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Expérimenter-observer-valider

No documento de recherche pour la classe (páginas 31-37)

Un point de vue épistémologique sur la démarche expérimentale

4. Expérimenter-observer-valider

Nous considérons que l’action d’expérimenter consiste à utiliser une stra- tégie ou construire une stratégie8en vue de résoudre un problème. Nous dé- finisons une stratégie comme un ensemble de manipulations ordonnées sur des objets du problème ou sur leurs représentations. Des exemples de mani- pulations sont : prendre un crayon, dessiner, manipuler des jetons de bois, faire effectuer des calculs à un logiciel. . . Un exemple de stratégie est repré- senté par la figure I.1. Il concerne le problème des caisses de dynamites. La stratégie est celle décrite par la figure où le numéro associé à chaque caisse indique l’ordre dans lequel nous avons placé les caisses. Nous avons mani- pulé des objets du problème, à savoir des caisses et un entrepôt. De plus, l’action d’expérimenter permet la production d’un fait observable, qui dans cet exemple est une configuration de caisses de dynamites.

8Nous différencions stratégie construite de stratégie utilisée par le fait qu’une stratégie utilisée pré-existe à l’action d’expérimenter alors que la stratégie construite se développe au cours de l’action.

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Fig. I.1. Exemple de stratégie.

L’action d’expérimenter est effectuée avec pour objectif la résolution d’un problème. Nous considérons que c’est notre conception sur le problème qui guide la construction de la stratégie ou la stratégie à utiliser.

D’autre part, au cours de la construction ou de l’utilisation d’une stra- tégie, nous observons le résultat de chacune de nos manipulations. C’est pourquoi l’action d’observer est aussi présente.

L’action de validation intervient au cours de l’action expérimenter pour contrôler que les manipulations que nous effectuons sont correctes. Dans l’exemple que nous avons présenté, la validation peut se voir à travers la vé- rification que chaque piège est sur une et une seule case. Nous parlons alors de validation de la stratégie, cela consiste à s’assurer que les manipulations effectuées sont autorisées par le problème et conforme à la stratégie. L’iden- tification d’une stratégie plus générale peut alors nous amener à rencontrer un nouveau problème de recherche de solutions qui consiste à étudier le do- maine de validité de la stratégie. Illustrons cela avec le problème des caisses de dynamites.

Exemple I.1 (Domaine de validité d’une stratégie). Considérons ce pro- blème avec les instances suivantes : un entrepôt carré de côté de longeur 6 et des explosions de type reine. Nous avons connaissance du résultat, l’op- timum est inférieur à 7. Nous expérimentons pour répondre au problème d’existence, existe-t’il une solution admissible de cardinalité 7 ? Pour cela nous employons la stratégie du cavalier, placer les caisses en suivant le mou- vement du cavalier. Nous obtenons la configuration de la figure I.2. Cette configuration est une solution admissible de cardinal 7 donc elle est solution.

Fig. I.2. Configuration produite avec la stratégie du cavalier.

Nous rencontrons un nouveau problème qui consiste à déterminer le domaine de validité de la stratégie cavalier9, là-dire à rechercher les entrepôts pour lesquels cette stratégie fournit une solution.

D’autre part, l’action de validation intervient à la fin de l’action d’ex- périmenter lorsque le produit de la stratégie est obtenu et que l’on doit

9Cette stratégie a été mise au point par des élèves du CLEPT lors d’un MATh.en.JEANS, ce qui les amené à étudier le domaine de validité de cette stratégie pour des entrepôts carrés.

s’assurer que les faits résultants de l’action d’expérimenter sont des solu- tions ou des solutions admissibles au problème étudié. Dans l’exemple que nous avons présenté ce type de validation peut se voir dans l’action de vé- rifier que la configuration de la figure I.1 est une solution admissible. Nous parlons alors devalidation du produit de la stratégie, qui consiste à s’assurer que les faits résultants de l’action d’expérimenter sont des solutions ou des solutions admissibles au problème étudié. Cela permet, en particulier, de donner le statut d’exemple ou de contre-exemple à ces faits.

De plus, nous pouvons voir la validation du produit de la stratégie comme une activité de preuve qui peut être de nature empirique ou mathématique.

En effet, la validation du produit de la stratégie n’est pas nécessairement ma- thématique, nous pouvons très bien effectuer une validation de nature plus

« empirique ». D’autre part, le problème associé à la validation n’est pas, généralement, nécessaire pour la résolution, c’est-à-dire qu’il est, a priori, possible de résoudre le problème sans résoudre le problème associé à la va- lidation. Par exemple, pour le problème des entrepôts le problème de la construction d’un algorithme qui permet de vérifier qu’une configuration est une solution admissible est annexe, il est utile si nous cherchons à déterminer un minorant à l’optimum par exhibition de solution admissible mais n’in- tervient pas, a priori, si l’on cherche à résoudre le problème en dénombrant le nombre de configurations possibles à X caisses et à comparer le résultat avec le nombre de configurations non-admissibles à X caisses.

