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CHOIX D’UN CADRE D’ANALYSE

No documento CADRE CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE (páginas 111-116)

LE TOTAL QUALITY MANAGEMENT (TQM)

1. CHOIX D’UN CADRE D’ANALYSE

Avant de présenter (§ 1.1) et de justifier (§ 1.2) le cadre d’analyse choisi pour rendre compte du TQM tel que défini dans la littérature scientifique contemporaine, il nous paraît important de clarifier la place accordée à ce cadre d’analyse par rapport au cadre conceptuel global de la recherche. Cette clarification a pour objectif principal d’en justifier le positionnement spécifique au sein de cette section relative au TQM :

• Du point de vue de la logique de la recherche, ce cadre d’analyse constitue un “point d’ancrage” à partir duquel la problématique sera formulée (cf. section suivante), d’où un positionnement antérieur à celui de l’énoncé de la problématique.

• Cette problématique, qui a trait au passage d’une certification ISO 9001 au TQM, s’inscrit au sein de ce cadre d’analyse principalement parce que ce dernier est pertinent pour rendre compte des différentes approches du TQM. L’intégration de la certification ISO 9001, qui s’avère possible au sein du cadre d’analyse, correspond, au niveau de la logique de la recherche, à une constatation ex post ; d’où un positionnement privilégié de ce cadre d’analyse au sein de la section relative au TQM.

• Par ailleurs, il faut préciser que, au-delà du recoupement réalisé dans la présente section entre TQM et théorie des organisations, le recoupement effectué au Chapitre I entre TQM et stratégie de l’entreprise prend lui aussi une place à part entière au sein du cadre conceptuel de la recherche177.

1.1. La classification paradigmatique des théories des organisations de Burrell et Morgan

A la base nous nous situons dans le cadre de la définition d’un paradigme au sens de Kuhn, à savoir une représentation de la réalité qui définit “ souvent implicitement les problèmes et les méthodes d’un domaine de recherche pour des générations successives de chercheurs ” (KUHN, 1983 : p.29). La littérature scientifique offre plusieurs représentations paradigmatiques visant principalement à classifier les nombreuses conceptions théoriques de l’organisation, souvent en fonction des fondements épistémologiques qui les sous-tendent.

Pour le chercheur en sciences sociales, l’utilité de telles classifications réside principalement

177 Le paradigme de la stratégie centrée sur les ressources et le concept d’intention stratégique appliqués aux démarches TQM seront aussi intégrés dans la problématique et supporteront donc les démarches empiriques de la recherche.

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dans le fait qu’elles constituent des cadres d’analyse lui permettant de prendre conscience de sa position personnelle, de celle des autres, tout en l’incitant à adopter d’autres positions qui lui sont moins “naturelles”. Ainsi, ces classifications aident le chercheur dans sa recherche d’une image de l’organisation la plus fidèle possible.

A travers l’analyse de cinq classifications paradigmatiques des théories de l’organisation (ASTLEY et VAN DE VEN, 1983 ; BOLMAN et DEAL, 1984 ; BURRELL et MORGAN, 1988 ; KOENIG, 1993 ; VAN DE VEN et POOLE, 1995), Michel Beaumont identifie la classification de Burrell et Morgan comme la plus appropriée dans le cadre de sa thèse en sciences de gestion sur la Qualité de la gestion des ressources humaines dans les entreprises certifiées (BEAUMONT, 1996 : pp.12-27). Cette classification, dont la reprise dans le cadre de notre propre recherche est justifiée au paragraphe suivant, s’appuie sur deux oppositions (cf. Figure 6 page suivante) :

• L’opposition de deux conceptions en sciences sociales : une conception objective qui assimile l’univers social au monde physique, et une conception subjective qui fait du premier une exception par rapport au second.

Dans la conception objective de la réalité organisationnelle, cette dernière est considérée comme ayant une existence à part entière. Elle est “extérieure” aux acteurs dans l’organisation et s’impose à eux malgré qu’ils puissent tout de même agir sur elle “comme l’artisan agit et transforme la matière”.

