d'affermage de 1980 stipule: "L'eau distribuée devra présenter constamment les qualités imposées par la réglementation en vigueur." Il reprend ainsi les dispositions de l'article 12 du cahier des charges type de 1951 dans des termes très peu modifiés.

En fait, la norme constitue l'unique obligation de résultats imposée au service d'eau en matière de qualité de l'eau.

Cela peut paraître étonnant. En effet, nous avons montré que les objectifs qui président à l'élaboration des normes de qualité de l'eau sont presque exclusivement d'ordre sanitaire et technique.

Le contrôle effectué sur les eaux produites et distribuées est fait dans le même esprit et met tout particulièrement l'accent sur les aspects sanitaires24. Or, l'aspect sanitaire n'est pas la seule composante de la qualité de l'eau. Cette discussion sera développée dans le chapitre 3 dans le paragraphe consacré à la perception de la qualité du service par les pouvoirs publics.

2 4 Cela apparaît très bien au travers des résultats des analyses de contrôle de l'eau distribuée par les services du panel national qui seront présentés dans le chapitre 2 : plus d'un résultat d'analyse sur deux concerne les paramètres bactériologiques ; à peine plus de 10% des analyses sont consacrées aux paramètres organoleptiques.