• Nenhum resultado encontrado

Le développement international du concept et des pratiques de qualité totale

No documento CADRE CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE (páginas 42-47)

DU CONTROLE AU MANAGEMENT DE LA QUALITE

5. LA QUALITE TOTALE

5.2. Le développement international du concept et des pratiques de qualité totale

Partie 1 Chapitre I Section 1 : Du contrôle au management de la qualité

a su développer que son impact sur le mouvement international de la qualité a été si important. Au-delà des cercles de qualité, véritable outil du management participatif, on peut citer, concernant le principe de focalisation client, le Quality Function Deployment (QFD), outil d’intégration des besoins implicites et explicites des clients au sein de l’entreprise tout entière (COLE et alii, 1993 : p.75 ; LU et KUEI, 1995 ; REED et alii, 1996 : p.179). Concernant la logique préventive centrée sur les processus, Kaoru Ishikawa invente le célèbre

“diagramme en arrête de poisson” ou “diagramme des 5M” (HACKMAN et WAGEMAN, 1995 : p. 314), un des nombreux outils de résolution de problèmes qui seront (et sont encore) utilisés de façon systématique par l’ensemble des salariés japonais. Il faut aussi noter l’apport de T. Ohno, ingénieur chez Toyota, qui réorganise l’entreprise dès 1956 en théorisant et en mettant en place le kan-ban, un nouveau système de gestion en juste à temps des commandes fournisseurs et de la production (OHNO, 1989).

5.2. Le développement international du concept et des pratiques de

• Au niveau du rapport de production : la pression du chômage et la flexibilité du travail conduisent à remettre en cause la socialisation du risque par la firme (acquis sociaux, emploi pérennisé). Par ailleurs, la flexibilité de l’offre nécessite des salariés responsables et impliqués dans la recherche de la satisfaction du client singularisé.

Pour la firme, il s’agit d’être capable d’adapter sa production de manière plus précise et plus fine à la complexité accrue du marché, c’est-à-dire aux différentes caractéristiques d’usage souhaitées par les consommateurs. Au-delà, il s’agit de développer de nouvelles formes d’organisation de production pour parvenir à une réponse plus rapide et plus ajustée à la demande des clients (AGATHOCLEOUS, 1996 : p.5). Jusqu’au milieu des années 1970, en faisant l’hypothèse que la nature de la demande reste inchangée, les positions stratégiques des entreprises avaient été principalement fondées sur la compétition par les prix, au moyen de la réalisation d’économies d’échelle essentiellement (BORONAT et CANARD, 1995 : p.95). A partir de cette date, le nouveau rapport d’échange que nous venons d’expliciter, couplé au succès commercial des entreprises japonaises, et à l’émergence progressive de nouveaux travaux relatifs aux dimensions humaine et économique de la qualité, conduit l’entreprise à davantage axer sa compétitivité sur la qualité.

A partir des années 1970 commence, aux Etats-Unis puis en Europe, une période d’imitation du modèle de management nippon : le Total Quality Management (TQM) se traduit au début par une importation d’outils managériaux en provenance du Japon (CHEVALIER, 1989 ; KANO, 1993), soumise à des effets de mode (LAWLER et MOHRMANN, 1985) et dont la mise en place est presque toujours déléguée. Ainsi, selon Juran, les dirigeants américains vont commettre une erreur cruciale dans le processus d’appropriation de ce modèle : « ceux-ci vont déléguer l’entière responsabilité de leurs plans d’amélioration de la qualité aux cadres moyens… Ils n’ont pas réalisé à cette époque que trouver des solutions à la qualité passait par trouver des solutions dans l’entreprise tout entière, ce qui ne pouvait pas être délégué » (JURAN, 1993a : p.47). Dès la fin des années 1970, les entreprises françaises vont aussi tenter de s’inspirer du mode de gestion japonais qui associe étroitement les salariés à la recherche d’une amélioration continue de la qualité.

L’heure est donc au management participatif pour mobiliser chacun autour d’un objectif

collectif ambitieux décliné le plus souvent en termes d’excellence51. Sous l’impulsion de

51 Se référer par exemple au best-seller managérial de l’époque, « Le prix de l’excellence » de Peter et Waterman, 1983, Paris : Interéditions. En contrepoint, on peut se référer au dossier « Entreprise : les concepts à la mode », Cahiers du LERASS, n°23, mai 1991, Université Toulouse III.