Dans la conception subjective, la réalité organisationnelle n’existe qu’à travers la conscience qu’en ont les acteurs. L’existence des structures, des stratégies ou des politiques n’est pas niée, mais la réalité organisationnelle n’est qu’interprétation, et seul le détour par la subjectivité des acteurs peut permettre de comprendre le sens de leur action individuelle ou collective. Cette distinction objectivisme/subjectivisme correspond à une différenciation menée à quatre niveaux : au plan ontologique, au plan épistémologique, au plan de la nature de l’homme dans son environnement, ainsi qu’au plan méthodologique (cf. Annexe 10).

• L’opposition au sein des sciences sociales entre l’ordre et le conflit qui donne lieu à l’utilisation de deux positionnements opposés lors de l’étude de la nature du changement au sein des organisations : d’un coté, les théories sociales relevant de la régulation, qui décrivent le fonctionnement du système social et s’attachent à montrer son caractère équilibré ; d’un autre coté, les théories sociales qui s’orientent plutôt vers la promotion d’un changement radical, d’une rupture, et mettent l’accent sur les conflits profonds, les modes de domination, les contradictions structurelles.

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La première position d’observation, qui relève de la régulation, perçoit l’organisation essentiellement comme un ensemble de personnes poursuivant des buts communs. Elle n’ignore pas le conflit mais le considère soit comme un “dysfonctionnement”, soit comme un moyen de passer d’une étape à une autre, chaque étape devant être replacée dans une marche orientée vers l’atteinte d’objectifs organisationnels. Le conflit, supposé être l’expression d’une opposition ponctuelle, rentre ainsi dans le cadre de la coordination fonctionnelle de l’organisation, elle-même supposée fonctionner suivant un mode de régulation. Cette régulation rend compte des phénomènes de contingence et donc d’adaptation. Cependant, il y a pour les tenants de cette position d’observation une certaine permanence de la nature organisationnelle, d’où le terme aussi employé d’approche par la stabilité (IGALENS et LOIGNON, 1997).

La deuxième position, celle du changement, considère que le conflit n’est ni fonctionnel, ni dysfonctionnel. Il est plutôt l’expression d’une opposition fondamentale et permanente entre les intérêts de plusieurs groupes en compétition pour le partage de ressources organisationnelles. La position du changement perçoit les organisations comme en perpétuel mouvement : le remous d’un fleuve qui présente l’apparence d’une stabilité, en constitue une bonne métaphore. Au travers de cette position, le changement organisationnel ne peut ainsi être appréhendé que de manière radicale, d’où le terme de changement radical employé par Burrell et Morgan.

CHANGEMENT (RADICAL)

SUBJECTIVISME

Paradigme humaniste radical

(Approche subjective du changement dans les organisations)

Paradigme structuraliste

(Approche objective du changement dans

les organisations)

OBJECTIVISME

Paradigme interprétatif

(Approche subjective de la stabilité dans

les organisations)

Paradigme fonctionnaliste

(Approche objective de la stabilité dans

les organisations) REGULATION (ou STABILITE)

Figure 6 : La classification paradigmatique des théories des organisations de BURRELL et MORGAN (1988 : p.22)

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1.2. Justifications du choix du cadre d’analyse

Dans le cadre de nos travaux, le choix de la classification de Burrell et Morgan comme cadre d’analyse de la littérature, en vue du dégagement d’une problématique et de l’émission d’hypothèses, nous semble particulièrement adapté, pour des raisons propres à la constitution même de la classification, ainsi que pour des raisons propres au thème de la recherche.

• Raisons propres à la constitution même de la classification :

La capacité de la classification à couvrir l’ensemble des approches possibles des organisations. Ceci est fondamental dans la mesure où la succession des idées et théories dans le domaine social s’est généralement déroulée sur le mode de la juxtaposition et non sur celui de la substitution : les théories les plus modernes n’ont pas chassé les plus anciennes ; elles ont souvent mis l’accent sur des phénomènes qui étaient jusque là sous- estimés ou même ignorés. Les perspectives historiques du chapitre I en sont un exemple dans le cas spécifique de l’évolution de la notion de qualité au sein de l’entreprise.