En ce sens, le problème de la validation du produit de la stratégie appa- raît comme annexe par rapport au problème initial mais peut être essentiel suivant le chemin de résolution que nous envisageons et ainsi devenir un problème à résoudre.

4.1. Deux types d’expériences. Nous avons vu précédemment que l’action d’expérimenter a pour objectif la résolution d’un problème. Nous allons distinguer deux types d’expériences qui vont dépendre du problème objet de l’expérience :

l’expérience générative, lorsque l’objet de l’expérience est un problème de recherche de solutions ;

l’expérience validative, lorsque l’objet de l’expérience est un problème d’existence.

Les noms de ces expériences sont données en référence à Dahan (2005, p. 22) qui distingue 2 types d’expérience :

Une expérience est une procédure qui génère des faits obser- vables avec comme fonction, une fonction de validation ou de génération d’hypothèses. Une expérimentation est la réa- lisation d’une expérience avec la fonction attribuée à cette expérience, validative (d’hypothèse) ou générative (d’hypo- thèse).

Nous partageons son point de vue selon lequel il y aurait deux types d’expériences mais considérons que c’est l’objet, i.e.le problème, qui carac- térise l’expérience et non la rétroaction de l’expérience. Nous considérons que la validation ou la génération de problèmes sont des rétroactions pos- sibles. D’autre part, nous ne parlons pas d’hypothèse mais de problème,

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notion plus générale qui englobe celle d’hypothèse de la même manière que la notion de conjecture.

Nous retrouvons aussi 2 types d’expériences chez Dias (2009, p. 160) :

’expérience-action’ (ou expérienciation) : Les élèves expéri- mentent "pour voir", actions qui peuvent être qualifiées d’es- sais, d’explorations ouvertes non référencées a priori à une théorie.[...]

’expérience-objet’ (ou expérimentation) : Les expériences sont conduites pour tester : une idée, une représentation, une image mentale.

L’expérience-objet apparaît comme similaire à l’expérience générative de Dahan (2005) même si elle semble plus générale pouvant prendre comme objet plus que des hypothèses. Quant à l’expérience-action, elle se rapproche de notre description d’expérimenter à travers une action. Cette expérience- action peut être vue comme notre expérience générative en remplaçant le

« pour voir » par « résoudre un problème de type recherche de solution ».

4.2. Lien entre expérience générative et expérience validative.

La stratégie associée à une expérience générative peut, parfois, se voir comme une succession d’expériences validatives. En effet, une expérience générative, dont l’objet est un problème P dont les instances appartiennent à ensemble E de cardinal supérieur à 2, entraîne la rencontre de problèmes qui sont des cas particuliers de P. Toutefois, le fait que nous rencontrions le problème n’implique pas le fait que nous cherchions à résoudre ces problèmes en allant jusqu’à une preuve mathématique ; nous pouvons nous contenter de donner une réponse sans en avoir fait la preuve, car l’objectif n’est pas la résolution de ces cas particuliers mais la résolution du problème général. Nous illustrons cela avec le problème de la roue au couleur

Exemple I.2 (Lien entre expérience générative et validative.). Nous considérons le problème de la roue au couleur P2,., pour quelles valeurs de n, existe-t’il une solution à P2,n?

P2,. est donc un problème de recherche de l’ensemble des n pour les- quels il existe une solution. La validation du produit de la stratégie consiste donc à vérifier qu’il existe une solution à P2,n pour un ndonné. De ce fait, une tentative de résolution de P2,. de manière expérimentale nous amène à rencontrer des problèmes d’existence du type P2,n. L’expérimentation géné- rative qui a pour objetP2,. a donc comme stratégie une succession d’action similaires à des expérimentations validatives ayant pour objet P2,n10.

Nous expérimentons pour résoudre ce problème, nous choisisons de com- mencer par expérimenter sur une roue dont le cercle extérieur est composé de 2 couleurs, nous rencontronsP2,2. En essayant de construire une solution, nous réalisons, qu’il n’existe pas de solution, car soit nous n’utilisons qu’une seule couleur soit nous n’avons aucune couleur qui soit face à l’autre. Nous avons, ici, résolu P2,2 : la réponse est négative.

10A priori, cela ne veut pas dire que l’on va essayer de résoudreP2,n, en particulier si l’on ne prend pasP2,ncomme objectif de résolution alors il n’est pas nécessaire d’effectuer l’action tentative de preuve surP2,n.

Nous essayons ensuite avec trois couleurs sur le cercle extérieur, nous produisons la configuration de la figure I.3. Pour la valider nous tournons la roue d’un cran dans le sens des aiguilles d’une montre, nous obtenons alors une configuration qui n’est pas solution.

Fig. I.3. Une configuration pour un cercle extérieur composé de 3 couleurs.