38

Partie 1 Chapitre I Section 1 : Du contrôle au management de la qualité

l’AFCIQ52 puis surtout de l’AFCERQ53, le mouvement des cercles de qualité, qui est le phénomène le plus visible de cette tendance, prend un essor considérable. Ainsi, en 1986, plus de 20 000 cercles français sont répertoriés (PERIGORD, 1987 : p.59) ce qui, malgré les résultats mitigés obtenus par certains d’entre eux et un essoufflement qui ne tarde pas à se manifester (LAVILLE, 1993), représente tout de même un mouvement de grande ampleur, notamment dans les grandes entreprises françaises. Le succès de la démarche se mesure souvent, dans les congrès internationaux, au nombre de cercles implantés. L’Europe rêve de rattraper le Japon dans la mise en place de ces petits groupes permanents et homogènes, composés de 5 à 10 volontaires appartenant à une même entité organique ou ayant des préoccupations professionnelles communes (CHEVALIER, 1989). Or, comme l’exprime Michel Beaumont, en se référant aux travaux de ROBIN (1987) : « Au Japon, les cercles de qualité sont le produit, certes d’une implantation américaine, mais surtout d’une culture originale, et en apparaissent plutôt comme un fruit ; tandis que dans l’esprit des dirigeants occidentaux les cercles de qualité sont perçus comme une graine qu’il suffit d’implanter » (BEAUMONT, 1996 : p.68). Françoise Chevalier, qui a étudié de près le développement des cercles de qualité en France, note que ceux-ci ont contribué à faire évoluer les pratiques et les comportements et que cette expérience « continue à irriguer le fonctionnement quotidien des organisations » (CHEVALIER, 1991). On peut d’ailleurs noter qu’il existe aujourd’hui dans beaucoup d’entreprises des groupes de travail sur la qualité qui fonctionnent selon des formes et sous des appellations variées et qui, à défaut d’avoir conservé toutes les méthodes et toutes les prérogatives des cercles de qualité, en perpétuent néanmoins un certain esprit de concertation.

Parallèlement au phénomène d’appropriation du modèle de management japonais, de nouvelles considérations se développent en Europe et aux Etats-Unis concernant la dimension humaine de la qualité. Dès 1969, au congrès de Tokyo, Borel de ITT et Cantarelli de Simca présentent la gestion de la qualité comme école de la démocratie au sein de l’entreprise : « La gestion de la qualité s’accommode très mal d’une organisation autocratique de l’entreprise ;

52 En 1957, sont créées, l’EOQC (European Organisation for Quality Control) et l’AFCIQ (Association Française pour le Contrôle Industriel de la Qualité), associations destinées à promouvoir la gestion de la qualité dans les entreprises, respectivement en Europe et en France.

53 L’AFCERQ (Association française des cercles de qualité), créée en 1981 avec comme objectif la promotion du management participatif au travers des cercles de qualité (JOUSLIN DE NORAY, 1990 : p.9) permet d’élargir singulièrement le champ de la qualité en France. L’AFCIQ et l’AFCERQ disparaissent en fusionnant en 1991 pour constituer le MFQ (Mouvement Français pour la Qualité).

39

à la démocratisation des structures doit répondre une démocratisation des rapports humains, car la qualité est vraiment l’affaire de tous et a besoin des efforts de toutes les forces vives de l’entreprise ». Et les dirigeants ont une responsabilité centrale : « L’esprit créatif, l’imagination, la connaissance, la compétence, la volonté de faire et de bien faire, d’apporter sa contribution à la collectivité font partie des facteurs que l’entreprise et ses dirigeants doivent savoir susciter chez les salariés et leurs représentants. Le rôle du directeur d’entreprise va donc être la recherche d’un équilibre entre la gestion économique et la gestion sociale auxquelles il est confronté dans sa mission journalière » (CANTARELLI, 1990 : p.114). Philip Crosby, qui dans les années 1960 travaille dans la société Martin54, est convaincu de l’importance du facteur humain dans la réalisation de la qualité et du “zéro- défaut”, dont il est un fervent promoteur. En 1979, la publication de son ouvrage « Quality is free : the art of making quality certain » (New-York : New American Library) aura une influence importante sur le développement international du management par la qualité totale, dans la mesure où management participatif et gains économiques pour l’entreprise y sont tous deux associés. Michel Beaumont note, au travers des 14 points de la qualité selon Crosby (voir Tableau 1 ci-dessous), « l’importance reconnue à la structure et aux moyens de mobilisation des hommes pour l’amélioration de la qualité » (BEAUMONT, 1996 : p.66-67) : concerne 7 points sur les 14 (points 2, 5, 7, 8, 9, 12 et 13).