Le caractère univoque des critères de distinction de la classification (objectivisme/subjectivisme et régulation/changement) qui en permet une utilisation facilitée en tant que cadre d’analyse. En effet, ces critères correspondent à des options conceptuelles tellement différentes que les erreurs d’interprétation sont très limitées. A contrario, la classification de Bolman et Deal, ainsi que celle de Van De Ven et Poole paraissent beaucoup plus perméables aux compromis (BEAUMONT, 1996 : pp.18-19).

La capacité de cette classification à particulièrement bien éclairer les aspects liés aux fondements épistémologiques, à l’orientation des problématiques, et à la définition des méthodologies de recherche en sciences sociales178.

Cependant, il n’en demeure pas moins qu’un certain nombre de pièges et de limites “guettent”

le chercheur lorsque, au moyen d’une classification aussi distinctive, il désire à la fois analyser l’abondante littérature et interpréter les résultats des démarches empiriques menées.

Il ne faut pas perdre de vue que le travail de recherche doit s’affranchir d’une vision cloisonnée ; et peut-être plus particulièrement dans le cadre de l’analyse des résultats empiriques : « Le caractère incommensurable des paradigmes ne doit pas inhiber la production du savoir actionnable » (ARGYRIS, 1995 : p.289).

178 Ainsi par exemple, dans le cadre de nos démarches empiriques, la classification pourra être utilisée afin de définir la stratégie d’accès au réel à mettre en œuvre et tout particulièrement les différentes techniques correspondantes de collecte de données (cf. Partie 2, Chapitre I, Section 1, § 4).

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• Raisons propres au thème de la recherche :

Il s’agit de montrer que la classification paradigmatique de Burrell et Morgan est particulièrement adaptée pour traiter du passage d’une certification ISO 9001 à un management par la qualité totale (TQM).

Raisons relatives au TQM : le choix de la classification de Burrell et Morgan comme cadre d’analyse de la littérature scientifique relative à l’approche TQM est repris de la thèse de doctorat de BEAUMONT (1996). Ce choix permet à l’auteur de mettre en évidence l’émergence de deux paradigmes distincts du TQM, le paradigme fonctionnaliste et le paradigme humaniste radical, dont les contenus respectifs semblent fortement rappeler les deux différentes approches de la notion contemporaine de la qualité identifiées au sein des perspectives historiques du premier chapitre : l’approche normalisatrice et celle centrée sur les ressources humaines. Par ailleurs, la récente approche du Total Quality Learning (TQL) axé sur l’apprentissage de la qualité et, en stratégie de l’entreprise, le paradigme centré sur les ressources constituent selon nous deux raisons complémentaires qui confirment la pertinence d’une reprise de la classification de Burrell et Morgan dans le cadre de notre propre recherche.

Raisons relatives à la certification ISO 9001 : la section précédente permet de constater qu’elle s’inscrit incontestablement dans le paradigme fonctionnaliste de la classification de Burrell et Morgan. Elle est en effet issue d’une conception objective de la réalité organisationnelle : au travers de l’ensemble de la documentation qualité, elle considère que les connaissances relatives à l’organisation relèvent d’un contenu objectif et transmissible, sa mise en oeuvre laissant peu de place à la subjectivité des acteurs, source éventuelle de dysfonctionnements lors du déroulement des processus (à fiabiliser selon l’essence même de l’assurance de la qualité). Par ailleurs, au travers de la certification, l’organisation est supposée fonctionner suivant un mode de régulation : l’ensemble des acteurs (y compris les acteurs externes : clients, fournisseurs...) sont censés poursuivre des buts communs ou du moins compatibles, les contradictions, les conflits, les phénomènes de contingence étant pris en compte dans le cadre d’une coordination fonctionnelle où l’atteinte du consensus est toujours possible. De plus, les dilemmes qu’elle induit semblent trouver leur origine dans l’existence, au sein des organisations, des deux axes d’opposition propres à la classification de Burrell et Morgan : objectivisme/subjectivisme et régulation/changement.

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