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CHAPITRE 2 – Culture, imaginaire et quotidien : entre le social rationnel moderne et la

2.1 Culture et Cultures

2.1.2 Identité X identification

La dynamique du mouvement, responsable d'un constant 'va-et-vient', un déplacement à travers lequel on part de ce qui nous est connu vers ce qui nous est étranger pour retourner auprès des nôtres, permet, finalement, de revenir à ses racines. L’errance débute par une fuite qui rappelle l’origine. Mais cette fuite pour qu’elle ait un sens doit s’opérer à partir de quelque chose qui soit stable. Pour outrepasser la limite, il faut bien que celle-ci existe.

La société contemporaine a négligé, en l'enfermant, le coté dynamique de la vie sociale, et s’est, donc, elle même sclérosée. C’est pourquoi nous sommes en train de vivre une période charnière de rééquilibrage entre ces composantes.

Pour notre part, à travers nos investigations sur le terrain, nous avons essayé de voir comment les tensions entre les composantes des différentes cosmologies se présentent à travers le récit des acteurs dans leurs expériences quotidiennes de rencontre avec autrui. Immergés dans des structures composantes de la cosmologie propre à la Modernité – des institutions gouvernementales de

recherche scientifiques – ces acteurs se sont confrontés, même à leurs insu, aux contextes où c'est la logique cosmologique postmoderne qui s'impose : en effet, ils se trouvent dans la condition d'être errant.

Une telle condition, d'être errant, se caractérise à partir du moment où ces acteurs sociaux se déplacent entre des univers pluriels et distincts à plusieurs niveaux : du monde scientifique vers le monde religieux ; de sa patrie vers un pays étranger ; du contexte organisationnel, qui est le sien vers le contexte de la vie quotidienne d'autrui, donc, pas la sienne. Car la condition d'errance est propre au nomadisme contemporain, caractérisé par le mouvement constant d'va-et-vient : aller vers l'étranger, vers ce qui nous est tout simplement étrange car inconnu, en un mot, aller vers l'autre ; retour auprès de la terre mère, auprès de tout ce qui nous est familier car connu, en un mot, retour vers nos racines. Voilà l'essence de l'enracinement dynamique dont nous parle Michel Maffesoli.

D'après Hall, cette supposée crise identitaire serait un des effets de la prise de conscience d'une diversité qui était déjà là car toujours existante. Prise de conscience due, entre autres, au phénomène de globalisation que l'intellectuel britannique comprend comme la compression de l'espace-temps causée par l’accélération de l'expansion du système économique Capitaliste, et par conséquent, du mode de vie consommateur Occidental.

Pourtant, comme nous l'explique Muniz Sodré, ce phénomène ne se produit pas seulement en raison des impositions économiques mais aussi par celles causées par les changements socio-techniques qui ont donné jour à un espace-temps technologique réglé par les transports de haute vitesse et par les machines de télécommunications qui disposent d'interfaces de commutation instantané.

La culture trouve sa place, alors, au sein de la globalisation, au delà de la sphère de l'économie, à travers de nouvelles expressions, comme la techno culture126 (ou la cyberculture127). D'où le point de vue de Michel Maffesoli et son ''temps des tribus'' : au milieu des tensions entre le global et le local, résultats de la compression des catégories espace et temps, on est témoin de l'effondrement des frontières tel qu'on les comprenait jusqu' à hier.

La culture est à nouveau vécue, alors, à travers les manifestations vraiment liées à la vie quotidienne. Reliée à son essence, le(s) culture(s) dans la Postmodernité est(sont) crée(s) et nourrie(s) autours des partages qui sont plus de l'ordre de l'esthétique que de l'éthique. La 'présentation' (Postmoderne) prend la place de la représentation (Moderne).

Ainsi, pour Maffesoli, différemment de Hall, la remise en question du sujet – et avec lui, des identités du type unifiées et unificatrices, tel que les identités nationales, est un des signes de l'effondrement d' une conception du monde : celle prônée par la Modernité basée sur l'unité et l'indivisibilité.

En guise de conclusion (provisoire), Stuart Hall affirme que la contestation et la délocalisation des identités fermées, comme celles basées sur les cultures nationales, peuvent être vues comme un des effets de la globalisation. C'est là que Hall utilise le terme identification. Mais, différemment de Maffesoli, il la voit comme le résultat du décentrement causé par la globalisation sur les identités unifiés. La pression contestatrice au sein de ce phénomène majeur aurait causé alors un effet pluralisant sur les identités, en produisant une variété de possibilités y compris des nouvelles positions d' identification.