En essayant de construire une nouvelle solution, nous remarquons qu’à changement de couleur près, la configuration de la figure I.3 est l’unique configuration possible. En effet, si l’on place une couleur rouge en face de la couleur rouge du cercle extérieur, nous sommes obligés de passer la cou- leur rouge devant la couleur bleu du cercle extérieur et comme nous devons utiliser deux couleurs, nous sommes obligé de placer la couleur bleu devant la couleur verte. Il n’y a donc pas de solution. Nous avons résolu P2,3 : la réponse est négative.

Nous allons maintenant essayer avec 4 couleurs, nous produisons la solu- tion de la figure I.4. En validant cette configuration, nous nous apercevons que c’est bien une solution. Nous avons résoluP2,4 : la réponse est positive.

Fig. I.4. Une solution avec un cercle extérieur composé de 4 couleurs.

Pour 5 couleurs, toutes les configurations que nous avons produites ne sont pas des solutions. Nous conjecturons alors que la réponse de P2,5 est négative. Nous ne faisons pas la preuve, car nous jugeons que le seul type de preuve que nous imaginons –la preuve par exhaustivité des cas – serait trop complexe à mettre en œuvre.

Pour P2,6, nous produisons la configuration de la figure I.5, c’est une solution. La réponse de P2,6 est donc positive.

Pour 7 couleurs, toutes les configurations que nous avons produites ne sont pas des solutions. Nous conjecturons alors que la réponse de P2,7 est négative. Nous ne cherchons pas à faire de preuve pour les mêmes raisons que pour P2,5.

Nous avons donc donné les réponses suivantes : – Non pour P2,2,P2,3,P2,5 etP2,7;

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Fig. I.5. Une solution avec un cercle extérieur composé de 6 couleurs.

– Oui pour P2,4 et P2,6;

Cela nous amène à conjecturer qu’il existe une solution si et seulement si le couleur sur le cercle extérieur est pair supérieur à 4.

Dans cet exemple, nous avons vu comment nous pouvions rencontrer des cas particuliers en expérimentant sur un problème de recherche de solutions dont l’une des instances est un ensemble de cardinalité supérieure à 2. Nous avons vu que nous avons résolu certains de ces problèmes, essentiellement ceux qui étaient triviaux, mais que nous nous sommes contenté de conjec- tures pour les cas plus complexes, car notre objectif n’est pas la résolution de ces cas mais du problème plus général.11

4.3. Expérimenter permet de découvrir des arguments locaux.

L’exemple précédent montre aussi qu’en essayant de construire une solution à P2,2 et à P2,3, nous avons construit des arguments locaux qui nous ont permis de faire la preuve de la non-existance d’une solution. De ce fait, ici, l’expérimentation nous a amené à effectuer une tentative de preuve de l’im- possibilité de la solution en nous donnant l’outil de la preuve, la construction par forçage.

4.4. Expérimenter, c’est faire des choix. A chaque fois que nous expérimentons, nous effectuons des choix sur différents types de variables :

– du problème. En effet, si nous nous intéressons au problème des caisses de dynamite sur un rectangle quelconque. Lorsque nous expérimen- tons, il est possible soit de choisir un rectangle de dimensions parti- culières sur lequel expérimenter, soit d’essayer d’expérimenter sur un rectangle générique12 ou pour le problème de la roue au couleur, du nombre de couleur sur le cercle exérieur. Cela nécessite donc de fixer les variables du problème. Concernant le choix de l’objet sur lequel expé- rimenter,Perrin(2007) met en avant le premier exemple non-trivial, il souligne aussi que la trivialité est dépendante de l’expérimentateur.

11Nous verrons plus tard que la conjecture est incorrecte mais que les réponses que nous avons données aux cas particuliers sont justes.

12Le rectangle particulier et le rectangle générique ne sont pas au même niveau, expérimenter sur le rectangle générique implique que ce que nous testions ou essayions de voir soit vue de manière structurel, c’est-à-dire en ne faisant intervenir que les propriétés d’un rectangle quelconque.

– de la stratégie employée. Il est, en effet, possible que la stratégie soit dépendante de certaines variables, il nous faudra alors fixer les para- mètres de la stratégie pour expérimenter. Par exemple, pour la si- tuation des caisses de dynamites, imaginons que nous essayons de construire une solution en plaçant une caisse sur chaque diagonale de la figure III.7 alors nous avons plusieurs possibilités pour placer les caisses qui ne sont pas sur les diagonales coins.

Les expérimentations en mathématiques peuvent être conduites en uti- lisant divers types d’outils : logiciels informatiques, matériaux concrets, papier-crayon. . . Nous n’allons pas développer cela plus en détail dans cette section, car ce qui nous intéresse est le processus d’expérimenter, que nous considérons comme « transversal » à tous ces outils. Nous traiterons dans la sectionles mathématiques expérimentales, des différences entre ces outils.

Toutefois, nous pouvons rajouter qu’expérimenter c’est aussi choisir l’outil que nous allons utiliser et effectuer les réglages de cet outil pour produire le fait qui nous intéresse.

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