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Organiser les interactions entre acteurs et encadrer la thématique traitée dans le cadre d'une démarche d'aide à la décision: contribution de la méthode DELPHI

PARTIE II Mises en : Mises en perspective et étude de

1.4. Organiser les interactions entre acteurs et encadrer la thématique traitée dans le cadre d'une démarche d'aide à la décision: contribution de la méthode DELPHI

1.4.1. Introduction

La méthode DELPHI est une méthode consistant à recueillir sur un ensemble de questions le point de vue d’experts. Il s’agit d’une procédure itérative dans laquelle est mise en œuvre une certaine forme de structuration de la participation d’acteurs multiples. A ce titre, la méthode nous intéresse. Notre propos est, ici, de montrer que la méthode DELPHI, dans certains contextes, peut constituer une démarche complémentaire des activités d’aide à la décision. Elle peut en effet contribuer à faire d’une démarche d’aide à la décision une démarche participative. Par ailleurs, le cas pratique que nous présentons au chapitre 5 a mobilisé une procédure de type DELPHI. Il nous paraissait donc important d’en présenter dans le cadre de cette section les principaux ressorts.

1.4.2. Présentation de la méthode

Cette procédure a été développée par N. Dalkee et ses associés de la RAND corporation. Nous en trouvons entre autre un exposé détaillé dans Dalkee et al. [1972]. Elle s’appuie sur l’implication dans une démarche de recueil de points de vue de trois catégories d’acteurs :

- Le groupe des décideurs : ils sont ici maître d’ouvrage du processus et sont à ce titre en partie liés à ce qui émerge finalement de la procédure ;

- Le groupe des acteurs en charge de la mise en œuvre de la procédure : il s’agit de coordinateurs qui supervisent les différentes phases constitutives de la démarches ; dans certains contextes, nous parlerions de facilitateurs28 ;

- Le groupe des répondants ou des interrogés : il est constitué généralement des experts dont on souhaite recueillir le jugement sur un ensemble de questions.

Hwang et Lin [1986] reprennent en partie Delbecq et al. [1975] pour identifier dans la procédure DELPHI 10 étapes successives :

(1) Construction d’un questionnaire. Il s’agit d’une phase déterminante dans laquelle il est essentiel qu’une attention particulière soit apportée à la formulation des questions pour que celles-ci puissent être comprises de la même façon par tous les experts interrogés.

(2) Sélection et prise de contact avec les répondants. Il s’agit au même titre que la première phase d’une phase importante. La sélection doit tenir compte du degré d’implication des experts

dans le problème questionné, de la capacité des experts à apporter une information pertinente qu’il est possible de partager ensuite, de leur motivation à participer au processus DELPHI en entier. Enfin, les experts interrogés doivent évidemment avoir le sentiment que leurs points de vue seront effectivement pris en compte. Notons que nous retrouvons là une condition par ailleurs nécessaire à la mise en place d’une démarche de concertation.

(3) Détermination d’une taille du panel de répondants. Les auteurs suggèrent une taille de dix à quinze répondants

(4) Première série de questionnaire. Le premier questionnaire est soumis aux experts répondants.

Ce questionnaire est suffisamment libre pour que les experts puissent s’exprimer avec le moins de contraintes.

(5) Analyse des réponses au premier questionnaire. Les groupes des coordinateurs et des décideurs construisent un résumé des réponses et identifient les thèmes ou les réponses sur lesquelles il est possible de faire apparaître un consensus entre les experts interrogés.

(6) Deuxième série de questionnaires. Pour ce questionnaire, l’attention est spécialement portée sur la présentation aux experts interrogés des points qui dans le questionnaire précédent avaient suscité accords ou désaccords. Les acteurs peuvent modifier leurs points de vue initiaux et justifier ces changements.

(7) Analyse des réponses au deuxième questionnaire. Les groupes des coordinateurs et des décideurs déterminent les nombres de voix exprimées en faveur de thèmes et la réponse de chacun des experts.

(8) Troisième série de questionnaires.

(9) Analyse des réponses au troisième questionnaire.

(10) Préparation du rapport final. Ce dernier résume autant les résultats des différents questionnaires sur les questions posées mais également le déroulement du processus.