Si Hall achève son ouvrage en concluant que la globalisation n'avait pas l'air de produire ni le triomphe du global, ni la persistance du local dans son ancienne forme nationaliste, ce phénomène pourrait finir par faire partie du lent et inégal, mais continu, processus de décentrement de

l'Occident128, Maffesoli, quant à lui, nous présente une autre perspective.

Entre les preuves du triomphe du global (l’homogénéisation des produits de consommation, la pasteurisation de la restauration, etc.) et celles de la persistance du local (la réapparition des mouvement fondamentalistes de différentes inspirations – nationalismes, religieuses, etc.), la pluralité revient sur le devant de la scène sociale à travers l'accent mis sur les pratiques quotidiennes.

126Cf. SODRE, Muniz (1999) op.cit., p.

127Cf. LEMOS, André. As estruturas antropologicas do cyberspaço, 1996.

128HALL, Stuart. DU GAY, Paul. (1996) op.cit.

Et c'est en reprenant une place centrale avec le pluralisme au sein de la vie sociale mais exprimé au quotidien que Michel Maffesoli nous propose de ne plus parler d'identité sinon d'identification.

Mais, différemment de Stuart Hall, le sociologue français attribue au terme une acception plus profonde du fait qu'il synthétise la manière propre à la personne postmoderne (non plus le sujet moderne) de définir 'soi même' « A l'individu unique succède la personne plurielle. »'129.

A la fois, personnelle et collective car mutable et toujours mouvante, l'identification telle que nous le propose Maffesoli – comme une 'identité plurielle' qui permet de vivre pleinement une multitude d' instants présents – est typique de la logique postmoderne. Basée sur ce que le sociologue français appelle la sociabilité émotionnelle, le fait d'être enracinée dans la vie vécue et partagée hic et nunc fait partie des caractéristiques distinctives de cette manière de voir et de se définir soi même comme une sorte de 'moi pluriel'.

Dans la dynamique de la sociabilité émotionnelle, l'accent est mis sur le présent – l'instant donné, concret, par conséquent profitable ici et maintenant – et non plus sur le futur qui est supposé plus heureux, comme c'était le pari de la Modernité.

Maffesoli nous parle du jeu qui se produit au sein des pratiques quotidiennes. Celui qui est

responsable du renouvellement constant des pratiques culturelles qui restent, ainsi, vivantes. Un jeu qui a trouvé ses propres moyens de rester attaché au réel, en permettant, malgré tout, que la

sociabilité puisse continuer d'exister.

Pour conclure, nous voulons attirer l'attention sur un point de convergence entre les pensées de Stuart Hall et Michel Maffesoli.

Il y a un moment où Hall nous parle de deux formes de résistance à la globalisation

homogénéisante, l'une par la négation, l'autre, par l'hybridation. La première « consiste à 'se débrancher', à faire sécession, à s'arranger pour ne plus appartenir à la modernité.130» Mais celle-ci n'est pas accessible aux masses et aux gens ordinaires du fait qu'ils n'ont pas le choix : leurs mentalités sont inexorablement prises dans les contradictions de la globalisation. Alors, pour ceux qui vivent la vie de tous les jours il y a une deuxième forme de résistance, à savoir, l'hybridation qui (ce sont nos remarques) :

[...] peut alors relever de deux scénarios possibles. L'un de ces scénarios consiste à gorger le public d'un vaste éventail de différences futiles. L' autre permet à ce public d'introduire les différences qui comptent. Les règles du jeu ne sont pas simples. Le résultat n' est pas garanti. Mais pour certains, ce jeu est le seul possible.

Alors, quand Stuart Hall parle des ''différences qui comptent'' nous pouvons entrevoir la

reconnaissance de l'importance portée au quotidien par ces ''gens ordinaires''. Voilà le point où nous pouvons dire que sa pensée coïncide avec la vision de Maffesoli pour qui « En effet, le pluralisme quotidien souligne que les menus gestes de la vie, les créations minuscules, les situations

existentielles qui nous constituent, tout cela s'organise et se structure dans un mixte significant.»131

129MAFFESOLI, Michel. (2006) op.cit., p.12

130HALL, Stuart. (2000) op.cit., p.102.

131MAFFESOLI, Michel. (2010) op.cit., p. 113.

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