1 Engagement de la direction et des cadres

2 Mise en place d’équipes d’amélioration de la qualité 3 Mise en place de mesures pour chaque secteur et chaque service 4 Evaluation du coût d’obtention de la qualité

5 Faire prendre conscience de l’importance de la qualité

6 Entreprendre des actions correctives

7 Mettre en place les comités de Zéro défaut

8 Former les collaborateurs

9 Organiser une journée Zéro défaut

10 Définir des objectifs

11 Eliminer les causes d’erreurs

12 Mettre en place un système de reconnaissance

13 Organiser des Conseils de la qualité

14 Recommencer sans cesse

Tableau 1 : Les 14 points de la qualité selon CROSBY (1986a et 1986b)

54 C’est à la société Martin qu’est attribué le premier programme zéro-défaut en 1961 : cf. § 5.1.

40

Partie 1 Chapitre I Section 1 : Du contrôle au management de la qualité

En fait, la particularité des propos de Crosby (qui explique d’ailleurs le titre de son ouvrage) tient dans la justification économique qu’il donne aux démarches d’amélioration continue. En opposition avec Juran, d’après lequel il est nécessaire de maîtriser les coûts de la qualité pour correctement gérer l’entreprise55 car « les coûts de prévention augmentent de manière asymptotique, devenant infinis pour un niveau de conformité de 100% » (SCHNEIDERMAN, 1986), Crosby prône une nouvelle approche des coûts de la qualité, dite approche du zéro-défaut. Selon Crosby, une amélioration incrémentale et continue des processus permet, même à des niveaux de qualité proches de 100%, de maintenir les coûts de prévention inférieurs aux coûts des non-conformités qui seraient sinon obtenus. En confirmant ainsi l’efficacité économique de la méthode japonaise kaizen56, Crosby apporte dans les années 1980 un élan considérable au mouvement international de la qualité totale. D’ailleurs, dès cette période, plusieurs publications scientifiques relatives aux coûts de la qualité tendront plutôt à valider l’approche de Crosby et à remettre en cause l’approche classique de Juran57, démarches empiriques à l’appui (SCHNEIDERMAN, 1986 ; JAMIESON, 1989). Au travers du cas de l’entreprise Motorola, James Belohlav explique en quoi le modèle de management japonais et l’approche zéro-défaut des coûts de la qualité ont fortement contribué à positionner la qualité en tant que déterminant stratégique de la rentabilité des entreprises (BELOHLAV, 1993). Cette place de la qualité au sein de la stratégie de l’entreprise, que nous abordons spécifiquement dans la section suivante, est clairement visible dans les définitions de la qualité totale proposées dès le début des années 1980. A cette époque, l’AFCERQ définit la qualité totale comme « l’ensemble de méthodes et de principes organisés en stratégie globale, visant à mobiliser toute l’entreprise pour obtenir la satisfaction du client au moindre coût » (BEAUMONT, 1996 : p.69). Notons qu’au travers d’un dossier spécial sur le TQM édité en avril 1998 dans la revue du MFQ, Qualité en mouvement, un encart intitulé Définition de la qualité totale donne, à ce jour, une définition parfaitement similaire (MFQ, 1998 : p.23)58.

55 Cf. nos propos du §4.2. de la présente section.

56 Dans la préface de l’ouvrage de Masaaki Imai, « Kaizen : la clé de la compétitivité japonaise », Henri-Claude de Bettignies, professeur à Stanford, attribue à ce terme (qui signifie amélioration en japonais) une terminologie occidentale : un artisanat systématisé à la grande entreprise, culte du mieux (IMAI, 1989).

57 Des détails sur les distinctions entre l’Ecole classique et l’Ecole zéro-défaut des coûts qualité sont présentés dans notre mémoire de DEA (LERAT-PYTLAK, 1996).

58 « Stratégie globale par laquelle une entreprise, avec tous ses partenaires, met tout en œuvre pour satisfaire ses clients en qualité, en coûts, en délais. Elle y parvient grâce à la maîtrise des processus et des produits et aussi grâce à l’implication de ses dirigeants et de son personnel » (MFQ, 1998 : p.23).

41

No documento CADRE CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE (páginas 42-47)