1.4.3. Intérêts pour l’aide à la décision et les démarches d’intégration

D’un point de vue pratique, la méthode présente de nombreux avantages. Elle permet de mettre en place facilement, sans les contraintes qu’impose la tenue d’une réunion classique en un même temps et en un même lieu des différents acteurs, une interaction indirecte entre acteurs qui ne se rencontrent ainsi jamais. Les dérives possibles de réunion physique en terme de délai mais surtout en terme de sujet traité sont ainsi évitées29. L’interaction est contrôlée dans la mesure où les

29 L’expérience que chacun peut avoir des réunions d’experts ou de parties prenantes amène au constat qu’il est très rare que l’ordre du jour des réunions soit respecté. Très souvent, certains sujets amènent à des digressions

différents questionnaires encadrent à toute étape de la démarche le sujet qu’il convient que les experts traitent ; c’est là tout l’avantage des entretiens dirigés.

En terme d’aide à la décision et de démarche d’intégration, nous voyons en la méthode DELPHI quatre intérêts majeurs.

Tout d’abord, la méthode DELPHI est avant tout une procédure formelle qui structure les interactions des acteurs, autrement dit, leur participation à la démarche. La procédure précise implicitement quand intervenir, et sur quels sujets. Les rôles de chacun sont explicités et la procédure DELPHI distingue même formellement les acteurs qui participent parce qu’ils sont détenteurs d’une connaissance (les experts) et les acteurs qui participent parce qu’ils sont détenteurs d’enjeux (les décideurs).

Par ailleurs, le second intérêt est que cette distinction présente l’avantage de ne pas faire la confusion entre la recherche d’un consensus sur les connaissances en jeu d’une part et la recherche d’un consensus par rapport aux systèmes de valeur propres à chacun. Avec la méthode DELPHI, c’est le premier type de consensus qui est recherché.

A propos de consensus, nous notons ici que DELPHI s’appuie sur l’hypothèse implicite qu’il est possible de faire converger les points de vue de tous vers un même point de vue.

DELPHI permet en outre – troisième intérêt – de contribuer à prendre en compte explicitement les points de vue de tous. Tous les experts ont une égale capacité de faire prévaloir leurs opinions.

Au passage, la méthode empêche que puissent se produire des phénomènes de leadership d’opinion qui dans le cadre de réunions physiques classiques peuvent conduire à inhiber certains acteurs.

Enfin, la méthode contribue à diffuser un langage commun entre les experts puisque ceux-ci sont tous interrogés avec le même questionnaire et donc les mêmes terminologies, les mêmes syntaxes, etc... Evidemment, en contrepartie, cela nécessiterait qu’une phase préalable d’accord sur les définitions des termes utilisés soit mise en place. Cela n’est pas explicitement prévu par les concepteurs de la méthode DELPHI.

Les deux derniers intérêts de la procédure DELPHI auraient également pu justifier une présentation dans le cadre de l’étude des démarches d’identification au chapitre 4.

Conclusion: l'interaction vertueuse de la structuration de la participation avec la structuration d’une démarche d'aide à la décision

La mise en perspective que nous avons faite dans cette section n'a pas caractère d'exhaustivité.

Néanmoins, elle tente de mettre en évidence des liens possibles entre une démarche d'intégration et l’utilisation d’outils d'aide à la décision. En particulier, nous avons tenté de mettre en évidence l'interaction possible entre l'activité de structuration de la participation et celle de structuration de l'instrumentation d'aide à la décision elle même.

Nous pensons que cette interaction a plusieurs vertus.

- Elle peut servir à légitimer une attribution de rôles à des acteurs impliqués dans une démarche (cf. 1.1, 1.4.) ou une façon d'organiser des interactions entre acteurs (cf. 1.2., 1.3.). Cette légitimité est de type rationnel légal (cf. chapitre 1) et trouve ses sources dans la 'scientificité' des outils d'aide à la décision mobilisés;

- Elle enrichit l'éclairage qu'apportent les outils sur la complexité des problématiques traitées.

Ces outils servent de fait à éclairer la complexité du contexte multi acteurs. En fait, elle donne à des outils qui ne sont pas spécifiquement conçus pour des contextes multi acteurs une pertinence d'un point de vue de leur insertion dans un contexte socio organisationnel.

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